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Un reporter qui fournit des reportages photos à la rémunération desquels il a perçu des honoraires, en qualité de travailleur indépendant, peut toujours établir l’existence d’un lien de subordination vis-à-vis de son donneur d’ordre.
En effet, la qualité de travailleur indépendant induit une présomption de non-salariat qui n’est toutefois pas irréfragable, l’existence d’un contrat de travail pouvant être établie lorsque la personne physique immatriculée au registre du commerce et des sociétés fournit directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ouvrage dans des conditions qui la place dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci.
Pour revendiquer l’existence d’un contrat de travail le liant à un organe de presse, le reporter a justifié avoir exécuté une prestation intellectuelle rémunérée, sous la subordination juridique du directeur de publication. A cette fin, l’intéressé établissait que les sujets de ses reportages photos lui étaient imposés par le journal en fonction d’une actualité qu’il ne choisissait pas. Le fait que ces ordres s’accompagnaient de formules de politesse d’usage (STP, merci) n’a pas eu pour effet de priver de sa force obligatoire le contenu de ces messages. Dès qu’il était en possession de ses instructions, souvent données dans la précipitation car l’actualité était permanente, le reporter se rendait sur le lieu de son sujet, toujours en binôme avec un salarié du journal chargé de rédiger le texte que ses photographies illustraient lors de la parution de l’article. Le reporter n’avait donc aucune latitude pour proposer la couverture d’un événement ne convenant pas à la ligne éditoriale de la publication ou aux souhaits du rédacteur en chef. Par ailleurs, les nombreux déplacements du reporter étaient entièrement pris en charge par le journal. La collaboration du reporter au bon fonctionnement du journal était conséquente puisqu’il adressait en moyenne à son donneur d’ordre une cinquantaine de clichés par mois. Le reporter figurait également sur le tableau de service – plusieurs SMS s’inquiétant sur la réception de ce tableau de service à bonne date – afin que la couverture photographique des événements en fonction de l’actualité soit toujours assurée, ce dont il doit être retenu que le reporter était intégré dans l’organisation du service. Enfin le fait que le reporter avait la possibilité de travailler pour le compte d’une autre publication ne le privait pas du droit de faire valoir l’existence d’un contrat de travail. Ce faisceau d’indices a donc renversé la présomption légale de non-salariat.
Pour rappel, en droit, il y a contrat de travail quand une personne s’engage à travailler pour le compte et sous la direction d’une autre moyennant rémunération. Cette définition fait apparaître trois éléments : i) la prestation de travail, qui peut avoir pour objet les tâches les plus diverses (travaux manuels, intellectuels, artistiques), dans tous les secteurs professionnels, ii) la rémunération, contrepartie de la prestation de travail, peu importe qu’elle soit versée en argent ou en nature, et calculée au temps, aux pièces ou à la commission, iii) la subordination juridique, critère décisif, le lien de subordination étant caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et sanctionner les manquements de son subordonné. Télécharger la décision