Sous-location : 22 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05114

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Sous-location : 22 novembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/05114
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 4

ARRÊT DU 22 NOVEMBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/05114 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBU6O

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 janvier 2020 – Tribunal de proximité de PARIS – RG n° 11-19-004946

APPELANT

Monsieur [I] [X]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Harold HERMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

assisté de Me François VOIRON, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

INTIMÉ

Monsieur [F] [V]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté et assisté de Me Armelle GRANDPEY de l’AARPI JAD & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0673

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Michel CHALACHIN, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Michel CHALACHIN, Président de chambre

Mme Marie MONGIN, Conseiller

M. François BOUYX, Conseiller

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M. Michel CHALACHIN, Président et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 29 mai 2015 à effet du 10 août 2015, M. [I] [X] a donné à bail à M. [F] [V] un logement situé [Adresse 2].

Le preneur a donné congé au bailleur par lettre du 4 septembre 2018 puis a quitté les lieux le 8 octobre 2018.

Peu avant la date de ce départ, le bailleur avait fait constater par huissier la publication d’une annonce sur le site de location saisonnière Airbnb correspondant selon lui au bien loué.

Par acte d’huissier du 26 mars 2019, M. [X] a fait assigner M. [V] devant le tribunal d’instance de Paris afin d’obtenir la communication de documents permettant de déterminer le nombre de sous-locations opérées et le montant des sommes perçues par son locataire et obtenir le paiement des fruits civils indûment perçus par celui-ci ; à titre reconventionnel, M. [V] a demandé la restitution du solde du dépôt de garantie.

Par jugement du 23 janvier 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris a :

– débouté M. [X] de l’ensemble de ses demandes,

– débouté M. [V] de sa demande reconventionnelle,

– condamné M. [X] à payer la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [X] aux dépens,

– dit n’y avoir lieu au prononcé de l’exécution provisoire du jugement.

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 10 mars 2020, M. [X] a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions notifiées le 23 novembre 2020, l’appelant demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a débouté de ses demandes,

– statuant à nouveau, condamner M. [V] à lui restituer l’intégralité des fruits indûment perçus résultant de la sous-location illégale de l’appartement en cause, dont le montant aura été précisé à la suite de la production des documents sollicités auprès du conseiller de la mise en état,

– à défaut de production desdits documents, le condamner au paiement de la somme de 91 000 euros au titre des fruits indûment perçus par lui résultant de la sous-location illégale de l’appartement en cause,

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [V] de ses demandes reconventionnelles,

– en tout état de cause, condamner M. [V] au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première instance (comprenant le coût du constat d’huissier) et d’appel.

Par dernières conclusions notifiées le 9 septembre 2021, M. [V] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. [X] de ses demandes,

– le réformer en ce qu’il l’a débouté de sa demande reconventionnelle,

– statuant à nouveau, condamner M. [X] à lui restituer le solde du dépôt de garantie d’un montant de 2 599,92 euros majoré de 10 % pour chaque période mensuelle commencée en retard à compter du 8 novembre 2018,

– condamner l’appelant au paiement d’une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d’autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

Par ordonnance du 2 février 2021, le conseiller de la mise en état a rejeté la demande de M. [X] visant à se faire communiquer le relevé du compte Airbnb de M. [V].

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 septembre 2022.

MOTIFS

Sur la demande en remboursement des fruits civils

M. [V] nie avoir pratiqué des sous-locations du bien appartenant à M. [X] via le site internet Airbnb.

L’appelant soutient que plusieurs éléments de fait tendraient à prouver que l’annonce publiée sur ce site sous le titre ‘Elegant & top located Louvre Notre Dame Marais’ décrite dans le procès-verbal de constat d’huissier du 25 septembre 2018 correspond bien à l’appartement litigieux :

– M. [V] avait demandé à M. [X], par courriel du 18 janvier 2018, l’autorisation de sous-louer l’appartement à des touristes certaines fins de semaine afin de couvrir une partie de son loyer (demande à laquelle M. [X] avait opposé un refus par courriel du 23 janvier suivant) ;

– par courriels des 28 septembre 2018 et 11 mars 2020, la Mairie de [Localité 4] a confirmé que M. [V] avait déposé une déclaration de location en meublé de tourisme en janvier 2018 pour l’appartement dont il était locataire ;

– l’annonce était publiée au nom de ‘[L] & [S]’, [L] étant le diminutif de [F] et [S] le prénom de sa compagne ;

– la photographie du loueur utilisée sur l’annonce correspondrait aux photographies utilisées par M. [V] sur des réseaux sociaux ;

– la description de l’appartement apparaissant dans l’annonce correspondrait en tous points à celle de l’appartement qui était loué par M. [V] ;

– ce dernier ne disposant pas d’autres biens sur [Localité 4], cette annonce correspondrait nécessairement à l’appartement litigieux.

Mais le simple fait que l’intimé ait demandé à son bailleur et à la Mairie de [Localité 4] l’autorisation de sous-louer l’appartement ne suffit pas à démontrer que ces sous-locations aient bien eu lieu.

Quant au constat dressé par Me [N], huissier de justice, le 25 septembre 2018, il ne démontre pas avec certitude que le bien décrit dans l’annonce relevée sur le site Airbnb correspondrait à l’appartement de M. [X], et ce pour les raisons suivantes :

– la description de l’appartement est rédigée en anglais, n’a pas fait l’objet d’une traduction par un traducteur assermenté, et est trop imprécise pour permettre d’identifier de manière certaine l’appartement de l’appelant, logement dont l’adresse exacte ne figure pas sur l’annonce ;

– la seule photographie figurant dans l’annonce est une vue de la place du Châtelet, dont rien n’indique qu’elle aurait été prise depuis une fenêtre de l’appartement litigieux ;

– la photographie du loueur figurant dans l’annonce sous le pseudonyme ‘[L] et [S]’ ne permet pas d’affirmer avec certitude qu’il s’agit de M. [V], tel qu’il apparaît sur les photographies de ses profils ‘Facebook’ et ‘Linkedin’ ;

– rien ne permet d’affirmer que le pseudonyme ‘[L] et [S]’ correspondrait à l’intimé, le nom et le prénom de sa compagne ne figurant d’ailleurs pas dans le bail ;

– aucun des commentaires de voyageurs ayant fait l’objet d’une traduction (sans précision quant à l’auteur de ces traductions) ne peut être rattaché avec certitude au bien appartenant à M. [X], et ce d’autant que certains commentaires datent de 2011, et sont donc antérieurs à la signature du bail.

Pour tenter de pallier les carences du procès-verbal d’huissier, M. [X] a lui-même pris des photographies de l’intérieur de son logement pour les comparer à des photographies qui, selon lui, proviendraient d’une annonce figurant sur le site Airbnb ; mais rien ne prouve que ces dernières figuraient bien sur une annonce publiée par M. [V], puisqu’elle n’ont pas été authentifiées par un huissier de justice ; il est d’ailleurs surprenant qu’aucune de ces photographies n’apparaissent sur l’annonce relevée par Me [N] dans son constat du 25 septembre 2018.

Enfin, alors que, selon les calculs effectués par M. [X], les sous-locations auraient débuté en décembre 2016 et auraient duré 51 semaines, il est surprenant que l’appelant n’ait recueilli aucun témoignage de voisins ayant constaté l’utilisation fréquente de son bien comme meublé touristique et ait attendu le congé donné par son locataire le 4 septembre 2018 pour faire constater par huissier l’existence d’une annonce sur le site Airbnb qu’il attribuait à M. [V].

Au vu de ces éléments, M. [X] ne rapporte pas la preuve de la réalité des sous-locations qu’il invoque.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a débouté l’appelant de ce chef de demande.

Sur la restitution du dépôt de garantie

M. [X] a déduit la somme de 2 599,92 euros du dépôt de garantie avant de rembourser le solde à M. [V] par virement du 9 décembre 2018.

L’état des lieux de sortie a été réalisé le 8 octobre 2018 par la société Expertiz en présence de M. [V] qui avait pris soin de se faire accompagner d’un huissier de justice.

Ce document révèle les désordres suivants :

– dans l’entrée : parquet rayé, vitrification dégradée, fissures sur les murs, trous mal rebouchés avec chevilles ;

– dans la cuisine : deux trous de chevilles mal rebouchés, mitigeur descellé avec fuite, meuble sous évier gonflé, plaque de cuisson rayée, table amovible bois gonflé ;

– dans le w-c : craquelures dans le w-c, abattant gonflé ;

– dans le séjour : parquet rayé, vitrification dégradée, store déchiré, volet ne fermant pas ;

– dans la salle à manger : vitrification du parquet dégradée, dégât des eaux au plafond, peinture écaillée, tiroirs du placard coincés, éclats sur le placard ;

– dans le bureau 1 : lames de parquet disjointes, rayures, vitrification usée ;

– dans la chambre 2 : dégât des eaux côté salle de bains ;

– dans la salle de bains 2 : poignée extérieure absente ;

– dans la salle de bains 2 : un trou de cheville mal rebouché, craquelures au plafond.

Le fait que l’intimé ait refusé de signer l’état des lieux établi par la société Expertiz ne suffit pas à décrédibiliser ce document, M. [V], qui était présent, ayant eu la possibilité de faire noter par cette société toute observation relative aux désordres constatés, notamment concernant les dégâts des eaux.

Au contraire, le procès-verbal de constat dressé au même moment par Me [T], huissier mandaté par M. [V], vient corroborer certains de ces désordres (griffures du parquet et deux trous chevillés dans l’entrée, fuite au niveau du mitigeur de la cuisine, boursouflures sur un mur de la chambre 2).

Dans la mesure où aucune des deux parties ne produit l’état des lieux qui avait été établi à l’arrivée de M. [V] en août 2015, ce dernier est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives.

Or l’état des lieux de sortie établi par la société Expertiz décrit des désordres imputables au locataire sortant puisqu’il était censé avoir pris les lieux en bon état ; de plus, M. [V] ne fournit aucune explication sur l’origine des dégâts des eaux constatés par cette société dans la salle à manger et la chambre 2.

M. [X] justifie avoir fait réaliser des travaux de peinture permettant de remédier à ces dégâts puisque, même si les deux factures produites datent du 31 juillet 2019, elles sont conformes aux devis qui avaient été établis le 23 octobre 2018, soit juste après le départ du locataire.

Au vu de ces documents, M. [X] justifie avoir fait réaliser ces travaux de peinture pour un montant total de 2 145 euros.

Il produit également la facture d’achat d’un mitigeur pour la somme de 239 euros.

Compte tenu des autres dégâts constatés par la société Expertiz, la somme de 2 599,92 euros retenue par le bailleur sur le dépôt de garanti apparaît justifiée au vu du chiffrage qu’il a réalisé.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a débouté l’intimé de sa demande en restitution du solde du dépôt de garantie.

Sur les demandes accessoires

L’appelant, qui succombe en ses demandes, doit être condamné aux dépens d’appel et débouté de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

L’intimé, qui succombe également en sa demande reconventionnelle, doit être débouté de sa demande fondée sur ce texte.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant :

Déboute les parties de toutes leurs demandes formées devant la cour,

Condamne M. [X] aux dépens d’appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président

 


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