Subrogation et Conditions de Garantie : Les Enjeux de l’Indemnisation en Droit des Assurances

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Subrogation et Conditions de Garantie : Les Enjeux de l’Indemnisation en Droit des Assurances
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Contexte de l’Affaire

Monsieur [C] [X] a souscrit un contrat d’assurance auprès de la MAIF, référencé 0373959N, dans le cadre du contrat PRAXIS SOLUTIONS. Le 1er décembre 2016, son épouse, Madame [H] [X], a été victime d’un accident de la circulation, renversée par un véhicule assuré par la compagnie PACIFICA, alors qu’elle marchait à proximité de son domicile.

Expertise Médicale et Indemnisation

Suite à l’accident, plusieurs expertises médicales ont été réalisées, aboutissant à un rapport le 11 juillet 2020. Ce rapport a établi divers préjudices, incluant des périodes de gêne temporaire totale et partielle, un déficit fonctionnel permanent de 45%, ainsi que des souffrances évaluées à 5,5 sur 7. La MAIF a versé plusieurs provisions à Madame [X] en application de son contrat.

Transaction et Recours Subrogatoire

Un procès-verbal de transaction a été signé entre PACIFICA et Madame [X] en février 2022, fixant l’indemnisation à 195.644,40 €, à l’exception des frais d’assistance à tierce personne. La MAIF a ensuite exercé un recours subrogatoire contre PACIFICA pour récupérer les sommes versées à Madame [X].

Réponse de PACIFICA

En mars 2022, PACIFICA a accepté de rembourser une partie des frais, mais a refusé de prendre en charge les prestations d’aide-ménagère, arguant que la subrogation n’était pas applicable. Elle a contesté la validité des factures présentées, affirmant qu’elles n’étaient pas conformes aux termes du contrat PRAXIS SOLUTIONS.

Procédure Judiciaire

Face à l’absence d’accord, la MAIF a saisi le tribunal judiciaire de Paris en avril 2023. PACIFICA a contesté la recevabilité des demandes de la MAIF, soutenant qu’elle ne justifiait pas de la réalité de la subrogation. Madame [X] a également intervenu dans la procédure.

Arguments de PACIFICA

PACIFICA a fait valoir que la MAIF ne prouvait pas avoir payé l’indemnité d’assurance, et que les conditions particulières du contrat n’avaient pas été produites. Elle a également soutenu que les prestations d’assistance à domicile ne constituaient pas des indemnités au sens du contrat d’assurance.

Réponse de la MAIF et de Madame [X]

La MAIF et Madame [X] ont affirmé que la MAIF avait bien un contrat d’assurance et que les prestations d’assistance étaient couvertes. Elles ont contesté les arguments de PACIFICA, soutenant que les conditions générales et les attestations produites justifiaient leur position.

Décision du Tribunal

Le tribunal a jugé que la MAIF ne pouvait pas prouver qu’elle avait payé l’indemnité d’assurance dans le cadre des conditions du contrat, rendant ainsi ses demandes irrecevables. La MAIF a été condamnée à verser des frais à PACIFICA, et toutes les demandes des parties ont été rejetées.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

24 octobre 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG n°
23/06160
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies exécutoires
délivrées le :

5ème chambre 2ème section

N° RG 23/06160
N° Portalis 352J-W-B7H-CZWOE

N° MINUTE :

Assignation du :
28 Avril 2023

ORDONNANCE DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 24 Octobre 2024

DEMANDERESSES

S.A. MUTUELLE ASSURANCE INSTITUTEUR FRANCE (MAIF)
[Adresse 1]
[Localité 5]
représentée par Me Mélodie PANUICZKA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0782, et par Me Eric AZOULAY, avocat au barreau de PONTOISE

DEFENDERESSES

S.A. PACIFICA
[Adresse 6]
[Localité 3]
représentée par Me Patrice GAUD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0430

INTERVENANTE VOLONTAIRE

Madame [H] [X]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Mélodie PANUICZKA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #E0782, et par Me Eric AZOULAY, avocat au barreau de PONTOISE
Décision du 24 Octobre 2024
4ème chambre 1ère section
N° RG 23/06160

MAGISTRAT DE LA MISE EN ETAT

Christine BOILLOT, Vice-Présidente

assistée de Fathma NECHACHE, Greffier lors des débats
et de Nadia SHAKI, Greffier lors de la mise à disposition au greffe

DEBATS

A l’audience du 26 Septembre 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 24 Octobre 2024.

ORDONNANCE

Prononcée par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [C] [X] a souscrit d’un contrat d’assurance auprès de la compagnie d’assurance MAIF, sous les références 0373959N, selon un contrat PRAXIS SOLUTIONS.

Le 1er décembre 2016, alors âgée de 84 ans, Madame [H] [X], son épouse, a été renversée par un véhicule assuré par la compagnie PACIFICA alors qu’elle circulait à pied dans son quartier, à 600 mètres de son domicile.

Des opérations d’expertise amiable se sont mises en place, à l’initiative des deux compagnies d’assurance celle de Monsieur [X], la MAIF et la compagnie PACIFICA.

Après plusieurs examens et hospitalisations de Madame [X], les médecins-experts ont déposé leur rapport le 11 juillet 2020, qui arrivait aux conclusions suivantes :
– Gêne temporaire totale : du 1 er décembre 2016 au 20 juin 2017, du 17 janvier 2018 au 26 janvier 2018, du 14 janvier 2019 au 9 février 2019
– Gêne temporaire partielle de classe 4 : du 21 juin 2017 au 16 janvier 2018 et du 27 janvier 2018 au 13 janvier 2019
– Gêne temporaire de classe 3 : du 10 février 2019 au 3 octobre 2019
– Aide humaine avant la consolidation : voir la discussion
– Date de consolidation : 4 octobre 2019
– Souffrances endurées : 5,5/7
– Déficit fonctionnel permanent : 45%
– Préjudice esthétique temporaire : renvoi à la discussion
– Préjudice esthétique permanent : 3/7
– Préjudice d’agrément : natation, marche sportive et gymnastique

La MAIF a adressé plusieurs provisions à Madame [X], par application de son contrat PRAXIS SOLUTIONS.

Aux termes d’un procès-verbal de transaction cosigné les 3 janvier et 14 février 2022 entre PACIFICA et Madame [X], il a été fixé un droit à indemnisation à hauteur de 195.644,40 €, hors le poste d’assistance à tierce personne avant consolidation, pour lequel la MAIF lui a versé diverses prestations.

La MAIF a donc cherché à se faire rembourser des provisions versées par ses soins, en exerçant les recours subrogatoires contre l’assureur du responsable de l’accident, la compagnie PACIFICA.

Par courrier du 25 mars 2022, cette dernière lui a répondu :
– qu’elle acceptait de prendre en charge la somme de 12.142,89 €, se décomposant comme suit :
o 8.730 € correspond à l’avance contractuelle sur le déficit fonctionnel permanent,
o 1.656,64 € correspondant aux frais de déplacement,
o 1.756,25 € correspondant au remboursement des frais d’optique.
– qu’elle refusait de prendre en charge les prestations d’aide-ménagère, au motif que la subrogation n’était, en l’espèce, pas opérante, que ce soit au plan légal ou le plan conventionnel.

Elle relevait notamment que, s’agissant de l’aide à domicile, l’ensemble des factures transmises étaient au nom de Inter Mutuelles Assistance (IMA), d’une part, que ces prestations ne résultent pas d’une garantie du contrat PRAXIS SOLUTIONS, d’autre part, et enfin, que la date de signature de la quittance est très éloignée des prestations réalisées.

Face à l’impossibilité de trouver un accord avec la compagnie PACIFICA, la compagnie MAIF a saisi le tribunal judiciaire de Paris, par exploit du 28 avril 2023, pour mettre en œuvre son recours subrogatoire après l’indemnisation du poste assistance tierce personne, visant tant les articles L 121-12 du code des assurances, et 1346-1 du code civil, et le contrat d’assurance PRAXIS.

La société PACIFICA a notifié des conclusions d’incident; le 10 novembre 2023, aux termes desquelles elle affirme que la société MAIF est irrecevable en ses demandes, au motif qu’elle ne justifie pas de la réalité de la subrogation dont elle bénéficie; qu’elle soit conventionnelle ou légale.

Madame [X] est intervenue volontairement à l’instance, par voie de conclusions transmises par RPVA le 12 août 2024.

Vu les dernières conclusions d’incident n° 2, notifiées le 13 septembre 2024, par la société PACIFICA, au visa des articles L 121-12, L131-2 et L211-25 du code des assurances, et 1346-1 du code civil, par lesquelles la compagnie demande au juge de la mise en état de :
– juger la MAIF irrecevable en ses demandes et de la débouter de celles-ci;
– de se déclarer incompétent pour se prononcer sur les demandes formulées par Madame [H] [X] et de débouter cette dernière de l’ensemble de ses demandes;
– sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile de condamner
o Madame [H] [X] à lui verser 1.000 € ;
o la MAIF à lui verser 3.000 €, outre les entiers dépens ;
– débouter la MAIF et Madame [H] [X] de toute autre demande.

La société PACIFICA fait en effet valoir que pour bénéficier de la subrogation légale de plein droit, l’assureur doit justifier qu’il a effectivement payé l’indemnité d’assurance, et donc démontrer le paiement effectif de la somme mentionnée dans la quittance produite, et qu’à défaut de paiement effectif, il est en effet jugé que l’assureur n’a pas qualité pour agir au sens de l’article 122 du code de procédure civile, puisqu’il ne démontre pas être subrogé dans les droits de son assuré. Elle considère en outre que la MAIF n’est pas en mesure de prouver que le paiement de l’indemnité d’assurance est intervenu en exécution du contrat d’assurance, et qu’à défaut, le recours subrogatoire est irrecevable, puisque la subrogation ne peut en effet intervenir si les conditions de la garantie n’étaient pas réunies, ou si une exclusion de garantie devait s’appliquer.
La compagnie demanderesse à l’incident prétend, que la qualité d’assurée de Madame [X] n’est pas étayée, puisque pour justifier ses demandes, la MAIF se contente de produire les conditions générales d’un contrat d’assurance, sans produire les conditions particulières signées, alors que l’attestation de règlement de l’IMA, produite par la MAIF (pièce adverse n°8) fait par ailleurs apparaître en qualité d’assuré Monsieur [C] [X], et non Madame [H] [X], et que les conditions générales de ce contrat prévoient bien une version contrat individuel et une version contrat famille, sans qu’il soit indiqué à laquelle de cette version il est souscrit. En l’occurrence, les conditions particulières ne sont pas produites aux débats, alors que les conditions générales précisent bien que les conditions particulières, remises à l’assuré à la souscription, et lors de toute modification contractuelle, complètent et individualisent les conditions générales.
Ainsi, elle prétend qu’à défaut de produire les conditions particulières signées, il n’est pas possible de connaitre la version souscrite et partant, de savoir si Madame [X] pouvait bénéficier des garanties prévues à ce contrat PRAXIS précisément.
La compagnie PACIFICA observe qu’aux termes de ses conclusions d’incident, la MAIF se contente de verser aux débats une capture d’écran du dossier informatique de Monsieur [C] [X] ainsi qu’une attestation d’assurance, au titre de l’année 2016, sans pour autant produire les conditions particulières signées, de sorte qu’elle échoue à rapporter la preuve qui lui incombe et ne justifie pas que Madame [X] bénéficiait des garanties prévues au contrat MAIF et que la subrogation légale de celui qui l’a indemnisée soit recevable.
Elle ajoute enfin que la MAIF ne justifie aucunement avoir effectivement payé l’indemnité d’assurance à l’assuré, et qu’il appartient à la MAIF de justifier du décaissement des sommes à son assuré, la seule production d’une quittance étant insuffisante à l’établir. Elle relève que la quittance produite est datée du 3 février 2023, soit plus de 6 ans après l’accident litigieux, et ne mentionne aucune date à laquelle la somme de 14.208,24€ aurait été versée à Madame [X]. Elle oppose que la MAIF affirme qu’elle justifie de la réalité des décaissements, par le biais d’une attestation de compatibilité, mais souligne, quant à elle, qu’il ressort de ladite attestation, établie par la MAIF, qu’il s’agirait d’une liste de virements, dont l’effectivité n’est pas démontrée, intervenus entre le 25 septembre 2017 et le 14 février 2023, au profit du GIE Inter Mutuelles Assistances (IMA) pour un montant total de 14.229,24€. Selon elle, cette attestation ne justifie aucunement que la MAIF a effectivement payé l’indemnité d’assurance à son assuré.
Enfin, elle avance qu’il apparaît que les sommes qui auraient été versées par la MAIF à Madame [X] n’étaient pas contractuellement dues, puisque les conditions générales produites font apparaître que les prestations versées ont excédé celles prévues au contrat, ces services assistance tierce personne n’étant accordés que jusqu’à la date de consolidation. Or, pour justifier de sa demande, la MAIF produit des justificatifs faisant apparaître des périodes de facturation postérieures à la date de consolidation retenue par l’expert, fixée au 4 octobre 2019 (pièce adverse n°2).
Pour finir, la demanderesse ajoute que la compagnie MAIF n’est pas davantage en mesure de revendiquer le bénéfice d’une subrogation conventionnelle, celle-ci devant être expresse et consentie en même temps que le paiement, et la quittance subrogative ne faisant pas preuve par elle-même de la concomitance de la subrogation et du paiement. Or, Madame [X] intervenue à l’instance, indique pour sa part avoir reçu une somme de 14.208,24 € en application de son contrat, au titre des “aides à domicile et auxiliaire de vie “, aux termes d’une quittance du 3 février 2023 produite aux débats, tandis que la MAIF avance avoir assumé directement les frais d’assistance en recourant au GIE Inter Mutuelles Assistances (IMA) qui a mis en œuvre les prestations garanties par ses actionnaires, dont Madame [X] ferait partie et qui a donc, de ce fait, été réglée au fur et à mesure des prestations, la date des virements énumérés n’étant pas précisée. Selon elle, la compagnie MAIF ne justifie par ailleurs aucunement de la date à laquelle le paiement aurait été réalisé, se prévalant de ce qu’il n’apparaît pas sur la quittance produite, ni même de la réalité de ce paiement, alors que la subrogation est impossible après le paiement, en raison de l’effet extinctif de celui-ci.
Et elle ajoute enfin que la MAIF ne peut ainsi prétendre exercer un recours que pour le versement de prestations à caractère indemnitaire. Or, elle sollicite aux termes de son assignation le remboursement de sommes versées au titre d’une ” assistance à domicile “. La compagnie demanderesse à l’incident soutient que ces frais ne présentent aucun caractère indemnitaire pouvant donner lieu à un recours subrogatoire. Selon elle, au terme de la police, ces services d’aide à la personne sont ainsi distincts des indemnités versées au titre du dommage corporel, évalués après examen par un médecin expert.
La compagnie demanderesse en déduit que la MAIF devra donc être déclarée irrecevable en l’ensemble de ses demandes.

Vu les dernières conclusions de la compagnie MAIF et de Madame [X], transmises par RPVA le 10 septembre 2024, après intervention volontaire par voie de conclusions, du 12 août 2024, de cette dernière, par lesquelles elle demande de :
– la déclarer recevable en ses demandes;
– débouter la société PACIFICA de son incident ;
– condamner cette compagnie à lui payer 1.800 €, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’incident.

La compagnie défenderesse et Madame [X] font valoir l’une et l’autre que la compagnie justifie de son contrat d’assurance et produit ses conditions générales sur les services d’aide à la personne et l’assistance tierce personne et sur le financement des mesures compensatoires (p. 10 et 11 et 19 et 20), qui détaillent les mécanismes de règlement et de subrogation (p. 32 et 34), de sorte que la MAIF dispose d’une subrogation, alors que les quittances ont été émises à son nom. Elles déclarent justifier d’une attestation d’assurance de Madame [X] et de la capture d’écran qui démontre que le contrat d’assurance est conclu. Il est ajouté que l’intéressée reconnaît être assurée au nom de son mari, aux termes du contrat PRAXIS, de sorte que la non-production des conditions particulières n’est en rien rédhibitoire, et que la compagnie PACIFICA ne saurait dès lors opposer que les règlements ne sont pas intervenus en vertu du contrat d’assurance, le plafond d’indemnisation pour l’assistance tierce personne ayant, en l’espèce, bel et bien été respecté, et qu’il ne saurait être soutenu pour de simples questions de présentation de l’offre, qu’il ne s’agit pas là de prestations indemnitaires. La compagnie PACIFICA précise, au demeurant, que le procès-verbal de transaction du 3 janvier 2022, signé par Madame [X] le 14 février 2022, avait réservé ce poste. D’autant que la compagnie PACIFICA a déjà accepté de rembourser d’autres sommes, au titre de l’atteinte à l’intégrité corporelle subie. Elles relèvent qu’il est établi que les factures réglées sont antérieures à la consolidation.

Les parties ont été appelées à l’audience du juge de la mise en état du 26 septembre 2024, et l’incident a été mis en délibéré au 31 octobre 2024.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il convient de se référer aux dernières conclusions des parties, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE :

En vertu de l’article 789 du code de procédure civile, dans sa rédaction entrée en vigueur au 1er janvier 2020, et applicable aux procédures en cours à cette date, le juge de la mise en état est dorénavant compétent pour statuer sur les fins de non-recevoir, et notamment, sur le défaut de qualité et d’intérêt à agir, envisagés comme tels, à l’article 122 du code de procédure civile.

L’incident soulevé est recevable, dans la mesure où l’assignation est datée du 28 avril 2023, et est donc postérieure à l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions.

Sur ce

En application des articles 30 et 31 du code de procédure civile, l’action est le droit, pour l’auteur d’une prétention, d’être entendu sur le fond de celle-ci, afin que le juge la dise bien ou mal fondée. Pour l’adversaire, l’action est le droit de discuter le bien-fondé de cette prétention.

L’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie, pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.

L’article 32 dudit code précise qu’est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir.

L’article L121-12 du code des assurances dispose que l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance est subrogé, jusqu’à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l’assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l’assureur.
L’assureur peut être déchargé, en tout ou en partie, de sa responsabilité envers l’assuré, quand la subrogation ne peut plus, par le fait de l’assuré, s’opérer en faveur de l’assureur.
Par dérogation aux dispositions précédentes, l’assureur n’a aucun recours contre les enfants, descendants, ascendants, alliés en ligne directe, préposés, employés, ouvriers ou domestiques, et généralement toute personne vivant habituellement au foyer de l’assuré, sauf le cas de malveillance commise par une de ces personnes.

Il est de principe que le recours subrogatoire institué au profit de l’assureur qui a payé l’indemnité d’assurance peut être exercé contre toute personne responsable à quelque titre que ce soit.

Il est également de principe que le recours subrogatoire de l’assureur, dans les termes de l’article L121-12 du code des assurances est irrecevable, si la police d’assurance de l’assureur qui a réglé l’indemnité à la victime n’est pas produite, puisque ce faisant, la compagnie qui entend faire jouer le recours subrogatoire ne justifie pas que son paiement était intervenu en vertu d’une garantie régulièrement souscrite, pouvant seule lui conférer la qualification “d’indemnité d’assurance” visée par l’article L.121-12 précité, et, en conséquence, lui donner qualité pour revendique la subrogation légale envisagée à ce texte.

Il est également de principe que l’assureur qui indemnise à titre gracieux son assuré sans y être tenu par les termes du contrat d’assurance ne bénéficie pas du recours subrogatoire au sens de l’article L121-12 du code des assurances.

La subrogation spécifique du droit des assurances n’interdit néanmoins pas à l’assureur de se prévaloir de la subrogation légale de droit commun ou de la subrogation conventionnelle de l’article 1250-1, devenu art. 1346-1 du code civil. En effet, il est de principe que la subrogation légale de l’assureur contre le tiers responsable, instituée par les dispositions de l’art. L. 121-12 précité qui ne sont pas impératives, n’exclut pas l’éventualité d’une subrogation conventionnelle.

Il résulte des articles 1346 et 1346-1 du code civil que la subrogation a lieu par le seul effet de la loi au profit de celui qui, y ayant un intérêt légitime, paie dès lors que son paiement libère envers le créancier celui sur qui doit peser la charge définitive de tout ou partie de la dette.

La subrogation conventionnelle s’opère à l’initiative du créancier lorsque celui-ci, recevant son paiement d’une tierce personne, la subroge dans ses droits contre le débiteur.

Cette subrogation doit être expresse.

Elle doit être consentie en même temps que le paiement, à moins que, dans un acte antérieur, le subrogeant n’ait manifesté la volonté que son cocontractant lui soit subrogé lors du paiement. La concomitance de la subrogation et du paiement peut être prouvée par tous moyens.
Il est de principe que le recours subrogatoire fondé sur la subrogation légale résultant de l’article L121-12 du code des assurances, n’est recevable qui si en l’état de pièces produites le juge de la mise en état, l’assureur rapporte la preuve qu’il a versé l’indemnité d’assurance, cette fin de non-recevoir étant régularisable jusqu’au jour où le juge statue en application de l’article 126 du code de procédure civile.

Et le paiement ne peut être fait que dans les mains de la personne qui a la qualité d’assuré, au sens du contrat d’assurance invoqué, pour faire jouer le recours subrogatoire.

En l’espèce, Madame [X] a été bénéficiaire de certaines prestations versées par la MAIF, au titre de l’indemnisation de son accident de la circulation survenu le 1er décembre 2016, ce qui n’est pas contesté la PACIFICA ayant même pris en charge une part de cette indemnisation au titre d’autres chefs de préjudice que celui de la tierce personne.

Elle sera reçue en son intervention volontaire et il n’y a pas lieu comme le prétend la compagnie PACIFICA, au soutien de ses écritures, pour le tribunal de se déclarer incompétent pour se prononcer sur les demandes formulées par Madame [H] [X], puisque Madame [X] ne forme pas de demande pour elle-même, mais vient au soutien des demandes de la demanderesse, en tant que bénéficiaire d’une indemnisation perçue de la MAIF, cette demande étant dès lors sans objet.

Il convient de rappeler qu’il revient à l’assureur exerçant le recours subrogatoire de produire le contrat d’assurance, au titre duquel il invoque avoir payé.

En effet, en application de l’article 1353 du code civil, c’est à celui qui invoque le contrat d’assurance de le prouver et de prouver son contenu.

Il résulte de l’article L.112-3 du code des assurances que le contrat d’assurance et les informations transmises par l’assureur au souscripteur, mentionnées dans le présent code sont rédigés par écrit, en français, en caractère apparents.

Il est entre les parties établi au moyen de la production des conditions particulières, et d’un courrier de l’assureur attestant que l’assurance était toujours en cours au jour du sinistre.

A l’égard des tiers au contrat d’assurance, victime du sinistre, la preuve du contrat d’assurance peut cependant être rapportée par tous moyens. Et il appartient alors à l’assureur, en versant le contrat au débat, qu’il ne doit pas sa garantie.

Le tiers au contrat peut rapporter la preuve de l’existence du contrat par tous moyens, y compris par présomptions. L’attestation ou le certificat d’assurance a valeur de présomption simple que l’assureur peut détruire.

Dans la relation entre un assureur, son assuré et une autre compagnie contre laquelle il exerce un recours contre son assureur, l’assureur et l’assuré sont les personnes les mieux placées pour produire cet écrit, et c’est à elle qu’il incombe de l’établir à l’égard de l’autre compagnie contre qui est exercé le recours subrogatoire.

La charge et le risque de la preuve en incombe donc à la MAIF.

Les parties ne sauraient substituer à cette exigence de l’écrit une intervention volontaire de l’assuré qui reconnaît qu’elle est assurée et a été indemnisée comme prétendent le faire la compagnie MAIF et Madame [X], ce procédé ne saurait se substituer à l’exigence d’un écrit.

En effet, il ressort clairement des conditions générales produites (p.9) qu’il existe,en matière d’accident corporel, deux types de police : la police individuelle, qui ne couvre que l’assuré, et la version familiale qui couvre sa famille et son conjoint.

Il est constant que ne sont pas produites, à la présente instance, les conditions particulières de ce contrat.

Il en résulte que Madame [X] qui ne dément pas que son mari est le sociétaire assuré,n’est pas en mesure d’établir la qualité d’assurée dont elle se prévaut, alors que la charge lui en incombe, conjointement avec l’assureur qui l’a indemnisée la compagnie MAIF, demanderesse à l’instance.

Et le rapport médico-légal dont Madame [X] a fait l’objet ne saurait davantage pallier cette carence dans la preuve, aors que le risque de la preuve pèse sur Madame [X] et sur la MAIF, s’agissant d’un examen entrant dans le cadre de la loi Badinter comme il est précisé à titre liminaire pièce n° 2 du demandeur, sachant que le rapport d’expertise conclut à la nécessité d’une assistance tierce personne avant la consolidation et non après.

De même,la production d’une attestation d’assurance pour Monsieur et Madame [X] sur la seule année 2016 ne saurait suppléer à cette carence dans l’administration de la preuve, puisqu’elle ne permet pas de préciser les termes de la police d’assurance et ses limites, de sorte que la compagnie demanderesse devra supporter le risque de la preuve qui en découle.

Il ressort d’ailleurs du procès-verbal de transaction conclu avec Madame [X] qui ne saurait suppléer à lui seul à l’absence de production du contrat d’assurance et de ses clauses,que l’indemnisation de la tierce personne dont le défendeur prétend qu’elle n’est pas prévue à la police,n’est pas prévue au procès-verbal de transaction. Et que l’absence de production des conditions particulières empêche de préciser le contenu exact de la police souscrite, alors que la lecture des conditions générales fait ressortir que l’indemnisation de l’assistance tierce personne est assujettie à diverses conditions,et susceptibles d’aménagement par les conditions particulières.

La demande en tant qu’elle est fondée sur la subrogation légale est irrecevable,faute pour la MAIF d’être en mesure de justifier qu’elle a payé l’indemnité d’assurance, dans les limites de la police souscrite et que la prestation d’assurance assistance tierce personne était due au-delà de la date de consolidation.

Madame [X] et la MAIF ne sont pas davantage en mesure de se prévaloir de la subrogation conventionnelle, faute de produire une quittance subrogative pertinente et d’établir la concomitance du paiement avec les paiements, alors que n’est prise en charge que l’assistance tierce personne avant la consolidation, au regard du rapport d’expertise – et non postérieurement.

Il est en effet de principe que non seulement la subrogation doit être expresse mais aussi qu’elle doit être antérieure au paiement.

La quittance n’est pas propre à établir cette concomitance dans la mesure où elle est postérieure de quatre ans à la consolidation, et où il n’est pas précisément établi que les prestations d’assistance tierce personne aient pu être versées plus de 4 ans après leur réalisation aux intervenants.

La quittance invoquée ne saurait faire preuve du paiement, à elle seule, et doit être lue à la lumière du rapport d’expertise, dans la mesure où elle habilite à exercer les droits de l’assuré contre le tiers responsable, et qu’elle est dressée le 3 février 2023, soit nettement après la consolidation, alors que la consolidation est intervenue en octobre 2019, au regard dudit rapport d’expertise.

Par ailleurs, il résulte des factures produites par les demanderesses (pièce n° 7) et de l’attestation de règlement (pièce n° 8) que les paiements ont été facturés directement à l’IMA et réglés directement par elle et non à Madame [X] qui n’est dès lors pas en mesure de subroger son assureur, la MAIF dans ces droits. Ainsi, les paiements dont elle fait état dans cette quittance subrogative ne sauraient concerner l’assistance tierce personne.

Par ailleurs, l’attestation de paiement est elle-même antérieure à la quittance subrogative,de sorte que la concomitance n’est pas caractérisée, le paiement ayant éteint la dette à supposer qu’elle existe.

Il en résulte que la compagnie demanderesse ne saurait se prévaloir de la qualité de subrogée dans les droits de la victime qu’il s’agisse de la subrogation légale ou de la subrogation conventionnelle, de sorte que son action en tant qu’elle est formée sur le fondement des articles L. 121-12 du code des assurances, et 1346-1 du code civil, est irrecevable.

Puisqu’il est constant que la compagnie PACIFICA, assureur du véhicule à l’origine de l’accident de la circulation, a assumé certains postes de préjudices préalablement assumés par la MAIF, et que seule l’indemnisation du poste tierce personne est en cause dans le cadre du présent litige, le présent incident, met définitivement fin à l’instance, les demandes étant toutes rejetées. En effet, les demandes relatives à l’anatocisme qui sont accessoires sont nécessairement, par voie de conséquence, rejetées.

Il convient dès lors de mettre les dépens à la charge de la compagnie demanderesse à l’instance, et de condamner de surcroît la MAIF à verser à la compagnie PACIFICA, 2.000 € au titre des frais irrépétibles, en déboutant les parties du surplus de leur demandes, fondées sur l’article 700 du code de procédure civile, les demandes sur ce fondement formées par la compagnie PACIFICA contre Madame [X] étant rejetées en équité.

PAR CES MOTIFS

Le juge de la mise en état statuant publiquement par voie d’ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort, susceptible d’appel dans les termes de l’article 795 du code de procédure civile,

RECEVONS Madame [X] en son intervention volontaire ;

DECLARONS IRRECEVABLES les demandes formulées par la compagnie MAIF résultant de l’exploit du 28 avril 2023 contre la compagnie PACIFICA pour mettre en œuvre son recours subrogatoire après l’indemnisation du poste assistance tierce personne, faute de justifier de sa qualité à agir (RG 22-10322);

CONDAMNONS la compagnie MAIF à payer à la compagnie PACIFICA, 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETONS les plus amples demandes des parties;

CONDAMNONS la compagnie MAIF aux dépens.

Faite et rendue à Paris le 24 Octobre 2024.

Le Greffier Le Juge de la mise en état
Nadia SHAKI Christine BOILLOT


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