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COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
2ème Chambre
Arrêt du Jeudi 29 Juin 2023
N° RG 21/01320 – N° Portalis DBVY-V-B7F-GXRZ
Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de BONNEVILLE en date du 05 Mai 2021, RG 1121000104
Appelante
S.A. FLOA anciennement dénommée BANQUE DU GROUPE CASINO, dont le siège social est sis [Adresse 3]
prise en la personne de son représentant légal
Représentée par la SCP CABINET DENARIE BUTTIN PERRIER GAUDIN, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me Eric DEZ, avocat plaidant au barreau de L’AIN
Intimée
Mme [C] [F] [Y] épouse [M]
née le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 4], demeurant [Adresse 2]
sans avocat constitué
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COMPOSITION DE LA COUR :
Lors de l’audience publique des débats, tenue le 02 mai 2023 avec l’assistance de Madame Sylvie DURAND, Greffière,
Et lors du délibéré, par :
– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente,
– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,
– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,
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EXPOSÉ DU LITIGE
Selon offre préalable qui aurait été acceptée le 13 octobre 2018 par voie électronique, la SA Banque du groupe Casino aurait consenti à Mme [C] [Y] épouse [M], un crédit renouvelable par fractions, d’un montant maximum de 3 100 euros, à titre onéreux.
A la suite de la défaillance de l’emprunteur, le prêteur s’est prévalu de la déchéance du terme.
Par acte d’huissier du 22 février 2021, la société Floa anciennement dénommée Banque du groupe Casino a assigné Mme [C] [Y] en paiement.
Par jugement réputé contradictoire du 5 mai 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville a :
– débouté la société Floa de l’ensemble de ses demandes,
– condamné la société Floa aux dépens.
Par déclaration du 24 juin 2021, la société Floa Floa intervenant aux lieux et place de la société Banque du groupe Casino a interjeté appel du jugement.
Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 23 août 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la société Floa demande à la cour de :
– juger recevable sur la forme et bien fondé au fond l’appel formé à l’encontre du jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville le 5 mai 2021,
– réformer le jugement précité en ce qu’il :
– a dit qu’elle ne rapporte pas la preuve de ce que la signature électronique qu’elle invoque a été créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans les conditions fixées par le décret du 28 septembre 2017 renvoyant aux articles 26, 28 et 29 du règlement UE n° 910/2014 du 23 juillet 2014,
– a dit qu’elle ne peut se prévaloir d’une présomption de fiabilité du procédé de signature électronique qu’elle a mis en oeuvre de sorte qu’il lui appartient de démontrer la fiabilité de ce procédé,
– a dit qu’il n’est pas démontré que le contrat produit aux débats qui ne porte aucune référence ni aucun numéro commun, soit bien le contrat objet de la transaction qui a été signée électroniquement,
– a dit que l’existence même du contrat de prêt dont se prévaut la demanderesse n’est pas démontrée,
– l’a déboutée du surplus de ses demandes,
– l’a condamnée aux dépens,
– juger valide l’offre de prêt,
– juger valide le procédé de signature électronique,
– débouter Mme [C] [Y] de ses demandes,
– condamner Mme [C] [Y] à lui payer la somme de 4 051,71 euros, outre intérêts au contractuel à compter du 27 janvier 2020,
– condamner Mme [C] [Y] à lui payer la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [C] [Y] aux dépens de première instance et d’appel avec distraction pour ceux d’appel au profit de Laetitia Gaudin, avocate.
La déclaration d’appel et les conclusions de la société Floa ont été signifiées à Mme [C] épouse [M] par acte du 5 août 2021, signifié à étude.
L’intimée n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 03 avril 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la preuve du contrat
Il résulte de l’article 1367 du code civil que :
– la signature, nécessaire à la perfection d’un acte juridique, identifie son auteur et manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte,
– lorsqu’elle est électronique, la signature consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache.
A la différence de la signature manuscrite, la signature électronique n’est réputée émaner de la personne à laquelle elle est opposée que s’il est établi qu’il a été fait usage d’une procédé fiable d’identification.
La fiabilité du procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat.
Aux termes de l’article 1er du décret n°2017-1416 du 28 septembre 2017, la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en ‘uvre une signature électronique qualifiée, laquelle est définie comme étant une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur, et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié répondant aux exigences de l’article 29 dudit règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement.
L’article 26 du règlement énonce les exigences relatives à une signature électronique avancée. Les articles 28 et 29 du règlement renvoient à des annexes fixant les exigences que doivent respecter les certificats qualifiés de signature électronique et les dispositifs de création de signature électronique qualifiés.
En l’espèce l’appelant produit :
– l’attestation de conformité du ‘CDC ARKHINEO’ de l’archive (pièce n°7),
– une enveloppe de preuve ‘service protect&sign’ au nom de Mme [C] [Y] portant la date de signature du 13 octobre 2018 à 13h14 (pièce n°8),
– le parcours de signature (pièce n°9) mentionnant l’identité de l’intéressée, son adresse mail, l’envoi de ‘sms’ pour valider sa signature avec son numéro de téléphone mobile,
– une copie de la pièce d’identité de Mme [C] [Y] (pièce n°10),
– une copie de bulletin de paie de Mme [C] [Y] (pièce n°11),
– un relevé d’identité bancaire (pièce n°12),
– un décompte montrant qu’il y a eu des paiements (pièce n°14).
La cour relève que l’enveloppe est signée et horodatée électroniquement par Docusign le 18 octobre 2018 et peut être vérifiée via le logiciel Microsoft Office Word 2007 à 2016. Le contenu du fichier peut être consulté selon un procédé informatique clairement décrit.
Les pages suivantes contiennent le détail du fichier, commençant par une synthèse indiquant que la société ‘Docusign’ en qualité de prestataire de service de certification électronique atteste du consentement du signataire [C] [Y] pour le document finalisé le 13 octobre 2018, document transmis par son client ‘Netheos’ pour signature à la plate-forme ‘protect and sign’.
Le reste du document contient la description détaillée du fichier de preuve et de son contenu (tous les états successifs du document à chacune des étapes du processus de signature, enregistrement du protocole de consentement, information sur le fichier de preuve) et sur les transactions (reprenant notamment la date du contrat, le nom et l’adresse mail de Mme [C] [Y] ainsi que le détail de la réalisation du protocole de signature).
Il résulte de l’analyse de la pièce fournie que la cour est en mesure de s’assurer de la conformité de la signature électronique litigieuse aux exigences légales applicables aux certificats de conformité qualifiés de signature électronique. En effet, pour reprendre les termes de l’annexe III du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 le document :
– mentionne que le certificat est délivré comme certificat de signature électronique (première page),
– présente un ensemble de données représentant sans ambiguïté le prestataire (en l’espèce ‘DocuSign’, avec toutes les références concernant le siège social, l’Etat d’établissement et le numéro d’immatriculation de la personne morale : première page en pied de page),
– comporte le nom du signataire ([T] [U]),
– comporte les données de validation de la signature électronique (descriptif du procédé de signature),
– donne des précisions sur le début et la fin de validité du certificat en précisant les dates et heures de début et de fin de l’opération,
– précise le code d’identité du certificat (2FNETHEO-SERVID01—20181013231211-H3FXAJ35TB6BC281),
– mentionne la signature électronique avancée du prestataire (page 2/5 et 4/5 n°1.3.6.1.4.1.22234.2.4.6.1.5.)
– indique l’endroit où le certificat peut être obtenu gratuitement et l’emplacement des services pouvant être utilisés pour connaître le statut de validité du certificat qualifié (première page avec indication du procédé de consultation du fichier format ZIP).
La société Floa produit en outre une attestation de conformité de la société ‘cdc arkhinéo’ certifiant de l’intégrité de l’archivage du document litigieux (pièce n°7).
Ainsi, la société Floa apporte la preuve de l’authenticité de la signature électronique de Mme [C] [Y] et de la fiabilité du procédé s’agissant du contrat litigieux. Au demeurant, à supposer que la fiabilité du procédé ne soit pas établie, la cour relève que Mme [C] [Y] ne conteste pas sa signature et qu’elle a exécutée partiellement le contrat.
Le jugement déféré doit en conséquence être infirmé.
Sur les demandes de la société Floa
L’appelant produit aux débats :
– le contrat de prêt (pièce n°1),
– la fiche d’informations précontractuelles européenne normalisée (pièce n°2),
– la fiche de dialogue (pièce n°17),
– l’information annuelle (pièce n°16),
– les informations concernant l’assurance obligatoire (pièces n°5 et 6),
– la preuve de la consultation du fichier national des incidents de paiement (pièce n°3),
– des éléments d’identité et de vérification de la situation de l’emprunteur (pièce n°11),
– une mise en demeure avant déchéance du terme en date du 14 mai 2019 (pièce n°18),
– la déchéance du terme par lettre en date du 27 janvier 2020, mettant en demeure Mme [C] [Y] de régler la somme de 3 952,47 euros (pièce n°19),
– le décompte de la créance arrêtée au 24 avril 2020 (pièce n°20).
Aucune preuve du paiement des sommes réclamées n’est produite par le débiteur.
Par conséquent, Mme [C] [Y] sera condamnée à payer à la société Floa venant aux droits de la société Banque du groupe Casino, la somme de 4 051,71 euros représentant le capital restant dû, les intérêts échus et la clause pénale, laquelle s’élevant à 273,15 euros, n’apparaît pas manifestement excessive, outre intérêts au taux contractuel de 3,25 % l’an à compter du 27 janvier 2020.
Sur les dépens et la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Mme [C] [Y] qui succombe sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel, avec distraction au profit du conseil de la société Floa pour les dépens d’appel conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
En revanche, aucune considération d’équité ne permet de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société Floa. Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
Après en avoir délibéré conformément à la loi, la cour statuant publiquement et par défaut,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Condamne Mme [C] [Y] à payer à la société Floa venant aux droits de la société Banque du groupe Casino la somme de 4 051,71 euros, outre intérêts au taux contractuel de 3,25 % l’an à compter du 27 janvier 2020,
Condamne Mme [C] [Y] aux dépens de première instance et d’appel, maître Laetitia Gaudin, avocate, étant autorisée à recouvrer directement les dépens d’appel dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision,
Déboute la société Floa de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ainsi prononcé publiquement le 29 juin 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière.
La Greffière La Présidente