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Selon l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, ‘I.- lorsque l’autorité judiciaire, saisie par l’administration fiscale, estime qu’il existe des présomptions qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d’affaires en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l’administration des impôts, ayant au moins le grade d’inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des finances publiques, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s’y rapportant sont susceptibles d’être détenus ou d’être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu’en soit le support.
II. ‘ Chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter.
Lorsque ces lieux sont situés dans le ressort de plusieurs juridictions et qu’une visite simultanée doit être menée dans chacun d’eux, une ordonnance unique peut être délivrée par l’un des juges des libertés et de la détention territorialement compétents.
Le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d’autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d’information en possession de l’administration de nature à justifier la visite.’
COUR D’APPEL D’AGEN
CABINET DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE N° 18 /2023
N°RG : 23/283
N° Portalis : DBVO-V-B7H-DDF7
Décision déférée : ordonnance du 27 mars 2023 rendue par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de CAHORS
Ordonnance rendue le 3 juillet 2023 par Benjamin FAURE, conseiller, magistrat délégué, assisté de Nathalie CAILHETON, greffière,
APPELANT :
[L] [H]
né le [Date naissance 6] 1980 à [Localité 9]
domicilié [Adresse 3]
Ayant pour avocat : Maître Serge MONEY, [Adresse 7]
INTIMÉ :
Le directeur général des finances publiques
représenté par l’administrateur général des finances publiques chargé de la direction nationale d’enquêtes fiscales
[Adresse 5]
Ayant pour avocat : Maître Jean DI FRANCESO, SELARL URBINO ASSOCIES, [Adresse 4]
DÉBATS : à l’audience publique du 19 juin2023, devant Benjamin FAURE assisté de Chrystelle Borin, greffière,
Nous, Benjamin FAURE, conseiller délégué par ordonnance du premier président en date du 7 décembre 2022 pour statuer sur les appels formés à l’encontre de décisions de l’article L.16B du livre des procédures fiscales, en présence de notre greffier et après avoir entendu les parties ou les conseils des parties en leurs explications :
– avons mis l’affaire en délibéré au 3 juillet 2023 ;
– avons rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour la décision, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, l’ordonnance contradictoire suivante :
FAITS, MOYENS ET PROCÉDURE
Par requête présentée le 20 mars 2023, Mme [M] [K], inspectrice des finances publiques en poste à la direction nationale d’enquêtes fiscales, spécialement habilitée à cet effet par le directeur général des finances publiques, a sollicité la mise en oeuvre de l’article L.16B du livre des procédures fiscales à l’encontre de la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LTD et de la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS.
Ces sociétés ont respectivement pour objet :
les services de logistique ;
la commission de transports, le transport public routier de marchandises au moyen de véhicules de tous tonnages et location de véhicules industriels pour le transport public routier de marchandises avec ou sans conducteur assurée à l’aide de véhicules de tout tonnage ;
La requête était fondée sur les présomptions suivant lesquelles :
la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LTD s’était soustraite ou se soustrairait à l’établissement et au paiement des impôts sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d’affaires, en se livrant à des achats ou des ventes sans factures, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts ;
la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS s’était soustraite ou se soustrairait à l’établissement et au paiement des taxes sur le chiffre d’affaires en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts ;
Par ordonnance du 27 mars 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de CAHORS, à la requête de la direction nationale d’enquêtes fiscales, a autorisé, conformément à l’article L.16B du livre des procédures fiscales, les inspecteurs des finances publiques qu’il a désignés, spécialement habilités par le directeur général des finances publiques, et assistés des contrôleurs des finances publiques habilités et également désignés, à procéder à des opérations de visite domiciliaire notamment dans les locaux et dépendances sis [Adresse 3] susceptibles d’être occupés par [L] [H] et / ou [R] [M] [X] épouse [H] en propre et en qualité d’entrepreneur individuel et / ou la SAS [H].
Lesdites opérations ont été réalisées le 28 mars 2023 et ont fait l’objet d’un procès-verbal daté du même jour.
Par courrier recommandé du 6 avril 2023, reçu au greffe de la cour d’appel le 11 avril 2023, [L] [H] a relevé appel de l’ordonnance du 27 mars 2023.
Dans ses conclusions, [L] [H] demande l’annulation de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Cahors, la condamnation de l’Etat aux dépens et à lui payer 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que :
preuve n’est rapportée d’aucune présomption de fraude dans la mesure où, en cas de constatation par l’administration fiscale d’un manquement à l’obligation de déclaration de la TVA, seule une amende de 5% du montant de ladite TVA est applicable ;
la société est seulement présumée manquer à ses obligations déclaratives au regard des opérations soumises à l’autoliquidation de la TVA française ;
la mesure est disproportionnée ;
Dans ses conclusions, le directeur général des finances publiques demande la confirmation de l’ordonnance entreprise, le rejet de l’ensemble des prétentions de l’appelant et sa condamnation à lui payer 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il expose que :
l’ordonnance, en ce qu’elle vise la société EASYSENT, n’est nullement contestée ;
en réponse à l’argumentation selon laquelle les faits retenus à l’encontre de la société ENTREPRISE PONS SERVICE ne relèvent d’aucune des hypothèses de présomption de fraude énumérées par l’article L.16B du livre des procédures fiscales, les acquisitions communautaires d’une société, au même titre que les autres opérations réalisées, doivent figurer dans la rubrique des opérations imposables et participent, de la même manière, à la détermination de la TVA brute de l’entreprise
la société a manqué à son obligation déclarative et aucune régularisation n’était intervenue lors du dépôt de la requête ;
il n’est pas contesté par l’appelant que le montant des acquisitions intracommunautaires réalisées par l’entreprise n’est pas déclaré ;
l’administration fiscale n’a pas besoin de preuves probantes pour engager une visite domiciliaire à l’encontre d’un contribuable mais uniquement de simples présomptions ;
MOTIFS
1. Sur la forme
En vertu de l’article L.16 B du livre des procédures fiscales, ‘l’ordonnance peut faire l’objet d’un appel devant le premier président de la cour d’appel dans le ressort de laquelle le juge a autorisé la mesure. Les parties ne sont pas tenues de constituer avocat.
Suivant les règles prévues par le code de procédure civile, cet appel doit être exclusivement formé par déclaration remise ou adressée, par pli recommandé ou, à compter du 1er janvier 2009, par voie électronique, au greffe de la cour dans un délai de quinze jours. Ce délai court à compter soit de la remise, soit de la réception, soit de la signification de l’ordonnance. Cet appel n’est pas suspensif.
Le greffe du tribunal judiciaire transmet sans délai le dossier de l’affaire au greffe de la cour d’appel où les parties peuvent le consulter.’
L’appel interjeté par [L] [H], dans les formes et délais prévus par la loi, est recevable.
2. Sur le fond
Selon l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, ‘I.- lorsque l’autorité judiciaire, saisie par l’administration fiscale, estime qu’il existe des présomptions qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d’affaires en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts, elle peut, dans les conditions prévues au II, autoriser les agents de l’administration des impôts, ayant au moins le grade d’inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des finances publiques, à rechercher la preuve de ces agissements, en effectuant des visites en tous lieux, même privés, où les pièces et documents s’y rapportant sont susceptibles d’être détenus ou d’être accessibles ou disponibles et procéder à leur saisie, quel qu’en soit le support.
II. ‘ Chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter.
Lorsque ces lieux sont situés dans le ressort de plusieurs juridictions et qu’une visite simultanée doit être menée dans chacun d’eux, une ordonnance unique peut être délivrée par l’un des juges des libertés et de la détention territorialement compétents.
Le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d’autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d’information en possession de l’administration de nature à justifier la visite.’
2.1. considérations préalables
A titre liminaire, il convient de rappeler que l’article L.16B du livre des procédures fiscales exige de simples présomptions. Saisi d’un recours, le premier président ou son délégué doit apprécier seulement l’existence de présomptions d’agissements frauduleux justifiant la mesure autorisée, et non celle des agissements.
2.2. sur la société EASYSENT TECHNOLOGY LTD
2.2.1. constatations
[L] [H] ne conteste pas les constatations suivantes :
La société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LTD a pour activité les services de logistique. Elle est l’entité de contrôle du groupe EASYSENT composé de 15 sociétés situées en France, en Belgique, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Espagne et en Chine.
En premier lieu, il résulte de l’extrait du fichier icris.cr.gov.hk que la société EASYSENT TECHNOLOGY LTD a établi ses sièges sociaux successifs aux adresses des sociétés HONGKONG LONGSOM SERVICES AGENCY LIMITED puis UNION PROFESSIONAL LIMITED et enfin K PROFESSIONAL SERVICES LIMITED, ce que corrobore également la page extraite du site Internet de l’entreprise. Ces trois sociétés sont des secrétaires d’entreprises qui ne disposent pas de locaux propres pour l’exercice de leur activité mais permettent de ‘fournir une adresse enregistrée à HONG KONG.’ Aucun numéro de téléphone ne figure sur le site Internet de la société qui n’est accessible que par l’intermédiaire d’un formulaire de contact. Pareille absence est à relever sur le contrat de collaboration conclu entre la société EASYSENT TECHNOLOGY LTD et la SAS EASYSENT. Aucun numéro de téléphone n’apparaît dans le cartouche de désignation du représentant légal, [O] [E]. Des vérifications diligentées par l’administration fiscale, il ressort que ce dernier est policier et ne figure pas dans l’organigramme de l’équipe dirigeante sur le site Internet de la société EASYSENT TECHNOLOGY LTD. Au contraire, ce site présente, à la tête de la société, un dénommé [I], identifié comme étant [T] [I], domicilié en FRANCE. Auparavant, cette fonction était occupée par son épouse, [S] [E], fille de [O] [E]. [T] [I] réside avec cette dernière, [Adresse 2], en compagnie de leurs deux enfants, comme le rapporte l’attestation de Mme [A], contrôleuse des finances publiques à [Localité 10], le 9 mars 2023.
[T] [I] est déclaré comme le bénéficiaire effectif de la SAS EASYSENT, immatriculée au RCS de MEAUX, ayant pour activités ‘[la] réception, [le] stockage, [le] conditionnement, [le] contrôle et [l’]expédition de marchandises, [la] préparation de commandes, [la] distribution […].’
En deuxième lieu, la page LINKEDIN du groupe EASYSENT indique qu’il est installé à l’aéroport de [12], [Adresse 8], soit la même adresse que la SAS EASYSENT. Leurs activités sont également identiques et un contrat de collaboration a été signé le 1er septembre 2018 entre la S.A.S. EASYSENT et la société EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED ayant, notamment, pour objet des ‘services de livraison logistique au sein de l’UE (y compris la livraison de camions, la livraison express, la distribution des canaux postaux et d’autres méthodes de distribution possibles.)’ La SAS EASYSENT a eu recours aux services des sociétés DHL et UPS afin de réaliser la livraison de colis à des particuliers ou à des professionnels comme des entreprises de commerce en ligne, les factures mettant en évidence que la majeure partie de l’activité était organisée sur les territoires européen et français.
En troisième lieu, il ressort des pièces de la procédure que l’équipe de direction du groupe EASYSENT, contrôlé par la société EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED, est composée majoritairement de responsables employés par ses filiales françaises et domiciliés en FRANCE.
Ainsi, il convient de relever les éléments suivants :
comme il l’a été rappelé plus haut, [T] [I], domicilié en FRANCE, présenté comme PDG du groupe EASYSENT, occupe le poste de président de la SAS EASYSENT mais également de la SASU EASYSENT GROUP HOLDING, immatriculée au RCS de PARIS le 27 avril 2022, et ayant pour activité ‘toutes opérations et toutes missions pouvant se rattacher à toute activité de la réception, du stockage, du conditionnement, du contrôle et l’expédition de marchandises, de la préparation de commandes, de la distribution, de la plateforme logistique, ainsi que tous services de logistique internationale […]’ ;
[U] [C], domicilé en FRANCE, est actionnaire minoritaire de la société EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED, cofondateur du groupe EASYSENT, a perçu des salaires comme ‘directeur dével’ de la SAS EASYSENT ainsi que de BELGIQUE (23.400 euros) et des dividendes en provenance de HONG-KONG (274.000 euros) ;
[P] [J], domiciliée en FRANCE, vice-présidente du groupe EASYSENT, est cheffe de projet, responsable opérations chaîne logistique au sein de la SAS EASYSENT, et a perçu des revenus de HONG KONG pour la somme de 36.000 euros en 2021 ;
[G] [W], domicilié en FRANCE, est présenté comme directeur général d’Easysent FRANCE ;
[F] [V], domicilié en FRANCE, est directeur général d’EPSP FRANCE et membre de l’équipe de direction du groupe EASYSENT ;
Il s’en induit que l’équipe de direction du groupe EASYSENT, contrôlé par la société EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED, est composée majoritairement de responsables employés par ses filiales françaises et domiciliés en France.
En quatrième et dernier lieu, l’attestation de Mme [A], en date du 10 mars 2023, démontre que la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED ‘n’est pas répertoriée dans le compte fiscal des professionnels sous réserve des données souscrites par voie électronique ou courrier qui ne seraient pas encore prises en compte.’
2.2.2. présomptions
De ce qui précède, l’administration fiscale est ainsi bien fondée à invoquer les présomptions suivantes :
la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED dispose de moyens matériels limités à HONG-KONG pour la réalisation de son activité et sans rapport avec son implantation globale ;
la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED est représentée par [O] [E], policier en 2001, domicilié en CHINE, successeur de sa fille [S] [E], en qualité d’associé majoritaire et dirigeant sans que celui-ci n’exerce de fonction de direction ;
la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED a comme représentant réel [T] [I], qui concentre entre ses mains les pouvoirs décisionnels au sein du groupe EASYSENT et de la SAS EAYSENT ;
la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED dispose de son centre décisionnel en FRANCE ;
la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED exerce une activité similaire de transport logistique à celle de la SAS EASYSENT avec qui un contrat de collaboration de prestations de services logistiques a été signé en 2018 et a recours à des sociétés de transport ;
la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED utilise les moyens matériels et humains de la SAS EASYSENT pour exercer son activité ;
faute d’être répertoriée dans les bases internes de la DGFIP, la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED est présumée exercer en FRANCE ses activités sans soucrire les déclarations fiscales correspondantes ;
la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED ne procède pas à la passation régulière de la totalité de ses écritures comptables ;
2.3. sur la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS
2.3.1. constatations
La SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS, anciennement SAS ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS, représentée par son président, [N] [D], a son siège [Adresse 1]. Elle a pour objet ‘la commission de transports, le transport public routier de marchandises au moyen de véhicules de tous tonnages et location de véhicules industriels pour le transport public routier de marchandises avec ou sans conducteur assurée à l’aide de véhicules de tout tonnage.’ Le 22 mars 2022, [N] [D] a cédé la totalité de ses parts dans la société à la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED.
La SAS ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS, devenue la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS, a créé en BELGIQUE une SARL ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS (EPSP), sise [Adresse 13], dont [F] [V] et son épouse, [Z] [Y], étaient cogérant du 12 novembre 2019 au 15 mars 2022.
[L] [H] se présente, sur son profil Linkedin, comme étant consultant douane, sécurité et sûreté au sein de la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS dans laquelle il a antérieurement occupé les fonctions de directeurs d’exploitation, de directeur d’agence, directeur général délégué.
Le site Internet du groupe EASYSENT présente la société française SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS et la société belge SARL ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS comme faisant partie dudit groupe.
Le 14 avril 2022, l’administration fiscale française était destinataire d’un signalement de son homologue belge sur la SARL ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS dont il résultait que :
cette société importait des marchandises en provenance de CHINE à destination de l’Union européenne et fournissait ces biens à des clients à d’autres Etats membres ;
certains clients de la société étaient des commerçants qui avaient disparu ;
le montant des produits fournis destinés à des commerçants ayant disparu pouvait être évalué à 500.000.000 euros ;
la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED avait demandé à la SAS ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS de réaliser pour son compte les formalités douanières d’importation en BELGIQUE, raison pour laquelle une succursale a été établie dans ce pays ;
la société SAS ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS est la seule cliente de la SARL ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS ;
la société belge recevait directement ses instructions de la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED ;
la société belge facture ses services directement à la société de droit hongkongais EASYSENT TECHNOLOGY LIMITED et est payée par des comptes bancaires ouverts à HONG-KONG ;
la société belge n’a déposé que des déclarations de TVA nulle malgré la grande quantité de marchandises importées en BELGIQUE ;
la société belge n’a soumis aucune déclaration récapitulative, masquant ainsi l’identité des entreprises de l’Union européenne à laquelle les marchandises importées étaient destinées ;
suite à un contrôle relatif à la TVA, la société belge a déposé des déclarations rectificatives précisant qu’il s’agissait d’une erreur du comptable ;
L’administration fiscale belge concluait que l’entreprise SARL ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS n’avait pas des pratiques commerciales normales et était incapable de lier les déclarations en douane d’importation aux documents de transport.
Selon une attestation de Mme [A], en date du 8 mars 2023, suite à une demande d’échange d’informations entre Etats, la société belge SARL ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS avait importé via la BELGIQUE des produits chinois d’une valeur de 846.821.203,58 euros pour le compte de la société française SAS ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS. Elle a également livré des services d’une valeur de 583.000 euros pour le compte de la société française SAS ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS. Il était noté que la société belge SARL ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS n’avait pas de mandataire ou de comptable externe en BELGIQUE et que les déclarations de TVA et relevés intra-communautaires devaient être déposés sur l’adresse [Courriel 11]. Nonobstant, il était constaté que la société belge SARL ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS ne déposait pas de relevé intra-communautaire relatif aux importations.
L’attestation du 10 mars 2023 de Mme [A], après consultation des bases de données, met en exergue que les montants des opérations imposables et non-imposables ou non-taxées de SAS ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS, devenue la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS s’élèvent à :
9.073.635 euros pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2020 ;
9.819.738 euros pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2021 ;
9.281.255 euros au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2022 ;
Pour autant, la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS ne fait pas apparaître sur les déclarations de TVA mensuelles d’acquisitions intra-communautaires ni de TVA due sur les acquisitions intra-communautaires pour la période du 1er janvier 2020 au 30 décembre 2022.
2.3.2. présomptions
Au regard des éléments ci-dessus, c’est à bon droit que l’administration fiscale invoque les présomptions suivantes :
la SAS ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS, devenue la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS, effectue les démarches administratives et douanières en lieu et place de sa succursale ;
la SAS ENTREPRISE PEPETE SERVICE PLUS, devenue la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS, minore le montant des opérations imposables en matière de taxes sur le chiffre d’affaires ;
[L] [H] expose que les faits reprochés à la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS ne relèvent pas des hypothèses de présomptions de fraude énumérées par l’article L.16B du livre des procédures fiscales.
Pour autant, le fait de minorer le montant des opérations imposables en matière de taxes sur le chiffre d’affaires est de nature à affecter la passation régulière des écritures comptables. En effet, contrairement à ce que [L] [H] soulève, l’administration fiscale ne reproche pas à SAS ENTREPRISE PONS SERVICE une omission de ses obligations déclaratives en matière d’impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée mais une minoration. Dès lors, le moyen invoqué par [L] [H] sera écarté.
[L] [H] se prévaut du fait que, en cas de constatation, par l’administration fiscale, d’un manquement à l’obligation déclarative de la TVA, aucun rappel de taxe n’est notifié dans la mesure où celle-ci est déductible par le contribuable. Néanmoins, il ne s’agit là que de la conséquence du manquement qui est sans incidence sur la caractérisation de ce dernier. A ce stade de la procédure, il n’incombe à la juridiction que d’apprécier seulement l’existence de présomptions d’agissements frauduleux justifiant la mesure autorisée. Il ne lui appartient pas de se prononcer sur le régime de l’assujettissement de la société SAS ENTREPRISE PONS SERVICE et les conséquences fiscales qui en découlent. Le moyen est donc inopérant pour critiquer l’ordonnance par laquelle le juge a recherché s’il existait des présomptions d’agissements visés par la loi justifiant la recherche de leur preuve au moyen de la mesure autorisée.
[L] [H] considère qu’il existe une disproportion entre le but poursuivi et l’atteinte à l’inviolabilité du domicile. En effet, doit être pleinement appréciée la proportionnalité de l’ingérence ainsi commise au détriment des droits fondamentaux. En l’espèce, le recours à cette procédure, qui donne lieu à un recours juridictionnel effectif, s’explique par le caractère nébuleux de l’organisation du groupe EASYSENT dont des éléments précis laissent à penser que son centre névralgique serait situé en FRANCE. Une telle mesure est également justifiée par les minorations du montant des opérations imposables de la SAS ENTREPRISE PONS SERVICE PLUS en matière de taxe sur le chiffre d’affaires. Il s’ensuit qu’aucune disproportion entre les nécessités de la lutte contre la fraude fiscale et la protection du domicile ne peut être invoquée.
3. Conclusion
Au regard des points rappelés et tranchés ci-dessous, l’ordonnance du premier juge doit être confirmée en toutes ses dispositions.
4. Sur les demandes accessoires
[L] [H] succombe à la procédure et doit être condamné aux dépens.
Au regard de la solution apportée au litige, l’équité commande de condamner [L] [H] à payer au directeur général des finances publiques la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
Nous, Benjamin FAURE, conseiller statuant par délégation du premier président de la cour d’appel d’Agen, par ordonnance contradictoire et en dernier ressort,
Recevons l’appel de [L] [H],
Confirmons, en toutes ses dispositions, l’ordonnance entreprise,
Condamnons [L] [H] aux dépens,
Condamnons [L] [H] à payer au directeur général des finances publiques la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE CONSEILLER DÉLÉGUÉ
Nathalie CAILHETON Benjamin FAURE