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En l’absence de lien de subordination juridique, le contrat de mécénat ne peut être qualifié de contrat de travail.
Dans cette affaire, la société RH&B et Monsieur [H] régularisaient un contrat d’agent aux termes duquel RH&B se voyait confier un mandat exclusif relatif à la promotion du peintre et de ses oeuvres et à la commercialisation de l’intégralité de celles-ci, existantes et futures. Le contrat était conclu pour une durée de 5 ans.
Le 26 juillet 2018, un avenant audit contrat était signé entre les parties. Cet avenant visait principalement à organiser la vente des oeuvres réalisées sur le site internet ‘Art’s Rose’. Cet avenant prorogeait également la durée du contrat pour une période de 2 ans, étant entendu que cette prorogation n’affecterait pas la période de soutien et donc la date d’achèvement de l’oeuvre, toujours fixée au mois de janvier 2019 (article 2 de l’avenant).
Par la suite, les relations entre Monsieur [H] et la société RH&B ne se sont plus poursuivies et Monsieur [H] a saisi (sans succès) le conseil de prud’hommes de Créteil pour faire constater que la rupture des relations entre lui et la société RH&B ne peuvent s’analyser que comme une rupture d’un contrat de travail puisqu’il estime avoir été sous un lien de subordination juridique.
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 2
ARRÊT DU 29 JUIN 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/00538 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CG7CS
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Septembre 2022 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CRETEIL – RG n° F20/01059
APPELANT
Monsieur [C] [H]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représenté par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125
INTIMÉS
Madame [E] [P]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Monsieur [L] [P]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Société RH&B INVESTMENT LIMITED société de droit anglais, prise en la personne de son représentant légal
[K] [O], [Adresse 5]
[Localité 6]
[Localité 6], ENGLAND
Tous représentés par Me Benoît BOMMELAER, avocat au barreau de RENNES, toque : 43
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 84 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Paule ALZEARI, présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Marie-Paule ALZEARI, présidente
Christine LAGARDE, conseillère
Didier MALINOSKY, Magistrat Honoraire
Greffière lors des débats : Mme Alicia CAILLIAU
ARRÊT :
– Contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
– signé par Marie-Paule ALZEARI, présidente et par Alicia CAILLIAU, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
La société RH&B Investment Limited (RH&B) est une société de droit anglais. Elle est spécialisée dans la promotion de l’art et la gestion de patrimoine immobilier.
Monsieur [C] [H], ressortissant américain, est artiste peintre de métier depuis 2009. Début 2015, Monsieur [H], à la recherche d’un financement pour son projet, dénommé ‘Carmina’, se rapprochait de la société RH&B et présentait aux époux [P] un budget prévisionnel, incluant les frais fixes (documentaire du projet, toile et châssis, etc…) et les frais mensuels (loyers d’atelier, frais des modèles, etc…) induits par le projet.
Le 12 janvier 20216, la société RH&B et Monsieur [H] régularisaient un contrat d’agent aux termes duquel RH&B se voyait confier un mandat exclusif relatif à la promotion du peintre et de ses oeuvres et à la commercialisation de l’intégralité de celles-ci, existantes et futures. Le contrat était conclu pour une durée de 5 ans.
Le 26 juillet 2018, un avenant audit contrat était signé entre les parties. Cet avenant visait principalement à organiser la vente des oeuvres réalisées sur le site internet ‘Art’s Rose’. Cet avenant prorogeait également la durée du contrat pour une période de 2 ans, étant entendu que cette prorogation n’affecterait pas la période de soutien et donc la date d’achèvement de l’oeuvre, toujours fixée au mois de janvier 2019 (article 2 de l’avenant).
Par la suite, les relations entre Monsieur [H] et la société RH&B ne se sont plus poursuivies et Monsieur [H] a saisi le conseil de prud’hommes de Créteil pour faire constater que la rupture des relations entre lui et la société RH&B ne peuvent s’analyser que comme une rupture d’un contrat de travail puisqu’il estime avoir été sous un lien de subordination juridique.
Par jugement du 13 septembre 2022, le conseil de prud’hommes a :
dit le conseil des prud’hommes incompétent pour se prononcer sur la validité du contrat de collaboration commerciale ;
dit, en conséquence, n’y avoir lieu à statuer sur les demandes de Monsieur [H] ;
condamné Monsieur [H] à verser à la société RH&B :
15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
débouté la société RH&B de son autre demande au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile ;
mis les dépens à la charge de Monsieur [H].
Selon déclaration du 18 janvier 2023, Monsieur [H] a interjeté appel de cette décision.
Par ordonnance en date du 2 février 2023, il a été autorisé à assigner à jour fixe les intimés pour l’audience du 1er juin 2023 à 13h30.
L’assignation a été délivrée le 27 février 2023 et déposée le 24 avril 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 30 mai 2023, Monsieur [H] demande à la cour de:
‘ In limine litis et à toutes fins utiles : ANNULER la signification du jugement du conseil des prud’hommes de Créteil du 13 septembre 2022 dont appel :
REJETER la demande d’irrecevabilité de l’appel formulée par les intimés
INFIRMER le jugement du conseil des prud’hommes de Créteil en date du 13 septembre 2022
DIRE que le conseil des prud’hommes était bien compétent.
EVOQUER l’affaire
FAIRE DROIT aux demandes de monsieur [C] [H] ci-après exprimées :
o JUGER que monsieur [C] [H] a été engagé par les époux [P] et la société RH&B en date du 15 décembre 2015 par un contrat de travail à durée indéterminée ;
o JUGER que la prise d’acte de rupture du contrat de travail à la date du 18 juin 2020 est légitime et s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
o CONDAMNER solidairement madame [E] [P], monsieur [L] [P] et la société RH&B à payer à monsieur [C] [H] :
– Les arriérés de salaire pour la période du 19 avril 2016 du 18 juin 2020 pour un montant brut de 110 369,49 € brut, duquel il conviendra de déduire la somme nette de 21 285,50 € déjà réglée’;
– Et à lui remettre fiches de paie, attestations pôle emploi et certificat de travail conformes sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document compter d’un délai de 10 jours après notification du jugement ;
– Se réserver la liquidation de l’astreinte ;
– L’indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse prévue par l’article L.1235-3 du Code du travail pour un montant de 2 420,00 € ;
– L’indemnité légale de licenciement prévue à l’article L.1234-9 du Code du travail pour un montant de 2 722,50 € ;
– L’indemnité compensatrice de préavis pour un montant de 7 260,00 € ;
– L’indemnité compensatrice de congés payés pour un montant de 3 049,20 € ;
– L’indemnité pour travail dissimulé, prévue à l’article L.8223-1 du Code du travail la somme de 14 520,00 € ;
– La somme de 70 000 € sur le fondement de l’article 1240 du Code civil titre de dommages et intérêts pour comportement inapproprié et atteinte à sa liberté du travail ;
o FAIRE interdiction à madame [E] [P], monsieur [L] [P] et à la société RH&B de s’adresser aux partenaires de monsieur [H] sous astreinte de 10 000 € par infraction constate.
o CONDAMNER in solidum la société RH&B, madame [E] [P] et monsieur [L] [P], à payer à monsieur [C] [H] une somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.
o JUGER que l’ensemble des condamnations concernant les salaires et accessoires de salaires supportent l’intérêt légal avec capitalisation due sur une année entière.
A titre subsidiaire à défaut d’évocation,
RENVOYER l’affaire devant le conseil des prud’hommes autrement composé.’
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 2 mai 2023, la société RH&B, Madame et Monsieur [P] demandent à la cour de:
‘ A titre préliminaire, et in limine litis, déclarer irrecevable l’appel formé par Monsieur [H] en ce qu’il a été réalisé selon les conditions de la procédure à jour fixe ;
– A titre subsidiaire, confirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Créteil, en ce qu’il a :
o
Déclaré la juridiction prud’homale incompétente ;
o Condamné Monsieur [H] au paiement de la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
o Condamné Monsieur [H] au paiement de la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;
– En tout état de cause, condamner Monsieur [H] :
o A payer une amende civile d’un montant de 10 000 euros, sur le fondement de l’article 32-1 du Code de procédure civile ;
o Au versement de la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.’.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Sur la recevabilité de l’appel formé par Monsieur [H]
Les intimés soutiennent que l’appel formé par Monsieur [H] sur le fondement des articles 83 et suivants du code de procédure civile est irrecevable. En effet, le conseil de prud’hommes s’est d’abord prononcé sur le fond du dossier pour conclure à son incompétence, de sorte que le jugement déféré était un jugement mixte dont l’appel ne relevait pas des articles 83, 84 et 85 du code de procédure civile.
M.[H] invoque la nullité de la signification du jugement en indiquant que celui-ci ne lui a toujours pas été notifié puisqu’aucune notification conforme à l’article 84 du code de procédure civile n’a été mise en ‘uvre.
Sur la recevabilité de son appel, il fait valoir que le conseil de prud’hommes a dit n’y avoir lieu à statuer sur ses demandes ce qui exclut la qualification de jugement mixte.
En premier lieu, il doit être observé qu’en l’absence de notification du jugement, le délai d’appel ne peut avoir couru et il est donc sans objet de statuer sur la nullité d’une notification qui n’est pas intervenue.
En second lieu, il découle des précédentes observations que le jugement n’a pas été notifié conformément aux dispositions des articles 83 et suivants du code de procédure civile.
De même, il n’est pas qualifié de jugement statuant sur la compétence et ne renvoie devant aucune juridiction dans son dispositif.
Surtout, le conseil de prud’hommes, dans ses motifs, se réfère expressément à la décision du juge de la mise en état au tribunal judiciaire de Créteil ayant statué sur les exceptions d’incompétence soulevées par M.[H].
Il détaille également les suites procédurales à cette décision s’agissant d’un arrêt de la cour d’appel de Paris , d’un pourvoi en cassation tout en ajoutant que la procédure est toujours en cours devant le tribunal judiciaire de Créteil.
Le conseil de prud’hommes en déduit qu’il « ne peut que constater que les relations entre M.[C] [H] et la société RH&B Investment Limited ne sont nullement des relations soumises à un contrat de travail, et que faute de contrat de travail, le conseil de prud’hommes est incompétent pour juger du litige. »
Ainsi, en se déclarant incompétent pour se prononcer sur la validité du contrat de collaboration commerciale et en disant n’y avoir lieu à statuer sur les demandes de M.[H], le conseil de prud’hommes a statué sur le fond du litige.
L’appel introduit conformément aux dispositions des articles 83 et suivants du code de procédure civile est donc irrecevable.
À titre reconventionnel, les intimés demandent qu’il soit fait application de l’article 32-1 du code de procédure civile estimant que l’action en justice de M.[H] devant le conseil de prud’hommes est manifestement abusive et démontre sa mauvaise foi.
Ils expliquent que celui-ci a plaidé devant plusieurs juridictions, y compris lorsqu’il était lui-même à l’initiative de la procédure, qu’il s’agissait d’un contrat commercial (contrat de mécénat) et que la saisine du conseil de prud’hommes n’est arrivée que très tardivement et manifestement dans un but dilatoire afin de retarder la procédure judiciaire en cours devant le tribunal judiciaire de Créteil et de faire échec à la plainte pénale.
Cependant, en l’état de l’irrecevabilité de l’appel, il ne peut être statué sur le caractère manifestement abusif et de mauvaise foi de la saisine du conseil de prud’hommes.
En effet, il n’est nullement argué du caractère manifestement dilatoire ou abusif de l’appel introduit par M.[H].
Il n’y a donc pas lieu au prononcé d’une amende civile.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
M.[H], qui succombe sur la recevabilité de son appel, doit être condamné aux dépens et débouté en sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
À l’opposé il sera fait application de cet article au profit des parties intimées qui en font la demande.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, publiquement et en dernier ressort
Déclare irrecevable l’appel introduit par M.[C] [H] selon déclaration du 18 janvier 2023,
Dit n’y avoir lieu au prononcé d’une amende civile,
Condamne M.[C] [H] aux dépens d’appel et le déboute en sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne M.[C] [H] à payer à Madame [E] [P], Monsieur [L] [P] et la société RH&B Investment Limited la somme de 5000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La Greffière, La Présidente,