Signature électronique : 20 septembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/03301

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Signature électronique : 20 septembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/03301
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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-8

ARRÊT AU FOND

DU 20 SEPTEMBRE 2023

N° 2023/ 385

N° RG 22/03301

N° Portalis DBVB-V-B7G-BI7NS

S.A.S. ALLOPNEUS

C/

[K] [P]

[F] [H]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Jean-Christophe STRATIGEAS

Me Laurence

[U]

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de proximité d’AIX EN PROVENCE en date du 13 Décembre 2021 enregistrée au répertoire général sous le n° 11-21-0201.

APPELANTE

S.A.S. ALLOPNEUS

représentée par la société HIEVEA, son président, elle même représentée par [R] [E], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège sis [Adresse 2]

représentée par Me Jean-Christophe STRATIGEAS, membre de la SELARL CADJI & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, ayant pour avocat plaidant Me Cendrine CLAVIEZ, membre de la SELARL PINT AVOCATS, avocat au barreau de MARSEILLE, substituée et plaidant par Me Marie PONCIN, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMES

Madame [K] [P]

née le 22 Mai 1985 à [Localité 4], demeurant [Adresse 1]

Monsieur [F] [H]

né le 27 Août 1983 à [Localité 3] (06), demeurant [Adresse 1]

représentés et plaidant par Me Laurence DE SANTI, membre de la SCP DRUJON D’ASTROS & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Philippe COULANGE, Président

Madame Céline ROBIN-KARRER, Conseillère

Monsieur Jean-Paul PATRIARCHE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme Maria FREDON.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Septembre 2023.

ARRÊT

Contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Septembre 2023, signé par Monsieur Philippe COULANGE, Président et Madame Maria FREDON, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Selon facture en date du 18 octobre 2019, M. [H] et Mme [P] ont commandé des pneumatiques directement sur le site internet de la société ALLOPNEUS pour leur véhicule BMW.

La société proposait le montage et l’équilibrage des pneumatiques directement à leur

domicile par un partenaire.

L’intervention était réalisée le 28 octobre 2019, pour un montant de 150 € TTC.

Le 29 octobre 2019, M. [H] et Mme [P] ont constatés des impacts sur les jantes et une vibration anormale à l’intérieur du véhicule.

Après contact du service client de la société ALLOPNEUS, le 7 novembre 2019, un technicien se déplaçait à leur domicile et procédait à un nouvel équilibrage des roues.

Malgré l’intervention du second technicien, les tremblements étaient toujours présents à la conduite.

Une expertise du véhicule était organisée par la compagnie d’assurance de M.[H] le 14 janvier 2020.

Bien que régulièrement convoqués par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 19 décembre 2019, la société ALLOPNEUS et son assureur étaient ni présents, ni représentés.

Le 14 janvier 2020, M.[H] procédait au rééquilibrage des 4 roues directement auprès d’un garage BMW pour un montant de 80 €.

A défaut de règlement amiable du litige, M.[H] et Mme [P] saisissaient le 8 février 2021 le Pôle de proximité du Tribunal judiciaire d’AIX EN PROVENCE afin d’obtenir la condamnation de la société ALLOPNEUS à procéder au règlement des travaux de réparation et à les indemniser de leurs préjudices.

Par jugement en date du 13 décembre 2021, le Tribunal a :

CONDAMNE la SAS ALLO PNEUS à payer à [K] [P] et [F] [H] :

-3122,92€ au titre des frais de réparation du véhicule.

– 500€ au titre du préjudice de jouissance.

-900€ en application des dispositions de l`article 700 du code de procédure civile,

RAPPELLE que les condamnations qui précèdent sont exécutoires de plein droit à litre provisoire,

REJETTE toutes autres et plus amples demandes,

CONDAMNE la SAS ALLO PNEUS aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 3 mars 2022, la société ALLOPNEUS interjetait appel de ladite décision et sollicite de la Cour la réformation intégrale du jugement querellé.

Elle sollicite :

RECEVOIR l’appel de la société ALLOPNEUS ;

DECLARER l’action de M.[H] et Mme [P] irrecevable pour défaut d’intérêt à agir ;

Les DEBOUTER de leur appel incident ;

DIRE ET JUGER que la société ALLOPNEUS n’a commis aucune faute susceptible d’engager sa responsabilité contractuelle ;

DIRE ET JUGER qu’il ne saurait être fait application de la théorie du mandat apparent pour recherche la responsabilité de la société ALLOPNEUS, M. [H] et Mme [P] ne pouvant prétendre ignorer l’intervention de GOMMIST’ADOM en tant que prestataire de montage indépendant avec lequel ils ont contracté et qu’ils ont payé.

En conséquence,

INFIRMER le jugement du 13 décembre 2021 en ce qu’il a condamné la société ALLOPNEUS à payer M.[H] et Mme [P] la somme de 3122,92€ au titre des frais de réparation du véhicule ; somme par ailleurs erronée en raison de la double comptabilisation de la somme de 80 euros au titre de la prestation d’équilibrage ;

INFIRMER le jugement du 13 décembre 2021 en ce qu’il a condamné la société ALLOPNEUS à payer M. [H] et Mme [P] la somme de 500€ au titre du préjudice de jouissance ;

INFIRMER le jugement du 13 décembre 2021 en ce qu’il a condamné la société ALLOPNEUS à payer M. [H] et Mme [P] la somme de 900€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens ;

CONFIRMER le jugement du 13 décembre 2021 en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts au titre d’un prétendu préjudice moral formulée par M.[H] et Mme [P] ;

Et statuant à nouveau,

CONDAMNER M. [H] et Mme [P] à rembourser à la société ALLOPNEUS la somme de 4.522,92 euros ;

CONDAMNER M. [H] et Mme [P] à payer à la société ALLOPNEUS la somme de 3.000 (trois mille) euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile qui seront recouvrés dans les formes et conditions de l’article 699 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel, distraits au profit de Maître Jean-Christophe STRATIGEAS, Avocat au Barreau d’Aix-en-Provence.

A l’appui de son recours, elle fait valoir :

-qu’elle propose à ses clients la livraison de pneus à leur domicile, ou à toute adresse de leur choix ou encore de sélectionner un partenaire dans le périmètre géographique pour procéder au montage des pneus,

-que quelque soit l’option choisie elle ne fait que vendre les pneus et seuls les professionnels du montage réalisent la prestation de montage, qu’elle n’assure en aucun cas,

-que les intimés ont commandé des pneus et choisi une prestation de montage à domicile avec un garagiste partenaire, franchisé indépendant de son réseau de franchise,

-qu’il leur a été livré les pneus commandés et que la relation commerciale s’est terminée à la réception des pneus sans réserve,

-que la prestation de montage a été facturée par le garagiste partenaire directement aux intimés,

-qu’il résulte de l’expertise amiable réalisée par l’assureur des intimés que le dommage est consécutif à l’action de montage des pneus réalisée par le prestataire de montage et non aux pneus eux mêmes vendus par elle et conformes aux produits commandés,

-que son service client a renvoyé les intimés sur le prestataire monteur et son assurance,

-que le jugement a méconnu le statut de la franchise,

-que le franchisé est un commerçant indépendant, qui s’il partage un visuel et un savoir faire commun garde des factures établies en son nom propre et pour son compte,

-que l’action des intimés est mal dirigée et les intimés n’ont aucun intérêt à agir à son encontre,

-que le premier juge a retenu sa responsabilité sur le fondement du mandat apparent, or les intimés ont eu le choix du franchisé, si l’enseigne ALLOPNEUS est utilisée sur la facture concernant l’adresse Facebook, c’est dû à la franchise et cela ne suffit pas à établir le mandat apparent puisque l’adresse mail du franchisé y est indiquée ainsi que son numéro de téléphone et son numéro siret quand bien même il serait erroné, que la facture est sous la seule entête du franchisé, qu’il résulte des conditions générales de vente que le franchisé est indépendant,

-que la théorie du mandat apparent suppose de croire que le contrat de montage était conclu par elle,

-que les échanges de SMS ne comportant pas de signature électronique ont une force probante insuffisante et doivent être écartés des débats,

-qu’en tout état de cause, l’apparition de l’enseigne ALLOPNEUS lors de la signature de ces derniers ne témoigne pas d’un mandat apparent mais résulte du principe de la franchise, à savoir la possibilité d’apposer le nom de l’enseigne et/ou la marque du franchiseur pour l’exercice de l’activité,

-qu’en aucun cas le SAV n’a reconnu sa responsabilité et n’a fait que servir de plate-forme de mise en relation entre les clients et le prestataire qui est seul signataire des messages,

-qu’en sa qualité d’entrepreneur individuel M.[H] ne peut prétendre être dans l’incapacité d’appréhender les mentions présentes sur la facture ou le statut de franchisé,

-que le préjudice matériel est erroné qu’il n’y a aucun préjudice ni de jouissance ni moral.

M.[H] et Mme [P] concluent :

DEBOUTER la société ALLOPNEUS de son appel non fondé

CONFIRMER la décision entreprise sauf en ce qu’elle a limité les indemnisations des consorts [H]-[P]

ACCUEILLIR l’appel incident des consorts [H]-[P]

En conséquence,

JUGER que la société ALLOPNEUS est responsable des préjudices subis par M.[H] et Mme [P].

CONDAMNER la société ALLOPNEUS à verser à M.[H] et à Mme [P] la somme de 3.122,92 € au titre des frais de réparation du véhicule

CONDAMNER le société ALLOPNEUS à verser à M. [H] et à Mme [P] la somme de 4.500 € en réparation de leur préjudice de jouissance,

CONDAMNER la société ALLOPNEUS à verser à M. [H] et à Mme [P] la somme de 1.500 € en réparation de leur préjudice moral,

CONDAMNER la société ALLOPNEUS à verser à M. [H] et à Mme [P] la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Ils soutiennent :

-que quand ils ont choisi la livraison des pneus avec montage à leur domicile ils n’ont pas eu le choix du monteur,

-que le technicien s’est présenté comme intervenant pour la société ALLOPNEUS,

-la facture du prestataire mentionne comme adresse de contact FACEBOOK : ALLOPNEUS ALPES MARITIMES [Localité 4],

-le prestataire n’a aucune existence juridique puisque le numéro de SIRET inscrit sur sa facture n’existe pas, et que même à supposer qu’il y a une erreur le prestataire aurait selon l’avis répertoire SIRENE cessé son activité depuis le 31 décembre 2016,

-qu’ils ne sauraient mettre en cause une société qui n’existe plus,

-qu’ALLOPNEUS entretient manifestement la confusion,

-que suite à leur réclamation ALLOPNEUS a signé pour le prestataire et leur a transmis les coordonnées de son assureur,

-qu’il résulte d’échanges de SMS que le prestataire signe pour la société ALLOPNEUS,

-qu’ils ont légitimement cru que le prestataire était un mandataire de cette société,

-qu’ils ont subi un préjudice matériel, de jouissance et moral.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 juin 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la responsabilité d’ALLOPNEUS

Il est de jurisprudence constante que le mandant peut être engagé sur le fondement d’un mandat apparent, même en l’absence d’une faute susceptible de lui être reprochée, si la croyance du tiers à l’étendue des pouvoirs du mandataire est légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs.

En l’espèce, s’il est établi que la société ALLOPNEUS est franchiseur et la société GOMMIST’ADOM est franchisé, et que la première n’est en principe pas responsable des fautes de la seconde, il n’en reste pas moins :

– que le site internet de la société ALLOPNEUS n’a pas laissé le choix aux intimés du prestataire de montage,

-que la facture de ce dernier, si elle mentionne une adresse mail, mentionne également l’adresse de contact facebook de la société ALLOPNEUS,

-que le numéro SIRET mentionné sur la facture est erroné,

-qu’il ressort de l’avis de répertoire SIRENE que l’établissement qui a procédé au montage des pneus le 28 octobre 2019 à savoir GOMMIST’ADOM a cessé son activité le 31 décembre 2016.

De plus, le contrat de franchise qui établit les modalités de responsabilité entre franchiseur et franchisé n’est pas versé aux débats.

En outre, contacté par les clients suite aux désordres constatés à la suite de la commande, la société ALLOPNEUS leur a envoyé les coordonnées de son assureur pour une expertise, à laquelle elle ne s’est finalement pas rendue, bien que dûment convoquée.

Enfin, dans les échange de SMS entre les clients et le prestataire litigieux ce dernier signe pour la société ALLOPNEUS.

Ainsi, c’est à juste titre que le premier juge a retenu que M.[H] et Mme [P] ont pu légitimement penser, quand bien même ils ont réglé la prestation directement au prestataire, que GOMMIST’ADOM bénéficiait d’un mandat de la société ALLOPNEUS pour procéder au montage et à l’équilibrage des pneumatiques que celle-ci commercialise et en conséquence l’existence d’un mandat apparent permettant de retenir la responsabilité d’ALLOPNEUS et établissant, ainsi, leur intérêt à agir et la recevabilité de leur action, étant précisé que GOMMIST’ADOM n’est plus in bonis.

Sur le préjudice subi

Il résulte de l’article 1231-1 du code civil que le garagiste est débiteur d’une obligation de résultat. Cette obligation de résultat qui pèse sur le garagiste emporte à la fois présomption de faute et présomption de causalité entre la faute et le dommage.

En l’espèce, il résulte du rapport d’expertise amiable contradictoire du 31 janvier 2020 que ‘les dommages relevés sur le véhicule de M.[H] sont consécutifs au remplacement des pneumatiques effectué par la société ALLOPNEUS.’

L’expert a constaté que l’équilibrage des roues n’était pas conforme, les masses utilisées n’étaient pas appropriées, que trois jantes ont été endommagées lors du remplacement des pneumatiques par choc contre l’outil de centrage utilisé lors de l’équilibrage des roues.

L’expert évalue les frais de remise en état à la somme de 3 042,92€TTC, qui correspond au préjudice matériel des intimés, cette somme comprenant déjà le coût d’équilibrage des roues.

Retenant que contrairement à ce que soutiennent M. [H] et Mme [P], indépendamment des jantes qui avaient été endommagées, seul un rééquilibrage des pneumatiques pour un coût modique était nécessaire pour remédier à la mauvaise qualité de la prestation réalisée par GOMMIST’ADOM et utiliser à nouveau le véhicule sans danger, c’est à juste titre que le premier juge a limité leur préjudice de jouissance à la somme de 500 €, d’autant que M. [H] et Mme [P] ne justifient nullement avoir dû louer un véhicule du 18 octobre 2019 au 14 janvier 2020.

Enfin, le jugement est également confirmé en ce qu’il a débouté ces derniers de leur demande pour préjudice moral non établi.

Sur les autres demandes

La société ALLOPNEUS est condamnée à 1500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel outre aux entiers dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,

DECLARE recevable l’action de M.[H] et Mme [P],

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 13 décembre 2021 par le Tribunal judiciaire d’Aix en Provence pôle de proximité,

SAUF en ce qu’il a condamné la SAS ALLOPNEUS à payer à Mme [P] et M.[H] la somme de 3122,92€

Statuant à nouveau :

CONDAMNE la SAS ALLOPNEUS à payer à Mme [P] et M.[H] la somme de 3042,92€

Y ajoutant,

CONDAMNE la SAS ALLOPNEUS à régler à Mme [P] et M.[H] la somme de 1500€ sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure Civile,

CONDAMNE la SAS ALLOPNEUS aux entiers dépens de l’appel.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

 


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