7 octobre 1997
Cour de cassation
Pourvoi n°
95-44.307
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Les Alizés, société à responsabilité limitée, dont le siège est …, en cassation d’un arrêt rendu le 8 juin 1995 par la cour d’appel de Rennes (8e chambre, section A), au profit de M. Bertrand de X…, demeurant …, défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l’audience publique du 11 juin 1997, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Besson, conseiller référendaire rapporteur, MM. Carmet, Bouret, conseillers, Mme Girard-Thuilier, Mme Lebée, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Barault, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Besson, conseiller référendaire, les observations de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la société Les Alizés, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que M. de X…, entré le 1er février 1990 au service du Groupe LG en qualité de skipper professionnel, est devenu salarié de la société Les Alizés, filiale du Groupe LG, à compter du 1er mai 1991 ;
qu’ayant participé en 1992 à la course en solitaire du Vendée globe challenge à la demande de son employeur, et ayant dû quitter la course pour se dérouter sur la Nouvelle-Zélande afin de faire vérifier et réparer son bateau, il a été considéré comme démissionnaire à compter du 28 février 1993, ayant regagné la France par avion ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Les Alizés fait grief à l’arrêt attaqué (Rennes, 8 juin 1995) d’avoir déclaré que le licenciement de M. de X… était dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que la manifestation d’insubordination du salarié, tel le fait de quitter son poste sans raison légitime, malgré l’opposition formelle manifestée par l’employeur, constitue une faute grave justificative du licenciement; qu’ainsi, en s’abstenant de rechercher si le fait pour M. de X… d’avoir pris la décision unilatérale de quitter l’Australie et de regagner la France par avion, motif invoqué dans la lettre de rupture et dont la réalité est constatée par l’arrêt attaqué, ne constituait pas une faute grave du salarié justifiant son licenciement, l’arrêt a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d’appel a relevé que M. de X…, qui n’était pas contractuellement tenu de rapatrier le navire, avait uniquement refusé de le convoyer en solitaire en raison des dangers inhérents à ce type de navigation; qu’elle a pu ainsi décider que son retour en France par avion ne constituait pas un abandon de poste et qu’il n’avait pas commis de faute ;
d’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Les Alizés fait encore grief à l’arrêt de l’avoir déboutée de sa demande tendant à voir M. de X… condamné à lui verser le prix d’un matériel qu’il n’avait pas restitué, alors, selon le moyen, que celui qui se prétend libéré d’une obligation lui incombant doit le prouver; qu’ainsi, en reconnaissant qu’un matériel avait été confié à M. de X… par l’employeur, mais en déboutant ce dernier de sa demande de restitution, motif pris de ce qu’il n’était pas établi que ce matériel n’aurait pas été restitué, la cour d’appel, qui a interverti la charge de la preuve, a violé l’article 1315 du Code civil ;