Sous-classification du Mannequin : l’acceptation du salarié validée
Sous-classification du Mannequin : l’acceptation du salarié validée
Ce point juridique est utile ?

L’article 9 de la convention collective des mannequins indique qu’une agence peut proposer au mannequin une prestation correspondant à une classification inférieure ou supérieure à celle qu’il a atteinte précédemment et ne pose aucune condition quant à la nature de la prestation réalisée mais seulement relativement à la rémunération brute minimum.

En signant des contrats de travail le salarié est censé en avoir accepté les dispositions, de sorte qu’il lui appartient, pour remettre en cause cet accord, de rapporter la preuve d’un vice de son consentement, laquelle ne peut résulter d’une déclassification par rapport à celle lui étant habituellement octroyée au regard de son expérience professionnelle.

L’adhésion du salarié au contrat du contrat de travail, formalisée par sa signature, pouvant être interprétée comme la volonté de mettre en oeuvre une telle faculté, qui permet notamment de compléter ses revenus, la preuve d’une acceptation contrainte des dispositions contractuelles doit résulter d’éléments précis et suffisants.

Tel n’est pas le cas en l’espèce de sorte que le décompte du salarié ne peut pas être validé sur ce point, sauf à modifier les classifications T7/2 ou T/8/2 pour adopter celles T7 ou T8, mais uniquement dans l’hypothèse où les premières n’ont pas été utilisées dans le cadre d’essayages.

En effet la rémunération de cette dernière activité relève des dispositions de l’article 12 de la convention collective, si ce n’est l’application d’un seuil minima tel que fixé par l’article 5, étant précisé que ces essayages ne pouvant être rattachés à une opération de presse ou de publicité, le taux de 36 % doit être retenu comme constituant le seuil en dessous duquel la rémunération ne peut descendre.

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République Française

Au nom du Peuple Français

Cour d’appel de Douai

Sociale b salle 2

ARRÊT DU 26 MARS 2021

N° RG 17/00804

N° Portalis DBVT-V-B7B-QSPB

AM/SST/HB

RO

Jugement du Conseil de Prud’hommes

Formation paritaire de LILLE

en date du

17 Novembre 2016

(RG F 15/01920 -section )

GROSSE :

aux avocats

le

26 Mars 2021

APPELANTE :

SARL PERFECT MODELS

[…]

[…]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI, assisté de Me Marion HUERTAS, avocat au barreau de LILLE

INTIMÉ :

M. Z A

représenté par Me François PARRAIN, avocat au barreau de LILLE

DÉBATS : à l’audience publique du 19 Janvier 2021

Tenue par B C

magistrat chargé d’instruire l’affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les parties ou leurs représentants ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré,

les parties ayant été avisées à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER : Charlotte GERNEZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Monique Y : PRÉSIDENT DE CHAMBRE

B C : X

D E : X

ARRÊT : Contradictoire prononcé par sa mise à disposition au greffe le 26 Mars 2021, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Monique Y, Président et par Annie LESIEUR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 12 janvier 2021

FAITS ET PROCEDURE

Par arrêt en date du 29 mai 2020, auquel il convient de se référer tant pour l’exposé des faits que de la procédure, la Cour d’appel de Douai a :

Confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a dit et jugé que l’accord national du mannequinat du 15 février 1991 complété par la convention collective nationale du 22 juin 2004 et de ses avenants s’applique aux prestations effectuées par M. Z A pour déterminer la rémunération devant lui être versée,

Avant dire droit sursis à statuer quant à la demande en rappel de salaire, quant à celle en dommages et intérêts, et relativement à celles formulées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Ordonné la réouverture des débats à l’audience du 13 octobre 2020 à 14 heures,

Invité les parties au regard des principes édictés par la Cour dans les motifs de procéder à un nouveau calcul du montant de la rémunération due à M. Z A au titre des différentes prestations réalisées, avec nécessité pour les parties d’échanger leurs évaluations pour permettre à l’autre d’y répondre s’agissant des prestations objets de points de divergences,

Réservé les dépens.

Parallèlement l’ordonnance de clôture a été révoquée.

Vu les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

Vu les conclusions déposées par la société le 12 octobre 2020 et les dernières pièces communiquées par la société.

Vu les conclusions déposées par le salarié le 24 décembre 2020.

Vu la clôture de la procédure au 19 janvier 2021.

SUR CE

Des rappels de salaires

Il convient tout d’abord de rappeler qu’en vertu de l’arrêt du 29 mai 2020 la Cour a confirmé le jugement entrepris en ce qu’il a dit que la convention collective nationale des mannequins adultes et mannequins enfants de moins de 16 ans employés par des agences de mannequins en date du 22 juin 2004 s’applique aux activités réalisées par le salarié dans le cadre des différents contrats de travail en ce compris celle des essayages.

S’agissant des rappels de salaires la Cour, après avoir mentionné les règles applicables et l’interprétation devant en être donnée, a indiqué qu’en signant des contrats de travail le salarié est censé en avoir accepté les dispositions, de sorte qu’il lui appartient, pour remettre en cause cet accord, de rapporter la preuve d’un vice de son consentement, laquelle ne peut résulter d’une déclassification par rapport à celle lui étant habituellement octroyée au regard de son expérience professionnelle.

La cour a par ailleurs apporté les précisions suivantes :

En effet, au-delà de la question du caractère suffisamment probant d’une telle allégation, il apparaît aux termes de la convention collective qu’une telle faculté est offerte aux mannequin pour préserver notamment la liberté de travail, étant précisé que la possibilité d’une «surclassification » est également instaurée.

L’adhésion du salarié au contrat du contrat de travail, formalisée par sa signature, pouvant être interprétée comme la volonté de mettre en oeuvre une telle faculté, qui permet notamment de compléter ses revenus, la preuve d’une acceptation contrainte des dispositions contractuelles doit résulter d’éléments précis et suffisants.

Tel n’est pas le cas en l’espèce de sorte que le décompte du salarié ne peut pas être validé sur ce point, sauf à modifier les classifications T7/2 ou T/8/2 pour adopter celles T7 ou T8, mais uniquement dans l’hypothèse où les premières n’ont pas été utilisées dans le cadre d’essayages.

En effet la rémunération de cette dernière activité relève des dispositions de l’article 12 de la convention collective, si ce n’est l’application d’un seuil minima tel que fixé par l’article 5, étant précisé que ces essayages ne pouvant être rattachés à une opération de presse ou de publicité, le taux de 36 % doit être retenu comme constituant le seuil en dessous duquel la rémunération ne peut descendre.

En ce qui concerne la durée de travail, aucun élément tangible ne permet de remettre en cause celle retenue par l’employeur pour chaque contrat, et le nombre d’heures devant correspondre à une demi-journée doit être fixé à 3 heures et non à 4 heures comme retenues par le salarié dans ses calculs.

En effet l’employeur a souvent visé dans des contrats tant la durée de 3 heures de travail que celle de 4 heures sans mentionner la réalisation d’une demi journée, alors que le salarié ne se prévaut d’aucun argument étayé en lien avec la réalisation de chacune des prestations pour justifier son choix de revendiquer s’agissant d’une demi-journée celle de 4 heures.

Au contraire, il est fait référence dans la convention collective, et plus particulièrement dans les grilles y étant annexées à une durée de travail pour la journée de travail de 5 heures pouvant être portée à 8 heures, de sorte que la fixation par l’employeur d’une demi-journée à hauteur de 3 heures s’inscrit dans cette fourchette.

Or le salarié ne se réfère pas pour chaque contrat à un décompte précis de la durée de travail permettant à l’employeur d’y répondre, mais procède pour l’ensemble des prestations à une évaluation forfaitaire correspondant à une notion générale qu’est celle de demi-journée.

Au regard de l’ensemble de ces éléments les parties ont été amenées à présenter de nouveaux calculs quant au rappel de salaire revendiqué par le salarié.

Il convient de constater que la société dans ses dernières écritures reprend sa précédente argumentation y compris quant à l’exclusion des essayages dits technique des situations visées par la convention pourtant écartée par la Cour aux termes de l’arrêt du 29 mai 2020.

A titre subsidiaire elle demande à la Cour de réduire à la somme de 3624,28 euros en faisant valoir qu’elle est prête à rectifier les erreurs matérielles commises notamment en raison d’une vérification faite manuellement quant au respect des minima conventionnels.

Il y a lieu néanmoins de constater que la société ne fournit pas un décompte, relativement à la somme qu’elle reconnaît devoir à titre subsidiaire, conforme aux règles rappelées par la Cour, notamment en ce qu’elle a fait une interprétation erronée des dispositions de l’arrêt notamment quant à la portée de l’article 5 de la convention collective.

Toutefois elle fournit des pièces permettant de constater une différence entre la détermination du nombre de jours et d’heures de travail initialement prévus par le contrat et la séance effectivement réalisée, ou annulée.

Le salarié fournit un décompte correspondant aux principes dégagés par la Cour au regard des dispositions légales et conventionnelles, si ce n’est d’une part qu’il affirme que la cour ne semble pas avoir expressément tranché la question de la possibilité de conclure un contrat prévoyant une rémunération au titre de l’article 12 pour une prestation de défilé ou de photos ou, au contraire si cet article est réservé aux essayages, et d’autre part qu’il s’est uniquement référé aux données du contrat de travail quant à la durée de la prestation.

Toutefois, s’agissant du premier point, l’article 9 de la convention collective, qui indique que l’agence pourra proposer au mannequin une prestation correspondant à une classification inférieure ou supérieure à celle qu’il a atteinte précédemment, ne pose aucune condition quant à la nature de la prestation réalisée mais seulement relativement à la rémunération brute minimum.

Par ailleurs le contrat de travail stipule qu’il prendra automatiquement fin à l’issue des prestations prévues au contrat de mise à disposition, de sorte qu’il y a lieu de prendre en compte les modifications intervenues à ce titre après la signature du contrat entre les parties.

Il y a donc lieu au regard de ces précisions de limiter à la somme de 5320 euros le montant du rappel de salaire auquel le salarié a droit, outre les congés payés à hauteur de 532 euros.

De la demande en dommages et intérêts

Si la société ne s’est pas acquittée de la rémunération à laquelle le salarié pouvait prétendre en fonction de la nature de chacune des prestations réalisées, et a été invitée par l’inspection du travail à y remédier, pour autant une telle invitation n’a pas été réservée à la société mais aux agences de mannequins exerçant sur un même territoire.

Par ailleurs le SYNAM, syndicat regroupant des agences de mannequins, a conforté ces dernières dans leur interprétation des dispositions légales et conventionnelles, en faisant même part de son positionnement à l’inspection du travail, sans qu’il ne soit justifié d’une réponse de la part de ses services.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que la démonstration de la mauvaise foi de la société, qui incombe au salarié, n’est pas rapportée en l’espèce, de sorte que la demande en dommages et intérêts doit être rejetée, et par là même le jugement entrepris infirmé.

De la demande au titre de capitalisation des intérêts

Aux termes de l’article 1154 du Code civil, les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s’agissait intérêts dus au moins pour une année entière.

En l’espèce il n’est pas démontré que le retard apporté au paiement d’une créance ou le non paiement de celle-ci soient dus à l’attitude fautive du salarié, de sorte qu’il convient en application des dispositions de l’article 1154 du Code civil d’ordonner la capitalisation des intérêts échus sur ces sommes.

De la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

L’équité commande de condamner la société à payer au salarié la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Des dépens

La société qui succombe au principal doit être condamnée aux dépens.

PAR CES MOTIFS

Vu l’arrêt en date du 29 mai 2020,

Infirme le jugement entrepris quant aux montants du rappel de salaire et des congés payés afférents octroyés à M. Z A, en ce qui lui a alloué des dommages-intérêts, et le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau, et ajoutant au jugement entrepris,

Condamne la société PERFECT MODELS à payer à M. Z A les sommes suivantes :

-5320 euros à titre de rappel de salaire outre la somme de 532 euros pour les congés payés afférents

-800 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

Déboute M. Z A de sa demande en dommages et intérêts ,

Dit que les intérêts échus seront eux-mêmes productifs d’intérêts dès lors qu’ils seront dus pour une année entière à compter du 23 juin 2016, date à laquelle la demande d’anatocisme a été formée pour la première fois,

Condamne la société PERFECT MODELS aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

A. LESIEUR M. Y


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