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La suppression de données informatiques par l’hébergeur suite à un défaut de paiement du client ne relève pas de la compétence du juge des référés. Ce dernier peut toutefois ordonner le rétablissement des données le temps d’une saisine au fonds.
La société Safety & Maintenance Company (SMC) est une société de droit belge active dans la sécurité externe et la fourniture de matériel de sécurité. Elle utilise les services de stockage de données de la société OVH, spécialiste de l’hébergement informatique.
La société SMC disposait de 3 serveurs chez OVH. Elle enregistrait sur ces 3 serveurs des informations essentielles à son activité. Par courriel du 29 septembre 2020, la société SMC a été informée par OVH que les contrats d’hébergement allaient expirer faute d’une prolongation du service. La société SMC a tenté de procéder au renouvellement des services en suivant les instructions d’OVH mais n’y est pas parvenue. Par courriel du 5 octobre 2020, elle a été avisée que les contrats des serveurs avaient expiré et qu’ils seraient suspendus à défaut de réactivation dans un délai de 5 jours.
Dés le 6 octobre 2020, la société OVH informait la société SMC que ses serveurs avaient été fermés et que toutes les données avaient été effacées.
Estimant être dans une situation d’urgence extrême, la société SMC a requis en date du 14 octobre 2020 auprès du président du tribunal de commerce de Lille Métropole, l’autorisation d’assigner en référé d’heure à heure la société OVH.
Concernant les données hébergées sur le serveur, la société OVH a remis dès le 16 novembre 2020 à la société SMC trois disques durs de marque INTEL SSD correspondants au contenu sauvé du recyclage du dit serveur, mais qui ne sont pas directement exploitables, de sorte que si, formellement, la société OVH a satisfait à l’injonction du président du tribunal de commerce de Lille Métropole lui prescrivant de fournir à la société SMC l’accès aux contenus des serveurs et à toutes les données de la société SMC qu’ils contiennent, quelle que soit la forme de cette communication (accès temporaire aux serveurs. disque, cloud, clés USB….), elle n’a néanmoins par permis à la société SMC d’accéder à ses données, de sorte qu’elle ne peut être tenue pour libérée de son obligation.
La société OVH a également indiqué qu’elle était en mesure de réinstaller les disques qui étaient présents sur ses serveurs grâce à l’option ‘back-up’ et d’en permettre l’accès direct à la société SMC via une connexion sur l’interface d’OVH cloud.
Pour permettre à la société SMC d’échapper, au moins partiellement, dans la limite des données ayant été sauvées de la destruction, au dommage imminent résultant de la perte de l’intégralité des données stockées par la société SMC sur les serveurs dédiés d’OVH, la juridiction a ordonné à la société OVH de procéder à ladite mise à disposition via une connexion sur l’interface OVH Cloud, et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de huit jours suivant la signification de l’arrêt rendu.
La société OVH a ainsi été condamnée à rétablir l’accès de la société SMC aux données dont elle dispose.
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République Française
Au nom du Peuple Français
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 1
ARRÊT DU 10/06/2021
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N° RG 20/04651 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TJCG
Ordonnance (N° 2020020046) rendu le 05 novembre 2020 par le tribunal de commerce de Lille Métropole
APPELANTE
La Société OVH prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
Ayant son siège social […]
représentée et assistée par Me Viviane Gelles, avocat au barreau de Lille
INTIMÉE
La Société Safety & Maintenance Company, société de de droit belge, agissant par son dirigeant légal en exercice, domicilié ès-qualités audit siège
Ayant son siège social […] représentée et assistée par Me Bryan Roggeman, avocat au barreau de Lille
ayant pour conseil Me Jeanna Auwerx, avocat au barreau de Hasselt et de Bruxelles
DÉBATS à l’audience publique du 07 avril 2021 tenue par Geneviève Créon magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).
Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Delphine Verhaeghe
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ
Z A, présidente de chambre
Laurent Bedouet, président
Geneviève Créon, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 10 juin 2021 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Z A, présidente et X Y, greffier lors du délibéré, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 17 mars 2021
Vu l’ordonnance de référé du président du tribunal de commerce de Lille Métropole du 5 novembre 2020, qui a:
— jugé que la perte de l’intégralité des données stockées par SMC sur les serveurs dédiés d’OVH constitue un dommage imminent qui préjudicierait de façon très importante la société SMC ;
— dit n’y avoir plus lieu à statuer sur la demande de communication par la société OVH d’un état détaillant les opérations, connexions, manipulations, interventions et démarches, de quelque n a t u r e q u e c e s o i t , e f f e c t u é e s s u r l e s s e r v e u r s r é f é r e n c e s Ns3115696.ip-54-38-179.eu.Ns3082369.ip-147-135-254.euet Ns30664066.ip-193-70-46.eu. depuis le 01 septembre 2020 ;
— condamné la société OVH d’avoir à fournir à SMC l’accès aux contenus des serveurs référencés Ns31.15696.ip-54~38479.eu. Ns3082369V-147-l3S-254.eu et Ns30664066.ip493-70-46.eu et à toutes les données de la société SMC qu’ils contiennent quelle que soit la forme de cette communication (accès temporaire aux serveurs, disque, cloud, clés USB….), et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 24 heures suivant la signification de la présente ordonnance ;
— s’est réservé la liquidation de l’astreinte ;
— autorisé la société OVH de faire procéder à ses frais, par un expert judiciaire spécialisé en informatique, préalablement à la remise en fonctionnement de l’installation, à une ‘copie-image’ (ou ‘forensic copy ‘) desdits disques, ladite copie pouvant être conservée jusqu’à l’expiration des délais de prescription ;
— condamné la société OVH à payer à la société SMC la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
— condamné la société OVH aux entiers dépens taxés et liquides à la somme de 42.80 euros (en ce qui concerne les frais de Greffe).
Vu la déclaration d’appel du 16 novembre 2020 de la société O.V.H., portant sur l’ensemble des dispositions de l’ordonnance,
Vu les dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 30 mars 2021 par la société O.V.H., qui demande à la cour d’appel de :
— réformer l’ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de commerce de Lille
Métropole en date du 5 novembre 2020 ;
En conséquence,
— dire que le préjudice prétendument subi par la société SMC lui est exclusivement imputable et ne résulte d’aucun manquement de la société OVH à ses obligations contractuelles ;
— constater l’impossibilité matérielle et juridique, pour la société OVH, de donner à la société SMC un accès au contenu du serveur Ns3082369.ip-147-135-254.eu celui-ci ayant été totalement recyclé ;
— constater l’impossibilité matérielle et juridique, pour la société OVH, de donner à la société SMC un accès au contenu du serveur Ns30664066.ip-193-70-46.eu, seul le contenu de la sauvegarde de celui-ci pouvant être remis par la société OVH à la société SMC ;
— débouter en conséquence la société SMC de sa demande d’astreinte portant sur la fourniture d’un accès aux contenus des serveurs Ns3082369.ip-147-135-254.eu et Ns30664066.ip-193-70-46.eu, et des données de la société SMC qu’ils contiennent ;
— juger que la remise le 16 novembre 2020, par la société OVH, de 4 disques durs issus du serveur Ns3115696.ip-54-38-179.eu et de la sauvegarde du serveur Ns30664066.ip-193-70-46.eu satisfait à l’injonction qui lui était faite de fournir un accès aux contenus des serveurs correspondants et aux données qu’ils contiennent,
— débouter la société SMC de l’ensemble de ses autres demandes et prétentions formées à l’encontre de la société OVH ;
— condamner la société SMC à verser à la société OVH la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers frais et dépens de l’instance ;
Vu les dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 25 mars 2021 par la société Safety & Maintenance Company, qui demande à la cour d’appel de :
— confirmer l’ordonnance du 5 novembre 2020 en ce qu’il a :
— dit et jugé que la perte de l’intégralité des données stockées par SMC sur les serveurs dédiés d’OVH constitue un dommage imminent qui préjudicierait de façon très importante la société SMC ;
— enjoint et condamné la société OVH d’avoir à fournir à SMC l’accès aux contenus des serveurs référencés Ns3115696.ip-54-38-179.eu Ns3082369.ip-147-135-254.eu et Ns3066466.ip-193-70-46 et à toutes les données de la société SMC qu’ils contiennent, quelle que soit la forme de cette communication (accès temporaire aux serveurs, disque, cloud, clés USB..) et ce, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 24 heures suivant la signification l’ordonnance du 5 novembre 2020 ;
— s’est réservé la liquidation de l’astreinte ;
— condamné la société OVH à payer à la société SMC la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
— condamné la société OVH aux entiers dépens, taxés et liquidés à la somme de 42,80 euros (en ce qui concerne les frais de Greffe) ;
Y ajoutant,
— constater que dans sa note en délibéré OVH a pris l’engagement de monter elle-même sur les serveurs de ses infrastructures les copies des disques contenant les données de la société SMC afin
de lui permettre un accès direct via une connexion sur l’interface OVH CLOUD ;
— préciser que la condamnation sous astreinte de la société OVH à fournir à SMC l’accès aux contenus des serveurs référencés Ns3115696.ip-54-38-179.eu Ns3082369.ip-147-135-254.eu et Ns3066466.ip-193-70-46 et à toutes les données de la société SMC qu’ils contiennent, quelle que soit la forme de cette communication (accès temporaire aux serveurs, disque, cloud, clés USB..) et ce, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de l’expiration d’un délai de 24 heures suivant la signification de l’ordonnance s’entend par le rétablissement au profit de la société SMC d’un accès direct à ses données via une connexion sur l’interface OVH Cloud ;
— condamner la société OVH à verser à la société SMC la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d’appel;
— condamner la société OVH aux entiers frais et dépens ;
Vu l’ordonnance de clôture du 31 mars 2021,
SUR CE,
Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.
Il sera simplement rappelé que la société Safety & Maintenance Company, ci-après SMC est une société de droit belge active dans la sécurité externe et la fourniture de matériel de sécurité.
Elle utilise les services de stockage de données de la société OVH, spécialiste de l’hébergement informatique.
Ainsi, la société SMC disposait de 3 serveurs chez OVH :
— Ns3115696.ip-S4-38-I 79.eu ;
— Ns3082369.ip-I47-135-254.eu ;
— Ns30664066.ip- l 93-70-46.eu ;
Elle enregistrait sur ces 3 serveurs des informations essentielles à son activité.
Par courriel du 29 septembre 2020, la société SMC a été informée par OVH que les contrats d’hébergement allaient expirer faute d’une prolongation du service.
La société SMC a tenté de procéder au renouvellement des services en suivant les instructions d’OVH mais n’y est pas parvenue.
Par courriel du 5 octobre 2020, elle a été avisée que les contrats des serveurs avaient expiré et qu’ils seraient suspendus à défaut de réactivation dans un délai de 5 jours.
Dés le 6 octobre 2020, la société OVH informait la société SMC que ses serveurs avaient été fermés et que toutes les données avaient été effacées.
Le 7 octobre 2020, par lettre recommandée avancée par courriel, le conseil de SMC a mis en demeure OVH de rétablir les serveurs dédiés et de restaurer les données effacées.
Le 13 octobre 2020, la société OVH a répondu que l’absence de renouvellement des services ne lui était pas imputable. Elle n’apportait pas à sa cliente de solutions techniques au risque de perte des données.
Estimant être dans une situation d’urgence extrême, la société SMC a requis en date du 14 octobre 2020 auprès du président du tribunal de commerce de Lille Métropole, l’autorisation d’assigner en référé d’heure à heure la société OVH.
Par ordonnance du 16 octobre 2020, la société SMC a été autorisée à assigner la société OVH devant le juge des référés du tribunal à l’audience du 22 octobre 2020.
C’est dans ce contexte qu’est intervenue l’ordonnance dont appel.
La société O.V.H. fait valoir que la société SMC, qui avait repris les contrats de location souscrits auprès d’elle par la société C.T.K. s’est acquittée avec retard (virement du 30 juillet, encaissement manuel le 3 août en raison de l’expiration des services à la date de réception des fonds) du paiement de la facture correspondant aux services de juillet 2020, alors que les services sont en principe payables par avance, que ce retard de paiement a entraîné la désactivation du renouvellement automatique des services, qu’il appartenait alors à la société SMC de procéder au renouvellement manuel des services souscrits, étant rappelé que ceux-ci sont réglables, selon le contrat souscrit par la société SMC, mensuellement et par avance, ce dont elle a informée le 15 juillet 2020, que les éléments lui ont été communiqués qui lui permettait de réactiver leur renouvellement automatique, qui suppose nécessairement l’enregistrement d’un moyen de paiement ; que de nouveaux retards sont intervenus en août et septembre 2020, puis la société SMC n’a plus fait aucune demande de renouvellement, malgré les alertes reçues, qu’elle était donc fondée, à l’expiration des services souscrits jusqu’au 28 septembre 2020, et faute de renouvellement de ceux-ci par la société SMC à leur échéance, de procéder à leur arrêt, conformément à ses conditions générales de vente, que la société SMC s’est tardivement manifestée le 29 septembre 2020, sans mention d’urgence, de sorte que son mail n’a été traité que quelques jours plus trad, alors que toutes les données avaient été supprimées; en réponse aux arguments de la société SMC, elle indique que le lien permettant le renouvellement des services fonctionnait, que la mise en recyclage des serveurs résulte non pas d’un défaut de paiement mais simplement d’un défaut de renouvellement des services par la société SMC, dans le cadre d’une gestion exclusivement en ligne des dossiers, qui ne permet pas de rapprocher un paiement sur un compte prépayé des services souscrits ; elle rappelle que l’obligation essentielle assumée au titre du contrat est celle de la location d’un serveur dédié, correspond à la mise à disposition d’un service et non à la conservation des données en back-up, et que les conditions générales du contrant limitent sa responsabilité à l’équivalent de 6 mois de prestations ; elle fait valoir qu’en exécution de l’ordonnance du 5 novembre 2020, elle a effectuée la remise, dès le 16 novembre 2020 par ses soins, de disques durs contenant tout le contenu du serveur tel que sauvé du recyclage, dans lesquelles se trouve en effet le « contenu » et « les données » du serveur Ns3115696.ip-54-38-179.eu auquel la société SMC peut accéder selon les modalités de son choix,
La société SMC oppose qu’à la suite de la signification de l’ordonnance du 5 novembre 2020, intervenue le 16 novembre 2020, la société OVH lui a remis, par l’intermédiaire de son conseil, des disques durs sur lesquels les données étaient inscrites au format Raid sur lesquels se trouveraient une partie de ses données, lequel est totalement inexploitable par SMC , et que depuis, la société OVH refuse de rétablir l’accès aux données de la société SMC en rétablissant temporairement l’accès à ses serveurs ou en lui remettant les données dans un format lisible au mépris du préjudice subi par SMC ; elle rappelle que ces données sont vitales pour elle puisqu’elles concernent ses contrats, ses clients et prospects, et que sans ces dernières, le fonctionnement de la société est gravement mis à mal ; elle fait valoir que les conditions particulières du contrat prévoyaient que seul le client pouvait procéder à une modification de l’automaticité du renouvellement et que rien ne justifiait que la société OVH
s’arroge le droit de basculer les services en renouvellement manuel ce dont elle n’a jamais été avertie, et résilie unilatéralement ces derniers alors qu’elle était à jour de ses paiements ; qu’il incombait bien à OVH de renouveler les services de la société SMC et ce d’autant plus qu’elle avait déjà été payée pour le faire, qu’elle n’a été effectivement et expressément prévenue de ce que ses serveurs allaient être sur le point d’être effacés qu’à compter du 5 octobre 2020, avec un délai de 5 jours accordé pour procéder au renouvellement des serveurs ; qu’elle justifie avoir tenté à de nombreuses reprises de joindre la société OVH dès le 29 septembre 2020 au vu de l’urgence de la situation, laquelle ne l’a pas rappelée, qu’en réalité, elle n’a jamais été mise en mesure à compter du 29 septembre 2020 de renouveler les services d’hébergement dont elle bénéficiait ; elle soutient que il n’existe aucune règle qui obligerait OVH à supprimer immédiatement les données sur les serveurs, qu’au contraire, celle-ci, en tant que fournisseur de services de cloud computing, intervient uniquement en tant que sous-traitant pour le compte de SMC, qui est responsable du traitement des données personnelles sur ses serveurs, et que conformément à l’article 28 du RGPD, un sous-traitant ne peut agir que sur instruction du responsable du traitement, par conséquent, OVH ne pouvait supprimer ses données sur ses serveurs que si elle lui avait donné des instructions explicites à cet effet, ce qu’elle n’a jamais fait.
Sur l’imputabilité à la société OVH du préjudice allégué par la société SMC
Il ressort manifestement des débats qu’il existe une contestation sérieuse sur les responsabilités des parties dans l’inexécution de leurs obligations réciproques résultant du contrat d’hébergement des données de la société SMC par la société OVH ; la demande faite par l’appelante de trancher cette question ne ressort pas de la compétence du juge des référés, juge de l’évidence, et il n’y a donc pas lieu de statuer sur ce point.
Sur le dommage imminent résultant de la perte de l’intégralité des données stockées par SMC sur les serveurs dédiés d’OVH
Aux termes de l’article 873 alinéa 1er du code de procédure civile, ‘Le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.’
La société SMC demande à la Cour d’ordonner à la société OVH sur le seul fondement de la prévention d’un dommage imminent, de lui assurer l’accès aux contenus des serveurs référencés :
— Ns3115696.ip-54-38-179.eu ;
— Ns3082369.ip-147-135-254.eu
— Ns3066466.ip-193-70-46.eu
et à toutes les données qu’ils contiennent la concernant, quelle que soit la forme de cette communication.
La société OVH indique qu’en conséquence des défauts de paiements automatiques de la société SMC, les serveurs Ns3082369.ip-147-135-254.eu et Ns3066466.ip-193-70-46 ont fait l’objet dès le 5 octobre 2020 d’une procédure de recyclage ayant pour conséquence la suppression définitive des données qu’ils contenaient, de sorte que la récupération de celles-ci est matériellement impossible.
Elle se réfère à un courriel du 6 octobre 2020 rédigé en néerlandais qui lui est adressé, versé aux débats (pièce 18), dont la traduction libre proposée en ces termes: ‘A votre demande, le serveur Ns3082369.ip-147-135-254.eu a désormais été supprimé. Cette opération est irréversible’, n’est pas contestée.
La société SMC a pris acte dans ses dernières conclusions ( p16 et 17) du fait que les serveurs étaient partis en recyclage au mépris d’un délai de 5 jours qui lui avait été donné par la société OVH pour procéder au renouvellement de ses serveurs.
La procédure de référé a pour objet de permettre d’ordonner dans l’urgence les mesures susceptibles d’éviter un dommage imminent ; en l’espèce, l’effacement des données des serveurs Ns3082369.ip-147-135-254.eu et Ns3066466.ip-193-70-46 étant effectif, le dommage est acquis, de sorte que l’injonction d’accès aux données sollicitée visant à le prévenir est sans objet.
En conséquence, l’ordonnance de référé dont appel sera infirmée des chefs relatifs à ces deux serveurs.
Concernant les données du serveur Ns3066466.ip-193-70-46.eu l’appelante expose que celles-ci pouvaient faire l’objet d’une procédure de sauvegarde administrée par le client, résultant du bénéfice d’une option souscrite dite ‘ back-up’, dont elle a pu récupérer les données sans doute partielles mais qu’elle propose de mettre à disposition.
Concernant les données hébergées sur le serveur Ns3115696.ip-54-38-179.eu, il n’est pas contesté que la société OVH a remis dès le 16 novembre 2020 à la société SMC trois disques durs de marque INTEL SSD correspondants au contenu sauvé du recyclage du dit serveur, mais qui ne sont pas directement exploitables, de sorte que si, formellement, la société OVH a satisfait à l’injonction du président du tribunal de commerce de Lille Métropole lui prescrivant de fournir à la société SMC l’accès aux contenus des serveurs référencés Ns31.15696.ip-54~38479.eu. à toutes les données de la société SMC qu’ils contiennent, quelle que soit la forme de cette communication (accès temporaire aux serveurs. disque, cloud, clés USB….), elle n’a néanmoins par permis à la société SMC d’accéder à ses données, de sorte qu’elle ne peut être tenue pour libérée de son obligation.
Il est justifié que dans une note en délibéré communiquée le 26 octobre 2020 au président du tribunal de commerce de Lille Métropole, la société OVH a indiqué qu’elle était en mesure de réinstaller les disques qui étaient présents dans le serveur Ns31.15696.ip-54~38479.eu ainsi que les données sauvegardées grâce à l’option ‘back-up’ en provenance du serveur Ns3066466.ip-193-70-46.eu, et d’en permettre l’accès direct à la société SMC via une connexion sur l’interface d’OVHcloud.
Pour permettre à la société SMC d’échapper, au moins partiellement, dans la limite des données ayant été sauvées de la destruction, au dommage imminent résultant de la perte de l’intégralité des données stockées par la société SMC sur les serveurs dédiés d’OVH, il y a donc lieu d’ordonner à la société OVH de procéder à ladite mise à disposition via une connexion sur l’interface OVH Cloud, et ce, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de huit jours suivant la signification du présent arrêt.
L’ordonnance dont appel sera donc infirmée du chef de ses dispositions relatives au serveur Ns31.15696.ip-54~38479.eu et la société OVH sera condamnée à rétablir l’accès de la société SMC aux données dont elle dispose dans les termes définis ci dessus.
Sur les indemnités de procédure et les dépens
Les dispositions de l’ordonnance attaquée prises de ces chefs seront confirmées.
Enfin la société SMC a dû engager des frais non compris dans les dépens qu’il serait inéquitable de laisser en totalité à sa charge. Il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure qui sera précisée au dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS
Infirme l’ordonnance de référé du président du tribunal de commerce de Lille Métropole du 5 novembre 2020, sauf en ce qui concerne l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit n’y avoir lieu à référé sur l’imputabilité à la société OVH du préjudice allégué par la société SMC ;
Dit n’y avoir de dommage imminent concernant la récupération des données des serveurs Ns3082369.ip-147-135-254.eu et Ns3066466.ip-193-70-46.eu, en raison de la destruction des dites données ;
Rejette les demandes de la société Safety & Maintenance Company à ce titre ;
Condamne la société OVH à rétablir au profit de la société Safety & Maintenance Company un accès direct aux contenus des serveurs référencés Ns3115696.ip-54-38-179.eu , et aux données sauvegardées par l’option ‘back-up’ du serveur Ns3066466.ip-193-70-46 via une connexion sur l’interface OVH Cloud, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de huit jours suivant la signalisation du présent arrêt ;
Condamne la société OVH à verser à la société SMC la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure d’appel;
Condamne la société OVH aux dépens de l’appel.
Le greffier La présidente