Il résulte des dispositions des articles R. 133-3 et R. 142-18 du code de la sécurité sociale et R. 142-1 du code de la sécurité sociale dans leurs rédactions applicables que si l’organisme chargé du recouvrement, qui peut éventuellement avoir sollicité à titre reconventionnel le paiement des cotisations, n’est pas à l’origine de la procédure devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale saisi par le cotisant, ce dernier est forclos dans sa contestation de la mise en demeure et donc du contrôle, à défaut de saisine préalable de la commission de recours amiable ( en ce sens Soc., 5 avril 2001, pourvoi n° 99-19.144 ).
Par contre lorsque l’organisme chargé du recouvrement agit en paiement ou délivre une contrainte à laquelle il est fait opposition par le cotisant, ce dernier ne peut se voir opposer la forclusion du recours contre la mise en demeure (en ce sens 2e Civ., 12 février 2009, pourvoi n° 07-12.075 publié et Soc., 14 mars 1996, pourvoi n° 94-15.516, Bulletin 1996 V n° 99 ) sauf lorsqu’ayant saisi la commission de recours amiable il s’est abstenu de saisir le Tribunal dans les deux mois du rejet de son recours auprès de cette dernière auquel cas, si son opposition n’est pas de ce fait irrecevable, il n’est pas recevable à contester, à l’appui de l’opposition à la contrainte décernée sur le fondement de celle-ci, la régularité et le bien-fondé des chefs de redressement qui font l’objet de cette dernière (en ce sens 2e Civ., 4 avril 2019, pourvoi n° 18-12.014 publié au Bull et sur le site internet de la Cour de Cassation / Egalement 2e Civ., 16 juin 2016, pourvoi n° 15-20.542 ).
ARRET
N°491
[G]
C/
Organisme [10]
COUR D’APPEL D’AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 15 MAI 2023
*************************************************************
N° RG 21/01967 – N° Portalis DBV4-V-B7F-ICA2 – N° registre 1ère instance : 18/00313
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LAON EN DATE DU 04 mars 2021
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame [K] [G]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Florence GAACQUER, avocat au barreau d’AMIENS, substituant Me Charles HECART, avocat au barreau de SOISSONS
ET :
INTIMEE
Organisme [10] ayant siège social [Adresse 1]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
TSA 60200
[Localité 3]
Représentée par Me BROCHARD BEDIER, avocat au barreau d’AMIENS, substituant Me Laetitia BEREZIG de la SCP BROCHARD-BEDIER ET BEREZIG, avocat au barreau D’AMIENS
DEBATS :
A l’audience publique du 13 Février 2023 devant M. Renaud DELOFFRE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 15 Mai 2023.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme [E] [L]
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
M. [X] [I] en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Elisabeth WABLE, Président,
Mme Graziella HAUDUIN, Président,
et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 15 Mai 2023, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Audrey VANHUSE, Greffier.
*
* *
DECISION
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 12 septembre 2018, l'[10] saisissait le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS) de LAON d’une demande de paiement contre Madame [K] [G] de la somme de 26.117 euros en application de l’article L. 244-11 du Code de la sécurité sociale.
La Caisse se fondait sur une mise en demeure adressée le 08 avril 2016 à l’intéressée dans le cadre d’un constat de travail dissimulé.
Les convocations adressées à la défenderesse, demeurant [Adresse 2] revenaient toutes au greffe avec la mention «pli avisé non réclamé».
En application de l’article 670-1 du Code de procédure civile, la Caisse était invitée à procéder à la convocation de Madame [K] [G] par voie de signification.
L'[10] faisait citer Madame [K] [G] devant le Tribunal des Affaires de sécurité sociale de Laon par acte d’huissier du 14 octobre 2020 à étude à l’adresse de [8].
À compter du 1er janvier 2019, les procédures en cours devant le [9] ont été transférées en l’état au Tribunal de grande instance en application des articles 12 et 114 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 (le dossier enregistré sous le numéro NS2018/248 a été réenregistré sous le RG 2018/313).
À compter du 1er janvier 2020, en application de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, le Tribunal de grande instance se dénomme Tribunal judiciaire.
Par jugement en date du 4 mars 2021, le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Laon a décidé ce qui suit :
Le pôle social du tribunal judiciaire de LAON, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire rendue en premier ressort, par mise à disposition au greffe,
DIT l'[10] recevable ;
CONDAMNE Madame [K] [P] [G] à payer à l'[10] le la somme de 26.117 euros (vingt six mille cent dix sept euros) ;
CONDAMNE Madame [K] [P] [G] aux entiers dépens.
Il n’est pas justifié de la notification de ce jugement dont appel a été interjeté par Madame [G] par courrier recommandé avec accusé de réception de son avocat expédié au greffe de la Cour le 13 avril 2021.
Par conclusions n°1 reçues par le greffe le 26 janvier 2022, enregistrées par ce dernier en date du 27 janvier 2022 puis visées par le greffe en date du 13 février 2023 et soutenues oralement par avocat , l’appelante demande à la Cour de :
Vu l’article L 643-11 du Code de commerce
Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions
Dire et juger que la créance alléguée par l’URSSAF est prescrite et en conséquence débouter l’URSSAF de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de Madame [K] [G]
Dire et juger que le jugement de clôture de liquidation en date du 18 octobre 2019 a fait perdre à l’URSSAF son droit de poursuite face à Madame [K] [G].
Elle fait valoir que :
1°Sur l’impossibilité de condamner deux fois Madame [G] pour les mêmes faits
Il résulte du jugement entrepris que l’URSSAF a fondé sa demande devant la juridiction de premier degré sur des faits de travail dissimulé.
Or, Madame [G] a été condamnée par jugement rendu le 2 novembre 2021 par le Tribunal correctionnel de Soissons, statuant sur intérêts civils.
Il est donc demandé de réformer le jugement entrepris, Madame [G] ne pouvant être condamnée deux fois pour les mêmes faits.
2°Sur la prescription de la créance de l’URSSAF
Ainsi que le reconnaît l’URSSAF dans la constitution de partie civile (pièce n°1), la créance est prescrite.
Il y a donc lieu de dire et juger que Madame [K] [G] ne doit pas réparation à l’URSSAF et ainsi de réformer le jugement entrepris.
3°Sur les conséquences de la liquidation judiciaire de Madame [K] [G]
Par jugement rendu le 22 mars 2019, sur déclaration de cessation des paiements, le Tribunal de commerce de Saint Quentin a prononcé la liquidation judiciaire de Madame [K] [G].
Par jugement rendu le 18 octobre 2019, le Tribunal de commerce de Saint Quentin a prononcé la clôture de la liquidation judiciaire de Madame [K] [G].
Par requête en date du 10 septembre 2019, la SELARL [7], mandataire liquidateur, avait sollicité la clôture pour insuffisance d’actif, en exposant « qu’il n’a pas été révélé de faits suffisamment graves pour qu’une demande de sanction de nature civile ou patrimoniale soit formulée ».
Selon les termes de l’article L 643-11 du Code de commerce, l’URSSAF n’a plus droit de poursuite en raison de ce jugement de clôture.
Les dettes objet du présent litige sont des créances antérieures à l’ouverture de la procédure collective et de toute façon Madame [G] bénéficie de l’arrêt de poursuites.
Il y a donc lieu de dire et juger que l’URRSAF n’a pas le droit de recouvrer sa créance à l’égard de Madame [K] [G] et ainsi de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Par conclusions n° 2 reçues par le greffe le 3 février 2023 et soutenues oralement par avocat, l'[10] demande à la Cour de confirmer le jugement déféré, de condamner Madame [G] à lui verser la somme de 26117 € au titre des cotisations et majorations de retard dues pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, de la condamner à 1500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, de prononcer un sursis à statuer dans l’attente de la décision de la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel d’Amiens, de condamner Madame [G] à tous les dépens, lesquels comprendront notamment l’exécution du présent jugement et de déclarer la décision exécutoire à titre provisoire.
Elle fait valoir qu’en l’absence de saisine de la [6] la décision de mise en demeure revêt l’autorité de la chose jugée ce dont il résulte que le cotisant est forclos et la dette immédiatement exigible, qu’à défaut pour Madame [G] d’avoir saisi la [6] dans le délai imparti, la mise en demeure acquière l’autorité de la chose décidée et sa dette est exigible, qu’il convient donc de faire droit à sa demande en paiement, que le dirigeant engageant sa responsabilité pénale voir sa responsabilité personnelle engagée à l’égard de l’URSSAF.
MOTIFS DE L’ARRET.
SUR L’INVOCATION PAR L’URSSAF DE PICARDIE DE L’AUTORITE DE LA CHOSE DECIDEE DE LA MISE EN DEMEURE DU 8 AVRIL 2016.
Attendu que l’URSSAF oppose en quelque sorte une fin de non-recevoir à la contestation par Madame [G] du redressement litigieux en faisant valoir que n’ayant pas contesté la mise en demeure qui lui a été délivrée en date du 8 avril 2016, qui serait revêtue de l’autorité de la chose décidée, les sommes en faisant l’objet de cette dernière ne peuvent plus être contestées par elle.
Attendu qu’il résulte des dispositions des articles R. 133-3 et R. 142-18 du code de la sécurité sociale et R. 142-1 du code de la sécurité sociale dans leurs rédactions applicables que si l’organisme chargé du recouvrement, qui peut éventuellement avoir sollicité à titre reconventionnel le paiement des cotisations, n’est pas à l’origine de la procédure devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale saisi par le cotisant, ce dernier est forclos dans sa contestation de la mise en demeure et donc du contrôle, à défaut de saisine préalable de la commission de recours amiable ( en ce sens Soc., 5 avril 2001, pourvoi n° 99-19.144 ), que par contre lorsque l’organisme chargé du recouvrement agit en paiement ou délivre une contrainte à laquelle il est fait opposition par le cotisant, ce dernier ne peut se voir opposer la forclusion du recours contre la mise en demeure (en ce sens 2e Civ., 12 février 2009, pourvoi n° 07-12.075 publié et Soc., 14 mars 1996, pourvoi n° 94-15.516, Bulletin 1996 V n° 99 ) sauf lorsqu’ayant saisi la commission de recours amiable il s’est abstenu de saisir le Tribunal dans les deux mois du rejet de son recours auprès de cette dernière auquel cas, si son opposition n’est pas de ce fait irrecevable, il n’est pas recevable à contester, à l’appui de l’opposition à la contrainte décernée sur le fondement de celle-ci, la régularité et le bien-fondé des chefs de redressement qui font l’objet de cette dernière (en ce sens 2e Civ., 4 avril 2019, pourvoi n° 18-12.014 publié au Bull et sur le site internet de la Cour de Cassation / Egalement 2e Civ., 16 juin 2016, pourvoi n° 15-20.542 ).
Attendu qu’en l’espèce l'[10] étant à l’origine de la présente procédure, qui a été engagée par une action en paiement de sa part, il s’ensuit qu’elle ne peut opposer à Madame [G] le caractère définitif de la mise en demeure et son autorité de chose décidée et que cette dernière est parfaitement recevable à contester les sommes qui lui sont réclamées.
SUR LA NECESSITE D’UN SURSIS A STATUER DANS L’ATTENTE DE LA DECISION PENALE A INTERVENIR SUR L’ACTION DE L’URSSAF AU TITRE DES INTERETS CIVILS DEVANT LA JURIDICTION REPRESSIVE.
Attendu qu’il résulte de l’article 378 du Code de procédure civile qu’hors les cas où cette mesure est prévue par la loi, les juges du fond apprécient discrétionnairement l’opportunité du sursis à statuer.
Attendu que l’action publique engagée devant le Tribunal Correctionnel de SOISSONS a donné lieu à un jugement du 11 janvier 2021 dont le caractère définitif n’est pas contesté.
Que par contre, l’action civile de l’URSSAF, dans le cadre de cette procédure pénale, a fait l’objet d’un jugement du même Tribunal en date du 2 novembre 2021 condamnant Madame [G] à régler à l’URSSAF la somme de 50 637,50 € au titre de son préjudice matériel, correspondant lui-même aux cotisations et majorations non prescrites, et que ce jugement a fait l’objet d’un appel le 4 novembre 2021, selon les indications fournies par l’URSSAF, lequel serait toujours pendant devant la Cour.
Que les sommes réclamées dans la procédure sur intérêts civils et dans la présente procédure procédant exactement des mêmes causes et ayant la même nature et soulevant les mêmes problématiques tirées de l’éventuelle prescription des sommes et de l’extinction éventuelle de la dette , bien que les montants sollicités diffèrent, il apparait conforme à une bonne administration de la justice, pour éviter toute divergence de décisions, de surseoir à statuer selon les modalités indiquées au dispositif, sur l’action engagée devant la présente juridiction.
PAR CES MOTIFS.
La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe,
Déclare recevable la contestation par Madame [K] [G] des sommes faisant l’objet de la mise en demeure du 8 avril 2016.
Et avant dire droit sur les questions restant à juger,
Surseoit à statuer dans l’attente de l’arrêt à intervenir sur l’appel du jugement du Tribunal Correctionnel de SOISSONS du 2 novembre 2021.
Ordonne la radiation de la présente procédure du rôle de la Cour et dit qu’il appartiendra à la partie la plus diligente de solliciter la réinscription de la cause au rôle dès qu’un arrêt de la présente Cour sera intervenu sur l’appel du jugement du Tribunal Correctionnel du 2 novembre 2021.
Réserve les dépens.
Le Greffier, Le Président,