Tatouage et piercing : le régime social des auteurs applicable ?
Tatouage et piercing : le régime social des auteurs applicable ?
Ce point juridique est utile ?

Les tatoueurs pourraient relever du régime social des auteurs, plus favorable que celui des artisans.  

Le recours d’un tatoueur

Le recours d’un tatoueur devant le tribunal a eu pour objet de contester la décision de la commission de recours amiable de la caisse du RSI refusant sa demande de radiation du régime social des indépendants et tendent à ce que soit ordonné au régime social des indépendants de reconnaître son statut d’artiste auteur.

Le régime social des indépendants

Le régime social des indépendants pourrait être condamné à rembourser aux artistes tatoueurs l’intégralité des sommes versées au titre de leur affiliation erronée et cotisations recalculées sur la base des assiettes de cotisations.  

L’artiste tatoueur forclos

Toutefois, le tatoueur artiste ayant saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale, soit plus de deux mois après la notification régulière de la décision de la commission de recours amiable de la caisse du RSI rejetant sa demande de radiation, son recours était irrecevable comme étant forclos.

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE LYON
 
CHAMBRE SOCIALE D
PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU 06 SEPTEMBRE 2022
 
RG n° 20/02704
 
AFFAIRE : CONTENTIEUX PROTECTION SOCIALE
 
COLLÉGIALE
 
RG : N° RG 20/02704 – N° Portalis DBVX-V-B7E-M6ZZ
 
[K]
 
C/
 
URSSAF RHONE ALPES
 
CPAM DU RHONE
 
APPEL D’UNE DÉCISION DU :
 
Pole social du TJ de LYON
 
du 30 Mars 2020
 
RG : 16/01338
 
APPELANT :
 
[R] [K]
 
[Adresse 1]
 
[Localité 3]
 
comparant en personne
 
INTIMÉES :
 
URSSAF RHONE ALPES
 
[Adresse 6]
 
[Localité 2]
 
représenté par Me Thomas MERIEN, avocat au barreau de LYON substitué par Me Lisa LAVARINI, avocat au barreau de LYON
 
CPAM DU RHONE
 
[Localité 4]
 
représentée par madame [Y] [Z], audiencière, munie d’un pouvoir
 
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 12 Avril 2022
 
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
 
Nathalie PALLE, Présidente
 
Bénédicte LECHARNY, Conseiller
 
Thierry GAUTHIER, Conseiller
 
Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.
 
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
 
Prononcé publiquement le 06 Septembre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
 
Signé par Nathalie PALLE, Présidente et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
 
*************
 
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
 
M. [K] a été affilié au régime social des indépendants, en qualité d’artisan du 4 janvier 2008 au 26 décembre 2014 au titre d’une activité de création artistique de tatouage piercing.
 
Contestant son affiliation à ce régime au motif qu’il relève du régime de sécurité sociale des artistes-auteurs dépendant du régime général et géré par [5] pour une activité de création artistique, le 4 mars 2015, M. [K] a saisi la commission de recours amiable de la caisse du régime social des indépendants de la région Rhône, laquelle, par décision du 26 août 2015, après avis défavorable de la commission des auteurs d’oeuvres graphiques et plastiques ayant estimé que les activités exercées par l’intéressé ne laissaient pas une part prépondérante à la création, a rejeté son recours compte tenu de la nature et des conditions d’exercice de l’activité principale exercée et a rejeté la demande de radiation de son affiliation auprès de la caisse du régime social des indépendants du Rhône, secteur artisans.
 
Le 12 mai 2016, M. [K] a saisi d’un recours le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon en demandant que soit ordonné au régime social des indépendants de reconnaître son statut d’artiste auteur, que le régime social des indépendants soit condamné à lui rembourser l’intégralité des sommes versées au titre de son affiliation erronée depuis le 1er mai 2007 et qu’il soit ordonné que les cotisations soient recalculées sur la base des assiettes de cotisations de [5].
 
Par jugement du 30 mars 2020, retenant essentiellement, d’une part, que l’URSSAF ne justifiait pas de la date à laquelle la décision de la commission de recours amiable avait été notifiée à l’intéressé, aucune forclusion ne pouvait être opposée, d’autre part qu’il n’était pas justifié que l’activité alléguée de création artistique puisse être considérée comme majoritaire et/ou habituelle, le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon, devant lequel la procédure s’est poursuivie au 1er janvier 2019, a déclaré les demandes recevables mais a débouté M. [K] de l’ensemble de ses demandes et laissé à sa charge les dépens exposés depuis le 1er janvier 2019.
 
Le jugement lui ayant été notifié par lettre recommandée dont il a signé l’accusé de réception le 19 mai 2020, M. [K] en a formé appel par lettre recommandée adressée le 22 mai 2020.
 
Dans ses écritures intitulées conclusions n°2, adressées à la cour par lettre recommandée du 15 mars 2022 et ses écritures n°3 déposées le jour de l’audience, M. [K] invoque les dispositions de l’article 244 quater O du code général des impôts et fait valoir en substance que :
 
— il travaille en qualité d’artiste, créé des oeuvres qui sont produites en un seul exemplaire ou en petites séries et qu’il enregistre ses oeuvres auprès de l’INPI pour la protection de ses droits d’auteur,
 
— ses dessins et contrats de production créative représentent 94,37 % de ses revenus pour l’année 2013, soit 20’800 euros, portés dans sa déclaration annuelle de revenus, pour 21 dessins correspondant à autant de contrats,
 
— il n’existe aucune preuve à l’appui de l’affirmation selon laquelle la prépondérance de son travail n’est pas de nature créative et produit au contraire l’épreuve de son travail pour l’année 2013 par le biais de son enveloppe E-Soleau, avec le relevé de sa production fiscale et créative pour cette année-ci,
 
— il indique être affilié à l’URSSAF Limousin depuis le 1er janvier 2019 sous le statut d’artiste de [5].
 
Par conclusions déposées au greffe le 2 mars 2022 et oralement soutenues et modifiées à l’audience, l’URSSAF Rhône-Alpes demande à la cour de :
 
— confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [K] de l’ensemble de ses demandes,
 
‘ infirmer le jugement en ce qu’il a déclaré les demandes recevables,
 
et statuant à nouveau :
 
‘ déclarer irrecevable le recours introduit par M. [K],
 
‘ déclarer irrecevable la pièce n°3,
 
‘ débouter M. [K] l’ensemble de ses demandes,
 
‘ condamner M. [K] au paiement à l’URSSAF Rhône-Alpes la somme de 1800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et le condamner aux dépens.
 
L’URSSAF fait valoir que :
 
‘ le recours de M. [K] devant le tribunal est irrecevable pour avoir été formé le 18 mai 2016, soit plus de deux mois après la réception par celui-ci, le 1er septembre 2015, de la notification par lettre recommandée de la décision de la commission de recours amiable,
 
‘ la demande affiliation au régime général des artistes auteurs formée par l’intéressé à effet du 1er janvier 2014 a fait l’objet de deux avis défavorables par décision du 18 septembre et des 18 et 19 décembre 2014 de la commission des auteurs d’oeuvres graphiques et plastiques qui estimait que les travaux de dessin à l’origine des revenus d’indépendant déclarés par M. [K] ne laissaient pas apparaître une part prépondérante de création. La caisse primaire d’assurance-maladie a rejeté la demande d’affiliation de M. [K] sur le fondement de l’avis émis par cette dernière et sur recours de celui-ci, par décision du 18 mai 2016, la commission de recours amiable de la caisse primaire d’assurance-maladie a refusé son affiliation au régime des artistes auteurs,
 
‘ la consultation du site Internet de M. [K] démontre sans aucun doute que l’activité relève du tatouage exclu du champ d’application des assurances sociales des artistes auteurs,
 
‘ par courrier du 18 janvier 2017, [5] a confirmé la non affiliation de M. [K] aux assurances sociales des artistes auteurs pour la branche des arts graphiques et plastiques à la suite de sa demande d’affiliation en 2013, la commission professionnelle ayant estimé que l’activité exercée ne relevait du tatouage, référence exclue du champ d’application des assurances sociales des artistes auteurs.
 
‘ M. [K] ne produit aucun élément de nature à établir qu’il remplit les conditions de l’article L. 382-1 du code de sécurité sociale, en l’absence de production des contrats passés avec ses clients, les pièces produites étant dépourvues de force probante dans la mesure où il s’agit de factures rédigées au crayon à papier, qui ne sont pas des documents comptables. Quant aux attestations produites en pièce n°3 elles ne respectent pas les conditions exigées par l’article 202 du code de procédure civile et doivent être écartées comme étant irrecevables et, en tout état de cause, elles établissent, en contradiction avec la défense de M. [K], la nature exacte de son activité, en l’occurrence le tatouage.
 
Par conclusions déposées au greffe le 8 juillet 2021 et oralement soutenues à l’audience, la caisse primaire d’assurance-maladie du Rhône , demande à la cour de confirmer le jugement et de débouter M. [K] de son recours.
 
Elle rappelle qu’à deux reprises, la commission des auteurs d’oeuvres graphiques et plastiques a refusé le bénéfice de l’affiliation de M. [K] au régime des artistes auteurs, en estimant que les travaux de dessins à l’origine des revenus indépendant déclarés ne laissaient pas apparaître une part prépondérante de création et que l’activité exercée relevait du domaine du tatouage, référence exclue du champ d’application des assurances sociales des artistes auteurs.
 
Elle fait valoir que M. [K] ne produit aucun élément de nature à établir l’une ou l’autre des conditions exigées aux articles L. 382-1 et R. 382-1 du code de sécurité sociale, en l’absence de production du contrat passé avec ses clients, de sorte que c’est à juste titre que la caisse a notifié un refus d’affiliation au régime des artistes auteurs le 12 mars 2015.
 
A l’audience, M. [K] n’a fait valoir aucune observation sur le moyen soutenu par l’URSSAF tiré de l’irrecevabilité de son recours devant le tribunal, comme étant tardif. Il a confirmé maintenir ses demandes initialement formées devant le tribunal.
 
MOTIFS DE LA DÉCISION
 
Sur la recevabilité du recours
 
Selon l’article R. 142-18, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable, le tribunal des affaires de sécurité sociale est saisi, après l’accomplissement, le cas échéant, de la procédure prévue à la section 2 du présent chapitre, par simple requête déposée au secrétariat ou adressée au secrétaire par lettre recommandée dans un délai de deux mois à compter soit de la date de la notification de la décision, soit de l’expiration du délai d’un mois prévu à l’article R. 142-6.
 
En l’espèce, l’URSSAF produit aux débats, en pièce n°7 de son dossier, la décision de la commission de recours amiable du 26 août 2015 rejetant la demande de M. [K] de radiation du collège des artisans du régime social des indépendants au profit de la sécurité sociale de [5], mentionnant les voies et délai de recours, notifiée par lettre recommandée à l’adresse de M. [K], accompagnée de l’accusé de réception présenté le 27 août 2015 et retourné distribué et signé le 1er septembre 2015.
 
M. [K] ayant saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon le 12 mai 2016, soit plus de deux mois après la notification régulière de la décision de la commission de recours amiable de la caisse du RSI rejetant sa demande de radiation, son recours est irrecevable comme étant forclos.
 
Et alors que le recours de M. [K] devant le tribunal a pour objet de contester la décision de la commission de recours amiable de la caisse du RSI refusant sa demande de radiation du régime social des indépendants et que ses demandes sont toutes dirigées contre la caisse du RSI et tendent à ce que soit ordonné au régime social des indépendants de reconnaître son statut d’artiste auteur, que le régime social des indépendants soit condamné à lui rembourser l’intégralité des sommes versées au titre de son affiliation erronée depuis le 1er mai 2007 et qu’il soit ordonné que les cotisations soient recalculées sur la base des assiettes de cotisations de [5], la circonstance qu’il a par ailleurs formulé une demande d’affiliation au régime général des artistes auteurs avec effet au 1er janvier 2014 et que la commission de recours amiable de la caisse primaire d’assurance maladie a refusé sa demande d’affiliation au régime des artistes auteurs par décision du 18 mai 2016, ce dont il n’a pas saisi le tribunal, est sans incidence sur l’irrecevabilité de son recours.
 
Le jugement est par conséquent infirmé ce qu’il a déclaré les demandes de M. [K] recevables.
 
M. [K] qui succombe dans ses prétentions est tenu aux dépens.
 
Il n’est pas inéquitable de laisser à l’URSSAF la charge des frais non compris dans les dépens qu’elle a pu engager pour faire valoir ses droits dans la présente procédure.
 
PAR CES MOTIFS
 
La cour,
 
Statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort,
 
INFIRME le jugement déféré en ce qu’il a déclaré les demandes de M. [K] recevables,
 
Et statuant à nouveau,
 
Déclare irrecevable comme étant forclos le recours de M. [R] [K] devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon,
 
Y ajoutant,
 
REJETTE la demande de l’URSSAF Rhône-Alpes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
 
CONDAMNE M. [R] [K] aux dépens d’appel.
 
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
 

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