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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
15e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 26 OCTOBRE 2023
N° RG 21/01513 –
N° Portalis DBV3-V-B7F-UQRY
AFFAIRE :
[M] [W]
C/
SAS CARL ZEISS MEDITEC FRANCE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Avril 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de SAINT GERMAIN EN LAYE
N° Section : E
N° RG : 19/00316
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Florent HENNEQUIN de la SELARL LEPANY & ASSOCIES
Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT SIX OCTOBRE DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, initialement fixé au 08 juin 2023, prorogé au 07 septembre 2023, prorogé au 21 septembre 2023, au 19 octobre 2023 puis au 26 octobre 2023, les parties ayant été avisées, dans l’affaire entre :
Monsieur [M] [W]
né le 03 Janvier 1965 à [Localité 10]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Florent HENNEQUIN de la SELARL LEPANY & ASSOCIES, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R222
APPELANT
****************
SAS CARL ZEISS MEDITEC FRANCE
N° SIRET : 429 527 286
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Marine SAPHY de la SCP PAETZOLD ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0439 – Représentant : Me Marion CORDIER de la SELARL SILLARD CORDIER & ASSOCIÉS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 189
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 28 Mars 2023, Madame Régine CAPRA, présidente ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Régine CAPRA, Présidente,
Monsieur Thierry CABALE, Président,
Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE
Greffier lors du prononcé : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [W] a été engagé à compter du 2 septembre 1985 par la société Carl Zeiss par contrat de travail à durée indéterminée en qualité d’aide magasinier. En exécution d’avenants successifs, il a occupé ensuite l’emploi de technicien Sav Instrumentation chargé de la logistique Atelier SAV-Instruments, coefficient 210, à compter du 1er juin 1993 puis coefficient 250 à compter du 1er octobre 1993, l’emploi de Technicien préparateur-Monteur en instrumentation, coefficient 250 à compter du 12 décembre 1994, l’emploi de chargé de maintenance en Atelier, coefficient 290 à compter du 1er octobre 2001 et l’emploi d’ingénieur de maintenance, statut cadre, coefficient 350, à compter du 1er octobre 2002 moyennant un salaire annuel brut fixe forfaitaire de 35 838 euros répartis sur treize mois pour 214 jours de travail par an (215 jours à compter de l’instauration de la journée de solidarité), soit 2 756,77 euros par mois sur treize mois, mois auquel s’ajoutaient une rémunération variable fixée par avenant annuel et à compter de 2003 un avantage en nature véhicule.
Il a accepté l’avenant fixant sa rémunération variable pour l’exercice 2002/2003, dont le montant dépendait, contrairement à celle fixée pour l’exercice précédent, de l’atteinte d’un niveau de chiffre d’affaires personnel uniquement, plus 80% du produit des ventes auxquelles il contribuait. Il a refusé de signer les avenants des exercices suivants, qu’il estimait moins favorables, à chiffre d’affaire réalisé égal, et qui lui ont été néanmoins appliqués, ce dont il a fait part à l’inspecteur du travail par courrier du 2 mai 2006.
M. [W] a exercé les mandats de délégué syndical à compter du 21 septembre 1999, de membre du comité de groupe à compter de fin 1999 et de membre titulaire du comité d’entreprise à compter de juin 2000.
La société Carl Zeiss ayant cédé sa division médicale, dont relevait le poste occupé par M. [W], à la société Carl Zeiss Meditec France, le contrat de travail du salarié a été transféré au 1er mai 2006 à cette dernière, en application de l’article 1 224-1 du code du travail, avec l’autorisation de l’autorité administrative.
Les relations entre les parties étaient soumises à la convention collective des entreprises de commission, de courtage et de commerce intracommunautaire et d’importation de France métropolitaine.
M. [W] a exercé au sein de la société Carl Zeiss Meditec France les mandats de délégué syndical de mai 2006 à février 2011, de membre titulaire de la délégation unique du personnel et de membre du CHSCT de février 2007 à février 2011 et de membre suppléant de la délégation unique du personnel de février 2011 jusqu’aux élections professionnelles organisées le 3 février 2015.
Le salarié a été l’objet de deux avertissements en date du 5 mai 2006 et du 9 février 2007, qu’il a contestés. Il a été en arrêt de travail pour maladie à compter du 19 février 2007 pour épuisement anxieux, puis dépression grave. Il a été convoqué le 16 juillet à un entretien préalable en vue de son licenciement. La demande d’autorisation de licenciement a été rejetée par l’inspecteur du travail, par décision du 25 octobre 2007, confirmée, sur recours hiérarchique, par décision du ministre du travail du 17 avril 2008 et la requête en annulation de ces deux décisions a été rejetée par jugement du tribunal administratif de Versailles du 6 juin 2011.
M. [W] a été en arrêt de travail du 19 février 2007 au 27 novembre 2007.
A l’issue de la visite de reprise, le 27 novembre 2007, le médecin du travail l’a déclaré apte à reprendre le travail à mi-temps thérapeutique, puis le 15 septembre 2008 apte à une reprise à temps plein.
Soutenant être victime de discrimination syndicale et de harcèlement moral et invoquant la violation du principe ‘à travail égal, salaire égal’, M. [W] a saisi, le 13 juin 2008, le conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye aux fins d’obtenir réparation des préjudices qu’il estimait avoir subis.
Par décision du 8 septembre 2008, le bureau de conciliation a ordonné à la société Carl Zeiss Meditec France de produire les bulletins de salaire du mois de juillet 2018 des quatorze ingénieurs du département Service Après-Vente.
L’affaire a été radiée le 7 septembre 2009, puis réinscrite au rôle en août 2011.
Après débats à l’audience du bureau de jugement du 10 avril 2012, le conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye a, par jugement de départage du 29 mai 2012, débouté M. [W] de l’ensemble de ses demandes, débouté la société Carl Zeiss Meditec France de ses demandes reconventionnelles et condamné M. [W] aux dépens.
M. [W] a interjeté appel de ce jugement devant la cour d’appel de Paris, qui n’étant pas juridiction d’appel des décisions du conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye, a, par arrêt du 17 octobre 2012, jugé son recours irrecevable et le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté par décision de la Cour de cassation du 5 février 2014.
Le statut protecteur qui s’appliquait à M. [W] a pris fin en août 2015, à l’expiration du délai de six mois suivant la fin de son mandat de membre suppléant de la délégation unique du personnel.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 4 mars 2016, la société Carl Zeiss Meditec France a convoqué M. [W] à un entretien préalable à un éventuel licenciement, qui a eu lieu le 15 mars 2016, puis par lettre adressée dans les mêmes formes le 22 mars 2016, elle lui a notifié son licenciement pour motif personnel, avec dispense de l’exécution du préavis de trois mois, qui lui a été rémunéré. Elle lui a versé une indemnité conventionnelle de licenciement d’un montant de 41 741,68 euros.
Le salarié percevait en dernier lieu un salaire mensuel brut fixe de 2 995 euros sur treize mois, une prime d’objectifs et une prime sur vente.
Invoquant un harcèlement moral et une discrimination syndicale et estimant son licenciement nul, M. [W] a saisi, le 21 juillet 2016 le conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye afin d’obtenir le versement de diverses sommes au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail.
Après avoir été radiée par décision du 13 novembre 2017, l’instance a été réinscrite au rôle du conseil de prud’hommes le 8 novembre 2019.
Par jugement du 12 avril 2021, auquel la cour renvoie pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil des prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye a :
-écarté l’ensemble des prétentions, moyens et pièces de M. [W] ;
-débouté M. [W] de l’intégralité de ses demandes ;
-débouté la société Carl Zeiss Meditec France de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-laissé à chaque partie la charge de ses dépens.
M.[W] a interjeté appel de cette décision par déclaration au greffe du 20 mai 2021.
Par ordonnance d’incident du 29 juin 2022, le conseiller de la mise en état a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de chose jugée soulevée par la société Carl Zeiss Meditec France et dit que les demandes de dommages-intérêts du salarié étaient recevables.
Cette ordonnance, déférée à la cour par requête de la société Carl Zeiss Meditec France du 7 juillet 2022, a été confirmée par arrêt du 1er décembre 2022.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 21 mars 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, M. [W] demande à la cour de le déclarer recevable et bien fondé en son appel et de :
-infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a écarté des débats l’ensemble de ses prétentions, moyens et pièces et en ce qu’il l’a dès lors débouté de l’intégralité de ses demandes ;
-statuer à nouveau et :
1-prononcer l’existence d’agissements répétés constitutifs de faits de harcèlement moral, selon l’article L. 1152-1 du Code du travail, à son préjudice de la part la société Carl Zeiss Meditec France ;
-prononcer en tout état de cause la violation par la société Carl Zeiss Meditec France de son obligation de prévention, de santé et de sécurité, à son préjudice ;
En conséquence,
-condamner la société Carl Zeiss Meditec France à lui verser une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts :
*sur le fondement des articles L. 1152-1, L. 1152-2 et L. 1152-3 du code du travail, compte tenu des faits de harcèlement moral dont il a fait l’objet, de leur régularité, et de leur constance,
*et en tout état de cause sur le fondement des articles L. 4121-1 et suivants du code du travail, relatifs à l’obligation de prévention et de sécurité de l’employeur, et sur le fondement de l’article L. 1222-1 du code du travail, ces agissements constituant une exécution déloyale du contrat de travail,
2-prononcer l’existence d’une discrimination syndicale, au regard de l’article L. 1132-1 du code du travail, à son préjudice,
En conséquence,
-condamner la société Carl Zeiss Meditec France à lui verser une somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral et professionnel subi du fait de la discrimination syndicale,
3-prononcer à titre principal la nullité du licenciement sur le fondement des articles L. 1152-3 et L. 1132-4 du code du travail, et, à titre subsidiaire, son absence de cause réelle et sérieuse,
En conséquence,
-condamner la société Carl Zeiss Meditec France à lui verser :
*à titre principal : du fait de la nullité du licenciement une somme de 139 389 euros (36 mois) à titre d’indemnité pour licenciement nul,
*à titre subsidiaire : du fait de l’absence de cause réelle et sérieuse de licenciement une somme de 139 389 euros (36 mois) à titre d’indemnité sur le fondement de l’article L. 1235-3 du code du travail,
En tout état de cause,
4-débouter la société Carl Zeiss Meditec France de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
5-condamner la société Carl Zeiss Meditec France à lui remettre des bulletins de paie et une attestation Pôle Emploi conformes au jugement à intervenir, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard et par document, la cour se réservant le contentieux de la liquidation de l’astreinte,
6-prononcer l’application aux condamnations prononcées des intérêts au taux légal, et anatocisme conformément à l’article 1343-2 du code civil,
7-condamner la société Carl Zeiss Meditec France à lui verser une somme de 5 000 euros au titre au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
8-condamner la société Carl Zeiss Meditec France aux entiers dépens ainsi qu’aux éventuels frais d’exécution.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le Rpva le 16 mars 2023, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Carl Zeiss France demande à la cour de :
¿ à titre principal :
-constater que les demandes de M. [W] de dommages et intérêts pour harcèlement moral, manquement à l’obligation de sécurité, exécution déloyale du contrat de travail, discrimination syndicale et licenciement nul se heurtent à l’autorité de la chose jugée ;
-dire, par conséquent, M. [W] irrecevable en ces demandes ;
¿ à titre subsidiaire :
-constater l’absence de harcèlement, de manquement obligation de sécurité et exécution déloyale du contrat de travail.
-constater l’absence de discrimination.
¿ en tout état de cause
-constater que le licenciement de M. [W] repose sur une cause réelle et sérieuse,
par conséquent,
-débouter M. [W] de l’intégralité de ses demandes.
-confirmer le jugement entrepris,
-condamner M. [W] à lui verser une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
-condamner M. [W] aux entiers dépens de l’instance.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 28 mars 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée
La société Carl Zeiss Meditec France oppose la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de chose jugée attachée au jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye du 29 mai 2012 aux demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral, manquement à l’obligation de sécurité, exécution déloyale du contrat de travail, pour discrimination syndicale et pour licenciement nul.
M. [W] fait valoir qu’il n’y a pas identité de cause puisque dans la première procédure le juge a statué sur sa situation contractuelle au 10 avril 2012, date des débats, et que dans la seconde procédure, sa situation contractuelle sera appréciée au 19 juillet 2016, date de la saisine du conseil, en vertu d’une fin de contrat au 25 mars 2016 ; qu’en effet, le contrat de travail s’est poursuivi postérieurement au 29 mai 2012 et que la demande de reconnaissance de harcèlement moral, de discrimination et d’exécution déloyale du contrat de travail dont la cour est notamment saisie repose sur des faits postérieurs au jugement du 29 mai 2012, pour une période contractuelle postérieure à ce jugement, et que ces faits sont mis en perspective par des faits antérieurs à ce jugement.
La cour, saisie par requête en déféré de la société Carl Zeiss Meditec France, ayant confirmé par arrêt du 1er décembre 2022, ayant autorité de chose jugée, l’ordonnance d’incident du conseiller de la mise en état du 29 juin 2022, qui a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de chose jugée soulevée par la société Carl Zeiss Meditec France et a dit que les demandes de dommages-intérêts du salarié étaient recevables, l’intimée est irrecevable à opposer cette même fin de non-recevoir devant la cour statuant au fond.
Il y a juste lieu de rappeler ici que le jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye du 29 mai 2012 n’a tranché les questions du harcèlement moral, du manquement à l’obligation de sécurité, de l’exécution déloyale du contrat de travail et de la discrimination syndicale qu’en ce qu’elles étaient fondées sur les faits antérieurs au 10 avril 2012, date de la clôture des débats devant cette juridiction, qu’ils aient cessé ou non de produire leurs effets dommageables à cette date, et qu’il appartient à la cour de trancher la question du harcèlement moral ou du manquement obligation de sécurité et de l’exécution déloyale du contrat de travail, ainsi que celle de la discrimination syndicale au regard des faits survenus postérieurement au 10 avril 2012 et de statuer en outre sur la nullité du licenciement prononcé le 22 mars 2016.
Sur les motifs du licenciement
La lettre de licenciement notifiée à M. [W] le 22 mars 2016, qui fixe les limites du litige, énonce deux motifs distincts :
-l’insuffisance professionnelle ;
-le non-respect récurrent des instructions et règles applicables.
S’agissant de l’insuffisance professionnelle de M. [W], la société Carl Zeiss Meditec France soutient qu’elle se caractérise par :
-des temps d’intervention démesurés, avec l’émission de devis systématiquement et significativement plus élevés que ceux de ses collègues (deux fois plus de visites et deux fois plus de temps passé sur chaque intervention en moyenne que ses collègues, hors les derniers arrivés).
-des erreurs de diagnostic et/ou défauts de réparation nécessitant des ré-interventions récurrentes ;
S’agissant du non-respect récurrent des instructions et règles applicables, malgré les rappels, la société Carl Zeiss Meditec France invoque :
-des réparations entreprises sans attendre les validations des devis par le client, voire souvent l’émission du devis post-installation ;
-le dépassement des marges de négociation allouées ;
-la sollicitation systématique de la maison mère au lieu des ressources locales plus au fait des environnements des clients ;
-l’ignorance des règles les plus simples que ses collègues savent respecter (non-respect des procédures leads, intervention sur des matériels sur lesquels il n’a pas été habilité, etc.).
La société Carl Zeiss Meditec France invoque un manque de performance de M. [W], se traduisant par un faible nombre d’heures productives et une efficacité limitée.
Pour justifier d’une faible productivité de M. [W], qu’elle qualifie de nettement inférieure à celle de ses collègues et de très significativement inférieure à celle de ses collègues d’une ancienneté comparable, la société Carl Zeiss Meditec France produit des tableaux établis par ses soins, qui ne sont corroborés par aucune pièce ni certifiés par quiconque. Si elle affirme que ces tableaux sont des tableaux établis à partir des données saisies par les salariés dans le cadre de leur saisie des temps, elle n’en justifie pas.
Ces tableaux porte sur une période de cinq mois seulement, de novembre 2015 à mars 2016, insuffisante pour caractériser un manque de performance durable, susceptible de caractériser une insuffisance professionnelle, alors que les chiffres d’affaires par salarié des exercices 2003-2004 à 2011-2012 qu’elle produit par ailleurs montrent que, hors les exercices 2006-2007 et 2007-2008 durant lesquels le salarié a été en arrêt de travail ou a travaillé à mi-temps thérapeutique, ses résultats étaient satisfaisants.
Pour justifier d’un manque d’efficacité de M. [W], la société Carl Zeiss Meditec France affirme que sur les cinq derniers mois, la moitié des interventions du salarié devaient donner lieu à une ou plusieurs nouvelles interventions de sa part, que c’est le salarié du service qui compte le nombre de visite et le nombre d’heures moyen par appareil les plus élevés et que pour son manque d’efficacité, M. [W] établit des devis disproportionnés, adressés a posteriori, suscitant l’incompréhension du client qui s’étonne des différences de coût entre les différents techniciens.
S’il résulte des pièces produites par la société Carl Zeiss Meditec France :
-que par courriel du 15 janvier 2014, aux termes duquel Mme [U] a reproché à M. [W], alors en formation en Allemagne, de ne pas transmettre à son collègue, M. [H], qui les lui demande, les informations qu’il détient concernant le dossier du Dr [N], client chez lequel il a effectué la dernière intervention réalisée, et de prétendre suivre ainsi les instructions de celle-ci, ajoutant qu’elle apprécierait ‘que des enfantillages et/ou potentielles incompréhensions nées d’inventions pures et simples (cf. nécessité de demander des autorisations au n+2 [en parlant d’elle-même] n’aient plus à lui parvenir.’ ;
-que par courriel du 4 avril 2014, rappelé par courriels des 7 et 8 avril 2014, Mme [U] a demandé des explications à M. [W] sur la non-transmission du fichier de suivi de hot line demandé le 2 avril, sur ses bons d’intervention relatif à l’inventaire du stock central et de son stock personnel, dont elle estime le temps qu’il y a consacré inférieur au temps mentionné, et sur ses bons d’intervention relatifs à la remise en état de HLA en vue de les revendre, alors qu’ils ne vendent plus de HLA depuis longtemps et possèdent suffisamment d’appareils de prêt, ainsi que sur ses notes de frais de repas, non corroborées par des bons d’intervention ;
-que par courriel du 25 octobre 2014, M. [D] a fait remarquer à M. [W] qu’il a fait réparer un appareil sans que le client ait accepté le devis alors que celui-ci a finalement opté pour l’achat d’un nouvel appareil avec reprise de l’ancien ;
-que par courriel du 22 juillet 2015, Mme [U] a fait remarquer à M. [W], d’une part, que sa signature électronique à partir de son téléphone portable n’est pas conforme au format demandé et lui a demandé d’y remédier en mettant des signatures identiques sur son PC et sur son téléphone et, d’autre part, que sa remontée d’information vers le département des ventes n’est pas conforme à la procédure ‘Remontées de leads services’ diffusée le 22 mai 2015, applicable à compter du 1er juin 2015, la lui a adressée en pièce jointe et lui a demandé de l’appliquer et de ne plus la mettre en copie des remontées de leads ;
ces faits commis durant la période de protection, à les supposer fautifs ou révélateurs d’une insuffisance professionnelle, ne peuvent justifier le licenciement prononcé sans autorisation de l’autorité administrative après l’expiration de la période de protection. Comme le relève M. [W], les faits évoqués par M. [D] dans son courriel du 25 octobre 2014, qui relève du non-respect des procédures, est en tout état de cause prescrit.
En ce qui concerne la période postérieure à l’expiration de la période de protection du salarié, il est seulement établi :
-que Mme [U] a adressé le jeudi 24 septembre 2015 à 18h44 au service SAV un courriel mentionnant en objet ‘Top priorités fin d’année, demandant à ce que la préparation en atelier des machines de démonstration revendues soit terminée pour le 30 septembre, date de la fin d’exercice ; que par courriel du vendredi 25 septembre 2015 à 12h01, M. [W] lui a répondu qu’il sera présent le lundi et mardi dans l’après-midi ; que par courriel adressé à 12h06, Mme [U] a répliqué : ‘J’ai indiqué que ces dossiers sont prioritaires. J’attends que tu respectes mes décisions et te demande de faire le nécessaire pour te mettre à disposition de [P] lundi et mardi toute la journée.’; que par courriel adressé à 12h47, M. [W] a répondu : ‘Je suis désolé [S], j’avais déjà pris des engagements auprès de mes clients pour des urgences la semaine prochaine avant d’avoir ta demande. Maintenant je peux annuler si tu le souhaites, je suis à ton entière disposition.’ ; que par mail adressé à 12h53, Mme [U] a répliqué : ‘Seul ton agenda Outlook fait foi des rendez-vous pris. Jusqu’à ce matin, il n’y avait aucun rendez-vous pour lundi et mardi et ma demande t’est parvenue hier. Je te confirme donc de te rendre disponible à moins que tu ne saches intervenir sur la matériel qui a été évoqué.’ ;
-que par courriel du 8 décembre 2015, Mme [U], que M. [W] avait mise en copie d’un lead adressé par ailleurs à la bonne adresse de messagerie, lui a demandé de ne plus lui adresser les leads en copie et lui a fait remarquer que l’intitulé de l’objet des messages relatifs aux leads devait commencer par ‘Lead Service’ et lui a renvoyé la fiche pratique Remontées de leads services ;
-que le compte-rendu de l’entretien annuel d’évaluation et d’appréciation individuelle de la performance du 5 novembre 2015, portant sur l’exercice 2014/2015, clos le 30 septembre 2015, signé par Mme [U] et par M. [W] le 12 novembre 2015, mentionne des commentaires divergents de M. [W] en ce qui concerne l’appréciation par sa responsable de ses compétences au moyen de 6 items notés ‘conformes aux attentes’ et de 7 items notés ‘à améliorer’, et en ce qui concerne la conclusion tirée de l’entretien annuel;
-que par courriel du lundi 16 novembre 2015, Mme [U] a demandé à M. [W], en l’absence de disponibilité de M. [F], d’intervenir pour une action corrective réclamée depuis le 9 novembre 2015 par le CH d'[Localité 5] ; que M. [W] lui a adressé à 17h15 le devis de l’intervention et l’a informée qu’il avait pris rendez-vous pour intervenir les 23 et 24 novembre 2015, tout en demandant qui allait le remplacer sur son planning de la semaine, déjà chargé, et en faisant observer qu’il y avait des collègues plus proches que lui d'[Localité 5] pour intervenir et en demandant si cela ne serait pas mieux et plus économique ; que par courriel adressé à 17h49, Mme [U] lui a demandé d’honorer ce rendez-vous, exposant qu’il y a peu de techniciens formés pour intervenir sur ce type de matériel (FF450) et s’étonnant de tous ces rendez-vous pris tout à coup pour cette semaine alors que rien n’était inscrit sur son agenda avant la réunion atelier du matin et contestant la pertinence de certains rendez-vous de la semaine, celui du 17 novembre au [6], celui chez le Dr [Y] à [Localité 9] et celui chez le Dr [O] ; que M. [W] lui a répondu le 18 novembre en justifiant de ses revenus de la semaine, en soulignant qu’il n’a pas refusé d’intervenir et en ajoutant : ‘Mais tout de même, il me semble que je sois le seul à être constamment obligé de me justifier pour chacune de mes interventions, de mes déplacements, de mes devis, et même de mes diagnostics. Les collègues arrivés depuis 2, 3 ou 4 ans à peine plus n’ont pas les mêmes contraintes que moi qui suis là depuis 30 ans. Je n’avance pas comme je voudrai, toutes ces justifications me font perdre un temps considérable et prendre du retard que je préférerai allouer aux interventions techniques et aux clients (…) J’ai besoin de ta confiance pour travailler avec plaisir et avec sérénité (…).’; que Mme [U] a répliqué le 2 décembre 2015 qu’en tant que directeur du département Service & Applications, elle est en droit de vérifier la pertinence des rendez-vous pris par ses collaborateurs et de modifier l’échelle des priorités dans le traitement des dossiers si elle le juge nécessaire ; qu’il n’est pas confronté à une surcharge d’activité, que sa productivité est loin de corroborer ses dires et qu’elle voit plutôt dans son incapacité à tout mener de front un manque d’organisation ou d’investissement, qu’elle a vérifié l’offre transmise au CH de [Localité 7], qu’elle s’étonne qu’il évalue le nombre d’heures de travail à réaliser sur leur instrument à 18 heures quand M. [F] , qu’elle a sollicité, considère que 5 heures sont suffisantes, ce qui la conduit à se poser des questions sur son efficacité technique et qu’il semblerait par ailleurs qu’il n’ait pas su entendre la requête du client d’avoir une réparation à moindre coût et qu’il n’ait pas compris l’intérêt des essais de réparation qui lui ont été demandés ; qu’elle conclut, au vu de ces remarques, que les conditions ne sont pas réunies pour qu’elle lui fasse confiance au même titre qu’à ses autres collaborateurs et qu’elle attend qu’il lui prouve dans les mois à venir, par des prises de décisions judicieuses tant organisationnelles, commerciales que techniques dans son travail au quotidien, qu’une relation de confiance est possible avec lui ;
-que par courriel du 10 décembre 2015, M. [I], technicien supérieur biomédical de la direction des services économiques centre hospitalier national d’ophtalmologie des[6]t a exprimé son désaccord sur le devis de régularisation établi par M. [W] suite à une intervention de 3 heures le 27 novembre 2015 ;
-que M. [W] est intervenu à de multiples reprises chez le Dr [A], en raison de dysfonctionnements successifs de deux appareils, pour y être intervenu le 14 septembre 2015, les 2, 6 et 19 octobre 2015, les 6, 9, 10, 25, 26 et 27 novembre 2015, les 2, 11, 14, 15 décembre 2015, le 27 janvier 2016 et les 1, 2, 4, 11 et 12 février 2016 ;
-que M. [W] est intervenu au CHNO des [6] les 14 et 22 décembre 2015, le 14 décembre seul, puis, le problème détecté étant un problème de connexion du champ visuel HFA avec Forum, le 22 décembre en binôme avec M. [J], formé sur Forum contrairement à lui ; que la société Carl Zeiss Meditec France, qui n’a adressé aucun reproche à l’intéressé sur le moment, alors que sa supérieure hiérarchique était au fait de ses interventions, qu’elle surveillait étroitement, lui fait désormais grief :
*de ne pas avoir respecté les procédures : interventions curatives sans devis préalablement signé sur machine sous contrat préventif uniquement et envoi a posteriori d’un devis de régularisation (cf. devis de régularisation du 30 décembre 2015 au CHNO des [6] d’un montant total de 3 096 euros HT, hors pièces éventuellement à changer, pour la réparation d’un appareil HFA, soit 4 heures de main d’oeuvre à 140 euros, un forfait de déplacement tourné de 150 euros et un ordinateur Gator de 2 788,80 après remise de 20%, le tout avec 10% de remise, annulant et remplaçant un précédant devis du 11 décembre 2015, suite au passage du technicien les 14 et 22 décembre 2015);
*d’avoir manqué d’efficacité lors de son intervention du 14 décembre 2015 en y consacrant trop de temps par rapport aux opérations effectuées et sans réussir à établir un diagnostic fructueux et d’être intervenu le 22 décembre 2015, alors que sa présence était inutile, puisqu’au contraire de l’autre intervenant, il n’était pas formé sur le logiciel Forum à l’origine du dysfonctionnemment ;
*d’avoir facturé un nombre d’heures excessif ;
-que le 3 mars 2016, M. [W] a établi les devis suivants, dont rien ne permet d’affirmer qu’ils n’ont pas été envoyés pour validation à sa hiérarchie mais envoyés directement par ses soins aux clients concernés :
* un devis de 4 436 euros HT établi à l’attention du Dr [R] pour la réparation d’un appareil GDX, précisant que cette réparation ne sera pas facturée si le client accepte la proposition de contrat Optime 3 ans jointe au devis, que la société Carl Zeiss Meditec France critique comme suit :
Le compte-rendu de l’entretien annuel d’évaluation et d’appréciation individuelle de la performance du 5 novembre 2015, signé par Mme [U] et par M. [W] le 12 novembre 2015, qui se rapporte à l’exercice du 1er octobre 2014 au 30 septembre 2015, se rapporte pour une grande partie à la période de protection du salarié et ne peut en tout état de case suffire à établir l’insuffisance imputée au salarié, compte-tenu des commentaires divergents de M. [W] sur l’appréciation par sa responsable de ses compétences au moyen de 6 items notés ‘conformes aux attentes’ et de 7 items notés ‘à améliorer’, et sur la conclusion tirée de l’entretien annuel.
Si la société Carl Zeiss Meditec France affirme que M. [W] suscitait l’insatisfaction récurrente des clients, elle ne produit aucune pièce en justifiant.
Certaines pannes étant difficiles à diagnostiquer, le seul fait que M. [W] ait été amené à intervenir à de multiples reprises sur les appareils du Dr [A] ne caractérise pas en soi une insuffisance professionnelle.
Le centre hospitalier national d’ophtalmologie des [6], dont la société Carl Zeiss Meditec France indique qu’il est le client le plus important de l’entreprise, est particulièrement élogieux concernant le travail accompli par M. [W] en son sein, dont il indique dans un courriel du 27 septembre 2016 qu’il était le seul à assurer la maintenance des GDX de l’établissement :
-courriel du 1er avril 2016 de M. [I], technicien supérieur biomédical de la direction des services économiques, qui, informé par la société Carl Zeiss Meditec France, en la personne de M. [G], que M. [W] ne faisait plus partie de l’entreprise, répond spontanément : ‘C’est bien dommage pour Zeiss…’
-courrier détaillé établi le 5 avril 2016 par l’attachée d’administration hospitalière gérant la direction des services économiques du CHNO, où M. [W] intervient depuis plus de vingt ans sur l’ensemble des matériels d’imagerie et d’exploration fournis par la société Carl Zeiss Meditec France, qui relève que :
*ses interventions sur les plateaux techniques ont toujours donné satisfaction aux utilisateurs (orthoptistes, médecins, technicien biomédical) ;
*il programme ses interventions avec la cellule biomédicale et les services concernés ; il s’organise pour ne pas pénaliser l’activité des services en intervenant dans les meilleurs délais pour les cas urgents et dans les créneaux que le CHNO lui demande pour les opérations programmées ;
*il est ponctuel et reste discret dans ses interventions en milieu occupé par des patients ;
*il rend compte de ses actions curatives et conseille les utilisateurs et le technicien biomédical ; l’ensemble des interventions curatives hors contrat sont toujours accompagnées de proposition de remise en état du matériel ; il recherche, dans les situations sans solution technique immédiate, à proposer tant que possible un matériel de prêt ;
*il sait également manager les équipes lors des maintenances annuelles du parc, pendant le congrès de la SFO notamment, et répond aux demandes d’intervention tant sur le matériel que sur les dysfonctionnements liés au réseau informatique ;
et conclut que, dans la mesure où le matériel est relativement onéreux et où les données médicales sont sensibles, elle souhaiterait que l’ensemble des prestations des intervenants d’autres sociétés soient à l’image de celle effectuée par M. [W].
L’ingénieur hospitalier Systèmes d’imagerie du service universitaire d’ophtalmologie de Créteil a également établi un courrier en date du 30 mars 2016 témoignant de manière circonstanciée des grandes qualités professionnelles et humaines de M. [W], présenté comme expérimenté, fiable et autonome.
Les Drs [X], [Z], [C], [V] et [Y] témoignent également du professionnalisme, de la réactivité, de l’efficacité, de la disponibilité et de la gentillesse de M. [W].
S’agissant des réparations entreprises sans attendre les validations des devis par le client, voire souvent l’émission du devis post-installation, la société Carl Zeiss Meditec France invoque, d’une part, une intervention au CHNO des [6] en octobre 2015 pour une maintenance de matériels GDX, à l’occasion de laquelle M. [W] aurait pris l’initiative d’intervenir sur un autre matériel, sur lequel il n’est pas habilité, sans devis préalable, et serait réintervenu le 5 novembre, toujours sans devis préalable, puis aurait émis un devis de régularisation le 10 décembre 2015, et, d’autre part, une intervention d’octobre 2015 chez le Dr [O] sans devis préalable. S’agissant du devis du 10 décembre 2015 au CHNO des [6], se rapportant uniquement, selon le courriel CHNO des [6], à une intervention de 3 heures le 27 novembre 2015, il n’est pas établi qu’elle ait suscité un désaccord persistant du client, et s’agssant de l’intervention chez le docteur [O], il n’est pas établi que cette intervention en urgence ait suscité des difficultés de règlement de la part de ce dernier.
S’agissant du dépassement des marges de négociation allouées, il n’est pas établi que les devis en cause aient été adressés aux clients concernés.
S’agissant de la sollicitation systématique de la maison mère au lieu des ressources locales plus au fait des environnements des clients, elle n’est pas établie.
S’agissant du non-respect des procédures leads, la simple approximation dans le libellé de l’objet d’un courriel ou son envoi en copie à sa supérieure hiérarchique ne caractérise pas un manquement sérieux de M. [W].
S’agissant de l’intervention sur des matériels sur lesquels il n’a pas été habilité, le seul fait précis reproché au salarié est une intervention sur le logiciel Forum au CHNO le 14 décembre 2015, qui n’est pas établie, le salarié n’étant pas intervenu sur le logiciel mais ayant seulement recherché l’origine du dysfonctionnement de l’appareil sur lequel il était habilité à intervenir, lequel s’est avéré lié à un dysfonctionnement au logiciel Forum.
S’agissant de la non-prise en compte de demandes d’intervention depuis l’expiration de la période de protection de M. [W], elle n’est pas caractérisée par la seule interprétation que sa supérieure hiérarchique fait de ses courriels.
Il n’est pas établi non plus que, par son attitude, M. [W] ait obligé sa hiérarchie à des rappels sans fin sur les règles applicables et les travaux à réaliser, avec les pertes de temps associées.
Il s’ensuit que le licenciement de M. [W] n’est pas fondé sur des éléments sérieux.
Sur le harcèlement moral
Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. En vertu de l’article L. 1154-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, lorsque survient un litige relatif à l’application de l’article L. 1152-1, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et, au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
M. [W], qui soutient avoir été victime de harcèlement moral, fait état dans ses conclusions des faits suivants :
-la dévalorisation de son travail ;
-la difficulté pour prendre ses heures de délégation ;
-la stagnation de sa carrière et de sa rémunération fixe ;
-la baisse de sa rémunération variable ;
-une inégalité en termes d’outils de travail ;
-des insultes, menaces, vexations, actes d’intimidation et humiliation et des remarques incessantes sur la qualité de son travail et son comportement de la part de sa hiérarchie ;
-des sanctions injustifiées et l’engagement d’une procédure de licenciement qui n’a pas abouti en l’absence d’autorisation de l’autorité administrative ;
-le retrait abusif de tâches suite à un accident de travail ;
-la demande de justification de ses absences pour soins ;
-l’absence de réponse de l’employeur à ses alertes ;
-la dégradation de son état de santé.
Les sanctions injustifiées et l’engagement d’une procédure de licenciement qui n’a pas abouti en l’absence d’autorisation de l’autorité administrative, les insultes, menaces, vexations, actes d’intimidation et humiliation et les remarques incessantes sur la qualité de son travail et son comportement que le salarié impute à M. [E], son précédent supérieur hiérarchique, ainsi que la difficulté pour prendre les heures de délégation auxquelles il avait droit jusqu’en février 2011 sont des faits antérieurs au jugement du conseil de prud’hommes du 29 mai 2012, qui, tranchant la question du harcèlement moral, l’a débouté de sa demande de dommages-intérêts de ce chef. La dévalorisation de son travail, la stagnation de sa carrière et de sa rémunération fixe, la baisse de sa rémunération variable, l’inégalité en termes d’outils de travail qu’il dénonce, sont aussi des faits nés antérieurement au jugement du 29 mai 2012, qui l’a débouté de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral, même si leurs effets se sont poursuivis au-delà. Ces faits ne peuvent donc fonder la demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral formée dans le cadre de la présente instance.
M. [W] établit toutefois :
-que le 15 septembre 2014, il a été victime, dans l’atelier, d’un accident de travail qui lui a causé une lésion au genou droit ; qu’à l’issue d’une visite médicale du 31 octobre 2014, effectuée à la demande de l’employeur, le médecin du travail a conclu : ‘Apte à son poste avec aménagement suite accident du travail du 15/09/2014. Nécessité d’une aide pour porter les charges lourdes ou difficiles à manutentionner dans l’atelier ou en clientèle.’ ;
-que par courrier du 19 novembre 2014, la société Carl Zeiss Meditec France l’a informé qu’afin de respecter les prescriptions du médecin du travail, et compte-tenu de l’impossibilité de lui assurer une aide lors de ses déplacements en clientèle, elle lui demandait de ne plus assurer de déplacements et qu’il sera donc affecté à des travaux à l’atelier central de [Localité 8], où il disposera des aides qui seraient nécessaires ;
-que par courriel du vendredi 5 décembre 2014, Mme [U], directeur du département Service & Applications, sa supérieure hiérarchique, s’est étonnée auprès de lui de ne pas l’avoir vu en atelier à [Localité 8] ce jour ; qu’il lui a répondu qu’il était en soin suite à l’accident du travail, ainsi qu’il l’avait noté sur le planning Lotus, idem pour le lundi matin ; que Mme [U] a répliqué qu’il déclare s’être absenté de son travail le lundi 1er et le vendredi 5 décembre pour cause de soins suite à son accident du travail du 15 septembre 2014, alors qu’aucun arrêt de travail ne lui a été prescrit suite à cet accident et lui a demandé de fournir les arrêts de travail correspondant à ses absences ; que par courriel du 22 décembre 2014, elle lui a écrit : ‘Je reviens vers toi concernant tes absences répétées ces dernières semaines, avec comme motif invoqué des rendez-vous chez le kinésithérapeute, médecin généraliste ou passage à la pharmacie. Dans la mesure où tu n’as pu fournir aucun arrêt de travail, je te remercie de me transmettre les justificatifs de médecins pour toutes les absences passées et à venir.’ ; que par courriel du 23 décembre 2014, il lui a répondu : ‘Suite à ton accord tacite, relatif à mes absences ponctuelles et stipulé sur mon planning depuis septembre afin de pouvoir bénéficier des soins nécessaires à mon accident du travail, résultant de la non-conformité de l’atelier (…). Je m’interroge ayant refusé d’être en arrêt de travail comme proposé par mon médecin, pourquoi aujourd’hui cette solution d’absence ponctuelle et temporaire ne te convient plus, de plus pendant mes trajets et attente je continue de travailler (…). Je ne coupe mon téléphone que pendant mes séances de soins’, en joignant un document établi par son médecin traitant en date du 23 décembre 2014 certifiant qu’il a besoin de soins externes suite à son accident de travail ;
-qu’il a été en arrêt de travail pour accident du travail du 7 janvier au 30 avril 2015 ; que l’exemplaire du certificat de prolongation d’arrêt de travail pour la période du 21 janvier au 4 février 2015 destiné à l’organisme de sécurité sociale mentionne comme raison médicale : ‘Etat dépressif réactionnel suite …pathie du genou droit (AT)’ ; qu’à l’issue de la visite de reprise, le 7 mai 2015, le médecin du travail l’a déclaré apte à son poste ;
-que par courrier du 8 janvier 2015, il a écrit à la société Carl Zeiss Meditec France pour dénoncer une dégradation de ses conditions de travail, en relevant :
¿ à propos de son accident de travail du 15 septembre 2014 :
*que l’atelier étant exigu et encombré, les mouvements des salariés, qui sont parfois 4 ou 5 à l’intérieur, sont difficiles ;
*que son médecin traitant avait souhaité lui prescrire un arrêt de travail de quinze jours qu’il avait refusé par crainte de désorganiser le service, de surcharger ses collègues et pour éviter une accumulation de retards ; que Mme [U], responsable du SAV, qu’il en avait informée, avait accepté qu’il s’absente si nécessaire pour suivre ses soins, que cela a fonctionné ainsi jusqu’au mois de décembre 2014 ; qu’à compter du 5 décembre 2014, Mme [U] lui a demandé de justifier ses absences par des arrêts de travail et a contesté le 6 janvier 2015 lui avoir donné l’autorisation de s’absenter pour suivre des soins médicaux ; qu’il a le sentiment d’avoir été piégé pour que ses absences puissent lui être reprochées et qu’il espère que tel n’est pas le cas ;
*qu’il conteste l’impossibilité de se déplacer en clientèle que l’employeur déduit de l’avis d’aptitude avec aménagement du médecin du travail, soutenant que l’exercice de ses fonctions d’ingénieur de maintenance ne nécessite pas de port de charge lourde lors de ses déplacements en clientèle, que si cela peut arriver ponctuellement, il peut être aidé d’un apprenti, comme il l’a fait régulièrement auparavant, ce qui lui permet dans le même temps de le former et, qu’à défaut, il est toujours possible d’organiser les interventions en clientèle avec ses collègues pour éviter qu’il se trouve confronté à ce type de situation ; qu’il considère que la restriction apportée à ses fonctions est abusive et qu’il lui demande d’y mettre fin ;
¿ à propos de sa rémunération :
*qu’il n’a toujours pas eu d’augmentation de salaire depuis douze ans, sans explication objective ;
*qu’il est le seul ingénieur à payer la cantine lorsqu’il est à [Localité 8] ;
*que le travail qu’il effectue pour assurer la hotline n’est pas compensé financièrement alors qu’il n’est pas prévu par son contrat de travail ;
*que M. [L] et M. [H], qui occupent les mêmes fonctions que lui avec une ancienneté inférieure, ont un salaire variable supérieur ;
¿ à propos de ses frais :
*que depuis le mois de janvier 2014, la société Carl Zeiss Meditec France déduit systématiquement de ses notes de frais de mission en Allemagne certains dîners clients, qui ne lui sont pas remboursés malgré ses demandes réitérées ;
¿ à propos de ses interventions en clientèle : que d’octobre 2013 à novembre 2014, il a fait l’objet de la part de sa responsable hiérarchique de demandes insistantes de justifications concernant ses interventions en clientèle, traitement qui n’était réservé qu’à lui et qui nécessitait qu’il passe beaucoup de temps à se justifier, ce qui affectait sa productivité ;
-que par courrier du 16 janvier 2015, la société Carl Zeiss Meditec France a contesté le bien fondé de la dégradation des conditions de travail alléguée et, prenant acte de son insatisfaction, lui a proposé : ‘En l’état, nous pourrions réfléchir ensemble à un poste plus technico-administratif, avec un poste de travail en dehors de l’atelier.’ et lui a demandé de bien vouloir lui indiquer si cette option lui agrée ;
-que par courrier du 27 mars 2015, il a maintenu les termes de son courrier du 8 janvier 2015 et, concernant la proposition de poste a indiqué rester ouvert sur le principe, tant que la discussion se fait loyalement, dans le respect de ses droits et de ses attributions ;
-que par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 17 janvier 2016, il a saisi l’inspecteur du Travail, considérant que ses conditions de travail ont continué à se dégrader postérieurement au jugement du conseil de prud’hommes du 29 mai 2012 et qu’en dépit de ses alertes régulières, il continue de subir des vexations quotidiennes et une différence de traitement qu’aucun élément objectif ne justifie et qui ne peut s’expliquer que par le mandat de représentant du personnel qu’il exerçait et par la dégradation de son état de santé, et lui a demandé d’intervenir auprès de son employeur.
Il est établi par les pièces produites que M. [W] faisait l’objet d’une surveillance étroite de son activité de la part de sa supérieure hiérarchique, que celle-ci interprétait ses mails de manière tendancieuse, qu’à la suite de son accident du travail du 15 septembre 2014, son employeur lui a demandé de ne plus assurer de déplacements en clientèle et de travailler uniquement à l’atelier central de [Localité 8], qu’avoir toléré pendant plusieurs mois qu’il s’absente pour suivre les soins nécessités par son accident du travail, ce qu’elle ne pouvait ignorer compte-tenu de la surveillance étroite à laquelle elle le soumettait, sa supérieure hiérarchique a semblé découvrir cette situation et lui a soudainement demandé des arrêts de travail pour justifier ses absences les plus récentes, que les courriers qu’il a adressés à son employeur pour dénoncer sa situation n’ont donné lieu à aucune investigation, mais seulement à une proposition de modification de son contrat de travail. Ces faits qui, pris en leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail.
Si la société Carl Zeiss Meditec France justifie la demande adressée au salarié de ne pas effectuer de déplacement en clientèle par un élément objectif étranger à tout harcèlement, l’impossibilité de lui fournir une aide en clientèle permettant de respecter les préconisations du médecin du travail, elle ne justifie par aucun élément objectif étranger à tout harcèlement moral les autres faits ci-dessus retenus comme établis.
Le harcèlement moral est dès lors caractérisé. Ces agissements répétés commis postérieurement au jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye du 29 mai 2012 ont causé à M. [W] un préjudice que la cour fixe à la somme de 8 000 euros. Il convient en conséquence d’infirmer le jugement du conseil des prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye du 12 avril 2021 et de condamner la société Carl Zeiss Meditec France à payer ladite somme au salarié à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral.
Sur la discrimination
Aux termes de l’article L. 1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat, en raison de ses activités syndicales.
Aux termes de l’article L. 2141-5 alinéa 1 du code du travail, il est interdit à l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d’avancement, de rémunération et d’octroi d’avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail.
L’article L. 1134-1 du code du travail dispose qu’en cas de litige relatif à l’application de l’article L. 1132-1, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte telle que définie à l’article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations et il incombe à la partie défenderesse, au vu des ces éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge formant sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
M. [W], qui soutient avoir été victime de discrimination syndicale, fait état dans ses conclusions des faits suivants :
-la dévalorisation de son travail ;
-la difficulté pour prendre ses heures de délégation ;
-la stagnation de sa carrière et de sa rémunération fixe ;
-la baisse de sa rémunération variable ;
-une inégalité en termes d’outils de travail ;
-des insultes, menaces, vexations, actes d’intimidation et humiliation et des remarques incessantes sur la qualité de son travail et son comportement de la part de sa hiérarchie ;
-des sanctions injustifiées et l’engagement d’une procédure de licenciement qui n’a pas abouti en l’absence d’autorisation de l’autorité administrative ;
-le retrait abusif de tâches suite à son accident de travail ;
-la demande de justification de ses absences pour soins ;
-l’absence de réponse de l’employeur à ses alertes.
Les sanctions injustifiées et l’engagement d’une procédure de licenciement qui n’a pas abouti en l’absence d’autorisation de l’autorité administrative, les insultes, menaces, vexations, actes d’intimidation et humiliation et les remarques incessantes sur la qualité de son travail et son comportement que le salarié impute à M. [E], son précédent supérieur hiérarchique, ainsi que la difficulté pour prendre les heures de délégation auxquelles il avait droit jusqu’en février 2011 sont des faits antérieurs au jugement du conseil de prud’hommes du 29 mai 2012, qui, tranchant la question de la discrimination syndicale, l’a débouté de sa demande de dommages-intérêts de ce chef. La dévalorisation de son travail, la stagnation de sa carrière et de sa rémunération fixe, la baisse de sa rémunération variable, l’inégalité en termes d’outils de travail qu’il dénonce sont aussi des faits nés antérieurement au jugement du 29 mai 2012, qui l’a débouté de sa demande de dommages-intérêts pour discrimination syndicale, même si leurs effets se sont poursuivis au-delà. Ces faits ne peuvent donc fonder la demande de dommages-intérêts pour discrimination formée dans le cadre de la présente instance.
Il est établi comme relevé ci-dessus que M. [W] faisait l’objet d’une surveillance étroite de son activité de la part de sa supérieure hiérarchique, que celle-ci interprétait ses mails de manière tendancieuse, qu’avoir toléré pendant plusieurs mois qu’il s’absente pour suivre les soins nécessités par son accident du travail, ce qu’elle ne pouvait ignorer compte-tenu de la surveillance étroite à laquelle elle le soumettait, sa supérieure hiérarchique a semblé découvrir cette situation et lui a soudainement demandé des arrêts de travail pour justifier ses absences les plus récentes, que les courriers qu’il a adressés à son employeur pour dénoncer sa situation n’ont donné lieu à aucune investigation et que ces faits ne sont justifiés par aucun élément objectif étrangers à toute discrimination.
La discrimination syndicale dénoncée est dès lors caractérisée. Ces actes de discrimination commis postérieurement au jugement du conseil de prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye du 29 mai 2012 ont causé à M. [W] un préjudice que la cour fixe à la somme de 8 000 euros. Il convient en conséquence d’infirmer le jugement conseil des prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye du 12 avril 2021 et de condamner la société Carl Zeiss Meditec France à payer ladite somme au salarié à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale.
Sur la nullité du licenciement
Il est établi que le licenciement injustifié notifié à M. [W] le 22 mars 2016 est en lien avec le harcèlement moral et la discrimination syndicale qu’il a subis. Il s’ensuit que ce licenciement est nul. Le salarié dont le licenciement est nul et qui ne demande pas sa réintégration, a droit à une indemnité réparant intégralement le préjudice résultant du caractère illicite de son licenciement, dont le montant doit être au moins égal à celui prévu par L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, soit un montant égal aux salaires bruts perçus par le salarié pendant les six derniers mois.
En raison de l’âge du salarié au moment de son licenciement, 51 ans, de son ancienneté de 30 ans dans l’entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée et de son aptitude à retrouver un emploi, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral qu’il a subi, la somme de 60 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul.
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il a débouté M. [W] de ses demandes de ces chefs.
Sur les intérêts
Les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.
Il y a lieu d’ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 ancien devenu 1343-2 du code civil.
Sur les dépens et l’indemnité de procédure
La société Carl Zeiss Meditec France, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel et sera déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
Il convient de la condamner, en application de l’article 700 du code de procédure civile, à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros pour les frais irrépétibles qu’il a exposés.
PAR CES MOTIFS :
La COUR,
Statuant par arrêt CONTRADICTOIRE,
Déclare la société Carl Zeiss Meditec France irrecevable à opposer la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de chose jugée du jugement du conseil des prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye du 29 mai 2012 aux demandes de M. [M] [W] ;
Infirme le jugement du conseil des prud’hommes de Saint-Germain-en-Laye du 12 avril 2021, sauf en sa disposition qui déboute la société Carl Zeiss Meditec France de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en première instance, qui est confirmée ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant :
Dit que le licenciement de M. [M] [W] est nul ;
Condamne la société Carl Zeiss Meditec France à payer à M. [M] [W] les sommes suivantes :
*8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
*8 000 euros à titre de dommages-intérêts pour discrimination syndicale ;
*60 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ;
Dit que ces créances sont productives d’intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 ancien devenu 1343-2 du code civil ;
Condamne la société Carl Zeiss Meditec France à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société Carl Zeiss Meditec France de sa demande d’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles qu’elle a exposés en cause d’appel ;
Condamne la société Carl Zeiss Meditec France aux dépens de première instance et d’appel.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,