Signature électronique : 24 août 2023 Cour d’appel de Bourges RG n° 22/00889

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Signature électronique : 24 août 2023 Cour d’appel de Bourges RG n° 22/00889
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COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

– SCP ROUAUD & ASSOCIES

LE : 24 AOUT 2023

COUR D’APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 24 AOUT 2023

N° 374 – 8 Pages

N° RG 22/00889 – N° Portalis DBVD-V-B7G-DPMM

Décision déférée à la Cour :

Jugement du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de CHATEAUROUX en date du 03 Juin 2022

PARTIES EN CAUSE :

I – S.A. FLOA (anciennement dénommée BANQUE DU GROUPE CASINO) agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social:

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

N° SIRET : 434 130 423

Représentée par la SCP ROUAUD & ASSOCIES, avocat au barreau de BOURGES, substituée à l’audience par la SCP AVOCATS CENTRE, avocat au barreau de BOURGES

timbre fiscal acquitté

APPELANTE suivant déclaration du 29/08/2022

II – M. [H] [M]

[Adresse 2]

[Localité 4]

non représenté

auquel la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiés suivant actes d’huissier des 04/10/2022 et 22/11/2022 remis à étude

INTIMÉ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 13 Juin 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme CLEMENT, Présidente chargée du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme CLEMENT Présidente de Chambre

M. PERINETTI Conseiller

Mme CIABRINI Conseillère

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme SERGEANT

***************

ARRÊT : RENDU PAR DEFAUT

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

**************

EXPOSÉ

La société Floa, venant aux droits de la société Banque du groupe Casino, a mis M. [H] [M] en demeure de verser la somme de 232,46 euros par courrier du 4 mai 2021, puis de 408,42 euros par courrier du 4 août suivant, indiquant former ces demandes au titre d’un contrat de crédit renouvelable en date du 23 octobre 2019 dont les échéances seraient demeurées impayées.

Par courrier du 24 novembre 2021, la société Floa a prononcé la déchéance du terme et réclamé à M. [M] la somme de 7.156,05 euros.

Suivant acte d’huissier en date du 11 mars 2022, la société Floa a fait assigner M. [M] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Châteauroux aux fins de voir :

– condamner M. [M] au paiement de la somme de 7.300,52 euros en capital, intérêts échus et indemnité conventionnelle outre intérêts de retard au taux contractuel à compter de la mise en demeure,

– à titre subsidiaire, si la déchéance du terme devait être prononcée, limiter cette sanction aux seuls intérêts contractuels échus et non payés à la date de l’assignation et assortir toute condamnation des intérêts légaux avec majoration de 5 points en application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier,

– en tout état de cause, ordonner la capitalisation des intérêts,

– condamner M. [M] à lui verser la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens, et à supporter la charge des sommes retenues par l’huissier au titre de l’article R. 444-55 du code de commerce, en cas de procédure de recouvrement forcé.

M. [M] n’a pas comparu ni ne s’est fait représenter devant le tribunal.

Par jugement réputé contradictoire du 3 juin 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Châteauroux a :

– débouté la société Floa de l’ensemble de ses demandes,

– l’a condamnée aux dépens.

Le tribunal a notamment retenu que la signature imputée à M. [M] ne figurait pas sur l’acte de prêt que la société Floa entendait lui opposer, que le contrat se bornait à mentionner « signé électroniquement » sans élément d’horodatage, ni indication du nom du signataire allégué, ni référence du certificat de signature renvoyant au fichier de preuve, que le processus assurant la fiabilité de la transaction n’était pas complet à défaut de mention permettant de faire le lien entre le contrat de crédit et la signature de l’emprunteur, que l’acte litigieux ne pouvait dans ces conditions être considéré comme ayant été valablement signé numériquement ni, de ce fait, être opposé à M. [M].

Par déclaration du 29 août 2022, la société Floa a interjeté appel de cette décision, en ce qu’elle l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 17 novembre 2022, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu’elle développe, la société Floa demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée aux dépens,

– condamner M. [M] à lui payer et porter les sommes suivantes, arrêtées au 22 février 2022 :

* capital restant dû : 6.217,78 €,

* intérêts : 359,54 €,

* assurance : 225,78 €,

* indemnité légale : 497,42 €,

* total : 7.300,52 €,

outre frais et intérêts de retard au taux contractuel à compter de la mise en demeure et jusqu’à parfait paiement,

– ordonner la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil,

– condamner M. [M] à lui payer et porter la somme de 1.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [M] aux entiers dépens,

– ordonner que, dans l’hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par l’arrêt à intervenir, l’exécution devra être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier de Justice, le montant des sommes retenues par l’huissier, en application de l’article R. 444-55 du code de commerce et son tableau 3-1 annexé, devra être supporté par le débiteur, en sus de l’application de l’article 700 du code de procédure civile, l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution ne prévoyant qu’une simple faculté de mettre à la charge du créancier lesdites sommes.

Bien que dûment cité, M. [M] n’a pas constitué avocat devant la cour.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 mai 2023.

SUR CE

Sur l’existence du contrat de crédit renouvelable

Selon l’article 1353, alinéa 1, du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

L’article 1359, alinéa 1, du même code dispose que l’acte juridique portant sur une somme ou une valeur excédant un montant fixé par décret doit être prouvé par écrit sous signature privée ou authentique.

En vertu de l’article 1367, alinéa 2, lorsque la signature nécessaire à la perfection d’un acte juridique est électronique, elle consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

L’article 1, alinéa 1, du décret no 2017-1416 du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique précise que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en ‘uvre une signature électronique qualifiée.

En l’espèce, la société Floa soutient avoir conclu un crédit renouvelable avec M. [M] le 23 octobre 2019, d’un montant maximum autorisé de 6.000 euros.

Pour prouver l’existence de cet acte juridique, elle produit une copie numérique d’une offre de contrat de crédit renouvelable faite le 23 octobre 2019 au nom de M. [H] [M] d’un montant maximum autorisé de 6.000 euros (no dossier : 00010025266), qui mentionne en page 6 : « je soussigné(e) [H] [M] déclare accepter le présent contrat de crédit » puis « contrat signé électroniquement » dans une case de signature figurant à côté de la case contenant la signature du prêteur.

Afin de justifier que l’offre de contrat a été signée électroniquement par M. [M], la société appelante verse aux débats les pièces suivantes :

– un document dénommé « enveloppe de preuve », établi le 26 octobre 2019 par la société DocuSign France, contenant un fichier de preuve référencé 2FNETHE0-SERVID01-RECORD-20191023165356-9F3DRS4RRJHJD978 qui « permet d’attester de la signature électronique du document de type « default variant service » par le signataire désigné ci-après : [H] [M] ([Courriel 6]) a signé le 23 octobre 2019 16:54:20 CEST ‘ référence de la transaction associée 2FNETHE0-SERVID01—20191023165355-289VPUDH85GK5707 »,

– un document dénommé « fichier de preuve Protect&Sign », référencé 2FNETHE0-SERVID01-RECORD-20191023165356-9F3DRS4RRJHJD978, qui mentionne que « dans le cadre de la transaction référencée 2FNETHE0-SERVID01—20191023165355-289VPUDH85GK5707 réalisée via le service Protect&Sign, DocuSign atteste que le signataire identifié comme [H] [M], et dont l’adresse email est [Courriel 6], a procédé le 23 octobre 2019 16:54:20 CEST à la signature électronique des documents présentés à la demande du client Netheos » à savoir le document « contrat : default.pdf » et que « le signataire s’est authentifié sur la page de consentement en saisissant le code qui lui a été transmis automatiquement par le service Protect&Sign par SMS au numéro de téléphone [XXXXXXXX01] »,

– un document « Parcours client ‘ Trust and Sign » établi par la SAS Netheos, qui « décrit le parcours client pour le dossier no 28216661 [‘] réalisé au nom de M. [H] [M] par l’intermédiaire du produit Trust and Sign de la société Netheos pour les besoins de la société Groupe Banque Casino », faisant apparaître des données concordantes à celles présentes dans les deux documents précités et mentionnant au demeurant que l’opération portait sur le produit « PPR Prêt dispo » et le numéro de dossier « 10025266 »,

– une copie de la carte d’identité, l’avis d’impôt 2019 sur les revenus de l’année 2018 et un relevé d’identité bancaire au nom de M. [H] [M], qui comportent une date de naissance et une adresse identiques à celles mentionnées sur les documents contractuels.

L’ensemble de ces éléments, notamment la reprise dans le document intitulé « parcours client ‘ trust and sign » du numéro de dossier 10025266 qui correspond au numéro du contrat produit, permet de matérialiser un lien entre les documents contractuels litigieux et les fichiers de preuve destinés à caractériser la signature électronique de l’emprunteur.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, auxquels s’ajoute l’absence de contestation de M. [M], qui n’a comparu ni en première instance, ni en appel, bien qu’ayant été valablement cité et s’étant vu signifier par commissaire de justice tant la déclaration d’appel que l’assignation devant la cour d’appel, la société Floa apporte donc la preuve que l’offre de crédit du 23 octobre 2019 a bien été signée électroniquement par M. [M].

Sur les demandes de la société Floa

En vertu de l’article R. 312-35 du code de la consommation, les actions en paiement engagées devant le tribunal judiciaire à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion. Cet événement est caractérisé par le dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti dans le cadre d’un contrat de crédit renouvelable.

L’article L. 312-39 du même code dispose qu’en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt.

En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret.

L’article D. 312-16 prévoit ainsi que lorsque le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L. 312-39, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

En l’espèce, la société Floa produit la liste des mouvements avec soldes progressifs relatifs au crédit renouvelable litigieux, dont il résulte que le premier dépassement non régularisé du montant total du crédit consenti, à savoir 6.000 euros, est intervenu le 4 mai 2021, lorsque le solde progressif s’est établi à -3 198,19 euros pour le compte « prêt dispo » et -2937,64 euros pour le compte « finan. n. fois », soit au total -6135,83 euros, sans que le solde progressif ne revienne plus par la suite dans la limite du montant consenti.

L’assignation en justice étant intervenue le 11 mars 2022, l’action en paiement de la banque a donc été intentée dans le délai biennal de l’article R. 312-35 précité, de sorte que les demandes présentées à l’encontre de M. [M] sont recevables.

Au soutien du bien-fondé de sa demande, la société Floa verse aux débats, outre l’offre de crédit du 23 octobre 2019, deux courriers du 4 mai 2021 et 2 juin 2021 de demande de régularisation amiable, un courrier du 4 août 2021 de mise en demeure avant déchéance du terme et un courrier du 24 novembre 2021 de mise en demeure après déchéance du terme, envoyé par lettre recommandée avec accusé de réception, distribuée le 2 décembre 2021, ainsi qu’un décompte de créance au 22 février 2022.

Les différentes pièces versées aux débats par l’appelante démontrent que celle-ci a respecté les dispositions des articles L312-1 et suivants et L222-1 et suivants du code de la consommation. Aucune déchéance de son droit aux intérêts contractuels n’est de ce fait encourue par la société Floa.

L’appelante démontre ainsi le bienfondé de sa créance à hauteur de 6.217,78 euros s’agissant du capital restant dû et 225,78 euros s’agissant de l’assurance.

Les intérêts au taux contractuel de 9,423% seront dus sur la somme de 6.217,78 euros à compter du 2 décembre 2021, date de réception par M. [M] de la mise en demeure après déchéance du terme.

En outre, l’indemnité légale de 8 % apparaît manifestement excessive au regard de la somme due, des paiements effectués par M. [M] et des éléments d’appréciation de la situation financière du débiteur fournis par l’appelante et sera réduite à la somme de 50 euros.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a débouté la société Floa de l’ensemble de ses demandes et M. [M] condamné au paiement des sommes précédemment énoncées.

La société Floa sera en revanche déboutée de sa demande de capitalisation des intérêts, en application de l’article L. 312-38 du code de la consommation qui interdit de mettre à la charge de l’emprunteur défaillant tout coût autre que ceux mentionnés à cet article.

Enfin, l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution dispose qu’à l’exception des droits proportionnels de recouvrement ou d’encaissement qui peuvent être mis partiellement à la charge des créanciers dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat, les frais de l’exécution forcée sont à la charge du débiteur, sauf s’il est manifeste qu’ils n’étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés. Les contestations sont tranchées par le juge.

Le transfert à la charge du débiteur de tout ou partie des frais exposés par le créancier pour le recouvrement de sa créance, en application de ce texte, doit être sollicité auprès du juge de l’exécution et non, à titre préalable, auprès de la juridiction du fond.

La demande présentée par la banque tendant à la condamnation de M. [M] au paiement des honoraires proportionnels de recouvrement de l’huissier en cas d’exécution forcée du présent arrêt sera en conséquence rejetée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement entrepris sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens.

Partie principalement succombante, M. [M] sera condamné aux dépens de première instance et d’appel.

Nonobstant l’issue de la procédure, l’équité et la prise en considération de la disproportion économique majeure existant entre les parties commandent de débouter la société Floa de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement entrepris en l’ensemble de ses dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne M. [H] [M] à payer à la SA Floa les sommes suivantes :

– 6 217,78 euros au titre du capital restant dû, outre les intérêts au taux contractuel de 9,423% à compter du 2 décembre 2021,

– 225,78 euros au titre de l’assurance,

– 50 euros au titre de l’indemnité de l’article D. 312-16 du code de la consommation,

Rejette la demande de capitalisation des intérêts présentée par la SA Floa,

Rejette la demande présentée par la SA Floa tendant à condamner M. [H] [M] au paiement des honoraires proportionnels de recouvrement de l’huissier en cas d’exécution forcée du présent arrêt,

Condamne M. [H] [M] aux dépens de première instance et d’appel,

Déboute la SA Floa de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’arrêt a été signé par O. CLEMENT, Président et par Mme MAGIS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

S.MAGIS O. CLEMENT

 


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