Sous-traitance : 5 mai 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 20/06122

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Sous-traitance : 5 mai 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 20/06122
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ARRET

N° 227

CPAM DE ROUBAIX TOURCOING

C/

Société CROCUS STN

GH

COUR D’APPEL D’AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 05 MAI 2022

*************************************************************

N° RG 20/06122 – N° Portalis DBV4-V-B7E-H6DW

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (Pôle Social) EN DATE DU 08 octobre 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

La CPAM DE ROUBAIX TOURCOING, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

2 place Sébastopol

CS 40700

59208 TOURCOING CEDEX

Représentée et plaidant par Mme Stéphanie PELMARD dûment mandatée

ET :

INTIMEE

La Société CROCUS SOUS TRAITANCE NETTOYAGE STN, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

(A.T. : M. [F] [R]

9 bis rue Luis Néel

Synergie Park

59260 LEZENNES

Représentée par Me Nicolas PORTE, avocat au barreau de PARIS substituant Me Emily JUILLARD, avocat au barreau de PARIS

DEBATS :

A l’audience publique du 31 Janvier 2022 devant Mme Graziella HAUDUIN, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 05 Mai 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. Pierre DELATTRE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Graziella HAUDUIN en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Elisabeth WABLE, Président,

Mme Graziella HAUDUIN, Président,

et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 05 Mai 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Graziella HAUDUIN, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

*

* *

DECISION

Vu le jugement en date du 8 octobre 2020 auquel il convient de se référer pour l’exposé des faits, procédure et prétentions initiales des parties par lequel le pôle social du tribunal judiciaire de Lille, statuant sur le recours de la société Crocus STN à l’encontre de la décision de rejet de la CRA de la CPAM de Roubaix Tourcoing de sa contestation de la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l’intégralité des soins et arrêts de travail ayant fait suite à l’accident du travail survenu dont M. [F] [R] a été victime le 2 juin 2016, a, après avoir homologué le rapport d’expertise du médecin expert, M. [T], désigné par jugement avant-dire droit du 12 décembre 2019, dit que les soins et arrêts de travail prescrits suite à l’accident du travail sont imputables à cet accident du travail jusqu’au 15 juillet 2016, fixé au 15 juillet 2016 la date de consolidation, dit que les soins et arrêts à compter du 16 juillet 2016 sont inopposables à la société Crocus STN, invité la CPAM à donner les informations utiles à la CARSAT pour la rectification du taux de cotisations ATMP de la société et enfin mis à la charge de la caisse les dépens comprenant les frais d’expertise à hauteur de 541 euros.

Vu l’appel interjeté le 14 décembre 2020 par la CPAM de Roubaix Tourcoing de cette décision qui lui a été notifiée le 24 novembre précédent.

Vu les conclusions visées par le greffe le 24 août 2021 et soutenues oralement à l’audience du 31 janvier 2022, par lesquelles la CPAM de Roubaix Tourcoing demande d’infirmer en toutes ses dispositions la décision rendue par le tribunal judiciaire de Lille en date du 8 octobre 2020 et de confirmer l’opposabilité à l’égard de l’employeur de l’ensemble des soins et arrêts de travail pris en charge des suites de l’accident du travail du 2 juin 2016 au préjudice de M. [F] [R] et subsidiairement d’ordonner une nouvelle expertise médicale pour déterminer la date à laquelle les arrêts de travail ont une cause étrangère à l’accident du travail.

Vu les conclusions visées par le greffe le 20 janvier 2022 et soutenues oralement à l’audience, par lesquelles la société Crocus STN demande à la cour à titre principal de confirmer le jugement en toutes ses dispositions après constatation de la disproportion de la durée des soins et arrêts prescrits à la suite de l’accident du travail et entérinement du rapport d’expertise, subsidiairement de constater qu’au regard du barème de la Haute Autorité de santé et du rapport du docteur [M] la durée des arrêts prescrits est disproportionnée et qu’il existe un état pathologique antérieur au vu du rapport du docteur [T] et en conséquence de déclarer inopposable à son égard les arrêts de travail prescrits au-delà du 15 juillet 2016.

SUR CE, LA COUR :

M. [F] [R], salarié de la société Crocus STN, a été victime d’un accident survenu le 2 juin 2016, pris en charge par la CPAM de Roubaix Tourcoing au titre de la législation professionnelle par une décision en date du 1er août 2016.

Le pôle social du tribunal de grande instance de Lille, saisi par l’employeur le 23 juillet 2018 d’une contestation sur l’imputabilité à cet accident de la totalité des arrêts de travail, a, par jugement avant dire droit du 12 décembre 2019, ordonné une mesure d’expertise médicale judiciaire confiée à M. [T], médecin.

Ce même tribunal, devenu tribunal judiciaire de Lille, a, par jugement en date du 8 octobre 2020 entériné le rapport d’expertise judiciaire concluant que les soins et arrêts de travail ont été directement causés par l’accident du travail du 2 juin 2016 jusqu’au 15 juillet 2016 inclus et a en conséquence déclaré inopposables à l’employeur les soins et arrêts prescrits au salarié à compter du 16 juillet 2016.

En application des dispositions de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, la présomption d’imputabilité s’applique aux lésions initiales, à leurs complications, à l’état pathologique antérieur aggravé par l’accident du travail, pendant toute la période d’incapacité, précédant la guérison complète ou la consolidation, et postérieurement aux soins destinés à prévenir une aggravation et plus généralement, à toutes les conséquences directes de l’accident du travail.

Il appartient à l’organisme de sécurité sociale qui se prévaut de la présomption d’imputabilité de justifier de la continuité des soins, prestations et arrêts de travail depuis l’accident du travail jusqu’à la date de consolidation ou de guérison.

Pour détruire la présomption d’imputabilité, l’employeur doit rapporter la preuve d’une cause totalement étrangère au travail, laquelle peut notamment résulter de l’existence d’un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte et auxquels se rattacheraient exclusivement les soins et arrêts de travail postérieurs.

Il ressort du rapport de M. [T], médecin expert désigné par le tribunal que celui-ci, après avoir indiqué que les éléments en sa possession ne lui permettaient pas d’établir un lien entre les lésions initiales et les arrêts et soins, a conclu au caractère hautement probable d’un état antérieur non imputable à l’accident, évoluant pour son propre compte et à la nécessité d’une autre mesure expertale.

La nature incertaine de ces conclusions commande, par infirmation du jugement entrepris, de ne pas homologuer le rapport de M. [T].

Ensuite, il résulte des certificats médicaux de prolongation successifs prescrits au bénéfice de M. [R], l’existence d’une continuité d’arrêts de travail et de symptômes pendant toute la durée de l’incapacité de travail et d’une identité du siège des lésions et ce jusqu’à la date de consolidation ou de la guérison, de sorte que la caisse bénéficie de la présomption d’imputabilité à l’accident du travail des soins et arrêts successifs jusqu’à la date de guérison de la victime.

Cette présomption n’est pas détruite par l’employeur, celui-ci se bornant à émettre des doutes sur l’existence d’un lien entre l’accident initial et certains arrêts de travail et ce sur la base de l’analyse de M. [M], médecin, de documents médicaux jugés au demeurant par lui incomplets et du caractère trop long de la durée des arrêts, ainsi que sur sa pièce N°6, soit un document général de la CPAM daté de décembre 2012 sur la tendinopathie de la coiffe des rotateurs proposant des durées de référence après avis de la Haute Autorité de santé. L’existence d’un état antérieur, qui n’est pas contesté, ne permet pas de retenir en l’état celle d’une cause totalement étrangère au travail et la démonstration que les soins et arrêts prescrits se rattachent exclusivement à la pathologie préexistante.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en toutes ses dispositions.

Les soins et arrêts de travail prescrits au bénéfice de M. [F] [R] à compter du 16 juillet 2016 jusqu’au 4 septembre 2017, date de la guérison; seront donc déclarés opposables à la société employeur.

La société Crocus STN, qui succombe totalement, sera condamnée à supporter les dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau :

Déclare opposable à la société Crocus STN l’ensemble des soins et arrêts pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie Roubaix Tourcoing en lien avec l’accident du travail du 2 juin 2016 dont a été victime M. [F] [R] le 2 juin 2016 jusqu’à la date de guérison du 4 septembre 2017 ;

Condamne la société Crocus STN aux dépens de première instance et d’appel ;

Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,

 


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