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Skipper : 7 septembre 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/05106

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Skipper : 7 septembre 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/05106

7 septembre 2022
Cour d’appel de Montpellier
RG n°
19/05106

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 07 SEPTEMBRE 2022

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 19/05106 – N° Portalis DBVK-V-B7D-OIJR

ARRET N°

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 24 JUIN 2019

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BEZIERS

N° RG 15/00041

APPELANTS :

Monsieur [F] [X]

né le 18 Août 1950 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Nicolas JONQUET pour Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

Madame [B] [V] [A] épouse [X]

née le 24 Mai 1966 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Nicolas JONQUET pour Me Arnaud LAURENT de la SCP SVA, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

INTIMES :

Monsieur [H] [R]

né le 05 Août 1964 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Jean BELLISSENT de la SCP BELLISSENT – HENRY, avocat au barreau de BEZIERS, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/012054 du 07/08/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Madame [P] [K]

née le 30 Mai 1971 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Jean BELLISSENT de la SCP BELLISSENT – HENRY, avocat au barreau de BEZIERS, avocat postulant et plaidant

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/012054 du 07/08/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de MONTPELLIER)

Monsieur [I] [T] [S]

né le 27 Janvier 1953 à [Localité 8]

de nationalité Française

Le Soulège

[Localité 1]

Représenté par Me Marie GALLE pour Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO – DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 JUIN 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

Mme Cécile YOUL-PAILHES, Conseillère

M. Frédéric DENJEAN, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Henriane MILOT

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

*

**

FAITS ET PROCEDURE

Suivant acte du 6 mai 2013, M. [F] [X] et Mme [B] [A] épouse [X] (ci-après dénommés M. et Mme [X]) ont vendu à M. [H] [R] et Mme [P] [K] un navire de plaisance de type catamaran, modèle Graal 42 n° de série 42004 immatriculé sous le numéro 22872 et francisé en douane auprès du bureau des Sables d’Olonne sous le numéro 16105/243.2 dont ils sont devenus propriétaires pour l’avoir acquis le 14 novembre 1998 de M. [I] [T]-[S].

Les parties à l’acte de vente ont prévu une clause aux termes de laquelle M. [R] et Mme [K] déclarent bien connaître le navire pour l’avoir visité et l’accepter dans l’état où il se trouve.

Constatant des désordres sur le bateau, ils les ont fait constater le 18 octobre 2013 dans le cadre d’une expertise amiable non contradictoire, par M. [G] [L], expert maritime et les ont vainement signalés aux consorts [X] par l’envoi d’un courrier recommandé avec accusé de réception en date du 19 octobre 2013 aux fins d’obtenir le remboursement du prix de vente du bateau et des frais accessoires engagés pour l’entretien du bateau, la location de l’emplacement au port, le remboursement de leur déménagement et de la manutention du bateau.

Suivant ordonnance du 31 janvier 2014, sur saisine des consorts Dars-Mandron, le juge des référés du tribunal de grande instance de Fort-de-France a ordonné une mesure d’expertise qu’il a confiée à M. [U] [Z], lequel a déposé son rapport le 14 juin 2014.

Poursuivant l’instance au fond, les consorts Dars-Mandron ont fait assigner M. et Mme [X] par acte d’huissier de justice en date du 29 décembre 2014 devant le tribunal de grande instance de Béziers en résolution de la vente.

Par acte d’huissier de justice en date du 24 mars 2016, les consorts [X] ont fait appeler en intervention forcée M.[T]-[S].

Par jugement contradictoire en date du 24 juin 2019, le tribunal de grande instance de Béziers a :

Rejeté la demande en nullité du rapport d’expertise judiciaire établi par M. [Z], déposé le 14 juin 2014.

Prononcé la résolution de la vente litigieuse,

Condamné M. et Mme [X] à payer à M. [R] et Mme [K] les sommes indivises de :

102.500 euros correspondant au prix de vente du bateau.

886,80 euros correspondant aux frais d’assurance 2013/2014 et d’expertise du gréement.

1.000 euros au titre des frais de relogement provisoire.

6.000 euros au titre du préjudice de jouissance.

6.000 euros au titre du préjudice moral.

Mis hors de cause M. [T] [S].

Débouté M. [T] [S] de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts pour procédure abusive présentée à l’égard de M. [X] et Mme [X].

Débouté les parties de leurs autres demandes.

Condamné M. et Mme [X] à payer à M. [R] et Mme [K] une somme indivise de 4 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamné M. [X] et Mme [X] à payer à M. [T] [S] une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamné M. [X] et Mme [X] aux dépens de l’instance en ce compris les frais de référé et les frais d’expertise judiciaire mais à l’exclusion des frais de constat des techniciens et des huissiers de justice non désignés par décision de justice.

Ordonné l’exécution provisoire de l’intégralité de la décision.

Vu la déclaration d’appel en date du 18 juillet 2019 par les consorts [X],

Vu l’ordonnance de référé réputée contradictoire en date du 25 septembre 2019 qui a :

Dit qu’il sera sursis à l’exécution provisoire sur les condamnations prononcées en faveur des consorts Dars-Mandron à hauteur de 30 000 euros.

Rejeté toutes autres demandes.

Condamné M. et Mme [X] à verser à M. [T] [S] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dit que M. et Mme [X] conserveront la charge des dépens de la présente instance,

Vu l’ordonnance sur retrait d’incident rendu par le conseiller de la mise en état en date du 31 mars 2021,

Vu l’ordonnance de clôture en date du 17 mai 2022,

PRETENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions déposées via le RPVA le 6 avril 2022, M. et Mme [X] demandent à la cour :

* A titre principal, d’infirmer en totalité le jugement dont appel, et statuant à nouveau, de :

Prononcer la nullité du rapport d’expertise de M.[Z].

Condamner les consorts [W] à leur restituer toutes les sommes perçues au titre du jugement déféré.

* A titre subsidiaire, avant dire droit, au visa de l’article 144 du code civil, de :

ordonner une expertise judiciaire.

commettre tel expert qu’il plaira à la Cour, professionnel naval,

* En toute hypothèse de :

infirmer en son intégralité le jugement dont appel et condamner les consorts [W] à leur restituer toutes les sommes perçues au titre du jugement déféré.

* A titre très subsidiaire :

ramener le montant de la restitution du prix de vente à la valeur du catamaran au jour de sa vente, en tenant compte des travaux de reprise de la coque et de la valeur des pièces détachées.

condamner les consorts Dars Mandron à leur payer une indemnité égale à la valeur du catamaran au jour de la vente, en tenant compte des travaux de reprise de la coque et de la valeur des pièces détachées.

ordonner la compensation entre leurs créances et celles des consorts Dars-Mandron.

condamner M. [T]-[S] à relever et garantir de les consorts Dars-Mandron de toutes les éventuelles condamnations prononcées contre eux.

condamner les consorts Dars-Mandron à leur restituer le reliquat des sommes perçues au titre du jugement déféré et auquel la cour ne les aura pas condamnés.

condamner M. [T]-[S] à leur restituer le reliquat des sommes perçues au titre du jugement déféré et auquel la cour ne les aura pas condamnés.

* En tout état de cause, de :

débouter les intimés de l’ensemble de leurs demandes fins et conclusions en ce compris leurs appels incidents.

condamner toute partie succombant à leur payer la somme de 5 000 euros à titre de préjudice moral.

condamner toute partie succombant à leur payer la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, en ce compris ceux de la procédure de première instance.

Par dernières conclusions déposées via le RPVA le 25 avril 2022, M. [R] et Mme [K] demandent à la cour, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement dont appel sauf en ce qu’il a omis d’homologuer le rapport d’expertise et limité le montant des dommages et intérêts qui leur ont été alloués et statuant à nouveau et y ajoutant :

– homologuer le rapport d’expertise établi par M. [Z] en date du 14 juin 2014,

– condamner solidairement M. et Mme [X] à leur payer les sommes de :

– 4 693,83 euros, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013, au titre des frais occasionnés par la vente,

– 127 855,32 euros, outre intérêt au taux légal, au titre des préjudices d’ores et déjà définitivement arrêtés dont le détail s’établit comme suit :

Travaux d’amélioration et de réparation du navire : 22.645,28 euros, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013, pour la période courant de juillet 2013 à novembre 2013.

Frais de déménagement du matériel destiné à être à bord : 4 056,97 euros, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013.

Frais d’expertise amiable [G] [L] : 759,50 euros, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013.

Travaux composites pour remise à l’eau : 368,90 euros.

Achat matériel d’accastillage : facture Le Grenier du Marin de 280,00 euros, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013, et facture Polymar de 57,49 euros, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013.

Assurance bateau : 410,50 euros, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013.

Taxe « Droit annuel de Francisation et de Navigation 2016 » : 216,00 euros, outre intérêt au taux légal à compter du 1er janvier 2016.

Frais d’acquisition d’un véhicule peugeot partner, rendu nécessaire en raison de l’immobilisation du navire : 2.500 euros.

Pertes locatives : 70 000 euros, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013.

Les consorts Dars-Mandron avaient prévu un début d’exploitation à compter du samedi 7 octobre 2013 ;

pour une croisière à la semaine en pension complète avec skipper, selon la tarification en vigueur en Martinique : 1 050 euros par personne et par semaine, soit 4 200 euros pour l’embarquement de 4 personnes à bord, déduction faite des différentes charges (entretien du bateau, ravitaillement, carburant, assurances) à hauteur de 30 % (1 260,00 euros) soit 2 940 euros de bénéfice par semaine de mer.

l’Expert [G] [L] ayant, aux termes de son rapport du 14 juin 2014, indiqué que le bateau était non apte à la navigation en l’état les pertes locatives se doivent donc d’être arrêtées à cette date et ressortent donc à la somme de 70 000 euros (36 semaines entre le 7 octobre 2013 et le 14 juin 2014, ramené à 24 semaines après abattement d’inoccupation d’1/3 X 2.940 euros = 70 560 euros arrondi à 70 000 ;

Préjudice moral (5 000 euros par membre de la famille), soit : 15 000,00 euros.

11 560,68 euros, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 4 octobre 2017, au titre de l’enlèvement de l’épave du navire ;

147 387,04 euros, somme provisoirement arrêtée au 19 octobre 2020, outre intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013, au titre des préjudices évolutifs non encore arrêtés à ce jour :

Préjudice de jouissance personnel indépendamment de la perte d’exploitation : 1 000 euros par mois à compter de la mise en demeure du 19 octobre 2013, soit 84 000 euros.

Frais de relogement + loyer carénage : 14 807,04 euros jusqu’au mois de décembre 2014, outre 694 euros mensuels à compter du 1er janvier 2015 (694 x 70 mois = 48 580 euros).

Débouter M. et Mme [X] de l’ensemble de leurs demandes.

Déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [X] visant à ce qu’ils soient condamnés à leur payer une indemnité égale à la valeur du catamaran au jour de la vente, en tenant compte des travaux de reprise de la coque et de la valeur des pièces détachées en ce qu’une telle prétention s’analyse en une demande nouvelle en cause d’appel au sens des dispositions des articles 564 et suivants du code de procédure civile.

Subsidiairement, au visa des dispositions des articles 1116 et suivants du code civil, de :

prononcer la nullité de la vente litigieuse,

condamner solidairement les époux [X] à leur payer à titre de dommages et intérêts délictuels les mêmes sommes que précédemment détaillées,

déclarer irrecevable la demande de M. et Mme [X] visant à ce qu’ils soient condamnés à leur payer une indemnité égale à la valeur du catamaran au jour de la vente, en tenant compte des travaux de reprise de la coque et de la valeur des pièces détachées en ce qu’une telle prétention s’analyse en une demande nouvelle en cause d’appel,

En tout état de cause, de :

condamner solidairement M. et Mme [X] à leur payer la somme de 15 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers frais et dépens d’instance, en ce compris les frais de constat, de référé et d’expertises amiables et judiciaires.

Par dernières conclusions déposées via le RPVA le 3 mai 2022, M. [T] [S] demande à la cour, de :

* A titre principal :

– confirmer le jugement dont appel,

– déclarer irrecevable l’appel en garantie M. et Mme [X] à son encontre comme étant prescrit au regard des délais d’actions sur vices cachés et de responsabilité contractuelle de droit commun,

– débouter M. [X] et Mme [X] de l’intégralité de leurs demandes fins et conclusions,

* A titre subsidiaire :

– condamner solidairement M. et Mme [X] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral,

– débouter toute partie de l’intégralité de leurs moyens, fins et prétentions ou demandes telles que dirigées contre lui,

– condamner solidairement M. [X] et Mme [X] à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ainsi qu’aux entiers dépens dont distraction au profit de son avocat.

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur l’expertise :

M. et Mme [X] font grief au jugement dont appel de les avoir déboutés de leur demande en nullité du rapport d’expertise alors qu’en renvoyant au rapport de M. [L], expert amiable mandaté par les consorts Dars-Mandron, M. [Z] n’a pas rempli personnellement sa mission, n’a donné aucun avis technique sur le délaminage des coques du catamaran et qu’il a ainsi ouvertement violé les obligations de conscience, objectivité et impartialité auxquelles il est soumis et de ne pas voir dit que compte-tenu de la nullité du rapport d’expertise, les consorts Dars-Mandron ne rapportent pas la preuve de l’existence d’un vice caché antérieur à la vente.

Le fait qu’un expert se réfère aux conclusions et constatations d’un précédent expert n’est pas la preuve qu’il n’a pas accompli par lui même sa mission et ce alors même que la mission confiée à l’expert comprenait l’obligation de prendre connaissance des documents de la cause, dont le rapport de M. [L] n’était pas exclu.

Bien au contraire, à la lecture du rapport, il sera retenu que M. [Z] a bien, en présence des parties, procédé à la visite et l’inspection du bateau, faisant les mêmes constatations que M.[L]. Il a ainsi notamment pu exclure de la garantie des vices cachés certains désordres que M. [R] qualifiait comme tels, le point central demeurant celui du délaminage.

La décision dont appel sera ainsi confirmée en ce qu’elle a déclaré que le rapport d’expertise n’était pas nul, une nouvelle expertise n’étant en tout état de cause pas réalisable tenant la destruction du navire en cause.

Sur la garantie des vices cachés :

M. et Mme [X] soutiennent que la clause figurant dans l’acte de vente du 6 mai 2013, consentie entre des parties non professionnelles, s’analyse comme une clause exclusive de garantie des vices cachés, qu’il n’est pas rapporté la preuve de l’existence d’un vice antérieur à la vente du catamaran, qu’aucun élément au dossier ne permet de démontrer que les vendeurs avaient connaissance du vice avant la vente, que la tempête [O], les travaux mal réalisés par les consorts Dars-Mandron et le mauvais positionnement de la sangle Travelift sont à l’origine d’infiltrations d’eau dans la coque, que ces infiltrations d’eau dans la coque sont à l’origine du délaminage, ce qui est démontré par l’évolution très rapide du phénomène et que la négligence fautive des consorts Dars-Mandron, si elle n’est pas à l’origine du phénomène de délaminage, a, à tout le moins, concouru à la dégradation rapide du bateau en ce qu’ils ont sous-estimé l’entretien nécessité par le bateau.

‘ sur l’existence de vices cachés :

En application de l’article 1641 du code civil, « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. »

L’article 1642 du même code ajoute que « Le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même. »

Le rapport d’expertise est explicite sur le vice majeur ayant affecté le bateau, à savoir le délaminage de la peau en polyester des deux coques, ce qui a entraîné des voies d’eau, des décollements et, au final, un travail anormal de la structure.

Ce vice, qui n’a pu qu’être aggravé par les travaux entrepris par les consorts Dars-Mandron qui n’avaient pas les connaissances suffisantes et ne se sont pas entourés de conseils qui leur étaient indispensables pour l’entretien d’un tel navire et par les manutentions qu’il a subis, était caché et pré-existant à la vente.

‘ Sur la clause exclusive de garantie :

L’article 1643 du code civil dispose : « il est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie. »

L’acte de vente conclu le 6 mai 2013 comporte une clause énonçant :

« ÉTAT DU NAVIRE :

M. [R]/[K] déclaré bien connaître le navire et l’avoir visité pour l’accepter dans l’état où il se trouve. »

Aux termes de la jurisprudence de la Cour de cassation, l’exonération de garantie ne s’applique pas si le vendeur a la qualité de professionnel ou s’il est réputé ou s’est comporté comme tel, ou si l’acquéreur prouve la mauvaise foi du vendeur.

Il n’est pas contesté qu’aucune des parties n’est un professionnel de la vente de bateau ou de la navigation.

Il sera cependant retenu que :

– M. [X] est « un technicien averti, connaissant son bateau et ses équipements », « de très bon conseil pour résoudre tous les soucis techniques que les plaisanciers rencontrent au quotidien » ainsi qu’en atteste M. [M], « ‘uvrant à la maintenance et à la surveillance de son navire» et que l’indique Mme [N], aux termes des attestations rédigées à la demande de M. [X],

– la catamaran en la cause modèle Graal 42, aux dires de M. [Z], « était connu de l’architecte, des professionnels ainsi que de la communauté des internautes » comme présentant un risque potentiel de délaminage des coques, ce qu’un navigateur expérimenté comme M. [X] ne pouvait que savoir,

– M. [L], l’expert choisi par les consorts Dars-Mandron, a constaté, derrière les équipets de salle de bains et dans la cabine arrière tribord, cachés par les vaigrages, la présence de réparations succinctes, au niveau des peaux extérieures des traces de réparation qui sont vraisemblablement des ragréages d’enduits suite à reprise de collage, l’apparition de diverses fissures de travail sous la laque blanche de qualité médiocre, et a déduit que des réparations récentes avaient été faites en raison de la faible épaisseur d’antifouling et d’un accrochage défectueux laissant apparaître le polysester sans gelcoat. Ces réparations n’ayant pas été faites par les consorts Dars-Mandron, qui ne les ont découvertes que lors de l’expertise réalisée par leur expert, elles ont nécessairement été réalisées par l’un des deux propriétaires antérieures. M. [X], qui connaissait parfaitement bien son bateau, n’a manifestement pas eu à engager la responsabilité de son vendeur. En outre, certaines réparations ont un aspect récent au moment de l’expertise.

L’ensemble de ces éléments permet de retenir la mauvaise foi de M. et Mme [X] et en conséquence d’exclure la clause élusive de garantie.

La décision dont appel sera en conséquence confirmée en ce qu’elle a retenu l’existence de vices cachés, écarté la clause d’exclusion de garantie et prononcé la résolution de la vente.

Sur les conséquences de la résolution de la vente et la réparation des préjudices :

Les consorts Dars-Mandron font grief au jugement dont appel d’avoir réduit le montant des réparations qu’ils sollicitent.

L’article 1644 du même code indique que « L’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix. »

L’article 1645 du même code énonce : « si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur. »

Sur le remboursement du prix de vente du bateau, la décision du premier juge qui s’appuyant sur l’évaluation de l’expert, sera confirmée.

Sur les frais d’expertise amiable de 759,50 euros, cette expertise a été nécessaire pour que les consorts Dars-Mandron, qui n’avaient aucun savoir en matière navale, aient connaissance de la situation exacte du bateau et des vices qui l’affectaient. Ces frais étant directement liés à la vente doivent être assumés par les vendeurs. Ils viendront s’ajouter aux frais d’assurance, de droit annuel de francisation et de navigation 2016 et d’expertise de gréement auxquels M. et Mme [X] ont été condamné par la décision dont appel

Sur les frais de relogement et les loyers carénage, les consorts Dars-Mandron indiquent que le bateau devait être leur résidence principale. Il ne saurait en conséquence être nié que les vices affectant le bateau les a obligés à résider ailleurs. Ils ne produisent cependant qu’un contrat de location pour la période du 15 novembre 2013 au 15 janvier 2014 prévoyant le paiement d’un loyer mensuel de 500 euros qui n’est assorti d’aucune quittance de loyer, sans produire aucune facture relative aux frais de carénage. La décision du premier juge qui a fait le même constat que la cour quant à la carence probatoire, ne peut qu’être confirmée en ce qu’elle a limité l’indemnisation à ce titre à la somme de 1 000 euros correspondant aux frais de relogement de la famille entre le 15 novembre 2013 et le 15 janvier 2014.

Sur le préjudice de jouissance et le préjudice moral, les consorts Dars-Mandron ne versent aux débats aucune pièce venant justifier les demandes qu’ils font à ces titres. La décision du premier juge sera ainsi confirmée.

Sur les frais d’enlèvement de l’épave et de destruction du bateau, il a été clairement préconisé, dés novembre 2013, par M.[L] de stationner le bateau à terre pour éviter une aggravation de sa situation. Les consorts Dars-Mandron, pour des raisons qui leur appartiennent, ont remis le bateau à l’eau et l’ont laissé au mouillage. Cette décision s’est révélée fatale pour le bateau qui n’a pas pu résister aux effets de la tempête tropicale qui a causé sa destruction complète. Il ne relève pas de la responsabilité de M. et Mme [X] d’avoir à assumer cette décision malheureuse et ses conséquences.

Sur les frais de transport et d’hébergement pour visiter le bateau en Martinique, les consorts Dars-Mandron ont fait le choix dans le cadre d’un projet de vie qui les concerne de faire la déplacement en Martinique pour voir le bateau qu’ils souhaitaient acquérir par eux même. Outre le fait qu’ils n’ont manifestement aucune connaissance en matière nautique et que leur présence n’était pas ainsi que l’a retenu le premier juge indispensable, il ne saurait être considéré que le choix personnel qu’ils ont opéré relève des frais liés à la vente.

Sur les travaux d’amélioration et de réparation du navire de juillet à novembre 2013, les consorts Dars-Mandron qui ont accepté le bateau dans l’état dans lequel il se trouvait et ont, soit réparé des désordres apparents soit amélioré selon leurs desiderata le bateau, ne peuvent venir réclamer des sommes qui répondent à leurs choix personnels.

Sur les frais de déménagement, à l’instar du premier juge, la cour d’appel constate que le projet de vie des consorts Dars-Mandron se poursuit en Martinique malgré la perte du bateau. Il n’est donc pas démontré qu’ils ont à ce titre subi un préjudice.

Sur les pertes locatives, il ne peut qu’être constaté, outre le fait que le consorts Dars-Mandron ne versent aucun justificatif sur la réalité de leur activité en qualité de loueurs de bateau, que les attestations de M. [C], Mme [D] et Mme [Y], versées aux débats, ne sont corroborées par aucun contrat de location si bien que la preuve du tarif de location qui leur avait été appliqué resté inconnu et que la copie d’écran sur les tarifs de location de catamaran pratiqués en Martinique en 2020/21 n’est d’aucune utilité pour démontrer la réalité de leur préjudice.

Sur les frais d’acquisition d’un véhicule, les consorts Dars-Mandron ne sauraient contester que, quel que soit l’état du bateau, il leur était nécessaire pour leurs déplacements quotidiens, de disposer d’un véhicule. Cette demande ne peut donc être considérée comme relevant des frais liés à la vente.

Sur l’appel en garantie :

M. et Mme [X] font grief à la décision entreprise de les avoir déboutés de leur appel en garantie, alors qu’ils ont acheté le catamaran litigieux de seconde main à M. [T] [S] et qu’ils disposent d’une action en garantie des vices cachés à son égard puisqu’en cas de ventes successives d’un matériel d’occasion, la garantie du vendeur initial peut être retenue si les vices cachés, constatés alors que la chose vendue était la propriété du dernier acquéreur, existaient lors de la première vente.

Subsidiairement, ils demandent que la cour fasse application de jurisprudence de la Cour de cassation selon laquelle ce délai de prescription ne commence à courir qu’à compter du jour où le vendeur intermédiaire est assigné par l’acheteur final (Civ 3, 6 décembre 2018, n°17-24.111, Cass. Civ. 3 ème , 16 février 2022, n° 20-19.047, publié au bulletin).

Vu les articles 1648 et 2244 du code civil, L. 110-4 du code de commerce,

L’arrêt n° 20-21.439 rendu le 8 décembre 2021 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation ne saurait recevoir application à l’espèce. En effet, cet arrêt concerne un contrat conclu le 13 octobre 2013 soit aprés l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 qui a réformé les délais de prescription. La Cour de cassation y explique qu’avant l’entrée de vigueur de ladite loi, « la garantie légale des vices cachés, qui ouvre droit à une action devant être exercée dans les deux ans de la découverte du vice, devait également être mise en ‘uvre à l’intérieur du délai de prescription extinctive de droit commun. »

Quant à l’arrêt n° 20-19,047 du 16 février 2022, il fait application de l’article L. 110-4 du code de commerce qui ne trouve pas application à l’espèce qui concerne une vente entre des parties non commerçantes.

Ainsi, il est constant que M. et Mme [X] ont assigné M.[T] [S] en intervention forcée le 24 mars 2016 soit 21 mois après le dépôt en date dudit rapport d’expertise judiciaire.

L’action résultant des vices rédhibitoires en application de l’article 1648 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, n’a pas été intentée par les acquéreurs dans un bref délai. Elle est donc prescrite comme étant tardive et en conséquence irrecevable.

S’agissant de la prescription de droit commun, qui était lors de la vente de trente ans, s’est vue ramenée par l’effet de la loi du 17 juin 2008 à 5 ans. Le délai a commencé à courir le 14 novembre 1998. A compter de l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, il n’était pas expiré. Un nouveau délai a recommencé à courir à compter du 19 juin 2008, date d’entrée en vigueur de la nouvelle loi et a expiré le 19 juin 2013. L’assignation en intervention forcée en date du 24 mars 2016 est donc prescrite et en conséquence irrecevable.

La décision sera en conséquence également confirmée sur ce point.

Sur la demande de dommages-intérêts de M. [T] [S] :

M. [T] [S] fait grief au jugement ont appel de l’avoir débouté de sa demande de dommages-intérêts alors que l’action de M. et Mme [X] à son encontre est manifestement abusive.

Il ne suffit pas d’affirmer qu’une action est manifestement abusive pour obtenir réparation d’un préjudice qui n’est pas démontré.

La décision sera en conséquence confirmée sur ce point.

Sur les demandes accessoires :

Succombant à l’action, M. et Mme [X] seront, en application de l’article 696 du Code de procédure civile, condamnés aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt mis à disposition,

HOMOLOGUE le rapport d’expertise de M. [Z],

CONFIRME le jugement entrepris des chefs expressément dévolus, sauf pour ce qui concerne l’indemnisation au titre des frais d’expertise amiable,

Et statuant à nouveau :

CONDAMNE M. [F] [X] et Mme [B] [A] épouse [X] à payer à M. [H] [R] et Mme [P] [K] la somme de sept cent cinquante neuf euros et cinquante centimes euros au titre des frais d’expertise amiable,

CONDAMNE M. [F] [X] et Mme [B] [A] épouse [X] à M. [H] [R] et Mme [P] [K], ensemble, la somme de quatre mille cinq cents euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNE M. [F] [X] et Mme [B] [A] épouse [X] à M. [I] [T]-[S] la somme de mille cinq cents sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNE M. [F] [X] et Mme [B] [A] épouse [X] aux entiers dépens d’appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT

 


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