Sous-location : 12 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/18214

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Sous-location : 12 mai 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 21/18214
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Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 2

ARRET DU 12 MAI 2022

(n° , 2 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/18214 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CEQIH

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 04 Octobre 2021 -Président du TJ de PARIS – RG n° 19/53477

APPELANTE

LA VILLE DE PARIS, prise en la personne de Madame la Maire de PARIS, Mme [N] [T], domiciliée en cette qualité audit siège

Hôtel de Ville

75004 PARIS

Représentée et assistée par Me Fabienne DELECROIX de l’ASSOCIATION DELECROIX GUBLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R229

INTIMEE

Mme [P] [K]

27 rue Saint Prix

95320 SAINT LEU LA FORET

Représentée par Me Cécile VILLIE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0280

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 mars 2022, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre, et Michèle CHOPIN, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller chargé du rapport,

Michèle CHOPIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [K] est propriétaire d’un local sis au 6ème étage de l’immeuble du 16 rue Royer-Collard à Paris 5ème. La Ville de Paris a opéré un contrôle relatif à l’occupation des locaux d’habitation en date du 21 septembre 2018, par lequel elle a constaté que le local était ouvert à la location de courte durée.

Le 20 novembre 2018, un agent assermenté de la Ville de Paris a dressé un constat d’infraction à la réglementation du changement d’usage des locaux d’habitation.

Par acte du 26 février 2019, la Ville de Paris a fait assigner Mme [K] devant le président du tribunal judiciaire de Paris statuant en la forme des référés aux fins de, notamment, la condamner au versement d’une amende civile d’un montant de 50.000 euros pour avoir enfreint les dispositions de l’article L.631-7 du code de la construction et de l’habitation, concernant l’appartement situé 16 ure Royer-Collard à Paris 5ème.

Par ordonnance du 23 mai 2019, il a été sursis à statuer dans l’attente d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne sur renvoi préjudiciel de la Cour de cassation quant à la compatibilité de la réglementation nationale prévue par l’article L. 613-7 du code de la construction et de l’habitation à la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006.

La Cour de justice de l’Union européenne a statué, par arrêt du 22 septembre 2020, considérant la réglementation nationale conforme aux dispositions de la directive.

Par cinq arrêts en date du 18 février 2021, la Cour de cassation a tiré les conséquences de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, en jugeant notamment que la réglementation locale de la Ville de Paris sur le changement d’usage était conforme à la réglementation européenne.

L’affaire a été rétablie à l’audience du 30 août 2021.

La Ville de Paris a maintenu ses demandes de condamnation, Mme [K] soutenant en défense qu’elle a bien procédé à la déclaration de location de meublé de tourisme auprès de la mairie de Paris et que le constat d’infraction est lacunaire.

Par ordonnance contradictoire rendue en la forme des référés du 4 octobre 2021, le magistrat saisi a :

– débouté la Ville de Paris de sa demande de condamnation de Mme [K] à une amende civile sur le fondement des dispositions de l’article L.651-2 du code de la construction et de l’habitation ;

– débouté la Ville de Paris de sa demande visant à voir ordonner le retour à l’habitation des locaux ;

– débouté la Ville de Paris de sa demande de condamnation de Mme [K] à une amende civile sur le fondement des dispositions de l’article L.324-l-l III du code du tourisme ;

– débouté la Ville de Paris de sa demande de condamnation de Mme [K] à une amende civile sur le fondement des dispositions de l’article L.324-l-l IV du code du tourisme ;

– débouté la Ville de Paris de sa demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Ville de Paris aux dépens.

Le premier juge a en substance estimé que la ville échouait à démontrer l’usage d’habitation au 1er janvier 1970, que Mme [K] avait bien procédé à la déclaration de location de meublé de l’article L.324-l-l III du code du tourisme, que l’obligation de transmission de l’article L.324-l-l IV du code du tourisme ne concerne que les personnes qui offrent à la location un meublé de tourisme déclaré comme résidence principale.

Par déclaration du 19 octobre 2021, la Ville de Paris a relevé appel de cette décision.

Dans ses conclusions remises le 19 novembre 2021, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la Ville de Paris demande à la cour au visa de l’article 481-1 du code de procédure civile, de l’article L 631-7 du code de la construction et de l’habitation, de l’article L 651-2 du code de la construction et de l’habitation, de :

– juger la Ville de Paris recevable et bien fondée en son appel ;

– infirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance en la forme des référés du 4 octobre 2021 en ce qu’elle a :

* débouté la Ville de Paris de sa demande de condamnation de Mme [K] au paiement d’une amende civile de 50.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L.651-2 du code de la construction et de l’habitation ;

* débouté la Ville de Paris de sa demande visant à voir ordonner le retour à l’habitation des locaux ;

* débouté la Ville de Paris de sa demande de condamnation de Mme [K] au paiement d’une amende civile de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L.324-1-1 III du code du tourisme ;

* débouté la Ville de Paris de sa demande de condamnation de Mme [K] au paiement d’une amende civile de 10.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L.324-1-1 IV du code du tourisme ;

* débouté la Ville de Paris de da demande au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

* condamné la Ville de Paris aux dépens ;

– juger que Mme [K] a enfreint les dispositions de l’article L.631-7 du code de la construction et de l’habitation ;

– condamner Mme [K] à payer à la Ville de Paris une amende civile de 50.000 euros ;

– ordonner le retour à l’habitation des locaux transformés sans autorisation, sis 16 rue Royer-Collard Paris 5ème, lots 10 et 48, sous astreinte de 250 euros par jour de retard à compter de l’expiration du délai qu’il plaira au tribunal de fixer ;

– se réserver la liquidation de l’astreinte ;

– juger que Mme [K] a enfreint les dispositions de l’article L.324-1-1 III du code tourisme ;

– la condamner à payer à la Ville de Paris une amende civile de 5.000 euros ;

– juger que Mme [K] a enfreint les dispositions de l’article L.324-1-1 IV du code du tourisme ;

– la condamner à payer à la Ville de Paris une amende de 10.000 euros ;

– condamner Mme [K] à payer à la Ville de Paris la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– la condamner aux entiers dépens.

La Ville de Paris soutient que :

– le local en cause est à usage d’habitation, ainsi qu’en attestent les extraits du registre cadastral, le relevé de propriété, la fiche modèle H2 du 17 août 1979, la fiche modèle R du 19 octobre 1970, sans qu’aucun changement d’affectation n’ait été effectué ;

– le bien litigieux n’est pas la résidence principale de son propriétaire, car il est taxé au titre des logements vacants ;

– le bien a fait l’objet de location de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, ainsi qu’en attestent les annonces sur le site Airbnb, et les simulations de réserves effectuées, l’annonce est toujours active au 24 juin 2021, et le relevé de réservations transmis par Airbnb atteste de 181 nuitées louées en 2019 et 96 nuitées en 2020 ;

– sur le quantum de l’amende : l’exploitation irrégulière est d’une forte rentabilité, le gain estimé est de 218.437,50 euros sur la base d’un tarif de 125 euros par nuit, et d’un taux d’occupation de 75%, soit un gain illégal de 150.401,50 euros par rapport au loyer de référence ; par ailleurs le montant de la compensation nécessaire pour obtenir l’autorisation de changement d’usage du local d’habitation et exercer une activité d’hébergement hôtelier est de 30.800 euros ;

– Mme [K] ne s’est par ailleurs pas conformée à l’obligation de déclaration préalable soumise à enregistrement, l’annonce ne comporte ainsi pas de numéro d’enregistrement, justifiant une amende civile de 5.000 euros.

Dans ses conclusions remises le 14 décembre 2021, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, Mme [K] demande à la cour, au visa des articles L. 631-7 et suivants du code de la construction et de l’habitation, des articles L.324-1-1 III et L.324-1-1 IV du code du tourisme, de :

– confirmer l’ordonnance en la forme des référés du 4 octobre 2021 rendue par le tribunal judiciaire de Paris ;

– débouter la Ville de Paris de l’ensemble de ses demandes ;

– condamner la Ville de Paris à verser à Mme [K] la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [K] soutient que :

– il incombe à la ville de Paris d’établir l’existence d’un local à usage d’habitation, ainsi qu’un changement illicite de cet usage sans autorisation préalable ; or la lettre H figurant au relevé de propriété de 2017 ne suffit pas à établir cette présomption, pas plus que la fiche R, qui n’est pas datée, ni la fiche H, qui est elle datée du 17 août 1970, et ne saurait poser de présomption d’usage d’habitation au 1er janvier 1970 ;

– les locations saisonnières n’ont apporté qu’une rentabilité mesurée, et du fait du faible nombre de location de courte durée rapporté par le constat d’infraction établi par l’agent assermenté, Mme [K] n’a pas pu percevoir un gain de 218.437,50 euros, contrairement à ce qu’affirme la ville de Paris ;

– par ailleurs Mme [K] loue son logement à M. [V] sans discontinuité depuis le mois de septembre 2020, seules deux locations de courtes durée ont eu lieu en 2018 ;

– de plus, la Ville de Paris reproche à Mme [K] de ne pas s’être conformée à l’obligation de déclaration préalable soumise à enregistrement, alors qu’elle a toujours déclaré les revenus procurés par la location de son appartement ;

– cette obligation ne concerne que les personnes offrant à la location un logement meublé de tourisme déclaré comme résidence principale, ce qui n’est pas le cas de Mme [K] qui a sa résidence principale à Saint Leu La Forêt.

SUR CE LA COUR

L’article L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation, tel qu’issu de la loi du n°2016-1547 du 18 novembre 2016, dispose que toute personne qui enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50.000 euros (anciennement 25.000 euros avant la loi du 18 novembre 2016) par local irrégulièrement transformé.

Cette amende est prononcée par le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, sur requête du maire de la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé ou de l’Agence nationale de l’habitat et sur conclusions du procureur de la République, partie jointe avisée de la procédure. Le produit de l’amende est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé ce local. Le tribunal de grande instance compétent est celui dans le ressort duquel est situé le local.

Sur requête du maire de la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé ou de l’Agence nationale de l’habitat, le président du tribunal ordonne le retour à l’usage d’habitation du local transformé sans autorisation, dans un délai qu’il fixe. A l’expiration de celui-ci, il prononce une astreinte d’un montant maximal de 1.000 euros par jour et par mètre carré utile du local irrégulièrement transformé. Le produit en est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé.

Passé ce délai, l’administration peut procéder d’office, aux frais du contrevenant, à l’expulsion des occupants et à l’exécution des travaux nécessaires.

Il résulte en outre de l’article L. 631-7, dans sa version résultant de la loi n°2014-366 du 24 mars 2014, que la présente section est applicable aux communes de plus de 200.000 habitants et à celles des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne. Dans ces communes, le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est, dans les conditions fixées par l’article L. 631-7-1, soumis à autorisation préalable.

Constituent des locaux destinés à l’habitation toutes catégories de logements et leurs annexes, y compris les logements-foyers, logements de gardien, chambres de service, logements de fonction, logements inclus dans un bail commercial, locaux meublés donnés en location dans les conditions de l’article L. 632-1.

Pour l’application de la présente section, un local est réputé à usage d’habitation s’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970. Cette affectation peut être établie par tout mode de preuve. Les locaux construits ou faisant l’objet de travaux ayant pour conséquence d’en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés.

Toutefois, lorsqu’une autorisation administrative subordonnée à une compensation a été accordée après le 1er janvier 1970 pour changer l’usage d’un local mentionné à l’alinéa précédent, le local autorisé à changer d’usage et le local ayant servi de compensation sont réputés avoir l’usage résultant de l’autorisation.

Sont nuls de plein droit tous accords ou conventions conclus en violation du présent article.

Le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile constitue un changement d’usage au sens du présent article.

Pour l’application des dispositions susvisées, il y a donc lieu d’établir :

– l’existence d’un local à usage d’habitation, un local étant réputé à usage d’habitation s’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, sauf pour les locaux construits ou faisant l’objet de travaux ayant pour conséquence d’en changer la destination postérieurement au 1er janvier 1970 qui sont réputés avoir l’usage pour lequel la construction ou les travaux sont autorisés, le formulaire administratif de type H1 rempli à cette époque permettant de préciser l’usage en cause ;

– un changement illicite, sans autorisation préalable, de cet usage, un tel changement étant notamment établi par le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile, hypothèse excluant notamment la location saisonnière de son logement résidence principale, pour une durée n’excédant pas 120 jours par an, la location d’un meublé résidence principale (titre 1er bis de la loi du 6 juillet 1989) ou encore la location d’un meublé dans le cadre d’un bail mobilité (titre 1er ter de la loi du 6 juillet 1989).

Il est en outre constant que, s’agissant des conditions de délivrance des autorisations, la Ville de Paris a adopté, par règlement municipal et en application de l’article L. 631-7-1 du code de la construction et de l’habitation, le principe d’une obligation de compensation par transformation concomitante en habitation de locaux ayant un autre usage, obligation de compensation qui n’apparaît pas voir été respectée dans le cadre de la présente procédure.

En outre, l’article L. 324-1-1 du code du tourisme dispose que :

I.-Pour l’application du présent article, les meublés de tourisme sont des villas, appartements ou studios meublés, à l’usage exclusif du locataire, offerts à la location à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile et qui y effectue un séjour caractérisé par une location à la journée, à la semaine ou au mois.

II.-Toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme, que celui-ci soit classé ou non au sens du présent code, doit en avoir préalablement fait la déclaration auprès du maire de la commune où est situé le meublé.

Cette déclaration préalable n’est pas obligatoire lorsque le local à usage d’habitation constitue la résidence principale du loueur, au sens de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n°86-1290 du 23 décembre 1986.

III.-Par dérogation au II, dans les communes où le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est soumis à autorisation préalable au sens des articles L. 631-7 à L. 631-9 du code de la construction et de l’habitation une délibération du conseil municipal peut décider de soumettre à une déclaration préalable soumise à enregistrement auprès de la commune toute location d’un meublé de tourisme.

La déclaration indique si le meublé de tourisme offert à la location constitue la résidence principale du loueur au sens de l’article 2 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée.

IV.-Dans les communes ayant mis en ‘uvre la procédure d’enregistrement de la déclaration préalable mentionnée au III, toute personne qui offre à la location un meublé de tourisme qui est déclaré comme sa résidence principale ne peut le faire au-delà de cent vingt jours au cours d’une même année civile, sauf obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure.

La commune peut, jusqu’au 31 décembre de l’année suivant celle au cours de laquelle un meublé de tourisme a été mis en location, demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé a été loué. Le loueur transmet ces informations dans un délai d’un mois, en rappelant l’adresse du meublé et son numéro de déclaration.

V.- Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations résultant du III est passible d’une amende civile dont le montant ne peut excéder 5.000 euros.

Toute personne qui ne se conforme pas aux obligations résultant du IV est passible d’une amende civile dont le montant ne peut excéder 10.000 euros.

Ces amendes sont également prononcées par le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, sur demande de la commune dans laquelle est situé le meublé de tourisme. Le produit de l’amende est versé à la commune. Le tribunal judiciaire compétent est celui dans le ressort duquel est situé le meublé de tourisme.

En l’espèce, les parties s’opposent à d’abord sur les éléments de preuve à apporter par la ville de ce que le local dont il s’agit est bien un local à usage d’habitation au sens de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation, étant rappelé qu’un local est réputé à usage d’habitation au sens de ce texte s’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970, que cette affectation peut être établie par tout mode de preuve et que la preuve d’une affectation de fait à l’usage d’habitation postérieurement au 1er janvier 1970, date de référence, est inopérante.

Il revient ainsi à la Ville de Paris, pour caractériser l’infraction dénoncée de changement d’usage illicite, de démontrer que le local en cause était bien affecté au 1er janvier 1970 à l’usage d’habitation.

La Ville de Paris se prévaut ici de quatre types de documents : l’extrait du registre cadastral, le relevé de propriété, la fiche R qu’elle indique être datée du 19 octobre 1970, la fiche H2 du 17 août 1970.

Force est toutefois de constater :

– que l’extrait du registre cadastral et le relevé de propriété, mentionnés dans le constat d’infraction, ne font pas état d’un usage d’habitation au 1er janvier 1970, le premier juge ayant d’ailleurs à juste titre rappelé que la lettre “H” pour habitation, dans un relevé de propriété datant de 2017, ne permet pas de l’établir ;

– que la fiche R relative à l’immeuble n’est pas, contrairement à ce qu’indique la commune et comme l’indique à juste titre l’intimée, datée, de sorte qu’elle ne saurait établir l’usage d’habitation au 1er janvier 1970, étant précisé que ladite fiche comporte une rubrique “datez et signez” en page 4 qui a été laissée en blanc (pièce 5, page 12) ;

– que la fiche H2 date elle du 17 août 1970 et mentionne donc qu’à cette date le local est occupé par le propriétaire, sans autre précision ; qu’il n’est pas fait mention dans ce document de la perception d’un loyer au 1er janvier 1970 ;

– que si la Ville de Paris indique que la déclaration H2 implique nécessairement un usage d’habitation, les dispositions du décret n°69-1076 du 28 novembre 1969 qu’elle cite (article 38 les déclarations sont établies sur des formules spéciales fournies par l’administration, article 39 la date de référence de la première révision foncière quinquennale des évaluations foncières des propriétés bâties est fixée au 1er janvier 1970, article 40 la date limite d’envoi ou de remise des déclarations est fixées au plus tard en ce qui concerne les biens autres que les établissements industriels au 15 octobre 1970 pour les communes de plus de 5.000 habitants) ne permettent pas une telle déduction, la présomption d’usage d’habitation au 1er janvier 1970 telle qu’alléguée ne résultant ni de ces textes ni par ailleurs d’aucun autre texte.

Aucun autre élément n’est produit s’agissant de l’usage d’habitation au 1er janvier 1970.

Aussi, n’est-il pas possible d’affirmer, au vu de l’ensemble de ces éléments de preuve, que la local dont il s’agit avait bien un usage d’habitation au 1er janvier 1970.

La décision entreprise sera donc confirmée en ce qu’elle a dit que le manquement aux dispositions de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation n’était pas caractérisé et a conséquence débouté la Ville de Paris de ses demandes.

Concernant l’infraction aux dispositions de l’article L.324-1-1 III du code du tourisme, Mme [K] indique qu’elle a bien procédé à la déclaration.

Il apparaît à cet égard que, le 24 avril 2015, elle a en effet bien procédé à la déclaration de location meublée de tourisme auprès de la mairie (constat d’infraction annexe 11 p. 67), le contrôleur de la ville ayant d’ailleurs mis en annexe cette déclaration sans autre observation sur une éventuelle infraction de ce chef.

La commune appelante ne peut à cet égard fonder sa demande de condamnation sur le constat complémentaire du 24 juin 2021 (pièce 10), qui ne comporte en réalité qu’une copie d’écran de “l’export des déclarations de meublés de tourisme” pour indiquer qu’il n’y aurait pas de correspondance avec le nom “[K]”, alors que les conditions d’interrogation de cette base ne sont pas connues et que, nonobstant l’absence alléguée de numéro d’enregistrement, une déclaration avait été produite lors du constat initial.

Le rejet de la demande de la ville de Paris à cet égard sera également confirmé.

S’agissant enfin de l’infraction aux dispositions de l’article L.324-1-1 IV du code du tourisme, à savoir le défaut de transmission relative au nombre de jours loués, il sera relevé que l’obligation de transmission de l’article L.324-1-1 IV alinéa 2 du code du tourisme ne peut concerner que les locations visées à l’article L.324-1-1 IV alinéa premier, à savoir les locations d’un meublé de tourisme déclaré comme résidence principale, étant rappelé que les textes relatifs à une infraction civile, pouvant conduire au prononcé d’une amende, doivent s’interpréter strictement.

Le logement en cause n’est pas ici la résidence principale de Mme [K], ce qui n’est contesté par aucune des parties.

Les conditions pour prononcer une amende en application de l’article L.324-1-1 IV du code du tourisme ne sont donc pas plus remplies.

Ainsi, au regard de l’ensemble de ces éléments, il y a lieu de confirmer l’ordonnance entreprise, en ce compris le sort des frais et dépens de première instance exactement réglé par le premier juge.

En cause d’appel, la commune appelante devra indemniser l’intimée de ses frais non répétibles exposés et sera condamnée aux dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance entreprise ;

Y ajoutant,

Condamne la Ville de Paris à verser à Mme [P] [K] la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile à hauteur d’appel ;

Condamne la Ville de Paris aux dépens d’appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 


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