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COUR D’APPEL
DE NANCY
1ère chambre civile
N° RG 22/02731 – N° Portalis DBVR-V-B7G-FCYR
Appel d’une décision rendue par le tribunal judiciaire de NANCY en date du 23 novembre 2022 – RG 21/00090
Ordonnance n° /2023
du 21 Juin 2023
O R D O N N A N C E D’ I N C I D E N T
Nous, Nathalie CUNIN-WEBER, magistrat chargée de la mise en état de la 1ère chambre civile à la cour d’appel de NANCY, assistée de Céline PERRIN, greffier, lors de l’audience de cabinet du 31 Mai 2023,
Vu l’affaire en instance d’appel inscrite au répertoire général sous le N° RG 22/02731 – N° Portalis DBVR-V-B7G-FCYR ,
APPELANT
MINISTERE PUBLIC
[Adresse 1]
Représenté par Madame Béatrice BOSSARD, Avocat général près la Cour d’appel de NANCY
INTIMÉ
Monsieur [D] [Z]
né le 13 février 2002 à [Localité 3] (PAKISTAN)
domicilié chez Madame [L] – [Adresse 2]
bénéficie d’une aide juridictionnelle totale numéro 2022/011236 du 27/01/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de NANCY
Représenté par Me Brigitte JEANNOT, avocat au barreau de NANCY
Avons, après avoir entendu à l’audience de cabinet du 31 Mai 2023, les parties en leurs explications, mis l’affaire en délibéré pour l’ordonnance être rendue le 21 Juin 2023 ;
Et ce jour, 21 Juin 2023, assistée de Céline PERRIN, greffier, avons rendu l’ordonnance suivante :
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte d’huissier délivré le 5 janvier 2021, Monsieur [D] [Z], se disant né le 13 février 2002 à [Localité 3] (Pakistan), a fait assigner Monsieur le Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nancy, aux fins de voir dire qu’il est de nationalité française.
Par jugement contradictoire du 23 novembre 2022, le tribunal judiciaire de Nancy a dit que Monsieur [D] [Z], né le 13 février 2002 à [Localité 3] (Pakistan) est de nationalité française en application des dispositions de l`article 21-12 du code civil, ayant été confié au services de l’aide sociale à l’enfance pendant plus de trois ans avant sa majorité et disposant d’un état civil certain.
Le ministère public a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 5 décembre 2022.
Il a conclu 9 février 2023 en demandant à la cour de :
– constater que le récépissé prévu par l’article 1043 du code de procédure civile a été délivré ;
– infirmer le jugement de première instance en toutes ses dispositions,
– ordonner la mention prévue par les articles 23 du code civil, 1059 du code procédure civile
et 4-1 du décret n°65-422 du 1er juin 1965.
Par conclusions communiquées par voie électronique le 5 mai 2023, le conseil de Monsieur [D] [Z] a soulevé l’irrecevabilité de la déclaration d’appel datée du 30 novembre 2022 en ce que, contrairement aux dispositions de l’article 930-1 du code de procédure civile, elle n’a pas été déposée par voie électronique ; elle considère que le ministère public n’établit pas être face à une impossibilité matérielle de respecter ces dispositions ce qui exclut de formaliser son appel selon les modalités de l’article 930-1 alinéa 2 du code de procédure civile ; elle réclame en tout état de cause la confirmation du jugement entrepris ainsi que la condamnation de l’Etat à lui payer une somme de 2400 euros en application de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle et de l’article 700 du code de procédure civile, contre engagement de renoncer à la part contributive de l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle ainsi qu’aux dépens.
Par conclusions communiquées par voie électronique le 26 mai 2023, le ministère public reconnaît ne pas avoir respecté les dispositions de l’article 930-1 du Code Civil, en affirmant qu’il s’agit d’un problème technique insurmontable en produisant une attestation de la directrice de greffe du tribunal judiciaire de Nancy ; il indique à cet égard que l’appel du Procureur de la République de [Localité 4] n’était pas réalisable par voie électronique faute de paramétrage adapté ;
s’agissant de l’accomplissement de diligences sur support papier, le ministère public réclame qu’il soit constaté qu’il a respecté les dispositions de l’article 930-1 alinéa 2 du code de procédure civile, ayant déposé son appel en trois exemplaires tel qu’attesté par Madame la directrice de greffe de la cour d’appel, ce qui justifie de déclarer son appel recevable.
Pour en justifier, il produit :
– une déclaration écrite de la directrice des services de greffe judiciaires en charge des services civils près le tribunal judiciaire de Nancy attestant que ‘les paramétrages actuels du ministère public dans l’applicatif WinCi ne lui permettent pas d’interjeter appel par la voie électronique via cet applicatif’,
– la fiche d’enregistrement par le greffe de l’appel du Ministère public,
– la déclaration d’appel sur support papier en date du 2 décembre 2022 faite par Monsieur le Procureur de la République adjoint près le tribunal judiciaire de Nancy.
A l’audience d’incident du 31 mai 2023, le conseil de Monsieur [D] [Z], demandeur à l’incident – a développé oralement ses conclusions, estimant qu’il n’était pas rapporté la preuve que le parquet général ne pouvait pas former un appel par WinCi CA et qu’il ne démontre pas avoir vainement essayé d’y procéder.
Madame l’avocat général a développé oralement les moyens figurant dans ses conclusions sus énoncées.
L’affaire a été mise en délibéré au 21 juin 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Vu les actes de la procédure, auxquels il convient de se référer,
Vu les articles 907 et 789 du code de procédure civile donnant compétence au conseiller de la mise en état pour connaître des irrecevabilités affectant la déclaration d’appel,
L’article 930-1 du code de procédure civile, introduit par le décret n°2009-1524 du 9 décembre 2009, dispose dans sa rédaction actuelle que :
‘À peine d’irrecevabilité relevée d’office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique.
Lorsqu’un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l’accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ou lui est adressé par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. En ce cas, la déclaration d’appel est remise ou adressée au greffe en autant d’exemplaires qu’il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l’un est immédiatement restitué.
Lorsque la déclaration d’appel est faite par voie postale, le greffe enregistre l’acte à la date figurant sur le cachet du bureau d’émission et adresse à l’appelant un récépissé par tout moyen.
Les avis, avertissements ou convocations sont remis aux avocats des parties par voie électronique, sauf impossibilité pour cause étrangère à l’expéditeur.
Un arrêté du garde des sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique’.
Aucun texte n’exonère le Ministère public de ces obligations, la circulaire JUSC1234674C du 3 janvier 2013 présentant le décret n°2012-1515 du 23 décembre 2012 rappelle au contraire que le Ministère public est tenu de remettre, dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d’appel, par la voie électronique ses actes lesquels, à compter du 1er janvier 2013, doivent être revêtus de sa signature électronique.
En outre, l’arrêté JUST2002909A du 20 mai 2020 relatif à la communication par voie électronique en matière civile devant les cours d’appel définit aux termes de son article 2 son champs d’application qui comprend en particulier les envois, remises et notifications ‘entre le Ministère public et la juridiction’ (fichier au format XML destiné à faire l’objet d’un traitement automatisé par une application informatique du destinataire et document sous la forme d’un fichier séparé au format PDF).
S’agissant des actes émanant du Ministère public, l’article 5 sus évoqué énonce que ‘les envois et remises au greffe de la cour d’appel des déclarations d’appel et des conclusions du ministère public sont effectués par la voie électronique au moyen d’un message électronique acheminé au sein du réseau privé virtuel justice depuis la boîte électronique dédiée du ministère public, pour les parquets près les tribunaux judiciaires du type « [Courriel 5] » et pour les parquets généraux « [Courriel 6] ».’
L’arrêté précise par la suite à son chapitre 2 intitulé ‘du système de communication électronique mis à disposition des juridictions et du Ministère public’ les modalités d’accès des agents du ministère de la justice au système de messagerie automatisé ComCi CA, qui est une composante de l’application informatique de la chaîne civile WinCi CA.
Il résulte de ces textes que, s’agissant des actes émanant des parquets près les tribunaux judiciaires, comme de ceux émanant des parquets généraux qui doivent être notifiés au greffe de la cour par la voie électronique dont la déclaration d’appel, le ministère de la justice a défini les moyens techniques auxquels le Ministère public doit recourir ;
Par conséquent même si l’accès à ComCi CA et à WinCi CA n’est pas déployé auprès du parquet près le tribunal judiciaire de Nancy ou que le paramétrage mis en place pour l’accès du parquet général de Nancy à WinCi CA, ne semble pas lui permettre de réaliser une déclaration d’appel dématérialisée, cela ne constitue pas un obstacle technique irrésistible, dans la mesure où le ministère de la justice a prévu les modalités adaptées permettant au Ministère public d’interjeter appel par la voie électronique ;
En effet il n’est pas démontré que leur absence de mise en oeuvre au sein des juridictions du ressort de la cour d’appel de Nancy, résulte d’une impossibilité matérielle ;
dès lors l’existence d’une cause étrangère au Ministère public l’empêchant de remettre sa déclaration d’appel par la voie informatique et lui permettant de recourir aux modalités subsidiaires prévues à l’alinéa 2 de l’article 930-1 du code de procédure civile, n’est pas caractérisé en l’espèce ;
Par conséquent il y a lieu de constater que l’appel interjeté par le Ministère public dans la présente procédure, devait être effectué par la voie électronique telle que déterminé par l’arrêté sus-visé.
En l’espèce, il est constant que le Procureur de la République de Nancy a adressé par courrier postal simple ou par la navette entre le tribunal et la cour d’appel, une déclaration d’appel, en date du 2 décembre 2022, formalisée sur un support papier et adressée à ‘ Monsieur le greffier de la cour d’appel’ selon le courrier de transmission, par laquelle il déclarait interjeter appel devant la cour d’appel de Nancy d’un jugement rendu par le tribunal judiciaire de Nancy le 23 novembre 2022, dont il annexait une copie papier certifiée conforme et que ce document a été retranscrit par le greffe de la cour d’appel pour l’enregistrer dans l’application informatique WinCi CA.
En conséquence il y a lieu de constater l’irrecevabilité de la déclaration d’appel faite sur support papier par Monsieur le Procureur de la République de [Localité 4] le 2 décembre 2022, enregistrée par le greffe dans le logiciel WinCi CA le 5 décembre 2022.
L’ensemble des dépens de la procédure d’appel et de l’incident seront laissés à la charge de l’Etat.
Il sera également condamné à payer à Monsieur [D] [Z] une somme qu’il est équitable de fixer à 1500 euros en application de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle et de l’article 700 du code de procédure civile, contre engagement de son conseil de renoncer à la part contributive de l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle.
PAR CES MOTIFS,
Nous, Nathalie CUNIN-WEBER, Conseiller chargée de la mise en état, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire et susceptible d’être déférée par requête à la cour conformément aux dispositions de l’article 916 du code de procédure civile ;
Déclarons irrecevable l’appel interjeté par le ministère public contre le jugement rendu le 23 novembre 2022 par le tribunal judiciaire de Nancy selon déclaration faite sur support papier le 2 décembre 2022, enregistrée par le greffe de la cour d’appel dans le logiciel WinCi CA le 5 décembre 2022 ;
Condamnons l’Etat aux dépens de la procédure d’appel, y compris de l’incident ;
Condamnons l’Etat à payer à Monsieur [D] [Z] la somme de 1500 euros (MILLE CINQ CENTS EUROS) en application de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle et de l’article 700 du code de procédure civile, contre engagement de son conseil de renoncer à la part contributive de l’Etat au titre de l’aide juridictionnelle.
Et avons signé la présente ordonnance ainsi que le greffier.
Signé : C. PERRIN Signé : N. CUNIN-WEBER
Minute en cinq pages.