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Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
Attendu qu’aux termes de l’article 115 du même Code :
La nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.
Attendu qu’aux termes de l’article 117 du code de procédure civile constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte :
– le défaut de capacité d’ester en justice.
– le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne physique atteinte d’une incapacité d’exercice.
– le défaut de capacité ou de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice.
Qu’aux termes de l’article 54 du Code de procédure civile l’assignation doit indiquer l’organe qui représente légalement la société.
Qu’aux termes de l’article 648 du code de procédure civile auquel renvoie l’article 56 du code de procédure civile qui énonce que l’assignation contient à peine de nullité les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice , tout acte d’huissier de justice doit indiquer notamment si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social , l’organe qui la représente légalement.
Qu’il résulte de ces textes qu’ils n’exigent pas, à peine de nullité, que le nom de la personne physique qui agit pour une personne morale soit mentionné dans l’assignation et qu’il résulte également de leur application combinée avec les articles 114 et 117 du code de procédure civile que le défaut de désignation de l’organe représentant légalement une personne morale constitue un vice de forme dont la nullité ne peut être prononcée qu’à charge, pour l’adversaire qui l’invoque, de prouver l’existence d’un grief .
ARRET
N° 129
S.A.S. [29]
C/
Organisme CARSAT NORMANDIE
COUR D’APPEL D’AMIENS
TARIFICATION
ARRET DU 05 MAI 2023
*************************************************************
N° RG 22/03153 – N° Portalis DBV4-V-B7G-IPTD
PARTIES EN CAUSE :
DEMANDEUR
S.A.S. [29]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 17]
Représentée et plaidant par Me DENYS, substituant Me Stéphanie LEBEGUE de la SCP LEBEGUE DERBISE, avocat au barreau d’AMIENS
ET :
DÉFENDEUR
Organisme CARSAT NORMANDIE
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 13]
[Adresse 13]
[Localité 15]
Représentée et plaidant par M. [E] [I], dûment mandaté
DÉBATS :
A l’audience publique du 20 Janvier 2023, devant Monsieur Renaud DELOFFRE, Président assisté de Monsieur Louis-Noël GUERRA et Jean-François D’HAUSSY, assesseurs, nommés par ordonnances rendues par Madame la Première Présidente de la Cour d’appel d’Amiens les 03 mars 2022, 07 mars 2022, 30 mars 2022 et 27 avril 2022.
Monsieur Renaud DELOFFRE a avisé les parties que l’arrêt sera prononcé le 05 Mai 2023 par mise à disposition au greffe de la copie dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme Myriam EL JAGHNOUNI
PRONONCÉ :
Le 05 Mai 2023, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Monsieur Renaud DELOFFRE, Président et Mme Audrey VANHUSE, Greffier.
*
* *
DECISION
Par un courrier du 2 mars 2022, la société [29] a écrit à la CARSAT pour lui dire qu’elle entendait contester les taux 2022 de ses établissements
“suivant la liste jointe, puisque certains dossiers font ou feront l’objet de recours devant les organismes ou juridictions compétents susceptibles d’aboutir à une baisse de nos taux de cotisations “.
Par courriers du 31 mars 2022, la CARSAT Normandie a indiqué que les recours formés ” à titre conservatoire ” étaient actuellement sans objet, puisque si par le passé ce type de recours permettait d’interrompre la prescription triennale, il résultait de la loi du 22 décembre 2014 que la demande de remboursement des cotisations indument versées pouvait porter sur l’ensemble de la période au titre de laquelle les taux sont rectifiés, sans nécessité de recours conservatoire préalable.
Dans ces mêmes courriers, la CARSAT opposait à la société [29] l’irrecevabilité pour cause de forclusion du recours formé contre ses taux 2022 de cotisations AT/MP.
Par assignation délivrée le 25 mai 2022 à la CARSAT Normandie pour l’audience du 20 janvier 2023, la société [29] demande à la Cour de:
CONSTATER que les taux AT/MP 2022 ont été mis à disposition de la Société [29] le 10 janvier 2022 par la CARSAT NORMANDIE,
CONSTATER que la Société [29] a contesté les taux AT/MP 2022 auprès de la CARSAT NORMANDIE le 02/03/2022,
DIRE et JUGER que la contestation des taux AT/MP 2022 par la Société [29] des établissements ci-dessous listé est parfaitement recevable :
– Etablissement de Vire Normandie (Siret [N° SIREN/SIRET 4]),
– Etablissement de [Localité 30] (Siret [N° SIREN/SIRET 5]),
– Etablissement du [Localité 23] (Siret [N° SIREN/SIRET 6]),
– Etablissement de [Localité 20] (Siret [N° SIREN/SIRET 7]),
– Etablissement de [Localité 31] (Siret [N° SIREN/SIRET 8]),
– Etablissement de [Localité 33] (Siret [N° SIREN/SIRET 9]),
– Etablissement de [Localité 34] (Siret [N° SIREN/SIRET 9]),
– Etablissement de [Localité 22] (Siret [N° SIREN/SIRET 10]),
– Etablissement de [Localité 26] (Siret [N° SIREN/SIRET 11]).
FAIRE INJONCTION à la CARSAT NORMANDIE de procéder aux rectifications sollicitées par la Société [29] dans son courrier du 02/03/2022,
CONDAMNER la CARSAT NORMANDIE aux dépens, en ce compris les frais d’assignation.
A l’audience du 20 janvier 2023, la société [29] a soutenu par avocat ses conclusions visées par le greffe à la même date et par lesquelles elle réitère les prétentions résultant de son acte introductif d’instance et fait valoir pour l’essentiel ce qui suit :
Par courrier du 02/03/2022 la Société [29] a contesté auprès de la CARSAT NORMANDIE un certain nombre d’éléments de tarification et solliciter la rectification du taux de certains établissements.
Par décision du 31/03/2022 a rejeté la demande de l’employeur au motif que cette dernière était forclose.
La Société [29] demande à la Cour de constater que le recours introduit par cette dernière visant à contester les taux AT/MP 2022 notifiés par la CARSAT NORMANDIE est parfaitement recevable, et de lui enjoindre d’examiner ses demandes au fond.
Sur la régularité de l’acte introductif d’instance
Dans ses écritures la CARSAT soutient que l’assignation qui lui a été délivrée serait nulle au motif que la Société [29] ne justifie pas d’un pouvoir.
‘Votre Cour ne pourra toutefois que constater que l’assignation lui a été adressée par Madame [I] [R], juriste, qui justifie d’un pouvoir spécial. ( pièce 5)’
La CARSAT soutient par ailleurs que le pouvoir d’interjeter appel ne permet pas de s’assurer que Madame [R] était bien habilitée à agir en justice.
Le pouvoir d’interjeter appel produit autorise spécifiquement Madame [R] à saisir la Cour d’appel afin de contester la décision visée dans le pouvoir, décision rendue le 31/03/2022 par la CARSAT NORMANDIE et relative à l’irrecevabilité de la contestation des taux 2022.
La décision visée par la contestation est spécifiquement mentionnée.
Or selon les textes cette saisine de la Cour d’appel afin de contester une décision de la CARSAT ne peut s’opérer que par la délivrance d’une assignation.
Le pouvoir d’interjeter autorisait donc bien Madame [R] à délivrer l’assignation dès lors que c’est le seul moyen de saisir la Cour d’appel Tarification et donc d’interjeter appel de la décision visée dans le pouvoir.
Ce pouvoir était par ailleurs accompagné d’un courrier destiné à la Cour d’appel.
Madame [R] était donc parfaitement habilitée à saisir la Cour d’appel d’Amiens tarification en contestation de la décision rendue le 31/03/2022 par la CARSAT NORMANDIE par la délivrance et l’envoi d’une assignation.
La CARSAT soutient en outre que le pouvoir est daté du 22/06/2022, soit postérieurement à la délivrance de l’assignation.
Il convient toutefois de rappeler que selon une jurisprudence constante le défaut de pouvoir est une irrégularité qui peut toujours être couverte en cours de procédure.
La production d’un pouvoir d’interjeter appel (quand bien même il serait daté du jour de l’envoi de l’assignation à la Cour) suffit donc à justifier du pouvoir de Madame [R] d’ester en justice afin de contester la décision rendue par la CARSAT NORMANDIE le 31/03/2022.
Le recours est de ce fait parfaitement recevable.
La CARSAT ne justifie quant à elle pas d’un pouvoir spécial.
Sur les demandes formulées
La CARSAT soutient que la demande de la Sté [29] serait irrecevable au motif qu’elle n’évoque aucune contestation.
La Sté [29] entend préciser que les contestations dont elle demande à être relevée de forclusion sont les contestations formées dans son courrier du 02/03/2022 pour les établissements concernés par ladite assignation (pièce 6).
Ces contestations concernent
La modification des catégories de coût moyen retenues pour les accidents de Monsieur [N], Monsieur [M], Madame [P], Monsieur [S], Madame [H], Monsieur [B].
– Le retrait de l’accident de trajet de Monsieur [A] imputé à tort sur le compte employeur
Le transfert du sinistre de Monsieur [K] sur le NIC 11173
La rectification de la masse salariale 2020 des établissements de [Localité 34] et de [Localité 22]
L’ensemble de ces contestations est d’ailleurs reprise par la CARSAT dans les AR qu’elle adressés à la Sté [29] en lui opposant la forclusion (pièce 3). La CARSAT en connaît donc parfaitement la teneur.
La demande de la Sté [29] tendant à voir examiner ces demandes qui comme le constatera votre Cour ne sont pas forcloses est parfaitement recevable.
Sur la forclusion
En droit
Selon l’article L.411-2 et suivants du Code des relations entre le public et l’administration :
” Toute décision administrative peut faire l’objet, dans le délai imparti pour l’introduction d’un recours contentieux, d’un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai.
Lorsque dans le délai initial du recours contentieux ouvert à l’encontre de la décision, sont exercés contre cette décision un recours gracieux et un recours hiérarchique, le délai du recours contentieux, prorogé par l’exercice de ces recours administratifs, ne recommence à courir à l’égard de la décision initiale que lorsqu ils ont été l’un et l’autre rejetés.”
Selon l’article R.142-1-A-III du Code de la Sécurité sociale :
” /11. S’il n’en est disposé autrement, le délai de recours préalable et le délai de recours contentieux sont de deux mois à compter de la notification de la décision contestée. Ces délais ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision contestée ou, en cas de décision implicite, dans l’accusé de réception de la demande. ”
Il résulte de la combinaison de ces articles qu’un employeur a la possibilité de contester ses taux de cotisation AT/MP dans le délai de 2 mois à compter de leur réception, ce délai de 2 mois n’étant applicable que si et seulement si les délais et voies de recours sont mentionnés sur les notifications de taux contestés.
En fait
La Société [29] a contesté les taux AT/MP 2022 de ses établissements dépendants de la CARSAT NORMANDIE par courrier recommandé du 02/03/2022 (Pièce n°1), réceptionné par la CARSAT NORMANDIE le 03/03/2022. (Pièce n°2)
Par décisions du 31/03/2022, la CARSAT NORMANDIE a rejeté la contestation relative à certains établissements de la Société [29] au motif qu’à la date de son recours du 02/03/2022, le délai de contestation de 2 mois était dépassé (Pièce n°3).
Les établissements concernés par le rejet de la CARSAT NORMANDIE sont les suivants :
– Etablissement de Vire Normandie ([Adresse 12] – Siret [N° SIREN/SIRET 4]),
– Etablissement de [Localité 30] ([Adresse 3] – Siret [N° SIREN/SIRET 5]),
– Etablissement du [Localité 23] (e- étage [Adresse 28] – Siret [N° SIREN/SIRET 6]),
– Etablissement de [Localité 20] ([Adresse 16] – Siret [N° SIREN/SIRET 7]),
– Etablissement de [Localité 31] ([Adresse 18] – Siret [N° SIREN/SIRET 8]),
– Etablissement de [Localité 33] ([Adresse 25] – Siret [N° SIREN/SIRET 9]),
– Etablissement de [Localité 34] ([Adresse 21] – Siret [N° SIREN/SIRET 9]),
[29]
– Etablissement de [Localité 22] ([Adresse 1] – Siret [N° SIREN/SIRET 10]),
– Etablissement de [Localité 26] ([Adresse 14] – Siret [N° SIREN/SIRET 11]).
En effet, la CARSAT NORMANDIE soutient que le délai de contestation de 2 mois aurait commencé à courir à compter du 31/12/2021.
Toutefois à cette date le service chargé de la gestion des risques professionnels de la Sté [29] était fermé, l’ensemble de l’équipe étant en congés. (pièce 6)
Votre Cour constatera en outre l’incohérence des taux notifiés :
qui sont datés du 01/01/2022 (donc postérieurs au 31/12/2021, qui est la date qu’oppose la CARSAT)
qui mentionnent par ailleurs une date de notification au 17/12/2021, ce qui est impossible dans la mesure où à cette date l’arrêté fixant les forfaits pour la tarification 2022 n’était pas sorti, celui-ci ayant été publié le 24/12/2022. (pièces adverses 1 à 9)
Le délai de 2 mois n’a en réalité commencé à courir que le 12/01/2022.
En effet, c’est à cette date que la Société [29] a été destinataire de mails émanant de [027] ayant pour objet ” Avis de mise à disposition d’une décision de taux de cotisation AT/MP” mentionnant en toutes lettres : ” Les décisions annuelles du taux de cotisation AT/MP au titre de l’année 2022 vous ont été adressées le 10/01/2022 par la CARSAT NORMANDIE. ” (Pièce n°4)
La Société [29] disposait donc d’un délai de 2 mois à compter du 10/01/2022, soit jusqu’au 10/03/2022, pour contester lesdits taux de cotisation, ce qui a été fait le 02/03/2022.
Dès lors, aucune irrecevabilité pour cause de forclusion ne peut être soulevée par la CARSAT NORMANDIE.
Votre Cour ne pourra alors qu’en déduire au vu des arguments soulevés par la Société [29] que son recours introduit visant à contester les taux AT/MP 2022 est parfaitement recevable.
Par conclusions enregistrées par le greffe à la date du 17 janvier 2023 et soutenues oralement par son représentant, la CARSAT NORMANDIE demande à la Cour de :
A titre principal :
– Prononcer la nullité du recours introductif d’instance ;
A titre subsidiaire :
Juger irrecevable la prétention de la société [29] tendant à ce que la Cour d’appel d’Amiens se prononce de manière générale sur la recevabilité d’une éventuelle contestation des taux de cotisations 2022 de ses établissements de Vire Normandie (NIC [N° SIREN/SIRET 4]), de [Localité 30] (NIC [N° SIREN/SIRET 5]), du [Localité 23] (NIC [N° SIREN/SIRET 6]), de [Localité 20] (NIC [N° SIREN/SIRET 7]), de [Localité 31] (NIC [N° SIREN/SIRET 8]), de [Localité 33] (NIC [N° SIREN/SIRET 9]), de [Localité 34] (NIC [N° SIREN/SIRET 9]), de [Localité 22] (NIC [N° SIREN/SIRET 10]) et de [Localité 26] (NIC [N° SIREN/SIRET 11]).
A titre infiniment subsidiaire :
Juger que la société [29] n’était pas recevable à introduire le 2 mars 2022 un recours gracieux contre les taux de cotisation 2022 de ses établissements de Vire Normandie (NIC [N° SIREN/SIRET 4]), de [Localité 30] (NIC [N° SIREN/SIRET 5]), du [Localité 23] (NIC [N° SIREN/SIRET 6]), de [Localité 20] (NIC [N° SIREN/SIRET 7]), de [Localité 31] (NIC [N° SIREN/SIRET 8]), de [Localité 33] (NIC [N° SIREN/SIRET 9]), de [Localité 34] (NIC [N° SIREN/SIRET 9]), de [Localité 22] (NIC [N° SIREN/SIRET 10]) et de [Localité 26] (NIC [N° SIREN/SIRET 11]).
Elle fait pour l’essentiel valoir ce qui suit :
La société [29] demande à la Cour d’appel d’Amiens de juger qu’elle serait recevable à contester les taux accidents du travail et maladies professionnelles de l’année 2022 d’un certain nombre d’établissements listés dans son assignation.
A titre principal, la CARSAT Normandie demandera à la Cour d’appel d’Amiens de prononcer la nullité du recours introductif d’instance, à défaut pour la société [29] de justifier que l’action en justice a été diligentée à la demande d’une personne habilitée (I).
Subsidiairement, la CARSAT demandera à la Cour d’appel d’Amiens de juger que la prétention de la société [29] est par nature irrecevable, puisqu’elle ne s’accompagne d’aucune contestation actuelle de tarification (II°).
A titre infiniment subsidiaire, la CARSAT Normandie demandera à la Cour d’appel d’Amiens de juger que la société [29] n’était plus recevable à introduire un recours gracieux le 2 mars 2022 (III°).
1°/ A titre principal : la nullité du recours introductif d’instance
Aux termes de l’article 117 du code de procédure civile :
” Constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte : Le défaut de capacité d’ester en justice ;
Le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne atteinte d’une incapacité d’exercice ;
Le défaut de capacité ou de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice “.
L’article 119 dudit code précise que ” les exceptions de nullité fondées sur l’inobservation des règles de fond relatives aux actes de procédure doivent être accueillies sans que celui qui les invoque ait à justifier d’un grief et alors même que la nullité ne résulterait d’aucune disposition expresse “.
En l’espèce, la CARSAT Normandie s’est vu délivrer le 25 mai 2022 une assignation au nom de la société [29] sur laquelle ne figure ni le nom de la personne qui serait l’auteure du recours en justice, ni sa signature.
La seule mention de l’acte d’huissier de justice est de pure forme et consiste à dire que l’assignation aurait été délivrée par la société [29], ” prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège “.
L’absence de mention du nom et de la qualité des représentants légaux rend impossible toute vérification du consentement dudit ou desdits représentants légaux de la société à l’action en justice.
Il n’est donc pas justifié que la personne qui prétend ester en justice au nom de la société [29] disposerait d’une habilitation légale ou d’une délégation de pouvoir qui lui permettait de le faire.
La CARSAT Normandie demandera en conséquence à la Cour d’appel d’Amiens de prononcer la nullité du recours introductif d’instance et l’extinction de l’instance.
2° A titre subsidiaire, sur l’irrecevabilité pour absence de contestation de fond à l’appui des recours conservatoires.
La forclusion est un mécanisme qui en matière de sécurité sociale interdit d’élever une nouvelle contestation d’une décision individuelle d’un organisme de sécurité sociale au-delà d’un deux mois et ce conformément à une exigence de sécurité juridique.
Le cours du délai est suspendu par un recours gracieux ou contentieux élevé contre la décision adoptée et reprend dès lors qu’une décision gracieuse ou judiciaire a été adoptée la concernant, c’est-à-dire dès l’instant qu’a été tranchée la contestation de tarification.
Sauf à vider de toute substance la règle de forclusion, aucune personne ne peut donc prétendre s’élever contre la forclusion d’une décision adoptée par la CARSAT en matière de tarification, sans préciser la contestation de fond qu’elle entendrait faire trancher.
Le recours juridictionnel ne peut donc par hypothèse viser à ce que le juge relève de manière générale une partie de la forclusion et doit impérativement préciser les constatations concernées.
Or la société [29] demande dans son assignation à la Cour d’appel d’Amiens de juger qu’elle serait recevable à contester les taux accidents du travail et maladies professionnelles de l’année 2022 d’un certain nombre d’établissements listés dans son assignation, mais ne donne aucune précision concernant une éventuelle contestation de tarification.
La Cour d’appel d’Amiens en déduira nécessairement qu’aucune contestation de fond n’était portée au jour de l’introduction de sa demande en justice par la société [29] à l’encontre d’une décision de tarification.
En formulant sa prétention comme elle l’a fait, la requérante entend en réalité que le juge lui reconnaisse un droit de former une éventuelle contestation en tarification au-delà d’un deux mois, contrairement à l’article R.142-1-A du Code de la Sécurité sociale.
Au vu de tout ce qui précède, la Cour d’appel d’Amiens jugera que la société [29] est irrecevable en sa prétention consistant à demander au juge de dire qu’elle serait de manière générale recevable à contester les taux accidents du travail et maladies professionnelles de l’année 2022 des établissements listés dans son assignation.
3°/ A titre infiniment subsidiaire, la Cour d’appel d’Amiens jugera que la société [29] était forclose à introduire le 2 mars 2022 un nouveau recours contre les taux de cotisation de l’année 2022 des établissements listés dans son assignation
En application du troisième alinéa de l’article R.142-1-A du Code de la Sécurité sociale :
” S’il n’en est disposé autrement, le délai de recours préalable et le délai de recours contentieux sont de deux mois à compter de la notification de la décision contestée. Ces délais ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision contestée ou, en cas de décision implicite, dans l’accusé de réception de la demande “.
Les dispositions de l’article L.411-2 du Code des relations entre le public et l’administration précisent que
” Toute décision administrative peut faire l’objet, dans le délai imparti pour l’introduction d’un recours contentieux, d’un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai.
Lorsque dans le délai initial du recours contentieux ouvert à l’encontre de la décision, sont exercés contre cette décision un recours gracieux et un recours hiérarchique, le délai du recours contentieux, prorogé par l’exercice de ces recours administratifs, ne recommence à courir à l’égard de la décision initiale que lorsqu’ils ont été l’un et l’autre rejetés “.
Contrairement à ce qu’affirme la société [29], la loi n’exige pas que les avis de mise à disposition aient été déjà envoyés pour que la date effective de consultation de la décision soit retenue comme date de notification de la décision.
Une telle exigence n’aurait aucun sens puisque les voies et délais de recours sont mentionnés sur la décision consultée et que l’entreprise a donc la possibilité de la contester dès l’instant qu’elle l’a consultée.
L’envoi des avis de mise à disposition n’a vocation dans la logique des textes qu’à faire partir les voies et délais de recours en l’absence de consultation de la décision dans un délai de quinze jours, c’est-à-dire à garantir la sécurité juridique en cas de carence dans la consultation de la décision.
Il est, d’ailleurs, important de rappeler que l’envoi des avis de mise à disposition a toujours lieu après la mise à disposition effective des décisions sur le site [027], laquelle intervient en fin d’année N-1.
En l’espèce, la société [29] a consulté le 31 décembre 2021 les taux 2022 des différents établissements listés dans son assignation.
La CARSAT produit pour en justifier les courriers de fixation des taux et preuves de notification électronique des taux 2022 de ces différents établissements qui montrent que Madame [Y] [X], qui fait partie des personnes habilitées par l’entreprise, a consulté l’ensemble des décisions le 31 décembre 2021.
(Pièce n°1 : Courrier de fixation du taux 2022 du NIC [N° SIREN/SIRET 4] et sa preuve de notification)
(Pièce n°2 : Courrier de fixation du taux 2022 du NIC [N° SIREN/SIRET 5] et sa preuve de notification)
(Pièce n°3 : Courrier de fixation du taux 2022 du NIC [N° SIREN/SIRET 6] et sa preuve de notification)
(Pièce n°4 : Courrier de fixation du taux 2022 du NIC [N° SIREN/SIRET 7] et sa preuve de notification)
(Pièce n°5 : Courrier de fixation du taux 2022 du NIC [N° SIREN/SIRET 8] et sa preuve de notification)
(Pièce n°6 : Courrier de fixation du taux 2022 du NIC [N° SIREN/SIRET 9] et sa preuve de notification)
(Pièce n°7 : Courrier de fixation du taux 2022 du NIC [N° SIREN/SIRET 9] et sa preuve de notification)
(Pièce n°8 : Courrier de fixation du taux 2022 du NIC [N° SIREN/SIRET 10] et sa preuve de notification)
(Pièce n°9 : Courrier de fixation du taux 2022 du NIC [N° SIREN/SIRET 11] et sa preuve de notification)
La CARSAT précise que les preuves de notification produite correspondent à des documents éditables informatiquement à partir du Système National de Tarification des Risques Professionnels (SNTRP) et qui recueillent les données informatives en provenance du site www.[027].fr sur lequel les entreprises accèdent au téléservice compte AT/MP, qui leur permet notamment de consulter leurs décisions annuelles de fixation des taux de cotisations AT/MP.
Le site www.[027].fr est édité par le Groupement d’intérêt public de modernisation des déclarations sociales (GIP-MDS) et est hébergé par la société [19] SAS, selon les mentions légales de son site internet et est donc géré par des entités juridiques autonomes des CARSAT.
(Pièce n°10 : Mentions légales du site [027].FR)
La CARSAT entend également informer la Cour d’appel d’Amiens que la société [29] dispose d’un reflet sur le téléservice compte AT/MP du site [027] de la date de première consultation des décisions annuelles de fixation des taux de cotisation, ce qui lui permet de contredire d’éventuelles éléments apportés par l’organisme.
A défaut pour la société [29] de produire les reflets des premières consultations qui lui sont accessibles sur le site [027].FR, la Cour d’appel d’Amiens retiendra les dates de notification évoquées par la CARSAT avec des pièces justificatives, en considérant que la carence informative de la requérante confirme les présomptions établies par les documents produits par l’organisme.
Compte tenu de la date de notification des décisions qu’évoque la CARSAT, la société [29] avait jusqu’au 28 février 2022 pour introduire un recours gracieux ou contentieux contre les décisions de fixation des taux 2022 de ses établissements.
Or ce n’est que par un courrier du 2 mars 2022 qu’elle a formé le recours évoqué dans son assignation. (Pièce adverse n°2 : Courrier de la société [29] du 2 mars 2022)
La Cour d’appel d’Amiens jugera que la société [29] n’était pas recevable à introduire un nouveau recours contre ses taux 2022 le 2 mars 2022.
Lors de l’audience de plaidoirie du 20 janvier 2023, le Président de la formation de jugement a invité la CARSAT à faire parvenir à la Cour sous un mois la réponse aux questions suivantes en lien avec les mentions figurant sur les preuves de notification produites par l’organisme, avec réponse éventuelle de l’employeur sous un mois de la note de la CARSAT :
-Pourquoi une date d’authentification au 11/01/2022 par lien hypertexte figure-t-elle sur les preuves de notification alors que les avis de mise à disposition (produits par la société [29] avec son assignation) sont datés du 12/01/2022 ‘
-A partir de quelle manipulation concrète est obtenue la date d’authentification par lien hypertexte sur les preuves de notification et est ce à partir de la consultation de l’avis de mise à disposition ‘
Y-a-t-il des liens hypertexte en dehors de l’avis de mise à disposition ‘ .
-Pourquoi les courriers de notification des taux 2022 sont-ils datés du 01/01/2022 (date figurant sur les courriers de notification versés au débat par la CARSAT) alors que ces décisions auraient été consultées le 31/12/2021, selon les preuves de notification produites par la CARSAT ‘
Par note en délibéré du 17 février 2023 expédiée au greffe par courrier du 20 février 2023, la CARSAT NORMANDIE a répondu ce qui suit :
De l’avis de l’organisme, la seule question matérielle posée par le débat de la forclusion des taux 2022 est de savoir à quelle date la société [29] a consulté pour la première fois les décisions de fixation du taux 2022 des différents établissements en litige.
Dans ses conclusions datées du 12 janvier 2023, la CARSAT affirmait à cet égard qu’une consultation des taux avait été effectuée par une personne habilitée par la société [29] directement sur le site www.net-entreprisesfr, avant même l’envoi des avis de mise à disposition.
La CARSAT précisait la date et l’identité de la première personne à avoir consulté ces décisions.
Elle insistait également sur le fait que la société [29] avait elle-même accès à ces mêmes informations à partir du téléservice compte AT-MP du site www.[027].fr et qu’elle disposait de la possibilité matérielle de contredire les éléments de preuve apportés par l’organisme.
Sans préjudice de cette position, la CARSAT entend répondre aux questions qui lui sont posées.
-A partir de quelle manipulation concrète est obtenue la date d’authentification par lien hypertexte sur les preuves de notification ‘
Cette date est obtenue quand une authentification d’une personne habilitée a lieu sur le site www.netentreprises.fr à partir du lien hypertexte contenu dans l’avis de mise à disposition envoyé par courriel.
Un flux d’informations en provenance du site www.[027].fr permet ensuite au système informatique de la CARSAT de recueillir l’information de la date d’authentification hypertexte. qui figurera automatiquement sur la preuve de notification éditable informatiquement.
Mais la CARSAT entend rappeler que l’utilisation du lien hypertexte n’est pas la seule façon pour l’entreprise de consulter les décisions annuelles de fixation des taux de cotisation.
Elle peut le faire directement sur le site www.[027].fr, sans passer par ce lien hypertexte et sans attendre l’envoi des avis de mise à disposition.
-Pourquoi une date d’authentification au 11/01/2022 par lien hypertexte figure sur les preuves de notification alors que les avis de mise à disposition (produits par la société [29] avec son assignation) sont datés du 12/01/2022 ‘
Cela ne constitue-t-il pas une discordance ‘
Avant toute chose, il convient de rappeler que des avis de mis à disposition sont envoyés à toutes les adresses courriels enregistrées par une même entreprise sur le téléservice compte AT-MP du site www.[027].fr.
Selon les notifications produites, les avis de mise à disposition ont été envoyés à des dates différentes sur différentes adresses destinataires de l’entreprise :
-un envoi d’un avis de mise en disposition a eu lieu le 11 janvier 2022 sur l’adresse ” [Courriel 32]- ” (que l’entreprise utilise aussi pour un autre administrateur) enregistrée par l’entreprise pour l’information de l’administrateur nommé ” [Y] [X] ” ;
-un envoi d’un avis de mise a eu lieu le 12 janvier 2022 sur l’adresse “[Courriel 24] ” enregistrée par l’entreprise pour l’information de l’administrateur nommé “juridique ATMP “.
-un envoi d’un avis de mise en disposition a eu lieu le 13 janvier 2022 sur l’adresse ” serviceat.grf@ranclstadfr ” (que l’entreprise utilise aussi pour un autre administrateur) enregistrée par l’entreprise pour l’information de l’administrateur nommé ” service AT “.
L’organisme estime qu’il n’y a aucune discordance entre la date d’authentification par lien hypertexte et la date de l’avis de mise à disposition pour Madame [Y] [X] (seul administrateur à avoir utilisé le lien hypertexte contenu dans un avis de mise à disposition).
Selon les preuves de notification produites par l’organisme, un courriel a été envoyé le 11 janvier 2022 par le site www.[027].fr sur l’adresse ” [Courriel 32] ” (que l’entreprise utilise aussi pour un autre administrateur) enregistrée pour l’administrateur [Y] [X].
Il n’est nullement impossible que Madame [Y] [X] ait été authentifiée le 11 janvier 2022 par le site www.[027].fr. par l’utilisation du lien hypertexte contenu dans cet avis de mise à disposition.
La CARSAT entend attirer l’attention de la Cour d’appel d’Amiens sur le fait que la société [29] a produit avec ses conclusions les avis de mise à disposition envoyés à l’adresse enregistrée pour un autre administrateur, à savoir celui nommé “juridique ATMP ” :
En l’occurrence, la Cour d’appel d’Amiens pourra constater que les avis de mise à disposition produits par la société [29] montrent que des avis de mise à disposition ont été envoyés 12 janvier 2023 sur l’adresse “[Courriel 24] “.
C’est précisément la date figurant sur les preuves de notification produites par la CARSAT pour cette adresse destinataire.
L’exactitude des informations figurant sur la preuve de notification produit par la CARSAT pour cet administrateur tend à démontrer la fiabilité du document qu’elle produit.
-Pourquoi les courriers de notification des taux 2022 sont-ils datés du 01/01/2022 (date figurant sur les courriers de notification) alors que ces décisions auraient été consultées le 31/12/2021 (selon les preuves de notification produites) ‘
Les opérations de tarification annuelles sont réalisées dans le courant du mois de décembre pour permettre aux entreprises d’avoir accès sur le site www.[027].fr aux décisions annuelles de fixation des taux de cotisation, au plus tard au l’ janvier.
En raison de leur ampleur exceptionnelle et de leur complexité technique, ces opérations de tarification annuelles durent plusieurs jours.
Les courriers de notification des taux de cotisations sont datés par défaut du 1” janvier, car il est impossible de déterminer la date exacte à laquelle la décision annuelle de fixation du taux de cotisation sera effectivement accessible pour le cotisant sur www.[027].fr.
La seule certitude est que la décision sera accessible au plus tard au 1e1 janvier de l’année qu’elle concerne, puisque les organismes s’efforcent de commencer les opérations suffisamment à l’avance pour satisfaire cet objectif.
La solution pratique consistant à faire apparaître par défaut la date du 1er janvier sur la première notification annuelle du taux de cotisation n’a aucune incidence pour le cotisant puisque le point de départ de l’exercice de son recours gracieux ou contentieux correspondra à la date de notification de la décision.
Aucune réponse n’a été apportée par la société [29] à cette note en délibéré de la CARSAT NORMANDIE.
MOTIFS DE L’ARRET.
SUR LA DEMANDE DE LA CARSAT NORMANDIE EN ANNULATION DE L’ACTE INTRODUCTIF D’INSTANCE.
Attendu qu’aux termes de l’article 114 du Code de procédure civile :
Aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n’en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d’inobservation d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
La nullité ne peut être prononcée qu’à charge pour l’adversaire qui l’invoque de prouver le grief que lui cause l’irrégularité, même lorsqu’il s’agit d’une formalité substantielle ou d’ordre public.
Attendu qu’aux termes de l’article 115 du même Code :
La nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l’acte si aucune forclusion n’est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief.
Attendu qu’aux termes de l’article 117 du code de procédure civile constituent des irrégularités de fond affectant la validité de l’acte :
– le défaut de capacité d’ester en justice.
– le défaut de pouvoir d’une partie ou d’une personne figurant au procès comme représentant soit d’une personne morale, soit d’une personne physique atteinte d’une incapacité d’exercice.
– le défaut de capacité ou de pouvoir d’une personne assurant la représentation d’une partie en justice.
Qu’aux termes de l’article 54 du Code de procédure civile l’assignation doit indiquer l’organe qui représente légalement la société.
Qu’aux termes de l’article 648 du code de procédure civile auquel renvoie l’article 56 du code de procédure civile qui énonce que l’assignation contient à peine de nullité les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice , tout acte d’huissier de justice doit indiquer notamment si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social , l’organe qui la représente légalement.
Qu’il résulte de ces textes qu’ils n’exigent pas, à peine de nullité, que le nom de la personne physique qui agit pour une personne morale soit mentionné dans l’assignation et qu’il résulte également de leur application combinée avec les articles 114 et 117 du code de procédure civile que le défaut de désignation de l’organe représentant légalement une personne morale constitue un vice de forme dont la nullité ne peut être prononcée qu’à charge, pour l’adversaire qui l’invoque, de prouver l’existence d’un grief .
Attendu qu’en l’espèce la CARSAT NORMANDIE déplore l’absence dans l’acte introductif d’instance du nom et de la qualité des représentants légaux de la société ce dont il résulterait l’impossibilité de toute vérification du consentement dudit ou desdits représentants légaux à l’action en justice et l’absence de justification que la personne ayant agi en justice au nom de la société disposerait d’une habilitation légale ou d’une délégation de pouvoir à cet effet.
Attendu que l’assignation introductive d’instance est délivrée à la CARSAT NORMANDIE à la requête de la société par actions simplifiées ( SAS ) [29] prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au dit siège.
Que le reproche adressé par la CARSAT de l’absence d’indication du nom des représentants légaux de la société et de leur qualité manque en droit, seule la mention de l’organe ( et non la personne physique ) représentant la société étant impartie par les textes, de surcroît à peine de nullité de forme et non de fond.
Attendu qu’aux termes de l’article L227-6 du Code de commerce applicable aux sociétés par actions simplifiées :
La société est représentée à l’égard des tiers par un président désigné dans les conditions prévues par les statuts. Le président est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l’objet social.
Dans les rapports avec les tiers, la société est engagée même par les actes du président qui ne relèvent pas de l’objet social, à moins qu’elle ne prouve que le tiers savait que l’acte dépassait cet objet ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances, étant exclu que la seule publication des statuts suffise à constituer cette preuve.
Les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué, peuvent exercer les pouvoirs confiés à ce dernier par le présent article.
Les dispositions statutaires limitant les pouvoirs du président sont inopposables aux tiers.
Attendu que restituant à ce document son exacte portée malgré l’erreur de rédaction l’affectant, il résulte du “pouvoir d’interjeter appel ” donné par Monsieur [O] [V], Président de la société [29], à Madame [I] [R] en date du 22 juin 2022, que le Président de la société a donné pouvoir spécial à cette salariée de saisir la présente Cour d’une contestation des taux 2022 des établissements de la société.
Que la production d’un pouvoir spécial pouvant intervenir jusqu’à la date à laquelle le juge statue, il s’ensuit que la société a justifié que l’assignation avait été délivrée par une personne habilitée à agir en justice par l’organe représentant la société, à savoir son Président.
Qu’il résulte également de ce qui précède que l’irrégularité, d’ailleurs non soutenue, de l’assignation tenant à l’absence d’indication de l’organe représentant la société est couverte par ce pouvoir spécial puisqu’il résulte de ce dernier que la société est représentée à l’instance par son Président ayant donné pouvoir spécial à la salariée précitée.
Qu’il convient en conséquence de dire non fondée l’exception de nullité de l’acte introductif d’instance présentée par la CARSAT NORMANDIE et de l’en débouter.
SUR LA FIN DE NON-RECEVOIR DE LA CARSAT OPPOSEE AUX RECOURS DE LA SOCIETE [29] ET TIREE DE L’ABSENCE DE CONTESTATION DE FOND A L’APPUI DE LA CONTESTATION DES TAUX.
Attendu que la CARSAT fait valoir que la contestation des taux litigieux serait irrecevable, faute pour la société demanderesse d’avoir indiqué ses motifs.
Que ce moyen manque en fait puisqu’il résulte des courriers mêmes de la CARSAT du 31 mars 2022 de rejet des recours gracieux de la société demanderesse que chaque taux de cotisations était contesté à raison de l’existence de recours concernant des salariés ou de l’intention de la société d’engager de tels recours, ce qui suffit à constituer un motif de contestation des taux litigieux.
Qu’il manque au surplus en droit, aucune disposition des textes régissant la forclusion des recours ne prévoyant l’obligation pour l’employeur d’indiquer les motifs de sa contestation dans son recours gracieux ou contentieux, l’absence persistante d’indication de ces motifs pouvant tout au plus justifier non pas une irrecevabilité du recours mais son débouté sur le fondement de l’article 6 du code de procédure civile.
SUR LA FIN DE NON-RECEVOIR DE LA CARSAT OPPOSEE AUX RECOURS DE LA SOCIETE [29] ET TIREE DE LEUR FORCLUSION.
Attendu ensuite qu’il résulte du quatrième alinéa de l’article L. 242-5 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la loi du 24 décembre 2019 qu’après la réalisation des démarches nécessaires à la mise à disposition des decisions, celles-ci sont réputées notifiées à leur date de consultation et au plus tard dans un délai de quinze jours suivant leur mise à disposition.
Qu’il résulte de l’arrêté du 8 octobre 2020 fixant les modalités de la notification électronique des décisions mentionnées au quatrième alinéa de l’article L. 242-5 du code de la sécurité sociale que la notification des décisions relatives au taux de cotisations et au classement des établissements s’effectue par voie électronique par l’intermédiaire du téléservice : “Compte AT/MP” accessible sur le portail : www.[027].fr, sous réserve que l’employeur ait procédé à son adhésion au téléservice : “Compte AT/MP”, que la caisse adresse à l’adresse électronique de l’employeur, que ce dernier maintient à jour, un avis de dépôt l’informant qu’une décision est mise à sa disposition et qu’il a la possibilité d’en prendre connaissance et que cet avis mentionne la date de mise à disposition de la décision, les coordonnées de l’organisme auteur de la décision et informe l’employeur qu’à défaut de consultation de la décision dans un délai de quinze jours à compter de sa mise à disposition, cette dernière est réputée notifiée à la date de sa mise à disposition.
Attendu que sur la question de la recevabilité du recours gracieux introduit par la société [29] à l’encontre des notifications des taux AT/MP 2022 de ses établissements, la CARSAT indique à juste titre que les parties sont contraires sur la question de savoir si la notification peut intervenir avant la mise à disposition de la décision.
Qu’en effet, la société [29] estime qu’en toute hypothèse la date de consultation ne peut au plus tôt courir qu’à partir de la date de mise à disposition qu’elle fixe selon les passages de ses écritures tantôt au 10 mars tantôt au 12 mars 2022 tandis que la CARSAT estime que la décision peut parfaitement être consultée par une personne habilitée avant toute mise à disposition de la décision et se prévaut d’une consultation à la date du 31 décembre 2021 des décisions contestées
Attendu qu’aux termes de l’article L.441-1 du Code de l’organisation judiciaire, avant de statuer sur une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, les juridictions de l’ordre judiciaire peuvent, par une décision non susceptible de recours, solliciter l’avis de la Cour de Cassation.
Attendu que la question se pose de savoir s’il résulte du quatrième alinéa de l’article L. 242-5 du code de la sécurité sociale et de l’arrêté du 8 octobre 2020 que la notification du taux ne peut intervenir qu’après que l’employeur se soit vu notifier la mise à sa disposition de la décision portant sur le taux ou si au contraire il résulte de ces textes que la notification peut intervenir avant toute mise à disposition de la décision sur le taux.
Que cette question est nouvelle comme portant sur un texte récent et sur laquelle la COUR DE CASSATION ne s’est pas encore prononcée, qu’elle présente une difficulté sérieuse puisque si les deux textes précités n’envisagent que deux modalités de notification, à savoir une notification effective en cas de consultation de la décision dans les quinze jours de la mise à disposition et une notification réputée effectuée en cas d’absence de consultation dans ce délai, ils n’excluent pas pour autant pas que la notification puisse intervenir selon d’autres modalités et avant toute mise à disposition.
Que cette question se pose dans de nombreux litiges portés devant la Cour spécialement désignée.
Qu’en présence de la difficulté exposée ci-dessus, la Cour envisage de solliciter l’avis de la COUR DE CASSATION et de libeller ainsi cette demande d’avis:
Résulte-t-il du quatrième alinéa de l’article L. 242-5 du code de la sécurité sociale et de l’arrêté du 8 octobre 2020 que la notification électronique du taux de cotisation AT/MP d’un employeur faisant courir le délai de recours à l’encontre de ce taux ne peut intervenir qu’après que l’employeur se soit vu notifier la mise à sa disposition de la décision portant sur le taux ou au contraire résulte-t-il de ces textes que la notification faisant courir le délai de recours peut intervenir avant toute mise à disposition de la décision sur le taux’
Attendu qu’en application de l’article 1031-1 du Code de procédure civile lorsque le juge envisage de solliciter l’avis de la COUR DE CASSATION en application de l’article L 441-1 du Code de l’Organisation Judiciaire, il en avise les parties et le ministère public et recueille leurs observations écrites éventuelles dans le délai qu’il fixe, à moins qu’ils n’aient déjà conclu sur ce point .
Qu’il convient donc avant dire droit de recueillir les observations écrites éventuelles des parties dans le délai d’un mois de la date de notification ou, s’il y a lieu, de signification de la présente décision et celles de Madame la Procureure Générale près la Cour d’Appel d’Amiens dans le délai d’un mois de la date de réception de la présente décision en ses services.
Qu’il convient ensuite de rappeler qu’en application de l’article 1031-1 du Code de procédure civile que dès réception des observations sollicitées ou à l’expiration du délai imparti pour ces observations la Cour pourra solliciter l’avis de la COUR DE CASSATION .
Que la cause sera à nouveau évoquée à l’audience du 7 juillet 2023 à 9 heures pour déterminer les suites devant être données à la décision qui aura entre-temps été rendue par la Cour à la suite des observations des parties ou à l’expiration du délai imparti pour ces observations.
Que la cause devra en effet à nouveau être mise en délibéré pour statuer sur les prétentions respectives des parties si la Cour décide de ne pas saisir la COUR DE CASSATION ou pour sursis à statuer jusqu’à réception de l’avis ou jusqu’à l’expiration du délai mentionné à l’article 1031-3 du code de procédure civile, pour le cas contraire où la Cour aurait décidé de transmettre la demande d’avis à la COUR DE CASSATION.
Que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à l’audience du 7 juillet 2023 à 9 heures.
SUR LES DEPENS.
Attendu que la Cour n’étant pas dessaisie de la cause il convient de réserver les dépens jusqu’à la solution des questions restant en litige.
PAR CES MOTIFS .
La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe,
Déboute la CARSAT NORMANDIE de son exception de nullité de l’acte introductif d’instance et de sa fin de non-recevoir opposée à la contestation de ses taux de cotisations par la société [29] et tirée de l’absence d’allégation par cette dernière de moyens de fond à l’appui de ces recours.
Et satuant par décision insusceptible de recours,
Invite les parties à faire parvenir à la présente Cour dans le délai d’un mois de la date de notification ou, s’il y a lieu, de la signification du présent arrêt, leurs observations écrites sur l’éventualité de la saisine de la COUR DE CASSATION de la demande d’avis envisagée dans les motifs de la présente décision et invite Madame la Procureure Générale près la Cour d’Appel d’Amiens à lui faire parvenir ses observations écrites sur ce projet de demande d’avis à la COUR DE CASSATION dans le délai d’un mois de la réception de la présente décision en ses services .
Dit que la cause sera à nouveau évoquée à l’audience du 7 juillet 2023 à 9 heures pour que les parties soient entendues sur les suites devant être données à la décision qui aura été entre temps rendue par la Cour à la suite des observations des parties ou à l’expiration du délai imparti pour ces observations.
Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à cette audience du 7 juillet 2023 à 9 heures.
Réserve les dépens .
Le Greffier, Le Président,