Skipper : 31 octobre 2017 Cour d’appel de Montpellier RG n° 15/03965

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Skipper : 31 octobre 2017 Cour d’appel de Montpellier RG n° 15/03965

31 octobre 2017
Cour d’appel de Montpellier
RG
15/03965

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1ère Chambre C

ARRET DU 31 OCTOBRE 2017

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/03965

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 AVRIL 2015

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

N° RG 10/01203

APPELANTES :

S.A MMA IARD (MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD) – dossier 15/4248 – représenté par son représentant légal en exercice domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Hervé LAROQUE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Société ARMANIEN NAUTILE PLAISANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me DE ARANJO MARILINA, avocat au barreau de PARIS substituant Me CHOISEZ, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

INTIMES :

Madame [D] [A] Veuve [S]

née le [Date naissance 1] 1947 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Patrick DAHAN de la SCP BECQUE-DAHAN-PONS-SERRADEIL-CALVET-REY, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et assistée de Me CALVET de la SCP BECQUE-DAHAN-PONS-SERRADEIL-CALVET-REY, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

Monsieur [F] [S]

né le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 5] (COTE D’IVOIRE)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 6]

représenté par Me Patrick DAHAN de la SCP BECQUE-DAHAN-PONS-SERRADEIL-CALVET-REY, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant et assistéde Me CALVET de la SCP BECQUE-DAHAN-PONS-SERRADEIL-CALVET-REY, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

Monsieur [N] [S]

né le [Date naissance 1] 1970 à [Localité 5] (COTE D’IVOIRE)

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 4]

représenté par Me Patrick DAHAN de la SCP BECQUE-DAHAN-PONS-SERRADEIL-CALVET-REY, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES avocat postulant et assistéde Me CALVET de la SCP BECQUE-DAHAN-PONS-SERRADEIL-CALVET-REY, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

Madame [X] [J] Veuve [X]

née le [Date naissance 3] 1958 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 8]

représentée par Me Jean Marc DARRIGADE de la SCP DARRIGADE, MALGRAS, DOLEZ loco Me Cyril MALGRAS, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me CASTAGN » avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Madame [B] [X]

née le [Date naissance 4] 1989 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 8]

représentée par Me Jean Marc DARRIGADE de la SCP DARRIGADE, MALGRAS, DOLEZ loco Me Cyril MALGRAS, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me CASTAGN » avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Monsieur [M] [X]

né le [Date naissance 4] 1990 à [Localité 10]

de nationalité Française

[Adresse 6]

[Localité 8]

représenté par Me Jean-Marc DARRIGADE de la SCP DARRIGADE, MALGRAS, DOLEZ loco Me Cyril MALGRAS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me CASTAGN », avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat plaidant

Monsieur [A] [W]

né le [Date naissance 5] 1951 à [Localité 11] ( ALLEMAGNE)

de nationalité Française

[Adresse 7]

[Localité 12]

représenté par Me Marie-Camille PEPRATX-NEGRE de la SCP ERIC NEGRE, MARIE- CAMILLE PEPRATX- NEGRE, avocats au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assisté de Me Carole OBLIQUE, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat plaidant

Société ARMANIEN NAUTILE PLAISANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 2]

[Localité 2]

représentée par Me Yann GARRIGUE de la SELARL LEXAVOUE MONTPELLIER GARRIGUE, GARRIGUE, LAPORTE, avocat au barreau de MONTPELLIER avocat postulant et assistée de Me DE ARANJO MARILINA, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Société UMS (UNDERWRITING AND MANAGEMENT SERVICES) anciennement YACHT BOX-Philip Knight & Co-France) société en liquidation représentée par son Liquidateur Mr [N] [C] domicilié ès qualité

[Adresse 8]

[Adresse 9]

[Localité 13]

représentée par Me Jacques-Henri AUCHE de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Société CENTENNIAL INTERNATIONAL COMPANY (CIC) société de droit étranger exercant à l’enseigne UMS et pour elle son représentant légal domicilié ès qualités

[Adresse 9]

[Localité 13]

assignée le 21 août 2015 à personne morale

SOCIETE QBE INTERNATIONAL LIMITED de Droit Anglais prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au siège social sis [Adresse 10] Royaume- Uni, prise par le biais de sa succursale en France QBE FRANCE sis

[Adresse 11]

[Adresse 12]

[Localité 14]

représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CHABANNES, SENMARTIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et assistée de Me Capucine BERNIER, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Société UNDERWRITING AND MANAGEMENT SERVICES anciennement YACHT BOX PHILIP KNIGHT § CO FRANCE exerçant à l’enseigne UMS

prise en la personne de son représentant légal en exercice domiciliée ès qualité audit siège

[Adresse 13]S

[Adresse 9]

[Localité 13]

assignée le 21/08/2015 à personne habilitée

S.A MMA IARD (MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD) représentée par son représentant légal en exercice domicilié ès qualités au dit siège

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER et assistée de Me Hervé LAROQUE, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 30 Août 2017

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 SEPTEMBRE 2017, en audience publique, monsieur Philippe GAILLARD, président de chambre ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du Code de procédure civile, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre

Madame Nathalie AZOUARD, Conseillère

Madame Leïla REMILI, Vice-présidente placée

auprès du Premier président de la cour d’appel de Montpellier par ordonnance n° 5/2017 du 2 janvier 2017

qui en ont délibéré.

Greffière, lors des débats : Madame Marie-Lys MAUNIER

ARRET :

– réputé contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ;

– signé par Monsieur Philippe GAILLARD, Président de chambre, et par Madame Marie-Lys MAUNIER, greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

Le 17 avril 2006 vers 23 heures, le catamaran de plaisance de

13 m « l’Accroch’C’ur » chavirait à proximité de la côte en se dirigeant vers son port d’attache [Localité 15] après une régate.

Deux personnes tombées à la mer étaient ultérieurement retrouvées décédées, l’épave avec encore quatre personnes à bord dérivait vers la côte, deux seront retrouvées sans vie à proximité de l’épave, et deux autres réussissaient à gagner la terre et à donner l’alerte au matin.

Ainsi, quatre personnes décèderont ([J] [G], [T] [X], [K] [S], [U] [I]), deux survivront ([A] [W] et [R] [T]).

[A] [W] et sa compagne [J] [G] avaient acquis le navire par un contrat de location avec option d’achat avec une société CGL, et le 3 avril 2000 ils avaient fait apport du bateau à une société en participation CAT2R.

Une procédure pénale ouverte en Espagne s’est terminée par un non-lieu par arrêt de la cour d’appel de Gérone du 6 octobre 2008.

Un rapport du bureau d’enquête (BEA mer) donne des indications sur un faisceau de causes du sinistre, conjuguant des effets naturels comme l’état de la mer avec une brusque survente et changement de direction du vent, aggravés par l’obscurité de la nuit, des erreurs dans la conduite du navire (surface de voilure), des équipements manquants (gilets de sécurité, balise de radio localisation, VHS), inadaptés (gréement excessivement renforcé) ou en dysfonctionnement (moyens de signalisation, radeau de sauvetage)’

L’instance judiciaire engagée réunit les parties suivantes :

les ayants droits de [K] [S] : sa veuve [D] [A] ; ses enfants [F] [S] et [N] [S] ;

les ayants droits de [T] [X] : sa veuve [X] [J] ; ses enfants [B] [X] et [M] [X] ;

[A] [W], skipper et propriétaire du navire ;

la compagnie MMA assureur de la Fédération française de voile dont [A] [W] est adhérent ;

la société de droit étranger Centennial International Company (CIC) assureur de CAT2R et [A] [W], et son agent souscripteur (statut de mandataire de l’assureur) la société Underwriting Management Services (UMS) représentée par son liquidateur [N] [C], et le courtier qui a souscrit pour CAT2R la société Armanien Nautile Plaisance (ANP) ;

la société de droit étranger QBE International l’assureur de Underwriting Management Services ;

parties présentes en première instance mais pas dans l’instance d’appel : la Fédération catalane de voile qui avait organisé la régate et son assureur Mutua Général Seguros.

Le jugement rendu le 28 avril 2015 par le tribunal de grande instance de Perpignan énonce dans son dispositif :

Déclare recevable l’action en responsabilité et dommages-intérêts de [D] [A], [F] [S], [N] [S], [X] [J], [B] [X].

Déclare [A] [W] responsable des conséquences dommageables du naufrage du voilier et des décès de [K] [S] et [T] [X].

Condamne [A] [W] à payer les sommes suivantes :

à titre de dommages-intérêts pour le préjudice moral

15 000 € à [B] [X]

15 000 € à [M] [X]

25 000 € à [X] [J]

15 000 € à [F] [S]

15 000 € à [N] [S]

25 000 € à [D] [A]

au titre du préjudice économique

51 660 € à [B] [X]

240 321,60 € à [X] [J]

57 139,20 € à [M] [X]

Dit que les sociétés MMA, UMS, CIC, ANP, seront condamnées à garantir [A] [W] de toutes les condamnations relevant de sa responsabilité.

Dit n’y avoir lieu à mettre en ‘uvre la limitation de responsabilité des assureurs au regard de la convention de Londres.

Met hors de cause la QBE International et déclare irrecevables les demandes de la MMA à son encontre.

Dit qu’en l’état il n’y a pas lieu à l’application de l’article

L 121-4 al 5 du code des assurances.

Met hors de cause la Fédération catalane de voile et la Mutua Général Seguros.

Déboute la Fédération catalane de voile de sa demande de dommages-intérêts à l’encontre de la MMA.

Condamne [A] [W] à payer la somme de 1000 € à chacun des demandeurs, [D] [A], [F] [S], [N] [S], [X] [J], [B] [X], au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne la MMA à payer la somme de 1000 € à QBE International, et de 500 € à la Mutua Général Seguros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamne [A] [W] aux entiers dépens.

Dit que les sociétés MMA, UMS, CIC, ANP, devront garantir [A] [W] au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.

Le jugement retient en substance les motifs suivants utiles au litige devant la cour :

La décision pénale en Espagne ne retient pas une qualification d’infraction, de sorte qu’en application des articles 3 et 4 du code de procédure pénale en France l’action civile reste ouverte aux victimes sur les fondements des articles 1382 et 1384 du Code civil.

[A] [W] avait en qualité de skipper la direction du navire, les pièces des débats et notamment le rapport d’enquête technique de BEA mer démontrent une conjonction de mauvais choix, dont le juge fait une énumération précise à laquelle la cour renvoie les parties, caractérisant des négligences et des fautes de nature à retenir sa responsabilité entière, sans pouvoir invoquer utilement une théorie d’acceptation des risques ou une cause étrangère.

Le montant des préjudices économiques des ayants droits de [T] [X] est calculé sur la base d’une perte annuelle de revenus de 36 000 € au regard du barème de capitalisation et d’une poursuite des études jusqu’à 25 ans pour les enfants, du barème de rente viagère pour la veuve.

La MMA est déboutée de sa demande de limitation de garantie conformément à la convention de Londres à hauteur de 204 245 €, au motif d’une part qu’elle s’est engagée contractuellement en toute connaissance de cause sur une limitation de garantie supérieure de 10 millions d’euros par un avenant du 1er janvier 2006, d’autre part qu’un décret du 22 septembre 2007 (article 7) d’application immédiate a porté la limitation de la convention de Londres à un seuil pour les créances résultant de la mort des passagers nées d’un même événement pour un navire autorisé à transporter huit personnes à la somme de 1 502 707 €.

[A] [W] avait signé le 15 novembre 2005 par l’intermédiaire d’un courtier ANP un contrat d’assurance « yachtbox » par un souscripteur maritime UMS avec la société CIC ; la preuve n’étant pas rapportée de l’exequatur en France d’une liquidation de la société CIC le 27 avril 2011 par la cour suprême [Localité 16] celle-ci doit être condamnée à la réparation des dommages aux fins d’une éventuelle fixation de créance à la liquidation prévue par la décision de la cour suprême ; la responsabilité du courtier ANP est fondée sur la faute d’avoir retenu pour son client la compagnie CIC alors qu’il devait savoir que située hors de l’union européenne elle devait bénéficier d’un agrément pour exercer une activité en France ; la MMA n’est pas recevable à demander l’application de la garantie contractuelle par QBE de la responsabilité civile de UMS et ANP en application de l’article L 124-3 du code des assurances tant que MMA n’a pas intégralement payé les préjudices de ses assurés.

La société Armanien Nautile Plaisance a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 27 mai 2015 (dossier 15/3965).

La société Mutuelles du Mans Assurances (MMA) a relevé appel du jugement par déclaration au greffe du 9 juin 2015 (dossier 15/4248).

Il conviendra d’ordonner la jonction des deux procédures en appel concernant le même jugement et les mêmes parties.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 30 août 2017.

Les dernières écritures pour [X] [J], [B] [X], [M] [X], ont été déposées le 30 août 2017.

Leur conseil a déposé des écritures après clôture du

7 septembre 2017, identiques aux précédentes mais avec une pièce supplémentaire n°20 le livret de famille.

Les dernières écritures pour [D] [A], [F] [S], [N] [S], ont été déposées le 28 août 2017.

Les dernières écritures pour [A] [W] ont été déposées le

2 novembre 2015.

Les dernières écritures pour la société MMA ont été déposées le 30 août 2017.

Les dernières écritures pour la société UMS ont été déposées le

10 août 2017.

Les dernières écritures pour la société ANP ont été déposées le

29 août 2017.

Les dernières écritures pour la société QBE ont été déposées le

21 août 2017.

La société CIC exerçant à l’enseigne UMS n’a pas constituée.

Elle a reçu la signification de la déclaration d’appel par acte d’huissier délivré le 21 août 2015 à personne habilitée, puis par d’autres actes délivrés à étude par d’autres parties le 4 septembre, le 29 septembre, le 14 et 15 octobre.

L’arrêt sera rendu réputé contradictoire.

Le dispositif des écritures pour [X] [J], [B] [X], [M] [X], énonce :

Confirmer le jugement en ce qu’il a condamné [A] [W] à payer à [X] [J] 25 000 € pour le préjudice moral, et au titre du préjudice économique 51 660 € à [B] [X], 240 321,60 € à [X] [J], 57 139,20€ à [M] [X], ainsi que les condamnations à garantir et au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et sur l’exclusion de la limitation de responsabilité des assureurs au regard de la convention de Londres.

Dire que la responsabilité de [A] [W] sera retenue sur le fondement de l’article 1384 alinéa 1 du Code civil.

Infirmer le jugement en ce qu’il a alloué 15 000 € à [B] et [M] [X], et dire qu’il y aura lieu de leur allouer à chacun la somme de 25 000 €.

Condamner [A] [W] à payer à [X] [J], [B], [M] [X], une somme de 4500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile s’agissant de la procédure d’appel.

Ils exposent que le jour du drame d’autres voiliers revenant comme « l’Accroch’C’ur » de la régate ont choisi devant la dégradation des conditions météorologiques de rentrer s’abriter dans des ports de la côte, et développent dans leurs écritures l’argumentation des choix fautifs du skipper retenus par le jugement, notamment mis en évidence par l’enquête pénale de la juridiction espagnole, pour retenir la responsabilité de [A] [W] gardien du navire sur le fondement du premier alinéa de l’article 1384 du Code civil.

Le dispositif des écritures pour [D] [A], [F] [S], [N] [S], énonce :

Confirmer en son principe le jugement, constater l’insuffisante prise en compte des préjudices.

Fixer le montant des préjudices à 25 000 € pour chacun des frères [F] et [N] [S], et pour [D] [A].

Condamner la compagnie MMA au paiement des sommes.

Condamner la compagnie MMA en raison de sa résistance abusive à 10 000 € de dommages-intérêts, et 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ils fondent sur la même appréciation des faits leurs prétentions sur la responsabilité résultant des fautes du skipper en application de l’article 1382 du Code civil, éventuellement au subsidiaire également l’article 1384.

Le dispositif des écritures pour [A] [W] énonce :

Débouter la société ANP de ses demandes relatives à l’autorité de la chose jugée, et en conséquence déclarer recevables les demandes en garantie formulées à son encontre.

Réformer au principal le jugement en ce qu’il a retenu la responsabilité de [A] [W] dans la survenance de l’accident.

Constater que le naufrage relève d’un cas de force majeure climatique, et dire qu’il y a lieu de faire application de la théorie de l’acceptation des risques par les victimes.

En conséquence débouter les consorts [S] et [X] de l’ensemble de leurs demandes.

À titre subsidiaire, confirmer le jugement en toutes ses dispositions, prendre acte que la compagnie d’assurances MMA ne conteste pas la garantie responsabilité civile de [A] [W] en qualité de licencié de la Fédération française de voile.

Débouter la société ANP de ses demandes à son encontre.

Lui donner acte qu’il s’en remet quant au quantum des dommages-intérêts sollicités par les victimes.

En toutes hypothèses, condamner la partie succombant à lui payer une indemnité de 5000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens avec droit de recouvrement direct en application de l’article 699 du code de procédure civile.

[A] [W] oppose à l’irrecevabilité de ses demandes invoquée par la société ANP au regard de l’autorité de la chose jugée de l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence que celle-ci ne s’est prononcée que sur les dommages matériels, demandes rigoureusement différentes de la réparation du préjudice corporel.

Il conteste les fautes qui lui sont imputées dans la direction du navire et considère que le dommage résulte d’un enchaînement de fatalités qu’il énumère, mais aussi d’une situation de force majeure caractérisée par une violence soudaine et irrésistible du vent, une résistance trop forte du gréement qui a maintenu la pression sur les voiles, alors qu’avant l’accident la navigation était tranquille et que même les bulletins météo alarmistes n’établissent pas des certitudes.

Il soutient l’application à l’espèce de la théorie de l’acceptation des risques par les victimes dans leur participation à cette navigation à la voile, alors que toutes les consignes de sécurité avaient été données à des coéquipiers déjà chevronnés qui ont accepté de poursuivre la route en connaissance de cause de l’information sur les prévisions météorologiques défavorables.

Il rappelle la garantie contractuelle de la MMA, et demande de confirmer celles de la société ANP qui a proposé dans sa prestation de courtier d’assurer le navire auprès de la compagnie CIC sans avoir vérifié son agrément pour une activité en France.

Le dispositif des écritures pour la société MMA énonce :

Infirmer le jugement, mettre hors de cause [A] [W] et la compagnie MMA, et ordonner la restitution des sommes versées au titre de l’exécution provisoire, outre les intérêts au taux légal.

Subsidiairement, vu la convention de 1976 sur la limitation de responsabilité en matière de créance maritime transposée en droit interne par la loi du 3 janvier 1967 modifiée par la

loi du 15 décembre 1986 relative au statut des navires et autres bâtiments, dire que toute condamnation à l’encontre de la MMA et de [A] [W], skipper et propriétaire du navire, ne pourront excéder la contre-valeur en euros de 166 500 DTS soit 204 245,55 €, soit le montant du fonds de limitation de responsabilité du navire « l’Accroch’C’ur » suivant ordonnance du président du tribunal de commerce de Perpignan du 11 juillet 2014.

En tout état de cause, condamner in solidum ANP, UMS, QBE, soit à prendre directement en charge les préjudices soit à garantir la MMA de toute condamnation.

Condamner in solidum QBE, en qualité d’assureur responsabilité civile de UMS et Maître [N] [C] liquidateur de UMS et en qualité d’assureur responsabilité civile de ANP, avec MMA, à prendre directement en charge les préjudices au titre des règles des assurances cumulatives.

En tout état de cause, condamner tout succombant en application de l’article 700 du code de procédure civile à payer une somme de 20 000 € à la MMA, et aux entiers dépens.

La MMA expose que le navire était assuré selon un certificat établi par ANP par un contrat du 15 novembre 2005 auprès de la société de droit anglais CIC sur du papier à en-tête de USM, avec une responsabilité civile et un avenant spécifique pour garantir la navigation spéciale pour cette régate au retour de laquelle l’accident s’est produit, que la société ANP a été condamnée par la cour d’appel d’Aix-en-Provence à indemniser le préjudice matériel de son assuré [A] [W] au motif d’avoir placé un risque auprès d’une compagnie ne possédant pas d’agrément.

Elle soutient l’argumentation de l’absence de faute de son assuré, de la force majeure et de l’acceptation des risques.

Elle écarte également la responsabilité de l’article 1384 du Code civil, en ce qu’elle suppose un fait positif de la chose (le navire) ou une anormalité dans son comportement ou sa structure, de nature à expliquer le dommage. Elle observe que le navire était à l’état neuf parfaitement entretenu.

Elle demande à titre subsidiaire l’application de la limitation du montant de la responsabilité en application de la Convention de Londres en relevant que le jugement se réfère à tort à un décret du 22 septembre 2007 qui ne peut pas être applicable pour un accident survenu antérieurement, qu’une ordonnance du président du tribunal de commerce de Perpignan du 11 juillet 2014 a ouvert la procédure de constitution du fonds de limitation évalué à 204 245,55 € dans la limite duquel le liquidateur répartira l’indemnisation de tous les intéressés proportionnellement à leur préjudice, et que par ailleurs l’article 7 de la Convention de Londres de 1976 ne s’applique qu’aux créances d’un contrat de transport de passagers ou de marchandises.

Elle soutient que l’engagement maximum de l’assureur pour un plafond de garantie plus élevé ne fait pas obstacle à l’application des limitations légales de responsabilité.

La responsabilité du dommage par la société ANP résulte de sa faute d’avoir retenu la compagnie CIC dépourvue d’agrément pour opérer sur le territoire français et par ailleurs insolvable depuis sa liquidation.

La responsabilité de la société UMS est engagée en tant que détenteurs de l’autorité de souscription.

QBE est à la fois assureur de UMS et de ANP et doit rester tenue à garantie sur le fondement de l’article L 121-4 du code des assurances qui organise la contribution des assureurs dans une situation de cumul d’assurance pour un même assuré et un même risque, au titre de la subrogation de plein droit au profit de l’assureur qui a intérêt à acquitter la dette pour la compagnie assurée défaillante.

Le dispositif des écritures pour la société UMS énonce :

Constater l’absence de demandes de [A] [W] devant le premier juge, et l’irrecevabilité de la totalité des actions incidentes de toute partie en découlant à son encontre.

Constater que le tribunal a statué ultra petita.

En conséquence, mettre UMS hors de cause.

Subsidiairement, dire l’intermédiateur d’assurance UMS dépourvu de qualité pour défendre la garantie de la compagnie CIC, et l’action en recherche de garantie d’assurance irrecevable à son encontre, infirmer le jugement qui a retenu sa responsabilité solidaire et la mettre hors de cause.

Très subsidiairement, condamner QBE à garantir UMS de toute condamnation.

Constater l’absence de fautes de nature à exclure l’application du fonds de limitation du propriétaire du navire, infirmer le jugement et faire application du fonds à concurrence de sa contre-valeur invoquée.

Partager la charge du sinistre entre les assureurs en risque en application de l’article L 121-4 alinéa 5 du code des assurances.

UMS expose qu’elle est un intermédiaire d’assurance courtier sans rapport avec le public non tenue des obligations du code des assurances, disposant seulement d’un mandat de souscription comme intermédiaire grossiste entre les courtiers en contact avec le public et l’assurance CIC, et que devant le premier juge [A] [W] n’a conclu qu’à sa condamnation subsidiaire in solidum avec MMA et CIC après avoir constaté la défaillance de garantie de cette dernière, de sorte que le jugement a statué ultra petita au nom d’une recherche de garantie d’assurance de UMS.

L’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 26 mai 2009 (sur référé) a démontré toute absence de responsabilité de l’intermédiateur d’assurance UMS.

La faute reprochée de la souscription alors qu’elle avait connaissance du défaut d’agrément de CIC ne peut pas écarter la garantie contractuelle de son assureur QBE en l’absence de rapport de causalité direct et certain entre le défaut d’agrément de CIC et son défaut financier, et alors que QBE ne l’a pas alerté sur les difficultés de CIC qu’elle ne pouvait pas ignorer.

Elle soutient l’argumentation de l’absence de faute du skipper, et en tout cas d’une limitation du montant global indemnisable en application de la convention de Londres.

En application de l’article L 121-4 du code des assurances, la cour devra en tout cas faire application de la répartition sur les assurances cumulatives (partage par tiers).

Le dispositif des écritures pour la société QBE énonce :

Confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la mise hors de cause de QBE, en ce qu’il a retenu [A] [W] responsable des dommages en qualité de gardien du bateau.

Condamner en conséquence la MMA à prendre en charge l’intégralité des conséquences dommageables du sinistre.

Faire application des limites de responsabilité prévues par la convention de Londres du 20 novembre 1976.

Dire que la MMA est infondée à exercer un recours à l’encontre des sociétés ANP, UMS, QBE, et débouter toutes les parties de leurs demandes à l’encontre de celles-ci.

Subsidiairement, dire que le contrat de responsabilité civile professionnelle souscrit par UMS auprès de QBE n’a pas vocation à couvrir l’activité d’agent souscripteur maritime de l’assuré, et en conséquence dire QBE non tenue de garantir UMS.

Subsidiairement dire que la société UMS a commis une faute dolosive au sens du droit positif, de sorte que la compagnie QBE est fondée à lui opposer une exclusion de garantie.

Condamner toute partie succombant à verser à QBE 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens, dont distraction en application de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SELARL Chabannes Senmartin.

QBE reconnaît sa qualité d’assureur de UMS et ANP, retient la responsabilité entière de [A] [W] sur le fondement de l’article 1384 du Code civil, avec une présomption du rôle causal de la chose en mouvement au bénéfice des victimes.

Elle soutient que la garantie contractuelle des dommages de son assuré par MMA non contestée ne laisse aucun préjudice aux victimes à l’encontre des sociétés UMS et ANP et QBE, et ne permet pas d’invoquer une faute de ses assurés UMS et ANP en lien causal avec un préjudice qui n’aurait pu résulter que d’un défaut d’indemnisation, l’indemnisation résultant d’une obligation contractuelle en contrepartie des primes perçues ne constituant pas un préjudice.

MMA ne dispose pas d’une subrogation dans les droits de l’assuré contre un éventuel tiers responsable à l’encontre de UMS et ANP ou QBE dont la faute invoquée d’avoir recherché la garantie de CIC est sans lien causal avec les dommages.

Elle ne peut pas non plus se fonder concernant les préjudices corporels entièrement garantis par MMA sur la décision de l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence (2011) qui retient une responsabilité de la société ANP pour les dommages matériels qui ne pouvaient faire l’objet d’aucune garantie substituée à celle défaillante de CIC.

QBE rappelle que le souscripteur du contrat MMA est la Fédération française de voile et non pas [A] [W], alors que le souscripteur du contrat CIC est la société propriétaire de navire CAT2R, de sorte que les dispositions relatives aux assurances cumulatives n’ont pas vocation à s’appliquer.

QBE ajoute en subsidiaire qu’elle ne garantit pas la qualité d’agent souscripteur de UMS mandataire de la compagnie CIC, et en davantage subsidiaire que la garantie serait exclue par la faute de son assuré UMS qui a souscrit pour une compagnie dépourvue d’agrément dans les pays de l’union européenne.

Le dispositif des écritures pour la société ANP énonce :

Constater que le jugement du 28 avril 2015 n’a pas statué sur la demande d’irrecevabilité de la société ANP contre [A] [W], et dire la demande de garantie de celui-ci irrecevable au regard de l’autorité de la chose jugée par l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 14 septembre 2011.

Infirmer sur le fond le jugement en ce qu’il a condamné la société ANP à garantir [A] [W].

Constater que le jugement du 28 avril 2015 n’a pas statué sur la demande de la société ANP de garantie contre [A] [W], et les sociétés MMA et UMS, au titre des condamnations prononcées par l’arrêt du 14 septembre 2011 et celles qui pourraient être prononcées dans cette instance.

Débouter [A] [W] et la société MMA de leurs demandes à son encontre.

Débouter la société UMS de sa demande de mise hors de cause.

Condamner in solidum [A] [W] et les sociétés MMA, et UMS représentée par son liquidateur Maître [C] à garantir la société ANP de toute condamnation dans cette instance et prononcées par l’arrêt du 14 septembre 2011 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.

Condamner in solidum [A] [W] et les sociétés MMA, et UMS représentée par son liquidateur Maître [C], ou tout succombant, au paiement de la somme de 8000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamner in solidum [A] [W] et les sociétés MMA, et UMS représentée par son liquidateur Maître [C], ou tout succombant, aux entiers dépens de l’instance.

Elle soutient que [A] [W] devait formuler devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence une demande de garantie par ANP, et qu’elle n’est plus recevable à formuler dans cette instance au titre de l’obligation de concentration des moyens.

Elle reprend l’argumentation de son assureur QBE pour écarter la garantie d’une responsabilité fautive dans la souscription auprès de CIC alors que [A] [W] n’a pas eu de perte de chance d’obtenir une garantie dans l’espèce contractuellement réalisée par MMA, et alors que MMA n’est pas subrogée dans les droits de son assuré à l’encontre de ANP et qu’elle ne bénéficie pas des dispositions sur les assurances cumulatives en l’absence d’identité de souscripteurs.

À titre subsidiaire, elle demande l’application de la limitation d’indemnisation par la convention de Londres, conteste le calcul des montants d’indemnisation des préjudices économiques réclamés, retient la responsabilité du skipper sur le fondement de l’article 1384 du Code civil.

Elle soutient que la société USM souscripteur mandataire de la compagnie CIC est par conséquent responsable de la défaillance de son mandant.

MOTIFS

Sur la responsabilité de [A] [W]

L’article 1242 du Code civil (1384 dans la version du code en vigueur au moment du dommage) énonce le principe de la responsabilité du dommage causé par le fait des choses que l’on a sous sa garde.

[A] [W] avait lors du naufrage en mer la garde du navire, dans sa double qualité de propriétaire et de skipper.

Il ne peut s’exonérer de ce statut en prétendant que les autres passagers étaient eux-mêmes des marins chevronnés et qu’il n’était pas à la barre du navire au moment du naufrage, alors que sa double qualité lui donne une présomption de responsabilité du propriétaire de la chose, et plus nécessairement de gardien de la chose en mouvement qui ne peut être partagée du seul maître à bord dans la conduite d’un navire.

La mise en ‘uvre de cette responsabilité suppose la preuve d’un rôle causal de la chose, lequel bénéficie de la présomption de la chose en mouvement que constitue un navire en mer, contre laquelle le gardien devra apporter la preuve d’un rôle strictement passif.

Dans l’espèce, il ne peut pas être sérieusement contesté que le naufrage du navire caractérise un rôle actif dans la cause de la noyade en mer de [T] [X] et [K] [S].

[A] [W] ne peut pas davantage prétendre s’exonérer de sa responsabilité de gardien du navire par l’imprévisibilité ou l’irrésistibilité d’une cause étrangère ou de la force majeure, alors que l’aléa des conditions météorologiques et de l’état de la mer qui peut en découler est une constante reconnue de la navigation, et que lui-même reconnaît sans ambiguïté qu’il avait eu connaissance d’un risque météorologique mais que les passagers avaient choisi de poursuivre néanmoins leur navigation pour rejoindre plus vite le port d’attache.

Il n’est pas non plus établi un caractère irrésistible d’une tempête exceptionnelle, alors que le rapport technique du BEA développe sans être sérieusement critiqué des observations sur des choix de mode de navigation qui auraient pu notablement diminuer le risque, surface de voilure, diminution de la profondeur de la dérive, navigation trop près des côtes, rejet du choix de s’abriter au plus vite dans le port le plus proche’

Le moyen également soulevé d’une acceptation des risques par les passagers du navire n’est pas opérant dans l’application du principe de responsabilité sans faute du gardien de la chose.

La cour retiendra en conséquence la responsabilité de [A] [W] sur le fondement de sa qualité de gardien du navire invoqué en principal ou en subsidiaire dans les débats en première instance et en appel.

La responsabilité retenue rend sans objet les discussions des parties sur la pertinence d’une responsabilité pour faute appréciée dans les motifs du premier juge sur le fondement des articles 1382 et 1383 du Code civil (aujourd’hui 1240 et 1241).

Sur les montants des préjudices

Le jugement de première instance a retenu pour l’indemnisation du préjudice moral des ayants droits de [T] [X] et [K] [S] un montant de 25 000 € pour leurs conjoints respectifs [X] [J] et [D] [A], et de 15 000 € pour chacun des enfants.

Les ayants droits des victimes décédées réclament de porter à 25 000 € l’indemnisation pour les enfants.

Ni [A] [W] ni les compagnies d’assurances ne formulent de critique de l’appréciation du jugement déféré.

La cour fait l’appréciation de confirmer les montants d’indemnisation du jugement déféré qui apparaissent conformes à la jurisprudence concernant des enfants déjà adultes indépendants du foyer de leurs parents.

La cour observe que les montants d’indemnisation alloués en première instance en réparation du préjudice économique de [X] [J] et ses enfants [B] [X] et [M] [X] ne sont critiquées en appel ni dans les prétentions des victimes ni dans celles de [A] [W] et des compagnies d’assurances.

La société ANP argumente dans ses écritures une critique des montants alloués mais sans la traduire dans son dispositif par une prétention particulière à une évaluation différente au-delà de la mention de principe de « dire que [A] [W] et MMA ne justifient pas de leurs préjudices », qui ne caractérise pas sérieusement une critique opérante du jugement déféré.

Sur les garanties des compagnies d’assurances

[A] [W] demande au subsidiaire du dispositif de ses

écritures en appel la confirmation du jugement déféré, lequel a notamment prononcé une condamnation solidaire des sociétés MMA, UMS, CIC, ANP, à le garantir de toutes les condamnations relevant de sa responsabilité.

La société MMA demande de condamner in solidum ANP, UMS, QBE, soit à prendre directement en charge les préjudices soit à garantir MMA de toute condamnation.

La société MMA ne conteste pas sa garantie contractuelle de l’indemnisation des dommages des ayants droits des victimes décédées, en qualité d’assureur de la fédération française de voile dont [A] [W] était adhérent.

La cour observe que les responsabilités recherchées contractuelles ou délictuelles des sociétés CIC, UMS, ANP, QBE, dans la prise en charge ou la garantie du paiement de l’indemnisation des ayants droits des victimes du naufrage, se rattachent au lien contractuel distinct du contrat d’assurance du navire souscrit par la société CAT2R auprès de la société de droit américain CIC, par l’intermédiaire du mandataire souscripteur de celle-ci UMS, sur la proposition du courtier ANP, QBE étant assureur d’ANP et UMS.

Il n’est pas contesté que le contrat d’assurance souscrit auprès de la société CIC n’avait pas d’effet utile pour l’indemnisation des préjudices en France à défaut de l’agrément nécessaire.

Dans l’espèce la garantie contractuelle de la société MMA couvre l’indemnisation de l’entier préjudice des victimes, de sorte que son assuré [A] [W] (par sa qualité d’adhérent à la fédération française de voile) n’a pas d’intérêt à rechercher la garantie distincte de l’assureur du navire pour un risque identique déjà indemnisé.

Par ailleurs, la société MMA n’a pas d’intérêt à agir à l’encontre des sociétés UMS, ANP, QBE, pour la garantir du paiement d’une indemnisation qui résulte de la stricte application de son obligation contractuelle dont la cause se trouve dans la contrepartie des primes perçues, et ne caractérise donc pas un préjudice pour elle.

Elle n’est pas davantage bénéficiaire d’une subrogation dans des droits de son assuré qui pourrait seulement concerner un tiers responsable également du dommage.

Elle n’est pas fondée en qualité d’assureur de la fédération française de voile, par un contrat couvrant la responsabilité civile des adhérents dont [A] [W], à prétendre au bénéfice des contributions respectives des assurances cumulatives en l’absence d’identité de souscripteurs avec l’assurance prise auprès de la compagnie CIC par la société CAT2R/[A] [W], société en participation créée avec sa compagne, qui plus est inefficace à indemniser les préjudices en France.

Les fautes qui pourraient être recherchées contre les autres compagnies d’assurances à l’origine de l’inefficacité de la garantie CIC ne caractérisent pas un risque identique à l’indemnisation des dommages résultants du naufrage condition nécessaire pour le bénéfice des assurances cumulatives.

En tout état de cause MMA ne démontre pas une perte de chance d’obtenir ce bénéfice à l’encontre d’une société CIC à laquelle aucune garantie ne peut être utilement réclamée au soutien de sa prétention dans le dispositif de ses écritures à une condamnation in solidum des sociétés UMS, ANP, QBE.

Le débouté de [A] [W] et de la compagnie MMA de leurs demandes de garantie auprès de l’assureur du navire et des compagnies d’assurances liées à la souscription de ce contrat implique que deviennent sans objet utile dans le litige l’argumentation de la société ANP sur l’irrecevabilité des prétentions de [A] [W] au regard de l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, et sur les demandes de garantie de cette société, l’argumentation de la société UMS sur l’irrecevabilité des prétentions de [A] [W], l’ensemble des argumentations des compagnies d’assurances pour faire écarter leurs fautes contractuelles ou délictuelles.

La cour précise que l’arrêt rendu le 14 septembre 2011 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence prononce une condamnation de la société ANP concernant exclusivement la réparation des dommages causés au navire qui ne sont pas en litige dans cette instance, de sorte que pour ce motif également la demande de cette société d’être garantie de cette condamnation n’est pas dans l’objet du litige.

La société ANP ne serait pas recevable par ailleurs à réclamer devant cette cour cette garantie qu’elle n’a pas sollicitée devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence sur le même motif de l’obligation de concentration des moyens dont elle s’empare elle-même à son bénéfice pour demander d’écarter la prétention de [A] [W] à son encontre.

Sur l’application de la convention de Londres

Le jugement déféré a rejeté la demande de limitation de garantie en application de la convention de Londres au motif, d’une part que la MMA s’est engagé contractuellement en connaissance de cause par un avenant du 1er janvier 2007 sur une limitation de garantie à un montant supérieur aux préjudices retenus, d’autre part que le décret du 22 septembre 2007 d’application immédiate a porté également à un montant supérieur la limitation de la convention de Londres dans les conditions du sinistre.

La société MMA oppose sur le premier motif que l’engagement de l’assureur pour un plafond de garantie ne peut pas faire obstacle à l’application des dispositions légales de limitation de garantie d’indemnisation, sur le deuxième motif que le décret du

22 septembre 2007 ne peut pas s’appliquer pour un sinistre survenu antérieurement en avril 2006.

La cour observe que le caractère applicable en droit interne en France de la convention de Londres de 1976 sur la limitation de la responsabilité en matière de créances maritimes n’est pas contesté, de sorte qu’il doit en être déduit que les parties contractantes d’un contrat d’assurance ne sont pas autorisées à dépasser la limitation imposée par la convention internationale de 1976.

Il convient d’ajouter que le montant de garantie offerte par l’avenant du 1er janvier 2006 a une vocation d’application générale pour toute responsabilité, à laquelle la convention de Londres apporte une limitation spéciale pour le cas particulier des créances maritimes qui a valeur de loi en droit interne.

La cour observe ensuite que le décret visé par le premier juge du 22 septembre 2007 « portant publication du protocole modifiant la convention de 1976 », « considérant qu’il est souhaitable de modifier la convention afin d’offrir une indemnisation accrue » mentionne qu’il entre en vigueur 90 jours après la date à laquelle 10 États ont exprimé leur consentement, et 90 jours après la date du consentement pour chaque État, de sorte qu’il n’était pas en vigueur au moment du dommage résultant du naufrage du

17 avril 2006, date à laquelle doit être examiné le droit à indemnisation.

Dans ces conditions, le calcul qui n’est pas critiqué par les écritures des victimes, lesquelles demandent seulement la prévalence de la garantie du contrat sur la convention internationale, de l’évaluation par l’ordonnance du tribunal de commerce de Perpignan du 11 juillet 2014 du fonds de limitation de la responsabilité de créances maritimes en application de la convention de Londres en vigueur au moment du dommage survenu en avril 2006 à un montant de 204 245,55 € s’applique à l’obligation d’indemnisation de la compagnie d’assurances MMA et de son assuré [A] [W].

Ce montant sera assorti des intérêts au taux légal à compter des actes introductifs de première instance par lesquels les victimes ont engagé judiciairement leurs prétentions à la réparation de leur préjudice à l’encontre de [A] [W], soit la date du 26 février 2010 au bénéfice des ayants droits de [K] [S], et celle du 11 janvier 2011 au bénéfice des ayants droits de [T] [X].

La cour infirme en conséquence le premier juge en ce qu’il a rejeté la mise en ‘uvre de la limitation de responsabilité des assureurs par la convention de Londres.

Sur les autres prétentions

Les ayants droits de [T] [X] demandent pour chacun d’eux la condamnation de [A] [W] au paiement d’une somme de 4500 € pour les frais exposés en appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Les ayants droits de [K] [S] demandent sur le même fondement la condamnation de la compagnie MMA au paiement pour chacun d’eux d’une somme de 5000 €.

Il est équitable de mettre à ce titre à la charge de [A] [W] une somme de 4000 € au bénéfice de chacun des ayants droits de [T] [X], et à la charge de la compagnie MMA une somme de 4000 € au bénéfice de chacun des ayants droits de [K] [S], les victimes créancières depuis l’introduction de l’instance de l’indemnisation de leur préjudice n’ayant pas été appelantes.

Il convient également de confirmer les condamnations prononcées à ce titre en première instance.

En revanche, les ayants droits de [K] [S] ne fondent pas sur un préjudice distinct leur demande de dommages-intérêts à l’encontre de la compagnie MMA.

Il est équitable de laisser à la charge de chacune des autres parties les frais non remboursables exposés dans l’instance d’appel.

Dans la même appréciation, la cour infirme la condamnation prononcée en application de l’article 700 du code de procédure civile en première instance de la compagnie MMA au bénéfice de la société QBE International.

[A] [W] et la société MMA supporteront in solidum la charge des dépens de l’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe ;

Confirme le jugement rendu le 28 avril 2015 par le tribunal de grande instance de Perpignan, sauf :

en ce qui concerne les condamnations prononcées à l’encontre des sociétés CIC, UMS, ANP,

en ce qu’il condamne la société MMA à payer une somme de 1000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile à la société QBE International,

en ce qu’il dit n’y avoir lieu à mettre en ‘uvre la limitation de responsabilité des assureurs au regard de la convention de Londres.

Statuant à nouveau :

Dit qu’en application de la Convention de Londres la condamnation à l’indemnisation des préjudices de [A] [W] garantie in solidum par la société MMA s’exercera dans la limite d’un montant maximum de 204 245,55 €, assorti des intérêts au taux légal à compter du 26 février 2010 au bénéfice des ayants droits de [K] [S], à compter du 11 janvier 2011 au bénéfice des ayants droits de [T] [X].

Condamne sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en appel [A] [W] à payer à chacun des ayants droits de [T] [X] et la société MMA à payer à chacun des ayants droits de [K] [S], une somme de 4000 €.

Condamne in solidum [A] [W] et la société MMA aux dépens de l’appel, avec distraction en application de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SELARL Chabannes Senmartin pour la société QBE Insurance Limited.

LA GREFFIERE LE PRÉSIDENT

MM/PG

 


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