Autoentrepreneur ou salarié : le critère du lien de subordination

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Autoentrepreneur ou salarié : le critère du lien de subordination
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L’Autoentrepreneur qui souhaite faire requalifier sa collaboration en contrat de travail doit établir l’existence d’un lien de subordination vis à vis de son donneur d’ordres.

Preuve du contrat de travail

Il résulte des articles L1221-1 et L1221-2 du Code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d’autrui moyennant rémunération.

En l’absence d’un contrat de travail écrit, c’est à celui qui allègue l’existence d’un tel contrat d’en rapporter la preuve. Le contrat de travail se caractérise par un lien de subordination juridique qui consiste pour l’employeur à donner des ordres, à en surveiller l’exécution et, le cas échéant, à en sanctionner les manquements.

Présomption de non salariat

L’article L8221-6 du Code du travail prévoit que

I. Sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription :

1° Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales ;

II. L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes mentionnées au I fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci.

Dans ce cas, il n’y a dissimulation d’emploi salarié que s’il est établi que le donneur d’ordre s’est soustrait intentionnellement à l’accomplissement de l’une des formalités prévues aux articles L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche, et L. 3243-2, relatif à la délivrance du bulletin de paie.

Il résulte de ces dispositions légales que la présomption légale de non-salariat qui bénéficie aux personnes sous le statut d’auto-entrepreneur peut être détruite s’il est établi qu’elles fournissent directement ou par une personne interposée des prestations au donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci.

L’absence de lien de subordination

En l’espèce, l’appelant indique être auto-entrepreneur et exercer l’activité de peintre en bâtiment. Il expose avoir toutefois travaillé en tant que salarié pour le compte de l’entreprise [F] [N] exerçant une activité sous l’enseigne «Plaf’Isolation » à compter du 5 février 2013 jusqu’au 2 juin 2014, sans contrat de travail écrit ni contrat de sous-traitance, que l’employeur lui demandait d’établir des factures mais qu’il ne lui a pas payé l’intégralité de sa rémunération.

Le document issu du site internet societe.com produit par l’association Unédic CGEA AGS, établit que l’appelant avait la qualité d’auto-entrepreneur au moment des faits litigieux, son entreprise de travaux de peinture et vitrerie étant créée depuis le 1er octobre 2012 et étant toujours en activité en 2021.

Il lui incombe par conséquent de renverser la présomption de non-salariat en prouvant l’existence d’un lien de subordination juridique entre lui-même et [F] [N]. Toutefois, il ne verse aucun élément probant permettant d’établir ce lien. La demande de requalification est donc rejetée.


 

Grosse + copie

délivrée le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 17 MAI 2023

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/05127 – N° Portalis DBVK-V-B7G-PSIQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 DECEMBRE 2015

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE PERPIGNAN N° RGF15/00210

APPELANT :

Monsieur [D] [Y] [R]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentant : Me SALVIGNOL avocat pour Me Nese KOÇ, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES

INTIMES :

Me GASCON Hélène – Mandataire ad’hoc de Monsieur [N] [F]

[Adresse 2]

[Localité 3]

non comparant

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA DE TOULOUSE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentant : Me PANIS avocat pour Me Delphine CLAMENS-BIANCO de la SELARL CHATEL ET ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

En application de l’article 937 du code de procédure civile, les parties ont été convoquées à l’audience.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 MARS 2023,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère, chargé du rapport.

Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère, faisant fonction de Président en l’absence du Président empêché

Madame Florence FERRANET, Conseiller

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

– réputé contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère, en l’absence du Président empêché, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Par requête enregistrée le 19 mars 2015, M. [D] [R] a saisi le conseil de prud’hommes de Perpignan aux fins de condamnation M. [F] [N] à lui payer un rappel de salaire pour le mois de juin 2014, l’indemnité forfaitaire de travail dissimulé et des indemnités au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le 24 septembre 2015, M. [F] [N] a été placé en redressement judiciaire, Maître [X] et Maître [S] ayant été désignés respectivement en qualité de mandataire judiciaire et en qualité d’administrateur judiciaire.

Par jugement du 1er décembre 2015, le conseil de prud’hommes a débouté M. MM. [D] [R] et [F] [N] de leurs demandes et condamné M. [D] [R] aux dépens.

Par lettre recommandée du 16 décembre 2015 reçue au greffe le 17 décembre 2015, M. [D] [R] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Par jugement du 26 septembre 2018, le tribunal de commerce de Perpignan a désigné Maître [X] en qualité de mandataire ad hoc de M. [F] [N].

Par arrêt du 22 mai 2019, l’affaire a été radiée, l’affaire n’étant pas en état d’être jugée.

Par conclusions enregistrées le 14 juin 2019, le salarié a sollicité la réinscription de l’affaire au rôle.

Les deux procédures ont fait l’objet d’une jonction par ordonnance du conseiller de la mise en état du 19 mai 2022.

L’association UNEDIC CGEA et le mandataire ad hoc ont été régulièrement appelés à la procédure.

Par arrêt du 28 septembre 2022, l’affaire a fait l’objet d’une nouvelle radiation, l’avocat de l’appelant ne s’étant pas présenté à l’audience du 12 septembre 2022.

L’affaire a été de nouveau réinscrite au rôle et les parties convoquées à l’audience du 7 mars 2023.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 8 juin 2022, M. [D] [R] demande à la Cour, au visa des articles L1232-1, L.1235-3, L.1232-6 du Code du travail de :

– déclarer son appel recevable et bien fondé ;

– réformer en toutes ses dispositions le jugement dont appel ;

– déclarer opposable au CGEA-AGS l’arrêt à intervenir ;

– prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts et griefs exclusifs de l’employeur ;

– dire et juger opposable au CGEA-AGS l’arrêt à intervenir ;

– fixer sa créance au passif de la liquidation de l’employeur comme suit :

* 1 950 € net au titre du salaire du mois de juin 2014,

* 11 700 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 950 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement,

* 1 950 € net au titre de l’indemnité de préavis,

* 839,14 € net au titre des congés payés,

* 11 700 € au titre de l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

– dire et juger que les condamnations prononcées porteront intérêts au taux légal:

* A compter de la date de réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation pour les indemnités de rupture et les créances de nature salariale,

* A compter du jugement à intervenir pour toute autre somme ;

– dire et juger que lesdits intérêts seront capitalisés dans les conditions de l’article 1154 du Code civil ;

– ordonner la remise des documents sociaux rectifiés sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir, et notamment :

* l’attestation d’employeur pour l’inscription à Pôle emploi,

* le certificat de travail pour la période du 05/05/2014 jusqu’au 03/06/2014,

* les bulletins de salaire des mois defévrier 2013 à juin 2014 ;

– laisser les entiers dépens de l’instance au passif de la liquidation de l’employeur.

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 12 juillet 2022, l’association UNEDIC Délégation AGS CGEA de Toulouse demande à la Cour, au visa des articles L.625-1 du Code de commerce, L. 3253-1, D. 3253-5 du Code du travail de

– confirmer le jugement attaqué ;

– constater l’absence de contrat de travail et débouter M. [R] de l’intégralité de ses demandes ;

– mettre hors de cause le CGEA de Toulouse ;

En tout état de cause, de

– constater que la garantie de l’AGS est plafonnée toutes créances avancées pour le compte du salarié à l’un des trois plafonds définis par l’article D. 3253-5 du Code du travail et qu’en l’espèce, c’est le plafond 5 qui s’applique ;

– exclure de la garantie AGS les sommes éventuellement fixées au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, dépens et astreinte ;

– dire que toute créance sera fixée en brut et sous réserve de cotisations sociales et contributions éventuellement applicables, conformément aux dispositions de l’article L. 3253-8 in fine du Code du travail ;

– donner acte au CGEA de ce qu’il revendique le bénéfice exprès et d’ordre public des textes légaux et réglementaires applicables tant au plan des conditions de la mise en oeuvre du régime d’assurance de créances des salariés que de l’étendue de ladite garantie.

Maître Hélève Gascon, mandataire ad’hoc de Monsieur [F] [N], pourtant régulièrement convoquée, n’a pas constitué avocat.

MOTIFS

Sur l’existence du contrat de travail.

Il résulte des articles L1221-1 et L1221-2 du Code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d’autrui moyennant rémunération.

En l’absence d’un contrat de travail écrit, c’est à celui qui allègue l’existence d’un tel contrat d’en rapporter la preuve. Le contrat de travail se caractérise par un lien de subordination juridique qui consiste pour l’employeur à donner des ordres, à en surveiller l’exécution et, le cas échéant, à en sanctionner les manquements.

L’article L8221-6 du Code du travail prévoit que

I. Sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation ou inscription :

1° Les personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales pour le recouvrement des cotisations d’allocations familiales ;

(‘)

II. L’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque les personnes mentionnées au I fournissent directement ou par une personne interposée des prestations à un donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci.

Dans ce cas, il n’y a dissimulation d’emploi salarié que s’il est établi que le donneur d’ordre s’est soustrait intentionnellement à l’accomplissement de l’une des formalités prévues aux articles L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche, et L. 3243-2, relatif à la délivrance du bulletin de paie.

Il résulte de ces dispositions légales que la présomption légale de non-salariat qui bénéficie aux personnes sous le statut d’auto-entrepreneur peut être détruite s’il est établi qu’elles fournissent directement ou par une personne interposée des prestations au donneur d’ordre dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard de celui-ci.

En l’espèce, l’appelant indique être auto-entrepreneur et exercer l’activité de peintre en bâtiment. Il expose avoir toutefois travaillé en tant que salarié pour le compte de l’entreprise [F] [N] exerçant une activité sous l’enseigne «Plaf’Isolation » à compter du 5 février 2013 jusqu’au 2 juin 2014, sans contrat de travail écrit ni contrat de sous-traitance, que l’employeur lui demandait d’établir des factures mais qu’il ne lui a pas payé l’intégralité de sa rémunération.

Le document issu du site internet societe.com produit par l’association Unédic CGEA AGS, établit que l’appelant avait la qualité d’auto-entrepreneur au moment des faits litigieux, son entreprise de travaux de peinture et vitrerie étant créée depuis le 1er octobre 2012 et étant toujours en activité en 2021.

Il lui incombe par conséquent de renverser la présomption de non-salariat en prouvant l’existence d’un lien de subordination juridique entre lui-même et [F] [N]. Toutefois, il ne verse aucun élément probant.

Ainsi, il produit les attestations régulières de :

– M. [W] [G], opposé à la même entreprise dans le cadre d’un litige prud’homal similaire pendant devant cette cour ; ce qui tend à lui dénuer tout caractère probant,

– M. [L] [Z], lequel affirme que l’appelant a exécuté une partie des travaux de rénovation dans son appartement « avec le matériel de M. [N] sous la direction de ce même [N], entrepreneur de la société Plaf’isolation à qui (il a) réglé toutes les factures »,

– M. [I] [E], charpentier, lequel indique avoir vu l’appelant « travailler pour l’entreprise de M. [N] sur le chantier de [Localité 5] de la villa de M. [O] » « sous les directives de M. [N] avec son matériel ».

Toutefois ces deux témoignages ne permettent pas de caractériser un lien de subordination juridique entre l’entreprise et l’appelant.

Celui-ci verse également la copie d’un message électronique adressé le 30 juillet 2014 par l’employeur aux termes duquel celui-ci précise être en train de préparer un contrat de sous-traitance, M. [R] ayant saisi le conseil de prud’hommes en revendiquant la qualité de salarié, ce qui est faux.

Ce message ne prouve pas non plus l’existence d’un lien de subordination.

Faute pour l’appelant de prouver l’existence d’une relation salariée afin de renverser la présomption de non-salariat, il y aura lieu de le débouter de l’intégralité de ses demandes et de confirmer le jugement.

L’association Unédic Délégation AGS CGEA sera mise hors de cause.

Sur les demandes accessoires.

L’appelant sera tenu aux entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, par arrêt mis à disposition au greffe ;

CONFIRME le jugement du 1er décembre 2015 du conseil de prud’hommes de Perpignan en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

MET l’association Unédic Délégation AGS CGEA hors de cause ;

CONDAMNE M. [D] [R] aux entiers dépens de l’instance;

LE GREFFIER P/LE PRESIDENT EMPECHE

 


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