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Aux termes des articles L 133-16 et L133-17 dudit code , il appartient à l’utilisateur de services de paiement de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés et d’informer sans tarder son prestataire de services de toute utilisation non autorisée de l’instrument de paiement ou des données qui lui sont liées.
Selon l’article L 133-18, en cas d’opération de paiement non autorisée signalée par l’utilisateur, le prestataire de services de paiement rembourse au payeur le montant de l’opération non autorisée immédiatement, sauf s’il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l’utilisateur du service de paiement et s’il communique ses raisons par écrit à la banque de France.
Par application des articles L 133-19 IV et L 133’23 du même code, c’est au prestataire qu’il incombe de rapporter la preuve que l’utilisateur, qui nie avoir autorisé une opération de paiement, a agi frauduleusement ou n’a pas satisfait, intentionnellement ou par négligence grave à ses obligations mentionnées aux articles 133-16 (obligation de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisée) et L 133-17 (obligation de dénoncer sans tarder son prestataire toute utilisation frauduleuse).
Cette preuve ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été effectivement utilisées .
En l’espèce, le virement litigieux a été dénoncé immédiatement par le titulaire du compte à sa banque et n’a pas été autorisé puisqu’il ne connaissait pas le destinataire des fonds, Monsieur [N] et a porté plainte contre lui.
L’enquête pénale a confirmé l’existence d’une escroquerie commise par ce dernier sur l’instigation de son ex-épouse et d’un complice demeurant en Afrique sans que les moyens pour y parvenir ne soient élucidés , Monsieur [N] étant décédé en cours de procédure.
Dès lors que l’ordre paiement n’émane pas de l’utilisateur du service de paiement sécurisé, il appartient à la banque de rembourser immédiatement le montant de l’opération contestée conformément à l’article L 133-18 sauf à ce qu’elle rapporte la preuve que l’utilisateur a concouru à la fraude intentionnellement ou par négligence grave.
24/05/2023
ARRÊT N°224
N° RG 21/02957 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OIJL
FP – AC
Décision déférée du 21 Juin 2021 – Tribunal de Commerce de FOIX ( 2020J23)
M [Z]
S.A.S.U. AUTO LAVAGE 09
C/
Caisse CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MED ITERRANEE
Infirmation
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
2ème chambre
***
ARRÊT DU VINGT QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS
***
APPELANTE
S.A.S.U. AUTO LAVAGE 09
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par Me Sylvie ALZIEU de la SELARL ALZIEU-PUIG AVOCATS, avocat au barreau d’ARIEGE
INTIMEE
CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL SUD
MED ITERRANEE
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Regis DEGIOANNI de la SCP DEGIOANNI – PONTACQ – GUY-FAVIER, avocat au barreau d’ARIEGE
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant F. PENAVAYRE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
V. SALMERON, présidente
I.MARTIN DE LA MOUTTE, conseillère
F. PENAVAYRE, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffier, lors des débats : C. OULIE
ARRET :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par V. SALMERON, présidente, et par C. OULIE, greffier de chambre
EXPOSE DU LITIGE
La SASU AUTO LAVAGE 09 est titulaire d’un compte bancaire professionnel ouvert auprès de la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE qui bénéficie d’un service dématérialisé et sécurisé.
Les 31 janvier 2019 et 1er février 2019, deux virements ont été opérés à partir du compte de la société AUTO LAVAGE 09 au profit de Monsieur [Y] [N], le premier d’un montant de 4000 € et le deuxième de 2892 €. La SASU AUTO LAVAGE 09 a porté plainte auprès de la gendarmerie de [Localité 3] et avisé la banque du caractère frauduleux de ces virements le 5 février 2019.
La banque s’est rapprochée de l’organisme bancaire récepteur des fonds et a obtenu le remboursement de la somme de 2892 € . Elle n’a pu obtenir le remboursement du premier virement.
Considérant que la responsabilité du CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE était engagée, la SASU AUTO LAVAGE 09 a demandé à être indemnisée du préjudice subi ce qui a été refusé par la banque au motif que le système sécurisé de fonctionnement des virements par le biais d’Internet rendait impossible un virement sans l’intervention du titulaire .
Le Médiateur du crédit a proposé de solder le litige en réglant une somme de 2000 € mais aucun accord n’a été finalisé entre les parties.
Par acte d’huissier du 7 juillet 2020, la SASU AUTO LAVAGE 09 a assigné la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE devant le tribunal de commerce de Foix pour l’entendre condamner à lui payer la somme de 4000 € en réparation du préjudice subi du fait du virement frauduleux, une somme de 3000 € pour résistance abusive outre les frais et accessoires.
Par jugement du 21 juin 2021, le tribunal de commerce de Foix a :
– condamné la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE à payer à la SASU AUTO LAVAGE 09 la somme de 2000 € outre une somme de 1000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
-débouté la SASU AUTO LAVAGE 09 de sa demande de paiement de la somme de 3000 € au titre de son préjudice
– condamné la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE aux entiers dépens.
Par déclaration enregistrée au greffe le 2 juillet 2021, la SASU AUTO LAVAGE 09 a interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de commerce de Foix le 21 juin 2021 qu’elle critique en ce qu’il a limité à 2000 € l’indemnisation au titre du virement frauduleux et l’a déboutée de sa demande pour résistance abusive.
Au terme de ses conclusions notifiées le 10 octobre 2022 , la SASU AUTO LAVAGE 09 demande à la cour, sur le fondement des articles L 133-18 et L133-19 du code monétaire et financier, 1240 du Code civil :
-de réformer le jugement dont appel en ce qu’il a limité à 2000 € son indemnisation
Et statuant à nouveau
-de condamner la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE à lui payer la somme de 4000 € en réparation du préjudice subi du fait du virement frauduleux outre une somme de 3000 € du fait de la résistance abusive de l’établissement bancaire
– de condamner la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE à lui verser une somme de 4000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile et de mettre à sa charge les entiers dépens de l’instance.
Elle fait essentiellement valoir :
– qu’elle a fait immédiatement opposition aux virements frauduleux
-qu’en principe, l’établissement bancaire est responsable en cas de fraude sauf les cas où il existerait de sérieuses raisons de soupçonner que l’utilisateur a concouru à la fraude en étant particulièrement négligent
-qu’en l’espèce la banque ne rapporte pas la preuve que sa cliente a commis une négligence alors qu’aucun piratage sur l’adresse mail par laquelle elle communique avec la banque n’a été constaté par l’opérateur Orange
-que la banque sur qui repose la charge de la preuve s’abstient de communiquer les historiques de connexion, les éventuelles modifications de données, les ordres de virement litigieux et leur mode de validation
-que la procédure pénale a démontré l’existence d’une véritable escroquerie même si son auteur n’a pu être identifié pour vivre au Ghana.
La CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE a notifié ses conclusions le 14 octobre 2022.
Elle demande, au visa des articles L 133-4 et suivants du code monétaire et financier :
– de réformer le jugement du tribunal de Foix du 21 juin 2021 en ce qu’il a retenu une responsabilité partagée, condamné la banque au paiement de la somme de 2000 € outre une somme de 1000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
-de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société AUTO LAVAGE 09 de sa demande de dommages et intérêts
En conséquence,
– de débouter purement et simplement la société AUTO LAVAGE 09 de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions et subsidiairement,de les ramener à de plus justes proportions
-de condamner la société AUTO LAVAGE 09 à lui payer la somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens de l’instance.
Elle soutient que la responsabilité du prestataire de services de paiement ne peut être engagée que s’il est démontré que les identifiants ou données de sécurité ont été falsifiés et qu’il est impossible que l’opération ait pu être réalisée sans que le process décrit dans les conditions générales et sur le site Internet de la banque n’ait été effectué, ce qui suppose l’intervention du représentant de la société AUTO LAVAGE 09 pour renseigner le code confidentiel reçu par SMS sur son numéro fiabilisé et valider le virement litigieux .
En toute hypothèse, si la société AUTO LAVAGE 09 rapporte la preuve d’une absence d’intervention de sa part, la fraude dont elle se dit victime ne pourrait alors s’expliquer qu’en raison de ses graves négligences au sens de l’article L 133-19 du code monétaire et financier pour avoir communiqué à un tiers ses données bancaires ou s’être abstenue de porter à la connaissance de la banque le piratage de sa boîte mail et de modifier son mot de passe permettant l’accès aux services en ligne du Crédit Agricole.
Il y a lieu de se reporter expressément aux conclusions susvisées pour plus ample informé sur les faits de la cause, moyens et prétentions des parties, conformément à l’article 445 du Code civil.
L’ordonnance de clôture est en date du 17 octobre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Le virement litigieux a été réalisé à distance depuis le site Web de la banque au moyen d’un dispositif de paiement sécurisé au sens de l’article L 133-4 du code monétaire et financier.
Il suppose la fourniture d’un identifiant , d’un mot de passe ainsi que d’un code de validation adressé par SMS ou par mail au titulaire du compte.
Selon les conditions générales du Crédit Agricole, pour ajouter un nouveau bénéficiaire, il faut aller dans la rubrique « mes opérations » de l’espace personnel du client, s’ authentifier par l’envoi d’un SMS sur son téléphone portable puis enregistrer le nom et l’ IBAN du bénéficiaire. Le numéro de téléphone doit être fiabilisé pour réaliser ce type d’opération c’est-à-dire enregistré dans le dossier du client et validé par la banque.
Aux termes des articles L 133-16 et L133-17 dudit code , il appartient à l’utilisateur de services de paiement de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés et d’informer sans tarder son prestataire de services de toute utilisation non autorisée de l’instrument de paiement ou des données qui lui sont liées.
Selon l’article L 133-18, en cas d’opération de paiement non autorisée signalée par l’utilisateur, le prestataire de services de paiement rembourse au payeur le montant de l’opération non autorisée immédiatement, sauf s’il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l’utilisateur du service de paiement et s’il communique ses raisons par écrit à la banque de France.
Par application des articles L 133-19 IV et L 133’23 du même code, c’est au prestataire qu’il incombe de rapporter la preuve que l’utilisateur, qui nie avoir autorisé une opération de paiement, a agi frauduleusement ou n’a pas satisfait, intentionnellement ou par négligence grave à ses obligations mentionnées aux articles 133-16 (obligation de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisée) et L 133-17 (obligation de dénoncer sans tarder son prestataire toute utilisation frauduleuse).
Cette preuve ne peut se déduire du seul fait que l’instrument de paiement ou les données personnelles qui lui sont liées ont été effectivement utilisées .
En l’espèce, le virement litigieux a été dénoncé immédiatement par le titulaire du compte à sa banque et n’a pas été autorisé puisqu’il ne connaissait pas le destinataire des fonds, Monsieur [N] et a porté plainte contre lui.
L’enquête pénale a confirmé l’existence d’une escroquerie commise par ce dernier sur l’instigation de son ex-épouse et d’un complice demeurant en Afrique sans que les moyens pour y parvenir ne soient élucidés , Monsieur [N] étant décédé en cours de procédure.
Dès lors que l’ordre paiement n’émane pas de l’utilisateur du service de paiement sécurisé, il appartient à la banque de rembourser immédiatement le montant de l’opération contestée conformément à l’article L 133-18 sauf à ce qu’elle rapporte la preuve que l’utilisateur a concouru à la fraude intentionnellement ou par négligence grave.
Aux termes des explications fournies par les parties, il n’existe aucune raison sérieuse de soupçonner que la société AUTO LAVAGE 09 a été gravement négligente en communiquant ses données personnelles à un tiers ou en validant elle même le code SMS permettant de réaliser l’opération.
Il n’est rapporté la preuve d’aucun piratage de la messagerie utilisée par la société AUTO LAVAGE 09 ([Courriel 4]) pour communiquer avec la banque. Quant au piratage de la messagerie du compagnon de la dirigeante telle qu’évoqué dans sa plainte ( messagerie au nom de [X] [B]), la banque ne démontre pas que les codes de validation ont transité par cette messagerie qui ne sert pas aux échanges avec la banque.
En conséquence il y a lieu d’infirmer la décision qui a prononcé à tort un partage de responsabilité et de condamner la banque prestataire de services sécurisés à rembourser à la Société AUTO LAVAGE 09 la somme de 4000 € prélevée sur ses comptes sans son autorisation.
Il n’est démontré l’existence d’aucun abus de droit ni résistance abusive de la part de la banque à l’action intentée par la société appelante alors qu’elle s’était au final rangée à l’avis du médiateur.
La demande de dommages et intérêts complémentaires sera donc rejetée.
Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SASU AUTO LAVAGE 09 partie des frais irrépétibles qu’elle a exposés pour assurer sa représentation en justice. Il lui sera alloué la somme complémentaire de 1000 € pour les frais d’appel.
La partie qui succombe doit supporter les dépens de l’instance.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant après en avoir délibéré,
Infirme le jugement du tribunal de commerce de Foix en date du 21 juin 2021 en ce qu’il a condamné la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE à payer la somme de 2000 € au profit de la société AUTO LAVAGE 09,
Et statuant à nouveau de ce chef,
Condamne la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE à payer à la SASU AUTO LAVAGE 09 la somme de 4000 € en réparation du préjudice subi du fait du virement frauduleux outre une somme de 1000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en cause d’appel,
Confirme le jugement pour le surplus,
Rejette toute autre demande contraire ou plus ample,
Condamne la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL SUD MÉDITERRANÉE aux entiers dépens de l’instance.
Le greffier La présidente
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