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N° RG 21/03168 – N° Portalis DBVM-V-B7F-K7AC
N° Minute :
C3
Copie exécutoire délivrée
le :
à
la SCP ALPAZUR AVOCATS
la SCP ANSELMETTI – LA ROCCA
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
2ÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 23 MAI 2023
Appel d’un Jugement (N° R.G. 19/00392) rendu par le tribunal judiciaire de GAP en date du 21 juin 2021, suivant déclaration d’appel du 08 Juillet 2021
APPELANTS :
M. [R] [X] [A] [B] [H]
né le 19 Juin 1956 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 4]
Mme [Y] [U] [X] [C]-[H]
née le 26 Novembre 1956 à
de nationalité Française
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentés et plaidant par Me Nicolas WIERZBINSKI de la SCP ALPAZUR AVOCATS, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
INTIM ÉE :
Syndicat des copropriétaires de l’immeuble LES BALCONS DE LA LUYE représenté par son syndic en exercice, MS Syndic société à responsabilité limitée à associé unique, [Adresse 5], représentée par son gérant en exercice domicilié es qualité audit siège prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 10]
représentée et plaidant par Me Marc ANSELMETTI de la SCP ANSELMETTI – LA ROCCA, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
INTERVENANTS VOLONTAIRES
Monsieur [L] [X] [H]
né le 17 mai 1980 à [Localité 12]
de nationalité française, ingénieur des mines
demeurant [Adresse 7]
[Localité 8]
Monsieur [J] [X] [H]
né le 30 novembre 1982 à [Localité 11] (Haut-Rhin),
de nationalité française, ingénieur de la fonction publique,
demeurant [Adresse 1]
[Localité 6]
Monsieur [T] [K] [G] [X] [H]
né le 29 avril 1987 à [Localité 11],
de nationalité française, gérant immobilier,
demeurant [Adresse 3],
[Localité 4],
représentés et plaidant par Me Nicolas WIERZBINSKI de la SCP ALPAZUR AVOCATS, avocat au barreau de HAUTES-ALPES
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Emmanuèle Cardona, présidente
M. Laurent Grava, conseiller,
Mme Anne-Laure Pliskine, conseillère
DÉBATS :
A l’audience publique du 14 mars 2023, Anne-Laure Pliskine, conseillère, qui a fait son rapport, assistée de Caroline Bertolo, greffière, a entendu seule les avocats en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.
Il en a rendu compte à la Cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu à l’audience de ce jour.
EXPOSÉ DU LITIGE
Un ensemble immobilier en copropriété dénommé Les balcons de la Luye est édifié au [Adresse 2].
Cet ensemble est composé :
– Au rez-de-chaussée : un hall d’entrée, 4 garages dont 2 avec caves
– Au rez-de-jardin : 2 appartements de type 4 avec balcon et jardin privatif
– Au niveau 1 et combles : 2 appartements en duplex de type 5 avec balcon
Soit au total 4 logements.
Aux termes d’un acte notarié du 10 décembre 2013, M.[R] [H] et [Y] [C] épouse [H] ont fait l’acquisition des lots n°3 et n°8, soit un garage avec cave et un appartement de type 5 situé au 1er niveau.
Selon procès-verbal de l’assemblée générale du 1er novembre 2017, il avait été voté une mise à jour du règlement intérieur de la copropriété par l’ajout de l’article suivant :
« Tout autre usage que l’habitation est exclu au sein de la copropriété. L’activité de location meublée de courte durée (location à une clientèle de passage de type AIRBNB) est formellement proscrite par la copropriété ».
Les époux [H] n’étaient ni présents, ni représentés lors de cette assemblée générale.
Le 21 février 2019, une autre assemblée générale a eu lieu.
Monsieur [R] [H] et [Y] [C]-[H] ont assigné le syndicat des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye, au visa de la loi du 10 juillet 1965 et du décret du 17 mars 1967, aux fins de :
– prononcer la nullité des résolutions n°8 et 9 adoptées par l’assemblée générale des copropriétaires le 21 février 2019,
– condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye à 1 500,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre exécution provisoire ainsi qu’aux entiers dépens,
-demander l’exonération de leur quote-part dans les dépens, frais et honoraires par application de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965.
Par jugement du 21 juin 2021, le tribunal judiciaire de Gap a :
-constaté que la résolution n°8 adoptée par l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye le 21 février 2019 n’emporte pas modification des conditions d’occupation telles que prévues par le règlement de copropriété du 05 mars 2004 ;
-dit en conséquence que cette résolution n°8 ne requérait pas un vote à l’unanimité des copropriétaires ;
-débouté Monsieur [H] [R] et Madame [H] [Y] de leurs demandes en annulation des résolutions n°8 et 9 adoptées par l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye le 21 février 2019 ;
-débouté Monsieur [H] [R] et Madame [H] [Y] de leurs demandes plus amples et contraires ;
-déclaré irrecevable le syndicat des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye en ses demandes reconventionnelles faute de lien suffisant avec les prétentions originaires ;
-débouté Monsieur [H] [R] et Madame [H] [Y] de leur demande de dispense de contribution aux dépenses communes de frais de procédure ;
-débouté Monsieur [H] [R] et Madame [H] [Y] de leur demande indemnitaire formulée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
-condamné Monsieur [H] [R] et Madame [H] [Y] à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye la somme de 2 000,00 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
-condamné Monsieur [H] [R] et Madame [H] [Y] aux entiers dépens.
Par déclaration en date du 8 juillet 2021, les époux [H] ont interjeté appel du jugement.
[Y] [C]-[H] est décédée le 24 septembre 2021. Ses enfants et son mari en qualité d’ayant droits sont intervenus à l’instance.
Dans leurs conclusions notifiées le 23 septembre 2022, les consorts [H] demandent à la cour de:
Vu la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis,
Vu le décret n°67-223 du 17 mars 1967 pris pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis,
Vu le règlement intérieur et les éléments versés aux débats,
-réformer le jugement entrepris dans les limites de l’appel interjeté,
-constater que les dispositions d’ordre public relatives au statut de la copropriété n’ont pas été respectées,
-juger que le règlement de copropriété n’interdit pas les locations meublées de courte durée,
-juger que la résolution n°8 votée lors de l’assemblée générale du 21 février 2019 vise à modifier le règlement intérieur s’agissant des conditions d’occupation et de jouissance des parties privatives en sorte que le vote de la résolution devait se faire à l’unanimité, et que le vote de cette résolution constitue un abus de majorité,
-constater que les époux [H] ont voté contre cette résolution,
-prononcer la nullité des résolutions n°8 et 9 adoptées par l’assemblée générale des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye le 21 février 2019,
-juger irrecevable et en tous cas mal fondé le syndicat des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye en ses demandes, et l’en débouter,
-juger que le syndicat des copropriétaires Les balcons de la Luye devra cesser toute entrave, de quelque nature que ce soit, à la libre disposition par les Consorts [H] de l’appartement dont ils sont propriétaires au sein de la copropriété, en ce compris toute entrave à la mise en location du bien,
-juger que cette interdiction sera sanctionnée en cas de manquement par une astreinte de 1.000 euros par infraction constatée, laquelle pourra être démontrée par tout moyen,
-condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye à verser aux consorts [H] une somme de 4.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamner le syndicat des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye aux entiers dépens de première instance et d’appel,
-dire que les consorts [H] seront exonérés, en leur qualité de copropriétaire, de leur quote-part dans les dépens, frais et honoraires exposés par le syndicat dans la présente procédure, au titre des charges générales d’administration, conformément aux dispositions de l’article 10-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.
Au soutien de leurs demandes, les consorts [H] énoncent que la modification du règlement de copropriété du 21 février 2019, qui a été décidée à la majorité relative par la résolution n°8, peut être analysée comme un abus de majorité.
Ils affirment que le seul fait qu’il y ait des allers et venues de locataires, ou le stationnement de véhicules de locataires, ne peut constituer une « nuisance », qu’il s’agit d’inconvénients normaux à l’habitation.
Ils énoncent que le règlement de copropriété n’interdit pas les locations de courte durée et que la seule interdiction édictée par ce règlement concerne la transformation des appartements en chambres meublées pour être louées à des personnes distinctes.
Ils font valoir les irrégularités de l’assemblée générale du 21 février 2019 et la nullité de la résolution n°8, au motif que la décision de modification des modalités de jouissance des parties privatives, ou de leur destination, ne peut être prise qu’à l’unanimité des voix de tous les copropriétaires.
Ils font état d’entraves occasionnées lors de la location de leur bien.
Ils déclarent que les demandes reconventionnelles du syndicat des copropriétaires sont irrecevables dès lors qu’elles ne se rattachent pas aux prétentions originaires par un lien suffisant, qu’elles sont de surcroît infondées en l’absence de nuisances.
Ils indiquent que l’immeuble ne présente pas les caractéristiques d’un immeuble de haut standing et réfutent effectuer des prestations hôtelières ou para-hôtelières, soulignant que l’appartement n’est pas loué toute l’année.
Dans ses conclusions notifiées le 15 septembre 2022, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye demande à la cour de:
-constater l’intervention volontaire, en qualité d’ayant-droit de feue Madame [Y] [C]-[H], de Monsieur [L] [H], Monsieur [J] [H] et Monsieur [T] [H] ;
Sur le fond :
Sur la demande de nullité du procès-verbal d’assemblée générale et notamment des résolutions n°8 et 9 :
-confirmer le jugement en ce qu’il a débouté les consorts [H] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
-le confirmer en ce qu’il les a condamnés à verser une somme de 2 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Sur la demande reconventionnelle :
-accueillir le syndicat des copropriétaires en son appel incident, s’agissant de la déclaration d’irrecevabilité de sa demande reconventionnelle ;
Et statuant à nouveau :
Reconventionnellement :
Vu le règlement de copropriété du 5 mars 2004 et le procès-verbal d’assemblée générale du 21 février 2019,
-dire et juger les demandes reconventionnelles recevables et bien fondées ;
Et en conséquence :
-faire interdiction sous astreinte de 1 000,00 euros par infraction constatée à Monsieur [R] [H] ainsi qu’aux ayant-droit de feue Madame [Y] [C]-[H], décédée, à savoir Monsieur [L] [H], Monsieur [J] [H] et Monsieur [T] [H], de procéder à la mise à disposition de leur lot se trouvant dans cette copropriété dans le cadre de contrats de séjour court, et d’une manière générale toute mise à disposition en violation du règlement de copropriété quel qu’en soit le moyen ;
-ordonner, sous astreinte de 100,00 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, à Monsieur [R] [H] ainsi qu’aux ayant-droit de feue Madame [Y] [C]-[H], décédée, à savoir Monsieur [L] [H], Monsieur [J] [H] et Monsieur [T] [H], à leurs frais au rebouchage des trous laissés en façade après le retrait de leur première boîte à clefs installée ;
-leur ordonner sous la même condition d’astreinte, de retirer toute boîte à clefs se trouvant dans la copropriété, que ce soit sur leur porte ou sur la porte commune de la copropriété ;
En tout état de cause,
-condamner solidairement Monsieur [R] [H], Monsieur [L] [H], Monsieur [J] [H] et Monsieur [T] [H], à verser une somme de 3 000,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles devant la Cour ;
-les condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Le syndicat des copropriétaires indique qu’il résulte du règlement de copropriété tel qu’il a été rédigé à l’origine, bien avant l’assemblée générale du 21 février 2019, que l’occupation des appartements doit être une occupation bourgeoise, que cette définition exclut nécessairement l’usage commercial des lots d’habitations.
Il fait état des troubles générés par les locataires qui sont en vacances et adoptent un comportement bruyant ce qui l’a conduit à convoquer une assemblée générale de la copropriété pour le 21 février 2019 au terme de laquelle il a été voté une précision quant à l’usage des appartements dans la copropriété, de sorte qu’il est désormais précisé que toute occupation temporaire et commerciale est interdite.
S’agissant de la résolution n°8, il indique que la décision n’est pas contradictoire avec le règlement de copropriété en ce qu’il interdit depuis 2004 précisément une activité commerciale à savoir l’occupation hôtelière qui résulte de la mise à disposition par les époux [H] de leur bien dans le cadre de contrat AIR BNB, qu’elle n’a donc créé aucune interdiction nouvelle et en aucun cas ne modifie le règlement intérieur s’agissant des conditions d’occupation et de jouissance des parties privatives.
Il souligne que l’année 2019 totalise 233 nuitées louées, 180 nuits pour l’année 2020, qui a connu plusieurs mois de confinement, que les années 2021 et 2022 ont également fait l’objet de nombreuses locations, générant de graves nuisances pour les occupants permanents de l’immeuble.
Il énonce que la résolution n°9 a pour effet de mettre à la charge des époux [H] le rebouchage des trous percés sur les murs des parties communes pour installer leur boite à clefs.
Il allègue qu’en déclarant les demandes reconventionnelles irrecevables, le tribunal a fait une mauvaise application des dispositions de l’article 70 du code de procédure civile, que les demandes reconventionnelles sont directement liées à la demande initiale puisque la demande initiale d’annulation d’une résolution du procès-verbal d’assemblée générale par les époux [H] concerne spécifiquement l’utilisation de leur lot contraire au règlement de copropriété.
La clôture a été prononcée le 28 septembre 2022.
MOTIFS
Sur la demande de nullité de la résolution n° 8
Selon les dispositions de l’article 26 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, dans sa rédaction applicable lors de l’assemblée litigieuse, sont prises à la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix les décisions concernant :
a) Les actes d’acquisition immobilière et les actes de disposition autres que ceux visés à l’article 25 d ;
b) La modification, ou éventuellement l’établissement, du règlement de copropriété dans la mesure où il concerne la jouissance, l’usage et l’administration des parties communes ;
c) Les modalités d’ouverture des portes d’accès aux immeubles. En cas de fermeture totale de l’immeuble, celle-ci doit être compatible avec l’exercice d’une activité autorisée par le règlement de copropriété ;
d) La suppression du poste de concierge ou de gardien et l’aliénation du logement affecté au concierge ou au gardien lorsqu’il appartient au syndicat. Les deux questions sont inscrites à l’ordre du jour de la même assemblée générale.
Lorsqu’en vertu d’une clause du règlement de copropriété la suppression du service de conciergerie porte atteinte à la destination de l’immeuble ou aux modalités de jouissance des parties privatives, la suppression du poste de concierge ou de gardien et l’aliénation du logement affecté au concierge ou au gardien lorsqu’il appartient au syndicat ne peuvent être décidées qu’à l’unanimité.
L’assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu’elles résultent du règlement de copropriété.
Elle ne peut, sauf à l’unanimité des voix de tous les copropriétaires, décider l’aliénation des parties communes dont la conservation est nécessaire au respect de la destination de l’immeuble.
Aux termes de l’article 9 alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965, chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l’immeuble.
Il ressort de la lecture du règlement de copropriété du 5 mars 2004 les éléments suivants :
La rubrique «condition d’usage de l’immeuble, destination de 1’immeuble » précise que « l’immeuble est destiné à l ‘usage d ‘habitation. L’exercice de profession libérale est toléré sous les conditions énoncées ci-après au paragraphe usage des parties privatives ».
Le paragraphe « usage des parties privatives » indique :
«Principes :
Chacun des copropriétaires aura le droit de jouir comme bon lui semble des parties privatives comprises dans son lot, à la condition de ne pas nuire aux droits des autres copropriétaires et de ne rien faire qui puisse compromettre la solidité, la sécurité ou la tranquillité de l ‘immeuble ni de porter atteinte à sa destination.
Occupation :
Les appartements ne pourront être occupés que bourgeoisement; l’exercice de professions libérales est toutefois toléré dans les appartements à condition de ne pas nuire à la bonne tenue et à la tranquillité de l’immeuble ; mais il est interdit d’y installer des bureaux commerciaux ou administratifs.
Locations :
Les copropriétaires pourront louer leurs appartements comme bon leur semblera, à la condition que les locataires soient de bonne vie et m’urs et qu’ils respectent les prescriptions du présent règlement ainsi que la destination de l ‘immeuble.
Les baux et engagements de location devront imposer aux locataires l’obligation de se conformer aux prescriptions du présent règlement.
En tout cas, les copropriétaires resteront personnellement garants et responsables de l’exécution de cette obligation.
Lorsqu’un bail ou un engagement de location aura été consenti, le copropriétaire devra, dans les quinze jours de l ‘entrée en jouissance du locataire, en aviser le syndic par lettre recommandée.
La transformation des appartements en chambres meublées pour être louées à des personnes distinctes est interdite, mais les locations en meublé, par appartement entier, sont autorisées ».
En droit, la clause d’habitation bourgeoise se dé’nit comme l’obligation pour chaque propriétaire ou son locataire, de respecter le caractère bourgeois de l’immeuble, c’est-à-dire sa vocation à être un immeuble d’habitation. Dès lors, les activités commerciales, artisanales et industrielles sont prohibées au sein de l’immeuble (Civ. 3eme, l4 octobre 1964).
Les meublés de tourisme sont pour leur part définis par l’article D.324-1 du code du tourisme comme « des villas, appartements, ou studios meublés, à l’usage exclusif du locataire, offerts en location à une clientèle de passage qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, à la semaine ou au mois, et qui n’y élit pas domicile ».
En l’espèce, la preuve n’est pas rapportée que la location est accompagnée de prestations qui revêtent le caractère d’un service para hôtelier, ce qui permettrait de qualifier l’activité de commerciale.
En revanche, il résulte du courrier adressé par la mairie de [Localité 10] le 22 juin 2020 que le logement litigieux a fait l’objet d’une déclaration en mairie en qualité de meublé de tourisme en application de l’article L.324-4-1 du code de tourisme, or la mairie a précisé que cette déclaration avait été établie par M.[T] [H], agissant en qualité de professionnel. Le terme de professionnel sous-entend nécessairement que cette activité est exercée de manière régulière à but lucratif.
Cette notion de professionnel est également attestée par les annonces proposées par M.[T] [H], qui figure en qualité de gérant immobilier/professionnel sur l’annonce Abritel (pièce 24 du syndicat des copropriétaires) et qui indique disposer d’autres adresses (pièce 29 du syndicat des copropriétaires).
En outre, il convient de relever que la multiplicité et la rotation élevée des occupants contrevient à l’exigence de stabilité et de quiétude propre à l’occupation bourgeoise de l’immeuble fixée par le règlement de copropriété, étant en outre observé que les passages des différents locataires conduisent à avoir des parties communes très sales, ainsi qu’une multitude de véhicules en stationnement sur le parking, ainsi qu’en attestent les photographies versées aux débats, dont le nombre n’est pas compatible avec la taille de l’immeuble, composé de seulement quatre logements.
En conséquence, il est établi que la location de cet appartement constitue une activité commerciale qui est incompatible avec l’occupation bourgeoise visée dans le règlement de copropriété.
La résolution n° 8 relative à l’interdiction d’occupations contraires au règlement de copropriété dans les logements de la résidence » adoptée à la majorité des voix des membres composant le syndicat des copropriétaires représentant au moins les 2/3 des tantièmes, était ainsi rédigée :
« Les copropriétaires ont constaté des activités hôtelières dans un logement de la résidence.
Cette activité va à l’encontre de la clause d’occupation bourgeoise inscrite dans le règlement de copropriété.
L’assemblée générale après avoir pris connaissance du règlement de copropriété, pris connaissance de l’avis du syndic en place et après avoir délibéré décide d’interdire les occupations contraires au règlement de copropriété, dont les activités hôtelières.
En cas de non-respect, le syndic par 1’intermédiaire de Maître [E] est autorisé par l’assemblée générale à agir en justice au nom du syndicat des copropriétaires à l ‘encontre d’un copropriétaire qui ne respecterait pas les clauses du règlement de copropriété. Les frais de procédure, d’avocat, d ‘honoraires particuliers de la part du syndic seront dans un premier temps à la charge du syndicat des copropriétaires […] ».
Cette résolution est mal rédigée puisqu’elle emploie le verbe «décide» mais pour autant, et contrairement aux allégations des consorts [H], il n’a pas été prévu de modification du règlement de copropriété, et il n’y avait donc pas lieu de joindre à la convocation un projet de modification.
En réalité, cette résolution consiste davantage en un rappel des dispositions du règlement de copropriété, lequel n’évoquait pas la questions des locations de type Airbnb. Il n’y avait donc pas lieu d’exiger un vote à l’unanimité, faute de modification des modalités de jouissance des parties privatives.
Les consorts [H] évoquent ensuite un abus de majorité.
Il peut y avoir abus de majorité en cas de décision contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires, ou d’une décision adoptée dans le but de favoriser les intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires.
L’abus de majorité est alors caractérisé en présence de deux conditions cumulatives :
-une résolution d’assemblée générale qui doit être contraire à l’intérêt de la société,
-une résolution constitutive d’une rupture d’égalité entre les associés (Cass 3e civ, 9 juin 2016, n°15-17.529).
En l’espèce, le rappel du règlement de copropriété n’apparaît pas contraire à l’intérêt collectif des copropriétaires puisqu’il est manifeste que cette location s’accompagne d’une dégradation de l’état de l’immeuble et de nuisances, notamment en termes de stationnement. L’intérêt personnel des copropriétaires majoritaires va aussi dans le sens de l’intérêt collectif de la coproprité. Dès lors, cette résolution ne saurait être constitutive d’une rupture d’égalité, l’abus de majorité n’est pas démontré.
Sur la demande de nullité de la résolution n°9
Lors de l’assemblée générale du 21 février 2019, il a été voté la résolution suivante :
« Il est demandé par certains copropriétaires de procéder au rebouchage des trous situés au niveau de la porte d’entrée du logement de M/Mme [H] situé au 2eétage.
Il est demandé que ces travaux soient effectués aux frais de M/Mme [H] qui avait installé précédemment une boîte à clé à cet endroit.
L’assemblée générale après délibéré, décide de procéder à ces travaux aux frais de M/Mme [H], copropriétaires.
Maître [O] demande qu’une déclaration soit faite auprès de l’assurance collective.
Maître [O] informe l’assemblée générale qu’une plainte a été déposée auprès du commissariat de [Localité 10] pour vol avec destruction ou dégradation contre X. Il lui paraît donc nécessaire d’attendre l’intervention du service enquêteur avant de faire reboucher les trous.
Vote pour : 3 copropriétaires totalisant 741/1000 tantièmes ([F] ‘ [S])
Vote contre : 1 copropriétaire totalisant 259/1000 tantièmes ([H]).
La résolution est adoptée à la majorité des voix des membres composant le syndicat des copropriétaires représentant au moins les 2/3 des tantièmes ».
Les consorts [H] énoncent que le boîtier devait leur servir à eux et aux membres de leur famille et amis venant sur place, toutefois, s’il s’agissait d’accueil de proches, ils auraient été présents et n’avaient nul besoin de ce boîtier, utilisé justement pour permettre à des personnes de prendre possession des lieux lorsque le propriétaire n’est pas là.
En tout état de cause, dès lors que l’installation de ce boîtier avait un impact même minime sur les parties communes, il aurait dû faire l’objet d’une autorisation préalable de l’assemblée. Le fait que ledit boîtier ait été volé, ce vol s’accompagnant de dégradations sur la porte n’empêche pas qu’il n’aurait pas dû être installé.
Quant à l’article 434-4 du code pénal, il est inapplicable au cas d’espèce, sachant que la plainte a été déposée le 16 janvier 2019, et que si les auteurs des faits avaient été identifiés, les consorts [H] en auraient déjà été informés depuis longtemps.
C’est donc à juste titre que l’assemblée générale a voté que les travaux seraient effectués aux frais des époux [H], aucun élément ne justifie d’en prononcer l’annulation.
Sur les demandes reconventionnelles
Aux termes de l’article 64 du code de procédure civile, constitue une demande reconventionnelle la demande par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire.
Selon l’article 70, les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.
Toutefois, la demande en compensation est recevable même en l’absence d’un tel lien, sauf au juge à la disjoindre si elle risque de retarder à l’excès le jugement sur le tout.
L’existence d’un lien suffisant relève de l’appréciation souveraine du juge qui doit statuer dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice.
En l’espèce, compte tenu de ce qui précède, la demande formée par le syndicat de cesser toute location de type Airbnb présente un lien suffisant avec les modalités de jouissance des parties privatives.
Dès lors que le règlement de copropriété interdit toute activité commerciale, il sera fait droit à la demande du syndicat des copropriétaires de la Luye tendant à l’interdiction faite aux consorts [H] de procéder à la mise à disposition de leur lot se trouvant dans cette copropriété dans le cadre de contrats de séjour court. Une astreinte sera ordonnée, à hauteur de 200 euros par jour, afin d’assurer l’effectivité de cette décision.
Pour ces mêmes motifs, il sera fait droit aux demandes du syndicat des copropriétaires tendant à condamner les consorts [H] à procéder au rebouchage des trous laissés en façade après le retrait de leur première boîte à clefs installée et de retirer toute boîte à clefs se trouvant dans la copropriété, que ce soit sur leur porte ou sur la porte commune de la copropriété, sous astreinte de 100 euros par jour dans un délai de un mois à compter de la signification du présent arrêt et pour une durée de trois mois.
Les consorts [H] qui succombent à l’instance seront condamnés aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Infirme le jugement déféré en ce qu’il a déclaré irrecevable le syndicat des copropriétaires de l’immeuble Les balcons de la Luye en ses demandes reconventionnelles faute de lien suffisant avec les prétentions originaires ;
et statuant de nouveau ;
Dit que la demande reconventionnelle est recevable ;
Fait interdiction aux consorts [H], de procéder à la mise à disposition de leur lot se trouvant dans cette copropriété dans le cadre de contrats de séjour court, et ce sous astreinte de 200 euros par jour par infraction constatée ;
Condamne les consorts [H] à procéder à leurs frais au rebouchage des trous laissés en façade après le retrait de leur première boîte à clefs installée et à retirer toute boîte à clefs se trouvant dans la copropriété, que ce soit sur leur porte ou sur la porte commune de la copropriété, et ce sous astreinte de 100 euros par jour dans un délai de un mois à compter de la signification du présent arrêt et pour une durée de trois mois ;
Confirme le jugement déféré pour le surplus ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Condamne les consorts [H] à payer au syndicat des copropriétaires de La Luye la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
Condamne les consorts [H] aux dépens d’appel.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Arrêt signé par Mme Emmanuèle Cardona, Présidente de la deuxième chambre civile et par la Greffière,Caroline Bertolo, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE