Sous-traitance : 19 mai 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 20/03767

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Sous-traitance : 19 mai 2022 Cour d’appel de Grenoble RG n° 20/03767
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N° RG 20/03767 – N° Portalis DBVM-V-B7E-KUCU

C1

Minute N°

Copie exécutoire

délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY

la SCP PYRAMIDE AVOCATS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 19 MAI 2022

Appel d’un Jugement (N° RG 2017J213)

rendu par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 22 octobre 2020

suivant déclaration d’appel du 30 Novembre 2020

APPELANTE :

S.A.S. JOSEPH PARIS

SAS au capital de 1 600 000 €, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NANTES sous le n°866 800 550, prise en la personne de son

représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège.

boulevard du Général Koënig BP 64017

44100 NANTES

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant, plaidant par MeYves PHILIP de LABORIE de la SELARL BdL Avocats, avocat au barreau de LYON,

INTIMÉE :

S.A.S. FOC TRANSMISSIONS

SAS au capital de 250.000 €, immatriculée au RCS de

VIENNE sous le n° 316 418 292,représentée par son Président en exercice audit siège.

17-19, rue du 11 novembre

38200 VIENNE

représentée et plaidant par Me Fabrice POSTA de la SCP PYRAMIDE AVOCATS, avocat au barreau de VIENNE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Marie-Pierre FIGUET, Présidente,

Mme Marie-Pascale BLANCHARD, Conseillère,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

Assistés lors des débats de Madame Sarah DJABLI, Greffier placé.

DÉBATS :

A l’audience publique du 26 Janvier 2022

Mme BLANCHARD, conseillère, a été entendue en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour que l’arrêt soit rendu ce jour, après prorogation du délibéré

EXPOSE DU LITIGE :

Dans le cadre d’un marché public portant sur la rénovation du barrage du Liegeot situé sur la Moselle, confiée à un groupement d’entreprises constitué des sociétés Bouygues TP et Joseph Paris, cette dernière, attributaire du lot «vantellerie», a sous traité à la société Foc Transmissions la conception et la réalisation de treuils de man’uvre des clapets équipant les vannes-segments du barrage.

Le 13 novembre 2015, la société Joseph Paris a constaté le dysfonctionnement du treuil situé en rive gauche, à l’occasion de man’uvres de remontée, puis de redescente de la vanne et s’est plainte de la rupture du point fixe de la chaîne de man’uvre situé sur la rive droite.

Une expertise amiable a été diligentée à l’initiative de la compagnie d’assurances de la société Joseph Paris, dont les opérations ont été constatées par huissier de justice.

Un procès-verbal de constatations relatives à l’évaluation des dommages a été établi entre les experts le 14 février 2017.

La société Joseph Paris a signé avec la société Bouygues TP un accord transactionnel en vertu duquel elle l’a indemnisée à concurrence de 50.000 euros des dommages résultant de l’arrêt du chantier.

Ayant vainement réclamé à la société Foc Transmissions une indemnisation de 77.815, 46 euros, la société Joseph Paris l’a faite assigner en paiement par acte d’huissier du 10 novembre 2017.

Par jugement du 22 octobre 2020, le tribunal de commerce de Vienne a :

– condamné la société Foc Transmissions au paiement de la somme de 7.916,46 euros à titre de dommages-intérêts pour livraison et installation d’un moteur électrique défectueux,

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Joseph Paris aux dépens.

Par déclaration au greffe du 30 novembre 2020, la société Joseph Paris a interjeté appel de cette décision.

Prétentions et moyens de la société Joseph Paris :

Au terme de conclusions notifiées le 18 février 2021, la société Joseph Paris demande à la Cour de :

– réformer le jugement dont appel,

– statuant à nouveau,

– dire et juger que la société Foc Transmissions a manqué à son obligation de résultat vis-à-vis de la société Joseph Paris en livrant des moteurs non fonctionnels ayant conduit au sinistre du 13 novembre 2015 dont elle doit supporter les entières conséquences,

– débouter la société Foc Transmissions de l’ensemble de ses moyens, fins et prétentions,

– condamner la société Foc Transmissions à payer à la société Joseph Paris les sommes suivantes :

. au titre des dommages subis : 77.815,46 euros,

. au titre des frais irrépétibles : 5.000 euros,

– condamner la même aux entiers dépens.

La société Joseph Paris fait valoir qu’à l’issue de l’expertise, les causes du sinistre ont été identifiées dans le vice affectant la partie électrique des moteurs fournis par la société Foc Transmissions.

Elle soutient que :

– le dysfonctionnement du moteur du treuil de la rive gauche, causé par un court-circuit, a provoqué une désynchronisation du fonctionnement des deux treuils, une mise en biais de la vanne et une absence de déclenchement par le treuil gauche du capteur de fin de course,

– le treuil de la rive droite a continué à dérouler la chaîne qui a arraché son point d’ancrage,

– le lien de causalité entre les deux événements est établi.

Elle conteste l’affirmation de la société Foc Transmissions selon laquelle les dispositifs de sécurité n’auraient pas été mis en place, alors que tel avait été le cas la veille du sinistre.

Prétentions et moyens de la société Foc Transmissions :

Selon ses conclusions notifiées le 26 février 2021, la société Foc Transmissions entend voir :

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

– dire et juger que le sinistre affectant l’arrachage du point fixe n’est pas imputable à la société Foc Transmissions,

– dire que la société Foc Transmissions n’est responsable que du dysfonctionnement du moteur électrique,

– constater que la société Foc Transmissions a proposé, soit la réparation, soit le changement du moteur dans un délai de cinq jours, à compter de son intervention,

– constater que la société Joseph Paris n’a pas accepté cette offre,

– en conséquence, réduire aux seuls postes ci-dessus mentionnés le préjudice imputable à la société Foc Transmissions, laquelle n’est pas concernée par le dysfonctionnement du moteur, soit la somme totale de 7.916,46 euros,

-donner acte à la Société Foc Transmissions du règlement de la somme de 7.916,46 euros par chèque CARPA en exécution du jugement rendu le 22 octobre 2020,

– condamner la société Joseph Paris au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Joseph Paris aux entiers dépens.

La société Foc Transmissions soutient que :

– sa prestation était limitée à la fourniture de motoréducteurs, mais que leur montage mécanique et électrique relevaient de la société Joseph Paris,

– il appartenait à cette dernière de procéder au raccordement électrique des sécurités de fin de course,

– en sa qualité de concepteur de l’ouvrage, la société Joseph Paris devait prévoir un dispositif de sécurité garantissant le synchronisme des treuils,

– il n’y a pas de lien de causalité entre le bris du moteur constaté et la casse du point fixe de la chaîne, ainsi que l’a conclu son expert.

Elle conteste que les sécurités aient bien été mises en place ainsi que le soutient son adversaire puisque les deux treuils n’étaient pas synchronisés et que le treuil maître n’aurait pu empêcher le fonctionnement du dispositif de sécurité du second treuil.

Elle relève qu’elle et son propre fournisseur ont été empêchés d’intervenir rapidement ainsi qu’ils le proposaient.

Elle considère que sa responsabilité ne peut être engagée qu’au titre de la défaillance du moteur électrique et de son remplacement et que les termes du protocole d’accord régularisé entre les sociétés Joseph Paris et Bouygues TP lui sont inopposables.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 16 décembre 2021.

MOTIFS DE LA DECISION :

Selon les termes du marché de sous-traitance, les travaux confiés à la société Foc Transmission consistaient dans la conception et la réalisation de treuils de man’uvre des clapets équipant les vannes-segments, constitués d’ensembles réducteurs, moteurs freins, châssis, magasins à chaînes, visserie ainsi que l’assemblage avec les composants électriques fournis par la société Joseph Paris.

L’article 4.2.1 du contrat met expressément à la charge du sous-traitant une obligation de résultat au titre du fonctionnement, des caractéristiques, des performances et du rendement des réducteurs.

La société Foc Transmission ne conteste pas que pour la réalisation de l’ensemble réducteur, elle a mis en ‘uvre un moteur fourni par la société EMZ.

Il n’est pas non plus discuté entre les parties que le 13 novembre 2015, le réducteur installé rive gauche a connu des dysfonctionnements causés par la défaillance de son moteur.

Dans sa note technique du 24 octobre 2017, l’expert de la compagnie d’assurances de la société Joseph Paris a indiqué d’une part que l’examen de ce moteur a mis en évidence un court-circuit dans le bobinage du stator endommagé par le perçage du carter lors de la pose de la plaque du constructeur; d’autre part que les disjonctions électriques successives avaient entraîné une désynchronisation des moteurs des treuils rive droite et rive gauche, à l’origine du sinistre.

Le constat technique de l’état du moteur est admis par la société Foc Transmissions qui conteste cependant le lien de causalité entre ce dysfonctionnement et l’arrachage du point fixe de la chaîne de levée.

Compte tenu de l’obligation de résultat qui pèse sur elle quant au fonctionnement de l’installation réalisée par ses soins, il appartient à la société Foc Transmissions de rapporter la preuve que la cause du sinistre survenu à l’occasion du fonctionnement du treuil est soit étrangère au dysfonctionnement du moteur, soit le résultat d’une faute commise par la société Joseph Paris.

Si elle allègue un défaut de mise en place des sécurités de fin de course de la chaîne de relevage par la société Joseph Paris et une erreur de conception de l’ouvrage, elle n’en rapporte aucune preuve, les seules affirmations de son directeur technique dans un courriel du 18 novembre 2015, rapportant des propos d’autres salariés, étant dénuées de valeur probante.

Les éléments techniques débattus entre les parties établissent qu’en l’absence de dysfonctionnement du moteur, le sinistre ne se serait pas produit et à défaut de preuve d’une autre cause, la société Foc Transmissions doit supporter les conséquences de ce dysfonctionnement.

Selon procès verbal du 14 février 2017, les experts de chacune des parties ont procédé contradictoirement à l’évaluation des dommages à hauteur de 69.033, 48 euros se répartissant à hauteur de 37.655,29 euros au titre du dysfonctionnement du moteur et de 31.378,19 euros au titre de la détérioration du magasin à chaîne et incluant l’évaluation du préjudice subi par la société Bouygues TP à hauteur de 41.218, 02 euros.

La société Joseph Paris justifie avoir dû verser, en exécution d’un accord transactionnel, une indemnité de 50.000 euros à la société Bouygues TP en réparation des coûts générés par le sinistre que cette dernière avait initialement évalués à 81.900 euros.

En conséquence, la cour infirmera le jugement et condamnera la société Foc Transmissions à verser à la société Joseph Paris la somme de 77.815,46 euros à titre de dommages et intérêts.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement du tribunal de commerce de Vienne du 22 octobre 2020 sauf en ce qu’il a condamné la société Joseph Paris aux dépens,

statuant à nouveau,

CONDAMNE la société Foc Transmissions à verser à la société Joseph Paris la somme de 77.815,46 euros à titre de dommages-intérêts,

CONDAMNE la société Foc Transmissions à verser à la société Joseph Paris la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Foc Transmissions aux dépens de l’instance d’appel.

SIGNÉ par Mme FIGUET, Présidente et par Mme DJABLI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La GreffièreLa Présidente

 


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