Les délais pour agir contre un commissaire-priseur

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Les délais pour agir contre un commissaire-priseur
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L’article L. 321-17 du code de commerce, dans sa rédaction applicable jusqu’au 12 février 2004, dispose (souligné par cette cour) que ‘les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et les officiers publics ou ministériels compétents pour procéder aux ventes judiciaires et volontaires engagent leur responsabilité au cours ou à l’occasion des ventes de meubles aux enchères publiques, conformément aux règles applicables à ces ventes.

Les clauses qui visent à écarter ou à limiter leur responsabilité sont interdites et réputées non écrites.

Les actions en responsabilité civile engagées à l’occasion des prisées et des ventes volontaires et judiciaires de meuble aux enchères publiques se prescrivent par dix ans à compter de l’adjudication ou de la prisée.’

Le dernier alinéa de cet article a été modifié par l’article 19 de la loi n° 2011-850 du 20 juillet 2011 et a ramené le délai de prescription à cinq ans à compter de l’adjudication ou de la prisée.

L’article 52 de la loi du 10 juillet 2000 disposait que ‘les actions en responsabilité civile engagées à l’occasion des ventes volontaires et judiciaires de meubles aux enchères publiques ainsi que des expertises correspondantes et des prisées, en cours à la date de la promulgation de la présente loi, se prescrivent par 10 ans à compter de cette date, à moins que la prescription ne soit acquise selon les règles applicables antérieurement à ce délai’.

L’article L.321-2 du code de commerce précise que ces ventes peuvent également être organisées et réalisées à titre accessoire par les notaires et les huissiers de justice, dans le cadre de leur office et selon les règles qui leur sont applicables. Ils ne peuvent être mandatés que par le propriétaire des biens.

L’article 2222, alinéa 2, du code civil dispose que ‘En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.’

Il résulte de ces textes que :

* depuis le 11 juillet 2000, les actions en responsabilité contre un commissaire-priseur ou une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques se prescrivent par dix ans à compter de l’adjudication,

* depuis le 21 juillet 2011, ces actions se prescrivent par cinq ans à compter de l’adjudication,

* ce délai ayant été réduit l’article 2222, alinéa 2, du code civil s’applique.

Ces lois sont d’application immédiate sauf dispositions transitoires particulières.


 

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRÊT N°

PAR DÉFAUT

Code nac : 50A

DU 09 MAI 2023

N° RG 21/01803

N° Portalis DBV3-V-B7F-UMJ6

AFFAIRE :

[Z] [B]

C/

[O] [K],

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Janvier 2021 par le Tribunal Judiciaire de VERSAILLES

N° Chambre : 02

N° Section : 00

N° RG : 18/07291

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-Me Franck LAFON,

-la SCP HADENGUE & ASSOCIES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [Z] [B]

née le 22 Avril 1928 à [Localité 12]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 7]

représentée par Me Franck LAFON, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20210116

Me Maïa KANTOR, avocat – barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Monsieur [O] [K], ès qualités de commissaire-priseur

[Adresse 4]

[Localité 6]

S.A.R.L. [O] [K] ENCHÈRES

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 3]

[Localité 13]

représentés par Me Pascale REGRETTIER-GERMAIN de la SCP HADENGUE & ASSOCIES, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98 – N° du dossier 1800747

Me Christophe LUCAS de la SCP D. BARRET – G. SULTAN – A. COLLIN – D. BOUCHERON – PH. TUFFREAU – P. BARRET, avocat – barreau d’ANGERS

Société VERMONT FINE ART

prise en la personne de M. [H] [A] domicilié au siège social

[Adresse 1]

[Adresse 2])

Défaillante

INTIMÉS

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 13 Février 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anna MANES, Présidente chargée du rapport et Madame Pascale CARIOU, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anna MANES, Présidente,

Madame Pascale CARIOU, Conseiller,

Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

********************************

FAITS ET PROCÉDURE

Le 19 mai 1991, une vente aux enchères publiques était organisée par M. [O] [K], alors commissaire-priseur à [Localité 8], à 1’occasion de laquelle a été présenté à la vente un tableau attribué à [G] [F], portant le titre de « La grande parade », exposé préalablement à la vente et figurant dans le catalogue de vente.

Auparavant, ce tableau, vendu par la [Adresse 9], avait fait l’objet d’une expertise par M. [J] [X], expert agréé près la cour d’appel de Paris, qui en avait certifié 1’authenticité.

M. et Mme [B] ont été déclarés adjudicataires de ce tableau au prix de 490 000 Francs, hors frais, soit 519 385 Francs, frais inclus.

Au début de l’année 2016, Mme [Z] [B], devenue seule propriétaire du tableau à la suite du décès de son époux, s’est rapprochée de l’étude de M. [O] [K], lui indiquant qu’une expertise réalisée en vue de la revente du tableau de [G] [F] acquis en 1991, aurait révélé que ce dernier était un faux, l’oeuvre originale ayant été vendue par la société Sotheby’s en 1982 puis par la société Christie’s en 2005.

Par acte du 6 décembre 2016, elle a saisi le président du tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Nanterre, statuant en référé, d’une demande d’expertise judiciaire.

Une ordonnance du 21 mars 2017 a accueilli cette demande d’expertise et commis Mme

[N] pour y procéder.

L’expert a déposé son rapport le 2 octobre 2017. Il a conclu que l’oeuvre expertisée était un faux grossier, mais ne correspondait pas à l’oeuvre qui figurait dans le catalogue de vente de 1991.

Par acte d’huissier de justice du 25 octobre 2018, Mme [Z] [B] a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Versailles la société [Adresse 9], M. [O] [K] et la société [O] [K] enchères.

Par jugement réputé contradictoire rendu le 28 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a :

– Débouté Mme [Z] [B] de ses demandes comme étant non fondées en fait,

– Débouté M. [O] [K] et la société [O] [K] de leur demande de dommages et intérêts,

– Condamné Mme [Z] [B] aux entiers dépens, comprenant les frais d’expertise,

– Condamné Mme [Z] [B] à verser à M. [O] [K] et la société [O] [K] , ensemble, la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– Débouté les parties du surplus de leurs demandes,

– Dit n’y avoir lieu à exécution provisoire.

Mme [Z] [B] a interjeté appel de ce jugement le 17 mars 2021 à l’encontre de M. [O] [K], ès qualités de commissaire priseur, de la société [O] [K] enchères et de la société Vermont fine art.

Par ses dernières conclusions notifiées le 13 décembre 2022 (60 pages), Mme [Z] [B] demande à la cour, au fondement des articles 30 et suivants et 122 du code de procédure civile, 1er et 2 du code civil, 1108, 1109, 1110, 1304 et 1382 anciens du code civil, 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 3 du décret n° 81-255 du 3 mars 1981, de :

A titre liminaire :

– Déclarer que :

* elle apporte les éléments de fait nécessaires au succès de ses prétentions et que ses demandes sont fondées ;

* elle a intérêt et qualité à agir en sa qualité de propriétaire de la gouache litigieuse ;

* elle a intérêt et qualité à agir à l’encontre de M. [O] [K] à titre personnel ;

En conséquence,

– Censurer le jugement de première instance en sa totalité ;

– La déclarer recevable en toutes ses demandes ;

Sur l’action en nullité :

– Déclarer qu’elle a intérêt et qualité à agir en nullité du contrat de vente du 19 mai 1991 à l’encontre de Maître [O] [K] et de la société [O] [K] enchères PVE ;

– Déclarer que l’action en nullité du contrat de vente du 19 mai 1991 initiée par elle n’est pas prescrite ;

En conséquence,

– La déclarer recevable en toutes ses demandes au titre de la nullité du contrat de vente du 19 mai 1991 ;

– Prononcer la nullité du contrat de vente du 19 mai 1991 pour erreur sur les qualités substantielles de la chose ;

– Constater l’impossibilité pour elle d’obtenir la restitution du prix de vente auprès de la société [Adresse 9] ;

– Constater que M. [O] [K] et la société [O] [K] enchères ont commis une faute à l’origine de la nullité de la vente ;

En conséquence,

– Condamner in solidum M. [O] [K] et la société [O] [K] enchères à lui payer la somme de 115 152 euros au titre de la restitution du prix de la vente ainsi annulée ;

– Lui donner acte qu’elle restituera la gouache qu’elle a acquise lors de la vente aux enchères du 19 mai 1991 à qui de droit désigné par le tribunal ;

Sur l’action en responsabilité :

(i) A titre principal :

– La déclarer recevable en toutes ses demandes indemnitaires à l’encontre de M. [O] [K] et de la société [O] [K] enchères ;

– Condamner in solidum M. [O] [K] et la société [O] [K] enchères à lui payer la somme de 185 656 euros de dommages et intérêts au titre du gain manqué ;

– A titre subsidiaire, condamner M. [O] [K] et la société [O] [K] enchères à réparer les fautes commises en lui payant la somme de 115 152 euros, outre les sommes correspondant aux frais d’adjudication ;

– Condamner in solidum M. [O] [K] et la société [O] [K] enchères à lui payer la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu’elle a subi ;

(ii) A titre subsidiaire :

– La déclarer recevable en toutes ses demandes indemnitaires à l’encontre de M. [O] [K] ;

– Condamner M. [O] [K] à lui payer la somme de 185 656 euros de dommages et intérêts au titre du gain manqué ;

– A titre infiniment subsidiaire, condamner M. [O] [K] à réparer les fautes commises en lui payant la somme de 115 152 euros, outre les sommes correspondant aux frais d’adjudication ;

– Condamner M. [O] [K] à lui payer la somme de 10 000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu’elle a subi ;

Sur les autres demandes :

– Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir ;

– Condamner in solidum M. [O] [K] et la société [O] [K] enchères PVE au paiement de la somme de 15 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance qui comprendront les frais d’expertise supportés par elle dont distraction conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par leurs dernières conclusions notifiées le 2 décembre 2022 (70 pages), M. [O] [K], commissaire priseur, et la société [O] [K] Enchères PVE demandent à la cour, au fondement des articles 32 du code de procédure civile, 2224 et 2232 du code civil, 1108 et suivants anciens du code civil, 1382 ancien du code civil, de :

– Déclarer irrecevables les demandes formulées à l’encontre de M. [K] à titre personnel et le mettre hors de cause ;

– Déclarer irrecevable la demande en annulation de la vente formulée directement à l’encontre de l’opérateur de ventes volontaires ;

– Déclarer irrecevable comme prescrite l’action en nullité de la vente ;

– Déclarer irrecevable comme prescrite l’action en responsabilité engagée à l’encontre de M. [K] et de la société [K] enchères PVE ;

En tout état de cause,

– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [B] de l’ensemble de ses demandes ;

– Déclarer mal fondée la demande en nullité de la vente ;

– Déclarer mal fondée l’action en responsabilité à l’encontre de M. [K] et de la société [K] enchères PVE ;

– Dire et juger Mme [B] tant irrecevable que mal fondée en l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

– Débouter en conséquence Mme [B] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

– Infirmer le jugement en ce qu’il les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Statuant à nouveau,

– Condamner Mme [B] à leur verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

– Condamner Mme [B] à leur verser la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner Mme [B] aux entiers dépens, comprenant notamment les frais d’expertise judiciaire.

La déclaration d’appel a été signifiée à la demande de l’appelante à la société Vermont fine Art par acte d’huissier de justice du 20 avril 2021, délivré conformément aux dispositions de l’article 674 du code de procédure civile et de la convention de la Haye du 15 novembre 1965 relative à la notification et à la signification à l’étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale.

Celle-ci n’a pas constitué avocat, ni conclu de sorte que, compte tenu des modalités de signification de cette déclaration d’appel, le présent arrêt sera rendu par défaut.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 5 janvier 2023.

SUR CE, LA COUR,

A titre liminaire et sur les limites de l’appel,

La cour observe que l’appelante ne forme aucune demande à l’encontre de la société Vermont fine Art, vendeur de l’oeuvre litigieuse.

La cour rappelle encore que, conformément aux dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions récapitulées au dispositif des dernières conclusions. Par prétention, il faut entendre, au sens de l’article 4 du code de procédure civile, une demande en justice tendant à ce qu’il soit tranché un point litigieux. Ainsi, un ‘déclarer que Mme [B] apporte les éléments de fait nécessaires au succès de ses prétentions’ ou un ‘constater l’impossibilité pour Mme [B] d’obtenir la restitution du prix de vente auprès de la société [Adresse 9]’ ne répond pas à cette définition de sorte que la cour ne statuera pas sur de tels points, tout au plus les examinera-t-elle s’ils peuvent être considérés comme des moyens venant au soutien d’une prétention expressément récapitulée au dispositif des dernières conclusions.

Il résulte en outre des écritures respectives des parties que le jugement est critiqué en toutes ses dispositions.

Sur les questions de procédure

La cour observe que les fins de non-recevoir soulevées par M. [O] [K] et par la société [O] [K] Enchères PVE n’ont pas été examinées par le premier juge.

Sur l’irrecevabilité des demandes de Mme [B] dirigées contre M. [O] [K], commissaire priseur, en son nom personnel

‘ Moyens des parties

M. [O] [K] sollicite l’irrecevabilité des demandes de Mme [B] dirigées contre lui, en son nom personnel, aux motifs que la loi du 10 juillet 2000 sur les ventes publiques aux enchères a imposé que les ventes volontaires soient désormais organisées par des sociétés de forme commerciale et que, de ce fait, les commissaires-priseurs, tenus de créer de telles sociétés de ventes volontaires pour continuer à exercer leur activité dans la mesure où leur monopole a été supprimé, ont transmis à ces sociétés créées après l’entrée en vigueur de cette loi, leurs droits et obligations. Ces sociétés sont donc, selon lui, venues aux droits des commissaires priseurs qui agissaient avant l’entrée en vigueur de cette loi.

Il soutient que le fait que la vente litigieuse ait eu lieu en 1991 et fut organisée personnellement par lui n’est pas de nature à faire obstacle à l’application de la loi du 10 juillet 2000. Il ajoute que l’article de doctrine invoqué par Mme [B] est inopérant en ce qu’il ne concerne pas la recevabilité de l’action dirigée contre le commissaire priseur à compter de l’entrée en vigueur de cette loi, mais porte sur l’articulation dans le temps du délai de prescription de l’action en responsabilité.

Ainsi, selon lui, les ventes volontaires réalisées avant la loi du 10 juillet 2000 ont été transmises aux sociétés de ventes volontaires créées après cette loi. En application de cette loi, ayant créé la société [O] [K] Enchères PVE pour se mettre en conformité avec les dispositions de la loi de 2000, ladite société s’est substituée à lui, elle est ainsi venue en ses droits et obligations, dans le cadre d’un transfert de plein droit de son activité de ventes volontaires.

Il rappelle que l’article 30 de cette loi (codifié sous l’article L.321-17 du code de commerce) a créé un régime unique de responsabilité et de prescription pour les commissaires-priseurs judiciaires et les sociétés de vente volontaires de meubles aux enchères publiques ; que son article 43 prévoit que l’indemnisation qu’elle met en place à leur profit est subordonnée à la production d’une attestation d’assurance couvrant la responsabilité encourue par le commissaire-priseur à l’occasion de l’exercice des ventes volontaires à compter de son entrée en fonction et au plus tard pour les dix années antérieures à la promulgation de cette loi, preuves selon lui que les activités de ventes des commissaires-priseurs réalisées avant le 10 juillet 2000 (et le passif antérieur) ont bien été reprises par ces sociétés de ventes volontaires nouvellement créées.

Il en conclut que les demandes dirigées contre lui, en son nom personnel, ne pourront qu’être déclarées irrecevables.

Mme [B] rétorque que la loi du 10 juillet 2000 ne contient aucune disposition relative au transfert de plein droit des droits et obligations des commissaires-priseurs aux sociétés nouvellement créées et que son adversaire ne démontre pas le contraire.

Elle en déduit que ses demandes dirigées contre M. [O] [K] sont parfaitement recevables.

‘ Appréciation de la cour

Comme l’observe fort pertinemment Mme [B], la loi du 10 juillet 2000 ne prévoit pas le transfert de plein droit des droits et obligations pesant sur les commissaires priseurs ou leur bénéficiant aux sociétés de vente volontaires de meubles aux enchères publiques.

Ni M. [O] [K] ni la société [O] [K] Enchères PVE ne produisent les statuts de la société [O] [K] Enchères PVE qui auraient pu contenir des stipulations relatives au transfert des droits et obligations de l’un vers l’autre. Ils ne justifient pas plus l’existence d’une convention passée entre eux traitant de pareilles dispositions.

Il s’ensuit que le moyen soulevé par M. [O] [K] n’est pas de nature à justifier sa demande d’irrecevabilité.

Cette demande sera dès lors rejetée.

Sur la recevabilité de la demande en annulation de la vente formée directement à l’encontre de l’opérateur des ventes volontaires

‘ Moyens des parties

M. [O] [K] et la société [O] [K] Enchères PVE font valoir que l’effet relatif des contrats s’oppose à ce qu’une action en annulation ou en résolution d’un contrat soit exercée contre un tiers au contrat.

Or, ils observent que l’opérateur de ventes volontaires n’est pas partie au contrat de vente, mais n’est qu’un mandataire du vendeur. Ils relèvent que l’article L. 321-5 du code de commerce le précise clairement et, par voie de conséquence, selon eux, ces opérateurs ne peuvent pas être tenus personnellement des obligations nées du contrat de vente et n’ont pas à répondre d’une action en annulation de la vente ni même d’une action en responsabilité contractuelle dès lors qu’une telle demande ne concerne que les rapports entre les parties contractantes, à savoir le vendeur et l’adjudicataire. Ils produisent de multiples décisions de première instance et d’appel rappelant toutes que l’action en annulation ou en résolution d’une vente engagée par l’adjudicataire est à son encontre irrecevable puisqu’il n’a pas qualité pour y défendre (références figurant en pages 17 à 22 et décisions produites et récapitulées dans le bordereau des pièces). Ils citent encore des arrêts de la Cour de cassation (en particulier, 1re Civ., 26 mai 1993, pourvoi n° 91-13.652, Bulletin 1993 I N° 191). Ils ajoutent que la Cour de cassation juge constamment que les restitutions consécutives à l’annulation d’un acte ne visent qu’à replacer les parties dans l’état où elles se trouvaient avant la vente et ne présentent pas un caractère indemnitaire (1re Civ., 18 janvier 2005, pourvoi n° 03-12.713) et elle en déduit, selon eux, qu’aucune demande de condamnation in solidum du vendeur et de la société de ventes volontaires ne saurait être prononcée (1re Civ., 7 mars 2006, pourvoi n° 04-13.602 ; 1re Civ., 10 juillet 2002, pourvoi n° 01-10.508 ; 3e Civ., 3 mai 2018, pourvoi n° 17-11.132, 17-14.090, Bull. 2018, III, n° 48).

Ils précisent que, contrairement à ce que soutient leur adversaire, l’opérateur de ventes volontaires n’est tenu à aucune garantie à l’égard de l’adjudicataire de la restitution du prix et qu’il n’en serait autrement que s’il se refusait à dévoiler à l’adjudicataire le nom du vendeur puisque, dans ce cas, il priverait ce dernier de la possibilité d’agir en annulation de la vente.

Ils font valoir que tous les éléments d’identification du vendeur ont été fournis à Mme [B] et qu’ils ne sont pas responsables de l’éventuel changement de domiciliation de la [Adresse 9], voire de sa disparition, étant rappelé que la vente est intervenue en 1991 soit depuis près de 28 années. Ils contestent l’existence d’une confusion possible entre la Galerie Vermont Fine Art et M. [A] à titre personnel, ce dernier exerçant son activité de ‘commerce de détails d’objets d’art et d’antiquités’ (pièces 40 et 41) sous l’enseigne [Adresse 9], ces deux entités étant en réalité uniques et pas distinctes ou différentes. Ils précisent que dès la vente, les coordonnées bancaires de cette galerie, venderesse, ont été communiquées aux adjudicataires ainsi que l’adresse de son dirigeant, M. [A] et il revenait à Mme [B] d’entreprendre toutes les démarches pour rechercher le vendeur. Ils ajoutent que l’extrait du site internet www.monetas.ch versé aux débats par l’appelante permet de démontrer qu’elle pouvait retrouver la trace de son vendeur ce qu’elle ne démontre pas avoir sérieusement entrepris.

Ils relèvent que la répudiation d’une succession, selon le code civil suisse, n’a pas nécessairement pour effet de priver de droits les héritiers du défunt et ces derniers peuvent être tenus à l’égard des créanciers en cas de responsabilité (articles 572 et suivants du code civil suisse).

Mme [B] rétorque que son action en nullité de la vente dirigée contre l’opérateur de vente volontaire est parfaitement recevable dès lors que :

* le vendeur est insolvable,

* le commissaire-priseur a commis des fautes,

* ce dernier a refusé de communiquer les coordonnées du vendeur.

Elle ajoute avoir fait assigner la galerie Vermont Fine Art et avoir appris que celle-ci ‘est introuvable à l’adresse indiquée et n’est pas inscrite au registre du commerce du canton de Vaud’ (pièces 26 et 31).

Elle invoque un arrêt de la Cour de cassation qui admet que le mandataire du vendeur dans le cadre d’une vente aux enchères sera tenu de garantir l’acquéreur de la restitution du prix de vente lorsque celle-ci est rendue impossible par la disparition ou l’insolvabilité de ce vendeur (1re Civ., 27 novembre 2013, pourvoi n° 10-23.196).

Enfin, elle ajoute qu’en cas de répudiation d’une succession, acte irrévocable qui supprime la qualité d’héritier, le répudiant perd son droit aux actifs et n’est pas responsable des dettes successorales, il s’ensuit que le commissaire-priseur pourrait être condamné à restituer le prix de vente à l’adjudicataire, le vendeur étant devenu insolvable. Elle invoque à l’appui un arrêt de la cour d’appel de Paris qui a jugé en ce sens (pièce 51). Or, selon elle, il résulte de ses recherches (pièce 32, extrait du site internet www.monetas.ch) que la succession de M. [A] a été ‘répudiée’ et que l’entreprise de M. [A] a fait l’objet d’une faillite qui a été clôturée le 10 février 2006, il s’ensuit qu’il n’a plus aucun ayant droit de sorte que, en raison de l’insolvabilité du vendeur, son action en restitution du prix du tableau à l’encontre du commissaire-priseur est recevable.

‘ Appréciation de la cour

Les parties s’accordent pour considérer qu’en cas d’insolvabilité du vendeur et de fautes commises par un commissaire priseur, le mandataire du vendeur, donc le commissaire priseur, peut être tenu à garantir la restitution du prix de vente.

Il doit en outre être rappelé que la recevabilité d’une action n’est pas subordonnée à la démonstration préalable de son bien-fondé et que l’existence de l’insolvabilité du vendeur et/ou d’une faute imputable au commissaire-priseur de nature à entraîner l’annulation d’une vente n’est pas une condition de recevabilité de cette action, mais de son bien-fondé.

En l’espèce, Mme [B] sollicite la nullité de la vente sans préciser à l’encontre de quel intimé elle dirige cette prétention et demande expressément la condamnation in solidum de M. [O] [K] et de la société [O] [K] Enchères PVE à lui verser une somme au titre de la restitution du prix de vente du tableau, objet de la procédure.

Il s’ensuit que ses demandes consécutives à celle en annulation de la vente sont recevables.

Sur la prescription de l’action en nullité de la vente

‘ Moyens des parties

M. [O] [K] et la société [O] [K] Enchères PVE soutiennent, se fondant sur les dispositions de l’article 2224 du code civil, que l’action en annulation de la vente réalisée en 1991 est prescrite.

Ils font ainsi valoir que :

* à suivre Mme [B], l’oeuvre vendue en 1991 serait un faux,

* l’expert qui a déposé son rapport le 2 octobre 2017 a clairement indiqué que l’oeuvre expertisée par ses soins constitue un faux grossier qui n’aurait pas pu échapper à un profane, donc à plus forte raison à un amateur avisé, comme l’étaient Mme et M. [B] (pièces 42, 43 et 44),

* Mme [B] indique elle-même qu’une oeuvre similaire a été vendue le 1er novembre 2005 et en déduit que cette vente prouve bien que l’oeuvre acquise en 1991 est un faux ; cette vente de 2005 a cependant fait l’objet des plus larges publicités versées aux débats par l’appelante (pièces adverses 5 et 6).

Ils en déduisent que, de manière certaine, Mme [B] a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son action le 1er novembre 2005 de sorte que la prescription de cinq années a commencé à courir à cette date pour expirer le 1er novembre 2010. La saisine du juge des référés le 6 décembre 2016 est donc intervenue postérieurement à l’expiration du délai de prescription.

Enfin, se fondant sur les dispositions de l’article 2232 du code civil, ils soutiennent que le point de départ de l’action en nullité d’une vente pour erreur sur la substance court nécessairement à compter du jour de la vente de sorte que cette action est nécessairement prescrite depuis le 19 mai 2011 (délai de dix années à compter de la vente).

Mme [B] rétorque que le délai de prescription de l’action en nullité, de cinq années, pour erreur court à compter de la découverte de l’erreur affectant la vente (article 1304 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige) et que la Cour de cassation juge que ce jour est celui où l’erreur est découverte, pas simplement soupçonnée (1re Civ., 31 mai 1972, pourvoi n° 71-10.571, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 1 N 142 P124 ; 1re Civ., 14 octobre 2010, pourvoi n° 09-13.646).

Elle rappelle que l’article 1144 du code civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 10 février 2016, a confirmé cette jurisprudence puisqu’il dispose que ‘Le délai de l’action en nullité ne court, en cas d’erreur ou de dol, que du jour où ils ont été découverts et, en cas de violence, que du jour où elle a cessé.’

Elle soutient que ce n’est qu’après l’expertise déposée le 2 octobre 2017 que l’erreur a été découverte de sorte que le délai de prescription de l’action a commencé à courir à compter de cette date.

Elle explique qu’en 2016, lorsqu’elle a voulu procéder à la vente de la gouache litigieuse, elle a eu connaissance de la vente effectuée par Christie’s en 2005 et a commencé à douter de l’authenticité de cette oeuvre, ce qui l’a incitée à solliciter une expertise. Selon elle, ses doutes sont devenus certitude le 2 octobre 2017 seulement de sorte que le délai de prescription a commencé à courir en 2017.

Enfin, s’agissant du délai butoir de l’article 2232 du code civil, elle rappelle que cet article a été créé par la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, elle prétend que cet article est en l’espèce inapplicable.

Se fondant sur la jurisprudence de la Cour de cassation (1re Civ., 30 avril 2014, pourvoi n° 13-11.032), l’appelante soutient qu’en l’espèce, le délai de prescription en question n’ayant fait l’objet d’aucun report ni d’aucune suspension ou interruption, que le point de départ de la prescription de l’action en nullité initiée par ses soins correspond au jour de la découverte de l’erreur affectant la vente de la gouache litigieuse, soit au 2 octobre 2017 ou, à tout le moins, au 1er janvier 2016. Partant son droit de solliciter la nullité du contrat de vente est simplement né au jour de la découverte de l’erreur viciant le contrat de vente, soit au 2 octobre 2017 ou au 1er janvier 2016, conformément aux dispositions de l’article 1304 du code civil précité. En d’autres termes, le fait que l’action ait été initiée 28 ans après la vente litigieuse sans que cette action ne puisse être déclarée prescrite n’est pas dû à un report du point de départ du délai de prescription, mais à la naissance du droit d’agir en nullité de la vente au jour de la découverte de l’erreur affectant ladite en 2016 et 2017.

A titre subsidiaire, elle prétend que, dans l’hypothèse où cette cour devait considérer que son droit de solliciter la nullité de la vente n’est pas né au jour de la découverte du préjudice, que le délai de prescription a bien été reporté, l’article 2232 du code civil n’en serait, selon elle, pas moins inapplicable à une situation antérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile (Pièce n° 29 : Arrêt de la Cour d’appel de Paris (Pôle 3, ch. 1) en date du 4 avril 2012, n° 11/01728) et cette solution est prévue à l’article 26 de la loi du 17 juin 2008, réglant l’application dans le temps de la réforme.

Elle demande donc à la cour de ne pas déclarer prescrite son action en application de l’article 2232 du code civil.

‘ Appréciation de la cour

L’article 2224 du code civil, entrée en vigueur le 19 juin 2008, dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

Au terme d’une jurisprudence constante, confirmée par le législateur le 10 février 2016, le délai de l’action en nullité ne court, en cas d’erreur ou de dol, que du jour où ils ont été découverts et, en cas de violence, que du jour où elle a cessé (article 1144 du code civil).

Comme le soutient Mme [B], en l’espèce, c’est bien au jour où l’erreur est découverte, pas simplement soupçonnée, que le délai de prescription extinctive commence à courir (1re Civ., 31 mai 1972, pourvoi n° 71-10.571, Bulletin des arrêts Cour de Cassation Chambre civile 1 N 142 P124 ; 1re Civ., 14 octobre 2010, pourvoi n° 09-13.646). Or, en l’espèce, c’est au jour où l’expert judiciaire a déposé son rapport, soit le 2 octobre 2017, que le plaignant a connu de façon certaine les faits lui permettant d’exercer ses droits.

Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutiennent les intimés, l’action en nullité de la vente litigieuse n’est pas prescrite au fondement des articles 2224 et 1144 du code civil, le jour de l’introduction de l’action en nullité le 25 octobre 2018. En effet, le délai de cinq années ayant commencé à courir le 2 octobre 2017, Mme [B] avait jusqu’au 2 octobre 2022 pour agir de sorte qu’ayant agi le 25 octobre 2018, son action est recevable.

L’article 2232 du code civil précise que ‘Le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de la prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit.

Le premier alinéa n’est pas applicable dans les cas mentionnés aux articles 2226, 2226-1, 2227, 2233 et 2236, au premier alinéa de l’article 2241 et à l’article 2244. Il ne s’applique pas non plus aux actions relatives à l’état des personnes.’

En application des dispositions combinées des articles 2224 et 2232, dans leur rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, ensemble l’article 26-II de cette loi portant dispositions transitoires, d’une part, la réduction du délai de prescription des actions personnelles ou mobilières de trente à cinq ans s’applique aux prescriptions à compter de l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, sans que la durée totale puisse excéder celle prévue par la loi antérieure ; d’autre part, le report du point de départ, la suspension ou l’interruption de la prescription ne peut avoir pour effet de porter le délai de prescription extinctive au-delà de vingt ans à compter du jour de la naissance du droit (Voir, en particulier, 1re Civ., 30 avril 2014, pourvoi n° 13-11.032).

En l’espèce, ce n’est ni en raison du report du point de départ du délai de prescription, ni de la suspension ou de l’interruption de la prescription, que l’action a été initiée 28 ans après la vente litigieuse, mais en raison du fait que le droit d’agir de Mme [B] est né en 2017, correspondant au jour de la découverte de l’erreur alléguée.

Il découle de ce qui précède que l’action en nullité de Mme [B] est recevable car non prescrite.

Sur la prescription de l’action en responsabilité engagée à l’encontre de M. [O] [K] et de la société [O] [K] Enchères PVE

‘ Moyens des parties

Les intimés font valoir que, conformément aux dispositions de l’article L. 321-17 du code de commerce, codification de l’article 30 de la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000, créant un régime de prescription dérogatoire de l’action en responsabilité des commissaires-priseurs et des sociétés de ventes volontaires, les actions en responsabilité engagées à l’occasion des prisées et des ventes volontaires et judiciaires de meubles aux enchères publiques se prescrivent par dix ans à compter de l’adjudication ou de la prisée.

Ils soutiennent que cette disposition d’ordre publique vise tous les opérateurs de ventes volontaires, personnes morales ou personnes physiques.

Ils ajoutent que cette disposition n’est pas de nature à contrevenir aux exigences de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.

Ils précisent que l’article 43 de la loi du 10 juillet 2000 dispose que l’indemnisation qu’elle met en place au profit des commissaires-priseurs est subordonnée à la production d’une attestation d’assurance couvrant la responsabilité encourue par le commissaire-priseur à l’occasion de l’exercice des ventes volontaires à compter de son entrée en vigueur et au plus tard pour les dix années antérieures à la promulgation de la présente loi. Ils y voient une preuve du fait que la responsabilité de ce professionnel ne peut pas être recherchée au-delà de 10 années à compter de la vente volontaire peu important la date de la découverte du dommage.

Ils soulignent que l’article 52 de cette loi, qui règle les dispositions transitoires, ajoute que ‘les actions en responsabilité civile engagées à l’occasion des ventes volontaires et judiciaires de meubles aux enchères publiques ainsi que des expertises correspondantes et des prisées, en cours à la date de la promulgation de la présente loi, se prescrivent par 10 ans à compter de cette date, à moins que la prescription ne soit acquise selon les règles applicables antérieurement à ce délai’. Ils en déduisent que, pour les ventes antérieures à son entrée en vigueur, la prescription de l’action en responsabilité de 10 ans a commencé à courir à compter de son entrée en applications soit le 11 juillet 2000 de sorte que, au 11 juillet 2010, les actions en responsabilité contre les commissaires priseurs étaient prescrites.

Ils ajoutent que les textes instaurant des délais de prescription ne sont pas contraires aux dispositions de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales en ce qu’ils poursuivent un but légitime, consistant à garantir la sécurité juridique, qu’ils ne sont pas exagérément courts, qu’ils ne constituent pas une entrave à l’accès au juge. Ils citent différents arrêts de cours d’appel (pages 32 à 35 de ses écritures) dont [Localité 13], qui appliquent ce texte et déclarent régulièrement prescrites les actions contre les commissaires priseurs par application de ce régime dérogatoire au droit commun de la prescription.

Relevant que la vente litigieuse a été réalisée le 19 mai 1991, ils font valoir que Mme [B] disposait d’un délai expirant le 11 juillet 2010 pour agir en responsabilité contre la société [O] [K] Enchères PVE et/ou M. [O] [K] de sorte que, ayant engagé cette action le 25 octobre 2018, son action est irrecevable pour cause de prescription.

Mme [B] rétorque que l’article 30 de la loi du 10 juillet 2000 ne bénéficie qu’aux sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, pas aux commissaires priseurs.

Elle ajoute que ce délai de prescription a été ramené à 5 ans par la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile, sans que le point de départ du délai de prescription n’en soit modifié.

Elle soutient cependant que l’article 30 précité, aujourd’hui codifié à l’article L. 321-17 du code de commerce ne s’appliquerait pas aux actions portant sur des ventes antérieures à l’entrée en vigueur de la loi du 10 juillet 2000 faute de dispositions prévoyant l’application rétroactive de ces dispositions ; que les termes ‘officiers publics ou ministériels compétents pour procéder aux ventes judiciaires et volontaires’ qui y sont mentionnés concernent uniquement les notaires et huissiers de justice autorisés à procéder à des ventes en vertu de l’article 2 de la loi du 10 juillet 2000 (aujourd’hui L.321-2 du code de commerce).

Elle prétend que l’article 43 de la loi du 10 juillet 2000 n’a pas pour effet ni pour objet de faire reporter au jour de la vente le point de départ du délai de prescription de l’action en responsabilité initiée par elle.

De même, selon elle, l’article 52 de la loi du 10 juillet 2000 n’est pas applicable au présent litige et ne règle que la situation des litiges en cours à la date de promulgation de la loi. Il s’ensuit, selon elle, que les actions qui n’ont pas été engagées avant la promulgation de cette loi obéissent aux règles antérieures donc à l’article 2270-1 du code civil. Cependant, ce texte ayant été abrogé, selon elle, c’est l’article 2224 qui s’applique et le point de départ de cette action en responsabilité est bien le jour où elle a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Elle en déduit qu’elle disposait d’un délai de 5 ans à compter de l’expertise judiciaire pour introduire son action contre le commissaire priseur.

Subsidiairement, elle soutient que l’article 52 de la loi du 10 juillet 2000 est contraire à l’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l’Homme et des libertés fondamentales dans la mesure où, selon elle, appliquer le délai de prescription de 10 ans commençant à courir à compter de la réalisation de la vente est de nature à la priver de tout accès à un tribunal.

‘ Appréciation de la cour

L’article L. 321-17 du code de commerce, dans sa rédaction applicable jusqu’au 12 février 2004, dispose (souligné par cette cour) que ‘les sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques et les officiers publics ou ministériels compétents pour procéder aux ventes judiciaires et volontaires engagent leur responsabilité au cours ou à l’occasion des ventes de meubles aux enchères publiques, conformément aux règles applicables à ces ventes.

Les clauses qui visent à écarter ou à limiter leur responsabilité sont interdites et réputées non écrites.

Les actions en responsabilité civile engagées à l’occasion des prisées et des ventes volontaires et judiciaires de meuble aux enchères publiques se prescrivent par dix ans à compter de l’adjudication ou de la prisée.’

Le dernier alinéa de cet article a été modifié par l’article 19 de la loi n° 2011-850 du 20 juillet 2011 et a ramené le délai de prescription à cinq ans à compter de l’adjudication ou de la prisée.

L’article 52 de la loi du 10 juillet 2000 disposait que ‘les actions en responsabilité civile engagées à l’occasion des ventes volontaires et judiciaires de meubles aux enchères publiques ainsi que des expertises correspondantes et des prisées, en cours à la date de la promulgation de la présente loi, se prescrivent par 10 ans à compter de cette date, à moins que la prescription ne soit acquise selon les règles applicables antérieurement à ce délai’.

L’article L.321-2 du code de commerce précise que ces ventes peuvent également être organisées et réalisées à titre accessoire par les notaires et les huissiers de justice, dans le cadre de leur office et selon les règles qui leur sont applicables. Ils ne peuvent être mandatés que par le propriétaire des biens.

L’article 2222, alinéa 2, du code civil dispose que ‘En cas de réduction de la durée du délai de prescription ou du délai de forclusion, ce nouveau délai court à compter du jour de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.’

Il résulte de ces textes que :

* depuis le 11 juillet 2000, les actions en responsabilité contre un commissaire-priseur ou une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques se prescrivent par dix ans à compter de l’adjudication,

* depuis le 21 juillet 2011, ces actions se prescrivent par cinq ans à compter de l’adjudication,

* ce délai ayant été réduit l’article 2222, alinéa 2, du code civil s’applique.

Ces lois sont d’application immédiate sauf dispositions transitoires particulières.

Mme [B] ayant introduit son action après juillet 2011, elle se doit de respecter les règles de prescription nouvellement instaurées. Par l’application combinée des dispositions des lois des 10 juillet 2000, 21 juillet 2011 et de l’article 2222, alinéa 2, du code civil, elle devait engager son action avant le 11 juillet 2010.

En effet, avec l’entrée en vigueur à compter du 11 juillet 2000 des nouvelles règles de prescription des actions en matière de responsabilité des commissaires priseur, toute partie recherchant la responsabilité de ces professionnels doit engager son action dans les dix années qui suivent l’adjudication. Celle-ci étant intervenue en 1991 et ces nouvelles règles réduisant la durée du délai de prescription antérieurement fixée (article 2270-1 du code civil dans sa rédaction applicable de 1986 jusqu’à 1998), l’application combinée des dispositions de la loi du 11 juillet 2000 et des principes codifiés à l’article 2222, alinéa 2, du code civil, conduisent à retenir que Mme [B] devait engager son action avant le 11 juillet 2010.

L’entrée en vigueur de la loi du 21 juillet 2011 ne modifie rien pour elle dans la mesure, l’action de Mme [B] était déjà prescrite au moment de celle-ci.

Il est en outre constant que l’appelante n’invoque aucun acte interruptif de prescription et, à la connaissance de la cour, tel que cela ressort des écritures et de la procédure, l’action en référé a été exercée le 6 décembre 2016, soit postérieurement à l’expiration du délai de prescription.

Contrairement à ce que soutient Mme [B], contre les termes précités, l’article 30 de la loi du 10 juillet 2000 bénéficie tant aux sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, qu’aux commissaires priseurs.

C’est tout aussi pertinemment que les intimés soutiennent que les textes instaurant des délais de prescription ne sont pas contraires aux dispositions de l’article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales en ce qu’ils poursuivent un but légitime, consistant à garantir la sécurité juridique, qu’ils ne sont pas exagérément courts et qu’ils ne constituent pas une entrave à l’accès au juge.

Il découle de l’ensemble des développements qui précèdent que l’action de Mme [B] dirigée contre M. [O] [K] et la société [O] [K] Enchères PVE en responsabilité de ces professionnels des ventes volontaires et judiciaires de meubles aux enchères publiques est irrecevable car prescrite.

Au surplus, comme il sera analysé postérieurement, Mme [B] n’apporte aucun élément de preuve de nature à justifier que la responsabilité de ce professionnel soit engagée.

Sur la demande d’annulation de la vente

‘ Moyens des parties

Mme [B] poursuit l’infirmation du jugement qui fait peser sur elle la charge de la preuve de l’identité des deux gouaches à savoir celle qui a été achetée en 1991 et celle qu’elle a faite expertiser en particulier par l’expert judiciaire.

Elle soutient que :

* la gouache litigieuse n’a jamais quitté son domicile ainsi qu’en attestent plusieurs pièces versées aux débats (pièce 40 photographie présentant le faux [G] [F] au domicile du couple ; attestations de divers témoins pièces 41, 42, amies de longue date, 34, belle-fille, 43, personne venant depuis très longtemps lui rendre visite) ;

* la gouache originale appartenait à la collection d’E. R. [M] de 1982 à 2005 (pièce 35, article du [Localité 10] Times du 20 avril 2006 ; pièce 5, extrait du site internet de Christie’s ; pièce 44-1 extrait du site internet de Christie’s concernant la vente du Baiser de [Y] [L] ; pièce 44-2 catalogue E. R. [M] collection).

Elle déduit de ces éléments de preuve que la gouache vendue en 1991 par M. [O] [K] est incontestablement un faux, faux vendu aux époux [B] à distance en 1991 et qui depuis cette date n’a jamais quitté leur salon. Elle ajoute que la photographie présentée au catalogue de vente de 1991 ne peut en tout état de cause qu’être tout au mieux une erreur, inexcusable, puisque commise par des professionnels, au pire une mise en scène frauduleuse.

Elle conteste que, en raison de l’étiquette au dos du cadre du tableau de la gouache litigieuse, preuve serait rapportée que la gouache proviendrait de chez Sotheby’s et que la version originale aurait bien été vendue à M. et Mme [B] en 1991 (pièce 45, photographie du verso de la gouache litigieuse). Elle doute de la pertinence de cet élément relevé par l’expert judiciaire (pièce 18) et observe que l’expert [X] ne fait aucunement mention de cette étiquette sans doute, selon elle, parce qu’il n’a jamais expertisé la véritable oeuvre de F. [F] et qu’un faux leur a bien été vendu. Elle observe que le catalogue de vente de Sotheby’s de 1982 ne fait nullement référence à cette étiquette et les références qu’elle contient ne permettent nullement de conclure que cette étiquette correspond à une vente au sein de cette maison.

Elle fait valoir qu’il ne fait en revanche aucun doute que le cadre de l’oeuvre litigieuse et fausse provient, selon elle, de la salle des ventes de 1991 et que l’étiquette qu’elle présente (inscription ‘règlement numéro 164’ et le numéro 3042 inscrit au feutre) correspond à la galerie Fine Arts. Elle en déduit que ce serait donc M. [O] [K] qui aurait mis en vente un faux et non M. et Mme [B] qui auraient remplacé l’oeuvre par un faux.

Elle s’insurge contre les accusations avancées par ses adversaires selon lesquelles les époux [B] pourraient être à l’origine de la substitution de l’oeuvre originale de F. [F] par le faux grossier en particulier en raison de la personnalité de feu son époux, ancien résistant, décoré de la Légion d’honneur. A cet égard, elle souligne que ces allégations ne sont étayées par aucun élément de preuve.

Elle développe encore des moyens tendant à démontrer, selon elle, que la gouache présentée au catalogue et celle qu’ils ont achetée présenteraient des différences ; qu’ils sont des profanes ; que la présence sur le catalogue de vente de la photographie de la gouache originale de F. [F] ne permet nullement d’attester que la gouache expertisée n’est pas celle acquise en 1991 ; elle persiste à affirmer qu’ils n’ont pas substitué la gouache d’origine, achetée en 1991, par la gouache litigieuse.

Les intimés poursuivent la confirmation du jugement de ce chef et, en substance, insistent sur l’absence totale de preuve par Mme [B] des allégations qu’elle formule. Ils rappellent que la charge de la preuve du bien-fondé de ses prétentions pèse sur elle.

Ils observent à titre liminaire que sous couvert d’une action en nullité, l’appelante agit en réalité en non-conformité puisqu’elle se plaint en réalité de l’absence de livraison d’une oeuvre conforme à ce qui a été présentée au catalogue. Ils en déduisent que cette action en non-conformité se prescrit par cinq ans à compte de la livraison.

Ils font encore valoir qu’en tout état de cause l’erreur de l’acheteur n’est de nature à entraîner l’annulation de la vente que si elle est excusable. Or, selon eux, il suffit de lire le rapport d’expertise judiciaire pour comprendre que les différences entre l’oeuvre en possession de Mme [B] et celle reproduite dans le catalogue de vente organisée le 19 mai 1991 sont telles que tant les professionnels que les profanes, qui plus est, acquéreur de l’oeuvre lors de son ‘entrée en possession’, les auraient remarquées.

Il s’ensuit que l’action de M. et Mme [B] est, selon les intimés, manifestement vouée à l’échec.

‘ Appréciation de la cour

C’est, sans inverser la charge de la preuve, par des motifs pertinents adoptés par la cour, que le premier juge a rejeté la demande de Mme [B].

Il suffit d’ajouter qu’à hauteur d’appel, l’appelante ne rapporte toujours pas la preuve qu’il lui revient de produire et se borne à affirmer, sans preuve, que l’oeuvre qu’elle a achetée en 1991 était le faux grossier présenté à l’expertise de Mme [N], expert judiciaire.

Ainsi, la copie d’une photographie (pièce 40), dont la date n’est pas certaine pour ne pas avoir été prise par un commissaire de justice assermenté, n’a pas la force probante que l’appelante lui prête. En tout état de cause, cette production ne permet pas de vérifier comme l’appelante le prétend que ‘la gouache litigieuse n’a jamais quitté son domicile’ puisqu’une photographie n’est que le témoignage d’un instant et en outre sur cette copie de photographie, format 24 x 19, sont visibles au premier plan des personnes attablées, partageant un repas, à l’arrière plan un salon constitué de deux canapés, d’un fauteuil, un téléviseur, une table basse ; sur le mur au fond de la pièce, au-dessus d’un canapé, est visible un tableau représentant un paysage, au premier plan du tableau des arbres, au deuxième plan des cyprès, au troisième plan un clocher, des toits ; sur la gauche de la production, accrochés sur le mur de droite, au dessus du second canapé, sont visibles deux tableaux et on devine la présence d’un troisième dont le cadre est seul visible ; les deux premiers tableaux à peine visibles représentent pour l’un, un paysage, pour l’autre sont visibles des formes en spirales dont les tons sont chauds, rouge sang de boeuf. En définitive, cette production n° 40 ne prouve rien.

En ce qui concerne les attestations :

* la belle-fille de M. et Mme [B] (pièce 34) indique avoir toujours vu ‘l’étude de pour la Grande Parade’ sur le mur du salon, mais ne décrit pas l’oeuvre, ne fournit aucune précision sur ce qu’elle a vu ; en outre, en admettant que ce faux grossier ait été celui qui a été livré à ses beaux-parents en 1991, elle ne fournit aucune précision sur l’emballage de l’oeuvre et les modalités de celui-ci ainsi que le transport de l’oeuvre jusqu’au domicile de ses beaux-parents de sorte qu’il ne peut être tiré aucune force probante à cette attestation ;

* M. [S] (pièce 41), Mme [R] (pièce 42), Mme [D] (pièce 43) se bornent à attester avoir toujours vu le tableau de F. [F] dans le salon des époux [B], suspendu au-dessus d’un canapé ; pour les mêmes motifs, ces attestations n’ont pas la force probante que Mme [B] leur prête.

Les motifs du jugement sur l’analyse des expertises et les conséquences qu’il convient d’en tirer sont pertinentes.

Il sera ajouté que la cour ne peut que s’interroger sur le comportement des acquéreurs d’un tableau acheté dans les circonstances qui ont été décrites (par téléphone) pour le montant toutes taxes comprises de 519 385 Francs, ce qui ne correspond pas à une somme négligeable, qui n’ont pas pris la précaution élémentaire de vérifier et comparer le tableau qu’ils ont réceptionné en 1991 avec la photo du catalogue des ventes alors que l’expert judiciaire affirme sans aucune nuance que la ‘gouache qui m’a été déposée ne correspond pas à celle qui est reproduite sous le n° 164, en page 19 du catalogue de la vente de M. [O] [K] à [Localité 8]. Si la très légère différence de dimensions pouvait ne pas sauter aux yeux, l’aspect général de la gouache aurait dû interpeller les uns et les autres’. En d’autres termes, à supposer, pour les besoins du raisonnement, que la cour suive Mme [B] dans ses allégations (dans la mesure où la preuve de ce fait n’est toujours pas rapportée par les productions de Mme [B]), selon lesquelles c’est bien ce faux grossier qui leur a été vendu par M. [O] [K], puis livré, la cour ne peut que retenir que les acquéreurs ont fait preuve d’une grande légèreté en ne procédant pas à la comparaison de cette oeuvre avec la photo du catalogue.

En outre, le fait que le tableau correspondant à celui figurant sur le catalogue de la vente de M. [O] [K] à [Localité 8] en 1991 appartenait à la collection d’E. R. [M] de 1982 à 2005, acquise par ce collectionneur le 4 novembre 1982 chez Sotheby’s revendu en 2005 chez Christie’s, n’est pas plus probante de la ‘malhonnêteté’ de M. [O] [K], de la société [O] [K] Enchères PVE ou du vendeur, pas plus que de celle de M. et Mme [B]. Cet élément est certes troublant, mais ne peut apparaître comme probant et de nature à justifier les allégations de Mme [B]. Il n’est ainsi nullement démontré que la photo du catalogue ne correspondait pas à l’oeuvre vendue en 1991, que l’expert [X] n’a pas rempli sa mission de façon sérieuse, que M. [K] n’a pas vendu l’oeuvre authentique de F. [F] en 1991.

Il s’ensuit que les demandes de Mme [B] ne pourront qu’être rejetées et le jugement confirmé de ces chefs.

Sur l’appel incident de M. [O] [K] et de la société [O] [K] Enchères PVE

‘ Moyens des parties

M. [O] [K] et la société [O] [K] Enchères PVE poursuivent l’infirmation du jugement en ce qu’il rejette sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de cette procédure abusive.

Ils indiquent que Mme [B] a agi avec une légèreté coupable en accusant M. [O] [K] de lui avoir vendu un faux, et pire d’avoir procédé à une substitution du tableau original par un faux en 1991 ; que les opérations d’expertise judiciaire, sollicitée par Mme [B], ont mis en évidence que le tableau qu’elle arguait de faux n’était pas celui qui lui avait été vendu en 1991 ; qu’elle a persisté à le poursuivre devant les juges du fond et à maintenir ses accusations contre lui, sans aucune preuve ; qu’elle est allée jusqu’à déposer plainte le 31 juillet 2018 entre les mains du procureur de la République de [Localité 11] ; qu’il a dû s’expliquer devant un policier durant plusieurs heures ; qu’il n’a aucune nouvelle de cette audition et de la suite donnée par le procureur de la République à cette plainte. Il soutient donc que Mme [B] a entamé une procédure abusive à son endroit et la somme de 10 000 euros réparera justement le préjudice ainsi subi.

Mme [B] ne conclut pas sur ce point.

‘ Appréciation de la cour

Agir en justice, interjeter appel constituent un droit. Toutefois, ce droit est susceptible de dégénérer en abus et permettre l’allocation de dommages et intérêts à l’adversaire qui subirait en conséquence de cette faute un préjudice.

En l’espèce, l’abus d’appel est caractérisé.

En effet, en première instance, le premier juge avait répondu par des motifs pertinents et circonstanciés, rappelé de manière très claire les règles de droit et, en particulier celle gouvernant la charge de la preuve. Or, Mme [B] n’a pas hésité à interjeter appel sans aucun élément de preuve de nature à corroborer de manière certaine ses assertions contre M. [O] [K] et la société [O] [K] Enchères PVE.

Il sera en outre ajouté que Mme [B] ne pouvait pas espérer que son appel soit jugé fondé dans les circonstances de l’espèce et alors que le comportement léger des acquéreurs d’une oeuvre dans de telles circonstances a été relevé, plus avant, par cette cour.

Ces accusations sans fondement ont causé un préjudice moral certain à M. [O] [K] et à la société [O] [K] Enchères PVE qui ont dû s’expliquer devant la police, faire face à une plainte devant le procureur de la République de [Localité 11] alors que Mme [B] ne disposait d’aucune preuve pour agir de la sorte contre lui et que l’expertise judiciaire a révélé que l’oeuvre qu’elle possédait constituait un faux grossier dont même un profane aurait pu constater la réalité. La faute est caractérisée en appel puisqu’elle a persisté dans cette attitude contre M. [O] [K] et la société [O] [K] Enchères PVE alors que le premier juge avait exactement et de manière circonstanciée motivé le rejet de l’ensemble des demandes de Mme [B] ce dont elle n’a pas tenu compte puisqu’elle n’a développé aucun moyen nouveau pertinent, ni produit des éléments de preuve nouveaux probants.

Il s’ensuit qu’elle sera condamnée à verser la somme de 5 000 euros aux intimés en réparation du préjudice subi en conséquence de cet abus d’appel.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les autres demandes

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement en ses dispositions relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [B], partie perdante, supportera les dépens d’appel. Par voie de conséquence sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

L’équité commande d’allouer la somme (totale) de 5 000 euros à M. [O] [K] et à la société [O] [K] Enchères PVE.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt rendu par défaut et mis à disposition,

DÉCLARE recevables les demandes de Mme [B] dirigées contre M. [O] [K], commissaire priseur, en son nom personnel ;

DÉCLARE recevables les demandes de Mme [B] dirigées contre M. [O] [K], commissaire priseur, en son nom personnel, et la société [O] [K] Enchères PVE en restitution du prix de la vente du tableau acquis le 19 mai 1991 ;

DÉCLARE l’action en nullité de la vente de Mme [B] recevable ;

DÉCLARE irrecevable l’action en responsabilité civile professionnelle engagée par Mme [B] contre M. [O] [K] et la société [O] [K] Enchères PVE ;

INFIRME le jugement en ce qu’il rejette la demande de dommages et intérêts formée par M. [O] [K] et la société [O] [K] Enchères PVE ;

Le CONFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant ;

CONDAMNE Mme [B] à verser à M. [O] [K] et à la société [O] [K] Enchères PVE la somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice moral au titre de l’appel abusif ;

CONDAMNE Mme [B] aux dépens d’appel ;

CONDAMNE Mme [B] à verser à M. [O] [K] et à la société [O] [K] Enchères PVE la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE la demande de Mme [B] fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


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