Télétravail : 11 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/04603

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Télétravail : 11 mai 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/04603
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11 mai 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/04603

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 7

ARRET DU 11 MAI 2023

(n° , 18 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/04603 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCDON

Décision déférée à la Cour : Jugement du 02 Juin 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F 18/09798

APPELANT

Monsieur [P] [B]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Paul ESTIVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : E0037

INTIMEE

Société SAGE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Loïc TOURANCHET, avocat au barreau de PARIS, toque : K0168

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, présidente de chambre,

Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre,

Monsieur Laurent ROULAUD, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Charlotte BEHR.

ARRET :

– CONTRADICTOIRE,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC”DURE ET PR”TENTIONS DES PARTIES

La société Sage est une société britannique de services informatiques de dimension

internationale qui développe et vend divers logiciels de paye et de comptabilité

destinés à toutes tailles d’entreprises et collectivités.

M. [P] [B] a été embauché par la société Sage suivant contrat à durée indéterminée à compter du 20 septembre 2007,avec une reprise d’ancienneté au 20 novembre 2006, au poste de conseiller service information.

Le 1er janvier 2016, M. [B] a été affecté au poste de Conseiller Relation Client, classifié 275, position ETAM 2.1, en application de la convention collective nationale Syntec.

Son salaire brut mensuel moyen payé sur 13 mois s’élève à la somme de 2001,76 euros outre une indemnité de télétravail.

M. [B] devait être absent pour raison médicale du 21 mars au 31 octobre 2017.

Lors de la visite de reprise le 21 novembre 2017, le médecin du travail déclarait M. [B] apte à reprendre son poste avec « aménagement nécessaire de 4 jours de télétravail par semaine ».

Par avenant n°1 au contrat en date du 1er janvier 2018, les parties ont convenu que, pour des raisons d’ordre médical, M. [B] exercerait ses fonctions en situation de télétravail.

Le 24 avril 2018, la société Sage convoquait M. [B] à entretien préalable pour le 14 mai 2018. M. [B] se voyait notifier son licenciement pour faute par courrier recommandé en date du 28 mai 2018 au titre de ses retards au travail et d’une implication insuffisante dans ses fonctions. Il était dispensé d’exécuter son préavis et quittait l’effectif le 29 août 2018.

Contestant le bien-fondé de son licenciement, M. [B] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris par requête du 24 décembre 2018.

Par jugement rendu le 2 juin 2020, notifié le 23 juin 2020, le Conseil de Prud’hommes de Paris a débouté M. [B] de l’ensemble de ses demandes et laissé les dépens à sa charge.

M. [B] a interjeté appel par déclaration déposée par la voie électronique le 15 juillet 2020 et enregistrée le 28 juillet 2020 .

Aux termes de ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 2 décembre 2022, M. [B] demande à la Cour de :

-infirmer le jugement rendu en première instance en ce qu’il l’a débouté de l’ensemble de ses demandes ;

Et statuant à nouveau :

-fixer le salaire mensuel moyen de M. [B] à la somme de 2.124,95 euros bruts ;

-dire que le licenciement prononcé est nul;

-ordonner la réintégration de M. [B] au sein de la société Sage;

-condamner la société Sage au paiement de l’indemnité équivalant au montant des salaires depuis le 1er septembre 2018 jusqu’à sa réintégration ;

– en cas d’impossibilité de réintégration, condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 22.000,00 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ;

Subsidiairement,

-dire que le licenciement prononcé est sans cause réelle et sérieuse ;

– condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 22.000,00 euros nets à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Très subsidiairement,

-constater l’inopposabilité de la convention individuelle de forfait en heures à M. [B] ;

-constater l’exécution d’heures supplémentaires par M. [B] ;

-condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 2.400,00 euros bruts à titre de rappel d’heures supplémentaires à 125 % effectuées durant l’année 2018, outre 240,00 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

– condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 728,20 euros nets à titre de dommages-intérêts pour privation du droit à repos compensateur sur l’année 2018 ;

En tout état de cause,

-condamner la société Sage au paiement de 10.000,00 euros nets à titre de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité ;

-condamner la société Sage au paiement de la somme de 10.000,00 euros nets à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

-condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 746,81 euros bruts à titre de rappel de la gratification contractuelle de 13e mois pour l’année 2017, outre 74,68 euros bruts de congés payés afférents ;

-condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 1.231,85 euros bruts, bruts à titre de rappel de la gratification contractuelle de 13e mois pour l’année 2018, outre 123,18 euros de congés payés afférents ;

– condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 1.847,78 euros bruts, bruts à titre de rappel de 13e fraction du salaire pour l’année 2016, outre 184,77 euros de congés payés afférents ;

-condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 1.847,78 euros bruts, bruts à titre de rappel de 13e fraction du salaire pour l’année 2017, outre 184,77 euros de congés payés afférents ;

-condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 1.847,78 euros bruts, à titre de rappel de 13e fraction du salaire pour l’année 2018, outre 184,77 euros de congés payés afférents ;

-condamner la société Sage au paiement de la somme de 237,47 euros à titre de rappel de la prime de vacances pour l’année 2018;

-condamner la société Sage au paiement de la somme de 200,00 euros bruts au titre de la rémunération variable pour l’année 2017, outre 20,00 euros bruts de congés payés afférents;

-condamner la société Sage au paiement de la somme de 400,00 euros bruts au titre de la rémunération variable pour l’année 2018, outre 40,00 euros bruts de congés payés afférents;

-fixer la date de départ du calcul des intérêts à la date d’émission des convocations

des parties en Bureau de Conciliation et d’Orientation, soit le 1er janvier 2019 ;

-ordonner la capitalisation des intérêts ;

– condamner la société Sage à payer à M. [B] la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, outre le paiement des entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions déposées par la voie électronique le 30 décembre 2020, la société Sage demande à la Cour d’appel de Paris de :

A titre principal,

– confirmer le jugement rendu le 2 juin 2020 par le Conseil de prud’hommes de Paris et par conséquent :

– dire et juger que le licenciement de M . [B] est licite et repose sur une faute avérée ; – constater l’absence de harcèlement moral subi par M. [B];

– dire et juger que la Société Sage a rempli l’ensemble de ses obligations légales à l’égard de M. [B];

– débouter M. [B] de l’ensemble de ses demandes à titre de rappel de salaire ;

En conséquence,

– débouter M. [B] de l’ensemble de ses demandes.

A Titre subsidiaire,

-limiter le quantum des dommages et intérêts sollicités par Monsieur [B] à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse à 3 mois de salaire, soit 5 451 euros.

En tout état de cause,

– débouter M. [B] de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et, reconventionnellement,

– condamner M. [B] à verser 2 000 euros à la Société Sage en application de ces dispositions; – condamner M. [B] aux entiers dépens.

La cour se réfère expressément pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des partes à leurs conclusions conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’instruction a été déclarée close le 7 décembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement

Le salarié fait valoir que les prétendus griefs sont contestés, qu’il avait donné entière satisfaction au sein de la société pendant plus de 10 ans, que la rupture notifiée constitue la réponse à son état de santé, des restrictions médicales et de l’aménagement de son poste en télétravail.

L’employeur objecte que le licenciement repose sur des faits démontrés ayant généré des dysfonctionnements, rappelant qu’il a aménagé le poste du salarié en télétravail selon les préconisations du médecin du travail et a modifié son planning pour lui permettre d’honorer ses rendez- vous médicaux.

Aux termes de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse. Pour justifier le licenciement, les griefs formulés doivent être suffisamment pertinents, matériellement vérifiables et perturber la bonne marche de l’entreprise ou être préjudiciables aux intérêts de celle-ci .

Il résulte de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige que les motifs du licenciement y énoncés sont des retards et absences répétés injustifiés et un manque d’investissement du salarié dans ses missions depuis plusieurs mois ayant pour conséquence une prestation de travail inférieure aux attentes, étant observé que l’employeur s’est placé sur le terrain disciplinaire.

En considération de l’énoncé de la lettre de rupture, qui fixe les limites du litige, il apparaît que ce sont à la fois une mauvaise exécution des obligations contractuelles et des fautes qui sont reprochées au salarié.

Toutefois, tout licenciement disciplinaire prononcé sur l’ insuffisance professionnelle est sans cause réelle et sérieuse. De plus, si l’employeur s’est placé à tort sur le seul terrain disciplinaire dans la lettre de licenciement, le juge n’a pas la possibilité de requalifier la rupture du contrat de travail en licenciement non disciplinaire.

S’agissant des retards et absences injustifiés, l’employeur rappelle que conformément au règlement intérieur tout salarié doit observer l’horaire fixé, le salarié devant se trouver à son poste aux heures fixées pour le début et la fin de celui-ci. Il y est également mentionné que « tout retard doit être justifié. A défaut et selon les circonstances, la direction pourra appliquer l’une des sanctions prévues au règlement intérieur ».

L’employeur produit aux débats plusieurs courriels émanant du supérieur hiérarchique de M. [B] lui demandant des explications de son absence de connexion à partir de 9 heures. C’est ainsi qu’à plusieurs reprises, M. [L], manager Service relation client, demandait à M. [B] de justifier de son retard de connexion et de le prévenir à l’avance s’il avait des obligations personnelles afin d’adapter son planning.

A titre d’exemples, par courriel du 20 février 2018, Mme [T], département des ressources humaines, indiquait que M. [B] avait à nouveau informé son supérieur qu’il avait des soins sans respecter les délais de prévenance et précisait que celui-ci n’avait pour l’instant pas fait l’objet de recadrage. Par courriel en date du 19 février 2018, M. [L] rappelait à M. [B] ses horaires, soit de 9 h à 12 h et 13 h à 17 h, et qu’il serait en « adhérence » jusqu’à ce qu’il se connecte et devra compenser le retard. Par courriel du 9 mars 2018, M. [B] se voyait rappeler, suite à sa demande de rupture conventionnelle à laquelle l’employeur ne souhaitait pas donner suite, la nécessité de suivre les horaires de travail et évoquait sept retards déjà constatés entre janvier et mars 2018.

Il justifie également avoir rappelé à M. [B] l’importance du délai de prévenance ne serait-ce qu’aux fins d’organisation du travail de l’équipe.

Il ressort des échanges communiqués que M. [B] a bénéficié d’une modification de son planning à compter du mois de février 2018 et mars 2018 pour commencer à 10 h au lieu de 9 heures certains jours afin de tenir compte de ses contraintes liées à ses soins. Par courriel du 5 février 2018, M. [L] avait sollicité une modification du planning du salarié suite à la communication par celui-ci de ses rendez-vous médicaux. Par courriel du 14 mars 2018, M. [L] avisait qu’il avait fait aménager ses horaires pour éviter les retards du matin et afin que le salarié puisse se rendre trois fois par semaine chez son kinésithérapeute, aménagement dont le salarié était avisé puisqu’il était en copie du courriel envoyé au service des ressources humaines.

Des retards ou absences ont pu cependant être enregistrés pour les journées des 10 avril de 17 h à 18 h, 13 avril de 9 h à 14h 46, 16 avril de 14h07 à 18 h ; 17 avril de 10 h à 10 h 45, le 18 avril 2018 de 14 h à 18 h, le 2 mai de 10h à 10h18 et le 11 mai de 9h à 9h44.

M. [B] conteste le caractère volontaire de ses retards et se réfère au contexte dans lequel ces retards ou absences sont apparus dès lors qu’il devait recevoir des soins en raison de son handicap, ce dont son employeur était informé. Il soutient que sur les quatorze retards reprochés dans la lettre de licenciement, dix concernent des retards de quelques minutes justifiés par les soins reçus sur le créneau de 9 h-10 heures.

Selon les courriels échangés produits, M. [B] a prévenu son supérieur de son retard (courriel du 13 avril 2018), ou de difficulté de connexion survenue le 10 avril 2018 (sans justifier toutefois de contact avec le service informatique) et de son absence du 18 avril 2018.

Il sera relevé que M. [B] ne justifie pas des autres retards ou absences eu égard à l’horaire fixé pour sa connexion et pour quelle raison il ne respectait pas le délai de prévenance, étant observé que le télétravail ne le dispense pas du respect des horaires fixés par l’employeur qui lui ont été rappelés à compter de février 2018.

Ainsi, il est établi sur sept absences ou retards visés dans la lettre de licenciement que certains n’ont pas été justifiés.

M. [B] fait cependant valoir que la société ne produit aucun élément établissant le décompte des heures effectuées permettant de fonder les retards invoqués dans la lettre de licenciement dans le respect de la durée maximale de travail alors que les mentions figurant sur les bulletins de paie ne relèvent pas l’existence de ces retards ou absences reprochés sur l’année 2018, l’employeur n’en ayant tiré aucune conséquence sur le plan de la rémunération.

Toutefois, l’absence de retenue sur salaire au titre des retards et absences pour la période correspondante ne saurait enlever au grief formulé dans la lettre de licenciement sa matérialité.

Par ailleurs, ainsi que le souligne l’employeur, une convention individuelle de forfait annuel n’instaure pas au profit du salarié un droit à la libre fixation de ses horaires de travail indépendamment de toute contrainte liée à l’organisation du travail par l’employeur dans l’exercice de son pouvoir de direction.

Dès lors, au vu des précédents retards et en dépit des horaires rappelés, le grief lié à des absences et retards imprévus et non justifiés est établi.

Aux termes de la lettre de licenciement, il est également reproché à M. [B] un manque d’investissement et de résultats qui s’est manifesté par :

-s’agissant du traitement des demandes reçues, sur la période du 1er novembre 2017 au 30 avril 2018, l’accomplissement en moyenne que 17,31 par jour alors que l’objectif est de traiter 25 demandes par jour, soit une atteinte au cours des derniers mois inférieure à l’objectif suivant et en comparaison aux autres collaborateurs occupant le même poste l’atteinte la plus faible de tous ;

– une prestation inférieure concernant les autres objectifs, notamment la réalisation de 10 appels au cours du mois d’avril 2018 alors qu’il devait en effectuer un par jour ;

– les défaillances dans l’exécution de ses tâches, notamment l’envoi par anticipation des clés d’activation des produits lors du traitement des devis malgré les formations dispensées ;

– l’absence d’évolution de compétences malgré les formations sur les outils de numérotation et sur d’autres outils selon les besoins de l’activité.

L’employeur fait référence dans la lettre de licenciement à l’évaluation de la performance globale du salarié sur l’exercice fiscal 2017 (du 1er octobre 2016 au 30 septembre 2017) évoqué lors de l’entretien annuel du 29 novembre 2017.

Il produit au soutien des griefs évoqués :

-les échanges de courriels sur le suivi des objectifs qui font état en février 2018 au service des ressources humaines de la non atteinte des objectifs fixés et de la nécessité pour une autre collègue de prendre le relais pour le traitement des devis « GPAO » à partir du mois de février 2018.

-la fiche d’évaluation de l’activité du salarié établie sur la période du 18 septembre 2017 au 18 mars 2018 jugeant au 5 octobre 2017 les performances du salarié insuffisantes ;

– des courriels émanant du supérieur hiérarchique du salarié révélant que plusieurs difficultés ont émaillé le mois de février 2018 dans l’envoi de clefs conditionnant l’activation des produits et autres demandes émanant des clients. Selon courriel du 2 février 2018, M. [B] répondait à une interrogation sur le traitement d’une demande d’un client que « le partenaire envoie son courriel avec des numéros précis de série, je ne vais pas m’amuser à faire de l’interprétation. Comme je l’avais exprimé lors de notre entretien de plan de progrès hebdomadaire du 17 janvier 2918 si vous n’êtes pas satisfait il faut me remercier. Fin de la communication »;

– la référence à l’évaluation effectuée au mois de juin 2018 faisant état des « retards répétitifs du salarié qui devait faire des efforts pour collaborer avec son manager et s’adapter à l’organisation et pour atteindre ses objectifs ».

– la justification de l’absence de réalisation d’appel dit NPS destiné à mesurer la satisfaction d’une marque, d’un produit ou d’un service du 9 avril au 30 avril 2018.

Le salarié oppose avoir bien conscience que depuis son retour d’arrêt maladie, il a accompli quotidiennement moins de tâches qu’avant, son état de santé l’empêchant temporairement de réaliser la même quantité de travail qu’auparavant. Il en veut pour preuve que son manager déclarait dans le cadre du suivi du plan de progrès produit aux débats que le salarié donnait « le maximum de ses capacités, de lui-même » et qu’il n’attendait pas « d’évolution de volumes traités ».

M. [B] a été par ailleurs effectivement en arrêt maladie à compter du 31 mars 2017, a repris son activité pendant 5 jours après la visite de reprise avant d’être placé en congé jusqu’au 1er janvier 2018. En conséquence, son activité n’a pas pu être évaluée sur la période du 31 mars 2017 au 21 novembre 2017 et durant le mois de décembre 2017 alors qu’il n’a eu aucun entretien d’évaluation contrairement aux affirmations de l’employeur.

M. [B] fait encore valoir que selon le compte rendu du plan progrès évaluant sa performance communiqué il obtient la moyenne démontrant ainsi que sa performance ne caractérise aucune insuffisance mais qu’au contraire son licenciement était acté dès son retour d’arrêt maladie alors qu’il a du s’adapter après 8 mois d’arrêt aux nouvelles demandes sans que l’employeur n’attende l’issue des formations nécessaires à la prise en main des outils et lui a assigné en priorité de traiter les demandes présentes dans la file d’attente (objectif atteint à 70%) avant de traiter les devis clients qui correspond à une nouvelle tâche.

Il soutient encore que la société Sage ne peut valablement comparer ses performances quantitatives avec celles des autres collègues qui n’étaient pas placés dans une situation identique à la sienne en raison de son état de santé, ce qui le plaçait le mettait nécessairement en dernière position de ce classement des performances.

Il sera en effet relevé qu’après avoir été placé en arrêt de travail du 31 mars 2017 au 21 novembre 2017, date de la visite de reprise et en congés en décembre 2017 le 30 janvier 2017, une évaluation de son activité a été réalisée sans l’associer et lui était défavorable. La société Sage a, par ailleurs, choisi de mettre en place un plan de progrès et de suivi ainsi que des formations afin de lui permettre de progresser dans l’exercice de ses fonctions et d’intégrer de nouvelles tâches, ce qui vient renforcer l’idée que les reproches formulés étaient considérés comme résultant d’une insuffisance professionnelle et non pas d’un comportement fautif, sauf à démontrer son abstention volontaire ou sa mauvaise volonté délibérée.

Or, la société échoue à faire cette démonstration. En effet, M. [B] a été absent jusqu’au 1er janvier 2018 et a convoqué à un entretien préalable par courrier du 24 avril 2018, ce qui confirme que la société s’est basée sur une période de quatre mois et non six mois pour apprécier son activité dans un contexte où le système d’évaluation des performances mis en place avaient donné lieu à des actions lancées par les syndicats qui dénonçaient une politique de performance de 2016 à 2018 faussant les évaluations et détériorant les conditions de travail selon le communiqué établi par le syndicat CFTC produit par le salarié. Selon le compte rendu de l’entretien préalable, il lui était reproché non pas un comportement fautif mais « un fléchissement dans sa performance professionnelle depuis ces derniers mois ; cette perte de motivation ayant motivé le positionnement professionnel en dessous des attentes ».

Il sera également noté à la lecture du suivi du plan de progrès du salarié que son supérieur notait le 28 mars que M. [B] atteignait petit à petit son objectif en ce qui concerne la digitalisation, qu’il avait suivi des formations en janvier pour apprendre à activer les clés etc. M. [B] a pu être en progrès au mois de janvier 2018 avant que son activité ne soit notée insuffisante en mai 2018 selon l’objectif et le temps pris pour se former, son supérieur notant l’absence d’évolution et la nécessité de planifier des formations pour monter en compétence en mai 2018 alors que le salarié était déjà convoqué à un entretien préalable. Pourtant, le salarié réalisait selon le suivi dans les temps au mois de mars le traitement des devis et des fichiers clés et atteignait sur l’ensemble des sept objectifs impartis la moyenne.

La comparaison avec la performance de ses collègues ne saurait être retenue alors qu’il n’est pas communiqué la liste des tâches qui leur étaient attribuées, ce d’autant .

Enfin, il n’est produit que trois réclamations de clients confrontés à une difficulté de configuration de clé sans que la société ne démontre que le comportement reproché au salarié soit à la seule origine de cette difficulté et a porté une atteinte à son image ou à son activité. La nécessité à une seule reprise pour une collègue de suppléer le salarié dans le traitement des devis au mois de février 2018 ne permet pas non plus de corroborer sans autre élément que le comportement du salarié était préjudiciable à l’activité du service et aux conditions de travail de ses collègues.

Dès lors, le grief d’insuffisance professionnelle ne peut être pris en considération pour justifier un comportement fautif eu égard aux éléments de contexte ci-dessus rappelés.

Restent les quelques retards ou absences injustifiées, clairement situés dans le temps et dont il est légitime de relever qu’en considération du contexte, de leur survenance pour une ampleur réduite au regard de l’ancienneté du salarié, le licenciement s’avère une sanction disproportionnée. En effet, selon le compte rendu de l’entretien préalable produit par le salarié, il lui était reproché seulement deux retards injustifiés, sa manager soulignant que la direction était prête à lui laisser sa chance.

Sur la discrimination

M. [B] soutient que son licenciement repose sur une discrimination à raison de son état de santé aux motifs que la date d’apparition soudaine des griefs fondant le licenciement est simultanée à celle de son retour d’arrêt de travail à compter duquel il a constaté une modification importante du comportement de son employeur à son endroit, traduisant une hostilité affichée de sa hiérarchie. La société Sage n’a pas fait directement référence à son état de santé pour justifier son licenciement mais à des faits qui trouvent leur origine dans l’aménagement pour raison médicale de son rythme et lieu de travail.

Il reproche plus précisément à son employeur d’avoir manqué de réactivité pour préparer son retour dans l’entreprise en organisant dans le délai légal de la visite de reprise ; de ne pas avoir procéder rapidement à l’aménagement de son poste de travail, conforme à son état de santé , l’obligeant à se rendre au sein de l’entreprise malgré son handicap ; d’avoir mis en place un plan de progrès concomitamment à l’aménagement de son poste en télétravail, de lui avoir imputé des griefs totalement discriminatoires reposant principalement sur ses horaires de travail alors qu’il n’est pas soumis au respect des horaires de planning et que ses retards sont dus à des soins. Les mêmes griefs sont repris au titre du harcèlement moral sauf à jouter que la société a refusé sa demande de rupture conventionnelle.

La société réplique qu’elle n’a commis aucune discrimination et rappelle qu’il n’est nullement reproché à M. [B] son état de santé mais ses retards et absences injustifiés ainsi que son manque d’investissement caractérisé. La société Sage fait valoir qu’elle a organisé la visite médicale de reprise dans un délai raisonnable, a mis en place l’aménagement de son poste de travail et de son planning pour prendre en compte ses rendez-vous médicaux et mis en place un plan de progrès individuel pour lui permettre d’être accompagné par son manager.

Il sera rappelé que toute forme de discrimination en raison de l’état de santé est prohibée par l’article L. 1132-1 du code du travail. En application de l’article L.1134-1 du code du travail, en cas de litige relatif à l’application de l’article L.1132-1, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte et il incombe à la partie défenderesse, au vu de ces éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge formant sa conviction après avoir ordonné, en tant que de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Pour justifier les éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte en raison de son état de santé, M. [B] produit au débat :

-l’attestation portant visite de reprise établi le 21 novembre 2017 par le médecin du travail déclarant son état de santé compatible avec la reprise du poste de travail avec aménagement de 4 jours en télétravail ;

-la planification d’un rendez-vous pour M. [B] par son supérieur pour la mise en place d’un plan de progrès par courriel du 18 décembre 2017;

-la lettre en date du 4 décembre 2017 par lequel l’employeur demande au médecin du travail de préciser les motifs de sa préconisation et toute mesure d’aménagement alternative qui pourrait être envisagée ;

-l’avenant au contrat de travail définissant les conditions du télétravail en date du 1er janvier 2018 ;

– la lettre de licenciement lui reprochant des retards et l’absence de traitement des demandes sur la période du 1er novembre 2017 au 30 avril 2018 alors que son contrat était suspendu jusqu’à la date de visite de reprise et en date du 21 novembre 2017 et qu’il a dans l’attente de l’aménagement de son poste de travail du prendre des congés du 8 décembre au 29 décembre 2017 ainsi qu’en atteste le bulletin de salaire correspondant;

-un courriel en date du 29 janvier 2018 avisant son supérieur de ce qu’il avait une séance de soins le 30 janvier 2018 à 8 h 45 ;

-une sommation de communiquer notamment des plannings et extractions du logiciel pointant ses horaires pour la période de janvier 2015 à août 2018 délivrée à la société Sage dans le cadre du litige devant le conseil de prud’hommes.

Il présente ainsi des éléments laissant supposer que la décision de la société de le licencier procède d’une discrimination fondée sur son état de santé et son handicap. En effet, il existe au regard de la chronologie rappelée en exorde de l’arrêt une contemporanéité certaine entre la demande d’aménagement du poste par le médecin du travail le 21 novembre 2017, la mise en place d’un plan de progrès, les reproches faits au titre des retards, le contrôle de ses heures de connexion réalisé à compter du 1Er janvier 2018, date d’entrée en vigueur de l’avenant à son contrat de travail, l’insuffisance professionnelle soudaine d’un salarié ayant dix ans d’ancienneté et son licenciement. Enfin, la société Sage apparaît avoir fait preuve d’un certain retard suite aux préconisations du médecin du travail.

Au vu de ces éléments, il incombe à la société Sage de prouver que sa décision de licencier le salarié est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Pour justifier sa décision, la société Sage fait valoir que M. [B] a été licencié en raison de nombreux retards et pour son manque d’investissement et la non atteinte de ses objectifs et non en raison de son état de santé. Elle rappelle à cet égard que M. [B] doit comme tout salarié justifier de ses absences et retards éventuels.

Il sera relevé à la lecture de la lettre de licenciement que les retards retenus comme un des motifs du licenciement pour faute porte sur la période du mois d’avril au mois de mai 2018. La lettre de licenciement fait état des retards survenus antérieurement pour indiquer la répétition dans le temps du comportement reproché au salarié. Par ailleurs, il est fait état d’une insuffisance de résultats et de la non atteinte des objectifs depuis l’exercice 2017.

L’employeur produit les courriels écrits par M.[L], supérieur hiérarchique, qui a procédé dès le mois de février 2018 à l’aménagement du planning du salarié pour tenir compte de ses rendez-vous médicaux en lui permettant de débuter sa journée à 10 h au lieu de 9 h. Il s’évince également des éléments communiqués que la société a organisé la visite médicale le 21 novembre 2017 soit 13 jours de travail après la reprise de M. [B], soit avec un retard de 5 jours, et mis en place le télétravail dès le 15 décembre 2017 soit 3 semaines après la visite de reprise, l’avenant au contrat de travail n’ayant été signé que le 2 janvier 2018 par le salarié alors en congés ainsi qu’en atteste le courriel d’invitation à un entretien envoyé par le service des ressources humaines. Enfin, deux salariés dont M. [B] étaient conviés au mois de décembre 2017 à un rendez-vous pour la mise en place d’un plan de progrès (courriel du 18 décembre 2017 produit par le salarié), étant observé que ce plan est en lien avec la baisse de sa performance et la nécessité de le soutenir dans la reprise de son activité.

L’employeur présente ainsi des éléments objectifs étrangers à toute discrimation.

Le licenciement n’est donc pas nul mais seulement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié pouvant, par suite, prétendre à des dommages et intérêts pour licenciement abusif.

La barémisation des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, instituée par l’article 2 de l’ordonnance nº 2017-1387 du 22 septembre 2017, est applicable en la présente espèce, le licenciement de M. [B] étant postérieur au 23 septembre 2017 et fixe pour un salarié dont l’ancienneté est comprise entre 10 et 11 ans une indemnité comprise entre 3 mois et 10 mois de salaire.

Compte tenu de son ancienneté (10 années) dans une entreprise employant plus de onze salariés, des circonstances de la rupture, du montant mensuel brut de sa rémunération, de son âge au moment du licenciement, de l’absence de justificatif sur sa situation postérieure au licenciement, il y a lieu de fixer à 12. 000 euros les dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

Sur le harcèlement moral

M. [B] sollicite également des dommages et intérêts au titre d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail reprenant au soutien de sa demande les manquements cités au titre de la discrimination sans procéder à aucune démonstration.

Le régime probatoire est le même que celui évoqué pour la discrimination et il incombe au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

*Sur l’absence d’organisation d’une visite médicale de reprise dans le délai imparti par les dispositions du Code du travail

Il est établi par les éléments évoqués ci-dessus que le salarié a été placé en arrêt de travail jusqu’au 31 octobre 2017 et n’a bénéficié de la visite de reprise que le 21 novembre 2017, soit au-delà du délai légal de 8 jours.

Ce fait est établi.

*Sur l’absence de prise en considération par la société Sage des aménagements de poste de M. [B] imposées par la médecine du travail

Le salarié se réfère au fait de ce qu’il n’a pas bénéficié dans la continuité de la visite de la médecine du travail de l’aménagement de son poste en télé travail.

Il ressort des pièces versées et déjà évoquées que le médecin du travail a déclaré M. [B] apte sous réserve de la mise en place d’un télétravail à raison de quatre jours par semaine.

Toutefois, si effectivement l’avenant au contrat de travail instaurant le télétravail n’a été signé par le salarié que le 1Er janvier 2018, l’employeur justifie que le service des ressources humaines avait invité M. [B] à entretien pour le signer dès le 15 décembre 2017 et que le retard est du à un défaut de diligence du salarié.

En tout état de cause, il ressort des éléments communiqués que le télétravail a été mis en place à compter du 1er janvier 2018.

Ce fait est établi.

*Sur la prise de congés contrainte de M. [B] en décembre 2017 pour préserver son état de santé.

Il ressort des explications des parties et des pièces que le salarié ne pouvant reprendre le travail à défaut de mise en place dès la visite de reprise en télétravail a du prendre des congés.

Ce fait est établi.

*Sur la mise en place tardive du télétravail figurant dans l’avis d’aptitude à compter du 1er janvier 2018

Il s’évince des éléments retenus ci-avant que la société a mis en place le télétravail à compter du 1er janvier 2018. Pourtant elle proposait un entretien dès le 15 décembre 2017 à M. [B] aux fins de signature soit dans un délai de trois semaines après la visite de reprise .

Ce fait est établi.

*Sur la mise en place injustifiée d’un plan de progrès de la société Sage pour M. [B]

Il s’évince des pièces déjà citées que M. [B] a été convoqué à un entretien en décembre 2017 aux fins de la mise en place d’un plan de progrès.

Il n’est pas démontré par le salarié que la mise en place de ce plan de progrès était injustifiée alors que ce plan est destiné à accompagner le salarié rencontrant des difficultés dans l’exécution de ses missions à son retour d’un arrêt maladie de longue durée.

Ce fait n’est pas établi.

*Sur l’exaspération de M. [B] ayant conduit à une demande de rupture conventionnelle

Il n’est pas justifié par le salarié qu’il s’agirait d’un manquement de l’employeur.

Ce fait ne peut être retenu.

*Sur le refus de la société Sage de rupture conventionnelle

Par courriel du 19 mars 2018, M. [L] exposait que la société ne souhaitait pas donner une suite à sa demande de rupture conventionnelle.

Son refus est en conséquence établi.

*Sur la répétition de l’imputation de retards sur la période de janvier à mars 2018 alors que M. [B] n’est pas soumis au respect des horaires de planning et d’autre part que ces retards sont la conséquence des soins qu’il reçoit.

Il est établi par les pièces déjà citées que M. [B] n’a pas justifié de plusieurs retards ou absences alors que l’employeur avait tenu compte d’un certain nombre de contraintes et aménagé son planning en conséquence. Par ailleurs, il n’est pas démontré par le salarié que l’existence d’une convention en forfait heures lui permettait de fixer librement ses horaires alors que son employeur lui avait communiqué ses plannings.

Ce fait n’est pas établi.

En synthèse, il est établi que l’employeur a organisé au-delà du délai légal de 8 jours la visite de reprise ; a mis en place le télétravail par avenant signé le 1er janvier 2018, soit plus d’un mois après les préconisations du médecin du travail, a refusé la demande de rupture conventionnelle et que le salarié a du prendre des congés dans l’attente de la mise en place du télétravail.

Le salarié présente ainsi des faits qui pris dans leur ensemble avec les avis du médecin du travail permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il appartient en conséquence à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

L’employeur démontre en réplique avoir organisé la visite de reprise avec un retard lié selon lui aux contraintes administratives. Il sera retenu que la visite médicale a été organisée et que le salarié a été contraint de rependre son poste l’équivalent de 5 jours de travail.

Il justifie également qu’après avoir interrogé le médecin de du travail comme il en avait le droit, il a proposé le 15 décembre 2017 au salarié, soit dans un délai de trois semaines rendu nécessaire par l’adaptation des plannings et les modalités d’organisation, un rendez-vous en vue de signer l’avenant.

La société fait encore valoir que dans l’attente de la mise en place du télétravail, le salarié ne pouvait reprendre son poste et qu’il été en congés, ne subissant par ailleurs aucune perte de rémunération ainsi qu’en atteste le bulletin de salaire correspondant.

Enfin, le refus de l’employeur de satisfaire à la demande formée par le salarié de signer une rupture conventionnelle n’est que l’exercice d’un droit qui ne traduit pas en l’espèce des faits de harcèlement moral. A ce titre , les raisons du refus de l’employeur ont été exposés à M. [B] par courriel en date du 9 mars 2018 et sont liées à l’organisation de la société.

Il découle de ces observations que la société justifie les éléments établis par M. [B] par une raison objective étrangère à tout harcèlement.

M. [B] sera en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts à ce titre.

Sur le manquement à l’obligation de sécurité

M. [B] sollicite la condamnation de son employeur à lui verser la somme de 10. 000 euros nets aux motifs que « en première instance le juge a rejeté sa demande au seul motif qu’il ne justifie pas l’existence de son préjudice, que le manquement à l’obligation par la société Sage à) son obligation de sécurité crée un préjudice distinct de celui né des conséquences de ce manquement sur sa santé.

Aux termes de l’article L. 4121-1 du code du travail dans sa version applicable au litige, l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels, y compris ceux mentionnés à l’article L. 4161-1 ;

2° Des actions d’information et de formation ;

3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

Aux termes de l’article L. 4121-2 du code du travail dans sa version applicable au litige, ‘l’employeur met en oeuvre les mesures prévues à l’article L. 4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l’ état d’évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n’est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux ;

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l’influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu’ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs.

L’employeur tenu d’une obligation de sécurité envers ses salariés en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l’entreprise doit en assurer l’effectivité.

En l’espèce, M. [B] reproche à son employeur d’avoir manqué à son obligation de sécurité en raison des faits de harcèlement moral.

Toutefois, sans autre démonstration dans ses écritures au titre du manquement reproché alors que le harcèlement moral n’a pas été retenu et qu’aucun autre manquement n’est spécifiquement visé et en l’absence de démonstration de son préjudice, M. [B] sera débouté de la demande présentée à ce titre.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes financières présentées par M. [B]

*Sur le rappel de salaires au titre du treizième mois

M. [B] sollicite un rappel de salaire au titre du 13 ème mois pour les années 2017 et 2018, un rappel de salaire au titre de la prime de vacances et un rappel de salaire au titre de la rémunération variable.

Au soutien de ses prétentions tendant à la condamnation de la société Sage au titre de rappel de 13 ème fraction du salaire et de rappel de gratification contractuelle de 13 ème mois pour les années 2016, 2017 et 2018, outre les congés payés afférents, M. [B] fait valoir en premier lieu que sauf à établir l’existence d’une discrimination en raison de son état de santé, son absence est sans incidence sur la qualité de ses droits à rémunération au titre du treizième mois. Par ailleurs, il soutient qu’il convient de distinguer la prime de 13 ème mois prévue par le contrat de travail initial et la 13 ème modalité de paiement de rémunération prévue par l’avenant à son contrat de travail. Il bénéficie selon lui d’un treizième mois contractuel s’analysant en une modalité de règlement de sa rémunération devant faire l’objet d’un règlement distinct de celui de la prime de treizième mois prévue par son contrat de travail initial.

La société Sage conclut au rejet de la demande en opposant les dispositions contractuelles prévoyant expressément un calcul de la prime de 13 ème mois au prorata du temps de présence dans l’entreprise le mois de versement. Selon ses explications, M. [B] percevait au mois de juin 2017 une rémunération de 1847, 78 euros bruts et a été absent pour maladie 20 jours. Cependant, le maintien de son salaire net étant prévu à 80% conformément aux dispositions de la convention collective, il a perçu une prime de 13 ème mois de 793,01 euros. Au mois de décembre 2017, M. [B] a été absent 15 jours sur 25 jours ouvrés sur le mois, soit 2/3 de mois et a perçu un tiers de 923,89 euros, soit 307, 96 euros. Au titre de l’année 2018, M. [B] a perçu selon le bulletin de paie du mois de juin 2018 50 % du treizième mois conformément aux dispositions contractuelles évoquées. Ayant été licencié en août 2018, il n’a pas perçu le reliquat au titre du 13ème mois.

Enfin, elle fait valoir que l’avenant a intégré la prime de 13ème mois directement à la rémunération annuelle du salarié alors qu’elle était jusque-là prévue de manière distincte.

L’article 3 du contrat de travail en date du 20 septembre 2017 dispose que le salaire mensuel de M. [B] sera de 1538, 46 euros auquel viendra se rajouter en application des règles actuellement en vigueur au sein de la société Sage un treizième mois versé à raison de 50% au mois de juin et de 50% au mois de décembre, au prorata de son temps de présence dans l’entreprise et de son salaire le mois de versement.

L’article 2 de l’avenant au contrat de travail signé le 14 juin 2016 dispose qu’à compter du 1er janvier 2016 M. [B] percevra une rémunération annuelle brute de 24 021, 14 euros versée sur 13 mois, ce qui correspond ainsi que l’employeur le souligne à des mensualités de 1847, 78 euros. .

Il convient au regard des positions contraires adoptées par les parties et les termes du contrat et de l’avenant de qualifier les termes de 13ème mois pour déterminer s’il s’agit d’une modalité de rémunération ou d’une prime.

En l’espèce, l’avenant au contrat de travail postérieur au contrat de travail prévoit une rémunération de base annuelle de 24 021, 14 euros, soit une base mensuelle brute de 1847, 78 euros et sur 13 mois. Il renvoie explicitement à une modalité de versement de la rémunération. Il n’existe aucune condition d’attribution liée à cette modalité de versement puisqu’il ne s’agit pas d’une prime s’ajoutant au salaire de base mais d’une distribution sur treize mois du salaire annuel.

Le contrat de travail initial prévoit quant à lui une indemnité ajoutant à la rémunération et correspondant à un mois de salaire , payable en deux mensualités, conditionnée au prorata du temps de présence dans l’entreprise et du salaire le mois de versement. Les conditions contractuelles de l’embauche prévoyaient en conséquence le bénéfice du 13ème mois de façon séparée de la rémunération mensuelle.

Il en résulte que le 13 ème mois tel que défini par l’avenant au contrat de travail ne constitue pas une gratification mais une simple modalité de règlement du salaire, distincte, par son objet, de la prime de 13 ème mois instituée par le contrat de travail prévue de façon séparée de la rémunération. Le versement du salaire en treize fois constituant une modalité de versement du salaire, se cumule en conséquence avec la gratification contractuelle prévue.

Or, il s’évince de l’examen des bulletins de salaire que M. [B] a perçu chaque mois un salaire mensuel de 1847, 78 euros correspondant au montant du salaire annuel divisé par 13.

Par ailleurs, il sera rappelé que la « gratification » contractuelle » est versée en fonction de conditions prédéterminées. L’accord collectif ou la décision unilatérale de l’employeur qui institue une prime de 13ème mois peut subordonner le bénéfice de la gratification à une condition de présence du salarié à une date donnée ou sur une période donnée. Lorsque l’absence du salarié est considérée comme du temps de travail effectif, notamment en cas de congés payés, elle n’a aucun impact. Tel n’est pas le cas de l’absence pour maladie.

En l’espèce, il ressort des dispositions contractuelles que la gratification dite 13 ème mois est acquise au prorata du temps de présence du salarié et réglée sur la base du salaire du mois de son versement, en l’espèce juin et décembre.

Or, il s’évince de l’examen du bulletin de salaire du mois de décembre 2017 que l’employeur a retenu que les congés payés devaient être assimilés à une absence pour réduire d’autant la gratification du 13 ème mois. M. [B] a en conséquence perçu au mois de juin 2017 compte tenu de ses absences maladie et après retenue des absences au titre des jours de congés payés au mois de décembre 2017 la somme de 307 , 96 euros.

Pour l’année 2018, selon le bulletin du mois de juin 2018, M. [B] a perçu 921, 32 euros bruts au titre de la prime ’13 ème mois’.

Au vu de ces éléments, le rappel de salaire du à ce titre par M. [B] sera arrêté aux sommes suivantes :

-615, 93 euros bruts pour l’année 2017, outre 61, 59 euros bruts de congés payés ;

-310, 53 euros bruts pour l’année 2018, outre 31, 05 euros bruts de congés payés afférents.

Sur la rémunération variable

S’agissant de la rémunération variable, l’article 2 du contrat de travail dispose que « M. [B] pourra percevoir une rémunération variable d’un montant annuel brut de 400 euros à objectifs atteints.

La fixation de ces objectifs aura lieu en début de chaque exercice en fonction des orientations de la société et du service et sera transmise par le supérieur hiérarchique.

La rémunération variable liée à la réalisation des objectifs couvre les périodes de travail et de congés payés. A ce titre, les parties conviennent expressément que la rémunération variable liée à la réalisation des objectifs prend en compte le calcul et le versement de l’indemnité compensatrice de congés payés ».

Il s’évince de l’examen de l’article précité, à défaut d’autres éléments soutenant l’interprétation faite par l’employeur, que la rémunération contractuelle variable d’un montant maximal de 400 euros dépend de l’atteinte d’objectifs fixés unilatéralement par l’employeur.

Toutefois, il sera relevé qu’aucun document n’est versé permettant de connaître les objectifs annuels. Seuls sont produits des courriels émanant du supérieur hiérarchique du salarié évoquant ou rappelant par mois les objectifs à atteindre et le calcul retenu pour les primes en fonction de l’atteinte ou pas des objectifs dits quantitatifs et qualitatifs.

Selon les explications de l’employeur, 50% de cette somme était versée à la condition que M. [B] atteigne 100% de ses objectifs quantitatifs et les 50% étaient versés à la condition qu’il atteigne 100% de ses objectifs qualitatifs.

La rémunération variable de M. [B] se décomposait en conséquence selon deux critères:

-un critère qualitatif :50% de la rémunération variable si 100% des appels ou des demandes respectent la Sage attitude (soit une évaluation des écoutes des conversations téléphoniques du salarié) ;

-un critère quantitatif : 50% de la rémunération variable si le nombre de demandes fixé par jour

est atteint sur le mois.

Ainsi que le souligne le salarié, le premier critère repose sur la seule appréciation de l’employeur qui décide en conséquence seul du montant de la rémunération variable.

Toutefois, lorsqu’une prime d’objectifs constitue la partie variable de la rémunération versée au salarié en contrepartie de son activité, elle s’acquiert au prorata du temps de présence du salarié dans l’entreprise au cours de l’exercice, les dispositions ci-avant rappelées de l’avenant applicable mentionnant que la rémunération variable liée à la réalisation des objectifs couvre les périodes de travail et congés payés.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, la société Sage sera condamnée à verser à M. [B] 66, 68 euros au titre de la rémunération variable pour l’année 2017 compte tenu de la période de travail et de primes d’ores et déjà versées et la somme de 266, 66 euros au titre de la rémunération variable au titre de l’année 2018, outre les congés payés afférents.

* Sur la prime de vacances

Enfin, M. [B] sollicite un rappel de prime de vacances au visa des dispositions de l’article 31 de la convention collective Syntec selon lesquelles « l’ensemble des salariés bénéficie d’une prime de vacances d’un montant au moins égal à 10% de la masse globale des indemnités de congés payés prévus par la convention collective de l’ensemble des salariés. Toutes primes ou gratifications versées en cours d’année à divers titres et quelle qu’en soit la nature peuvent être considérées comme primes de vacances à condition qu’elles soient au moins égales aux 10 % prévus à l’alinéa précédent et qu’une partie soit versée pendant la période située entre le 1er mai et le 31 octobre. »

Selon lui, eu égard au mode de calcul prévu par la convention collective Syntec, il appartient à la société Sage de rapporter la preuve du montant global des indemnités de congés payés versé à l’ensemble des salariés en 2017 et 2018 pour déterminer le montant de la prime de vacances qu’il aurait du percevoir.

Il ressort cependant de l’examen des bulletins de salaire produits aux débats que M. [B] a perçu au mois de juillet 2017 la somme de 237, 47 euros bruts à ce titre et deux versements au mois de juillet et août 2018 pour un montant total de 203, 76 euros.

Concernant le calcul des sommes revenant à M. [B], il convient eu égard à la période de référence de se référer aux rémunérations brutes perçues par M. [B] pour le calcul de 10%.

Au vu du montant de la rémunération brute perçue par M. [B] sur la période de référence selon les bulletins versés, il y a lieu de dire qu’il a été rempli de ses droits. Il sera en conséquence débouté de cette demande.

Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts

Les créances porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation, le jugement étant infirmé de ce chef.

Les intérêts échus des capitaux porteront eux-mêmes intérêts au taux légal dès lors qu’ils seront dus pour une année entière à compter de la demande qui en a été faite.

Sur l’application de l’article L.1235-4 du code du travail

Il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur des indemnités de chômage versées à M. [B] du jour du licenciement jusqu’au jour du présent arrêt dans la limite de six mois.

Sur les dépens et frais irrépétibles

L’employeur qui succombe, doit supporter la charge des dépens de première instance et d’appel et ne saurait bénéficier d’une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il est inéquitable de laisser à la charge du salarié les frais par lui exposés en cause d’appel non compris dans les dépens, qu’il conviendra de fixer à la somme de 2 000 euros, la décision déférée étant infirmée de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en ce qu’il a débouté M. [P] [B] de sa demande de nullité de licenciement, de rappels de 13 ème fraction de salaire pour les années 2016, 2017 et 2018 et des congés payés afférents ; de rappels d’heures supplémentaires, de dommages et intérêts pour privation du droit au repos compensateur sur l’année 2018, pour manquement à l’obligation de sécurité et pour harcèlement moral, de rappel au titre de la prime de vacances et en ce qu’il a débouté la société Sage de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

L’INFIRMANT pour le surplus,

STATUANT à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT le licenciement de M. [P] [B] sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la Société Sage à payer à M. [P] [B] les sommes suivantes :

12. 000 euros à tire de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

615, 93 euros bruts au titre de rappel de gratification de 13ème mois pour l’année 2017;

61, 59 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

310, 53 euros bruts à titre de rappel de gratification de 13ème mois pour l’année 2018 ;

31,05 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

66, 68 euros bruts à titre de rappel de rémunération variable pour l’année 2017 ;

6, 66 euros bruts au titre des congés payés afférents ;

266, 66 euros bruts à titre de rappel de rémunération variable pour l’année 2018 ;

26, 66 euros bruts à titre de congés payés afférents ;

2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT que les intérêts au taux légal courront à compter de la date de la réception par l’employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation;

DIT que les intérêts échus des capitaux porteront eux-mêmes intérêts au taux légal dès lors qu’ils seront dus pour une année entière;

ORDONNE à la Société Sage de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage du jour du licenciement au présent arrêt dans la limite de six mois;

CONDAMNE la Société Sage aux dépens de première instance et d’appel;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

La greffière, La présidente.

 


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