MARS/SH
Numéro 23/01541
COUR D’APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 09/05/2023
Dossier : N° RG 21/02064 – N° Portalis DBVV-V-B7F-H446
Nature affaire :
Demande en réparation des dommages causés par un fonctionnaire ou employé, formée contre l’Etat ou une collectivité territoriale
Affaire :
ETAT PRIS EN LA PERSONNE DU RECTEUR DE L’ACADÉMIE DE BORDEAUX
C/
[L] [K]
Association sportive du lycée [11]
Mutuelle [12]
CPAM BAYONNE
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 09 Mai 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l’audience publique tenue le 13 Mars 2023, devant :
Madame ROSA-SCHALL, magistrate chargée du rapport,
assistée de Madame HAUGUEL, greffière présente à l’appel des causes,
Madame [B], en application des articles 805 et 907 du code de procédure civile et à défaut d’opposition a tenu l’audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame FAURE, Présidente
Madame ROSA-SCHALL, Conseillère
Madame REHM, magistrate honoraire,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l’affaire opposant :
APPELANT :
ETAT représenté par le Recteur de l’Académie de BORDEAUX
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté et assisté de Maître VERMOTE de la SCP UHALDEBORDE-SALANNE GORGUET VERMOTE BERTIZBEREA, avocat au barreau de BAYONNE
INTIMÉES :
Mademoiselle [L] [K]
née le [Date naissance 1] 1996
de nationalité Française
[Adresse 10]
[Localité 6]
Représentée et assistée de Maître CLAUDIO de la SCP ABC AVOCAT, avocat au barreau de BAYONNE
ASSOCIATION SPORTIVE DU LYCÉE [11] prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 7]
[Localité 14]
MUTUELLE [12]
[Adresse 2]
[Localité 9]
Représentées et assistées de Maître TORTIGUE de la SELARL TORTIGUE PETIT SORNIQUE RIBETON, avocat au barreau de BAYONNE
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE BAYONNE
[Adresse 8]
[Localité 5]
Assignée
sur appel de la décision
en date du 29 MARS 2021
rendue par le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BAYONNE
RG numéro : 18/01051
Le 20 février 2013, Mademoiselle [L] [K], âgée de 16 ans, a été victime d’un accident au cours d’un match de rugby alors qu’elle participait à un championnat inter départemental de rugby organisé sous l’égide de l’UNSS par l’association sportive du lycée [13] d'[Localité 14] (64), assurée auprès de la mutuelle [12] assurances.
Elle a reçu un violent coup de tête au visage lui causant une altération des dents n° 11 et 21 (incisives centrales supérieures).
Par ordonnance du 15 septembre 2015, le président du tribunal de grande instance de Bayonne, saisi par Madame [L] [K], a désigné le Docteur [J], chirurgien dentaire en qualité d’expert médical pour déterminer ses préjudices.
Le rapport de l’expert judiciaire et de son sapiteur, le Docteur [Y] a été déposé au mois de mai 2016.
Soutenant que les organisateurs avaient manqué à leurs obligations de sécurité, de prudence et de diligence, Madame [L] [K] a, par actes d’huissier des 28 mai et 04 juin 2018, fait assigner l’association sportive du lycée [13], la mutuelle [12] assurances et l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, en présence de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de Bayonne, devant le tribunal de grande instance de Bayonne afin de les voir déclarer responsables de l’accident et les voir condamner à indemniser le préjudice qu’elle a subi.
Par jugement du 29 mars 2021, le tribunal judiciaire de Bayonne a :
– Dit que l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux et l’association sportive du lycée [13] ont engagé leur responsabilité envers Madame [L] [K] et sont tenus de réparer une perte de chance de 90 % au titre du dommage corporel résultant de l’accident sportif scolaire subi par elle le 20 février 2013
– fixé le préjudice patrimonial de Madame [L] [K] à la somme de 134,31€
– fixé le préjudice extra-patrimonial de Madame [L] [K] à la somme de 4 541,81 €
– condamné in solidum l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux et l’association sportive du lycée [13] in solidum avec la mutuelle [12] assurances, à payer à Madame [L] [K] en réparation de son préjudice corporel la somme totale de 4 541,81 € euros
– condamné in solidum l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, et l’association sportive du lycée [13] in solidum avec la mutuelle [12] assurances, à payer à la caisse primaire d’assurance maladie de Bayonne la somme de 134,31 € euros.
– condamné in solidum l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, et l’association sportive du lycée [13] in solidum avec la mutuelle [12] assurances à payer à la caisse primaire d’assurance maladie de Bayonne la somme de 106,00 euros au titre de l’indemnité forfaitaire.
– condamné in solidum l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, et l’association sportive du lycée [13] in solidum avec la mutuelle [12] assurances aux dépens en ce compris les frais de l’expertise judiciaire ordonnée en référé
– condamné in solidum l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, et l’association sportive du lycée [13] in solidum avec la mutuelle [12] assurances à payer à Madame [L] [K] la somme de 3 000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
– condamné in solidum l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, et l’association sportive du lycée [13] in solidum avec la mutuelle [12] assurances, à payer à la Caisse primaire d’assurance maladie de Bayonne la somme de 500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
– ordonné l’exécution provisoire de la décision.
L’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux a interjeté appel de ce jugement le 18 juin 2021.
Par conclusions du 13 septembre 2021, l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux demande au visa des articles L.541-6 du code de l’éducation et L.412-8 du code de la Sécurité sociale, de l’article 122 du Code de procédure civile et en se référant à l’avis de la Cour de cassation, 2ème chambre du 3 juin 2021, n° 21-70-006. avis n° 15008P de réformer le jugement en toutes ses dispositions et de débouter Mme [K] de toutes ses demandes, fins et conclusions.
Il sollicite la condamnation de Madame [K] à lui payer la somme de 3 000€ au titre des frais irrépétibles d’instance et d’appel et aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Par conclusions du 12 décembre 2021, l’association sportive du lycée [13] et la mutuelle [12] formant appel incident demandent au visa des dispositions de l’article L911-4 du Code de l’éducation, des articles L 552-1, R 552-1 et R 552-2 du Code de l’éducation, d’infirmer le jugement du 29 mars 2021 en ce qu’il a retenu la responsabilité de l’association sportive du lycée [13] et partant, la garantie de la mutuelle [12], d’ordonner leur mise hors de cause et de condamner Madame [K] au remboursement des sommes perçues.
En tout état de cause, elles demandent :
– de débouter l’Etat, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux de son appel tendant à sa mise hors de cause
– de débouter Mme [K] de son appel tendant à majoration de l’indemnisation de son préjudice
Ce faisant, de réduire la perte de chance endurée par Mme [K] à une moindre proportion
– de juger n’y avoir lieu à indemnisation d’un quelconque préjudice d’agrément
– de condamner l’Etat, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, et toute partie succombant, à leur verser la somme de 3 000,00 au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, et aux entiers dépens de première instance et d’appel.
– de rejeter toutes prétentions contraires.
Par conclusions n°2 du 24 janvier 2022, Madame [L] [K] demande, au visa de l’article L 911-4 du code de l’éducation nationale, de l’article 1384 ancien du code civil et de l’article 1242 du nouveau code civil en leurs alinéas 6 ,des articles 1134 et 1147 anciens du Code Civil et des articles 1104 et 1231-1 nouveaux du code civil de confirmer le jugement du 29 mars 2021 en ce qu’il a :
– jugé Mademoiselle [L] [K] recevable en son action,
– dit que l’Etat, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux et l’association sportive du lycée [13] d'[Localité 14] ont engagé leur responsabilité envers Mademoiselle [L] [K],
Elle demande de l’infirmer en ce qu’il a limité son indemnisation à 90% de son préjudice.
En conséquence, elle demande :
– de juger l’Etat, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux et l’association sportive du Lycée [13] d'[Localité 14] responsables de l’entier préjudice subi par Mademoiselle [L] [K]
– de condamner in solidum l’Etat, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, et l’association Sportive du Lycée [13] d'[Localité 14] à lui payer les sommes suivantes :
Préjudices extra patrimoniaux
‘ Déficit fonctionnel temporaire 46,46€
‘ Préjudice esthétique temporaire 1 500,00€
‘ Souffrances endurées 3 000,00€
‘ Préjudice d’agrément 1 000,00€
Total : 5 546,46€
outre intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l’assignation introductive d’instance,
– de dire que la mutuelle [12], association responsabilité civile de l’association sportive [13], lui devra sa garantie,
– de statuer ce que de droit quant au recours de la CPAM,
– de condamner in solidum l’Etat et l’association sportive du lycée [11] d'[Localité 14] au paiement d’une indemnité de 6 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel,
– de condamner in solidum les mêmes aux entiers dépens de la première instance et de l’appel, en ce compris les frais d’expertise judiciaire.
Par ordonnance du 16 février 2022, les conclusions déposées le 12 décembre 2021 dans l’intérêt de l’association sportive du lycée [13] et de la mutuelle [12] ont été déclarées irrecevables, seulement à l’égard de la CPAM de Bayonne, leurs conclusions demeurant recevables à l’égard des autres parties.
La CPAM de Bayonne, régulièrement assignée, n’a pas constitué avocat.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 février 2023.
SUR CE :
Sur la responsabilité de l’État :
Au soutien de son recours, L’État représenté par le recteur de l’académie de Bordeaux soutient que dès lors que Mme [L] [K] était scolarisée dans un établissement professionnel, en 1ère BAC professionnel Accompagnement, Soins et Services à la Personne, l’accident relève du régime dérogatoire prévu à l’article L 541-6 du Code de l’éducation qui renvoie à l’article L.412-8 du code de la Sécurité sociale et donc du régime des accidents du travail en sorte qu’aucune action ne peut être engagée à l’encontre de l’État.
Il ajoute que la CPAM de Bayonne a reconnu le le 26 février 2013, le caractère professionnel de cet accident et que le litige relèverait donc du tribunal des affaires de sécurité sociale.
À titre subsidiaire, il fait valoir qu’aucune faute n’est imputable au professeur d’éducation physique et sportive dès lors que le protège-dents n’est pas un équipement obligatoire et concernant la perte de chance, que rien ne prouve que son port aurait évité la blessure.
L’association sportive du lycée [13] et la mutuelle [12] demandent la confirmation du jugement qui a retenu la responsabilité de l’État faisant valoir que l’accident est survenu à l’occasion d’un tournoi UNSS laquelle relève de l’éducation nationale.
Madame [L] [K] conteste que l’accident ait été pris en compte par la CPAM au titre de la législation relative aux accidents du travail et rappelle qu’il est intervenu dans le cadre d’une compétition sportive organisée par l’UNSS à l’extérieur de l’établissement.
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En liminaire, la cour observe qu’il n’est pas contesté que le lycée [13] d'[Localité 14], dans lequel était scolarisée Madame [L] [K] à l’époque de l’accident était un établissement sous contrat auquel sont applicables les dispositions de l’article L. 911-4 du code de l’éducation.
Aux termes de l’article L 911-4 du Code de l’Education, « Dans tous les cas où la responsabilité des membres de l’enseignement public se trouve engagée à la suite ou à l’occasion d’un fait dommageable commis, soit par les élèves ou les étudiants qui leur sont confiés à raison de leurs fonctions, soit au détriment de ces élèves ou de ces étudiants dans les mêmes conditions, la responsabilité de l’Etat est substituée à celle desdits membres de l’enseignement qui ne peuvent jamais être mis en cause devant les tribunaux civils par la victime ou ses représentants.
Il en est ainsi toutes les fois que, pendant la scolarité ou en dehors de la scolarité, dans un but d’enseignement ou d’éducation physique, non interdit par les règlements, les élèves et les étudiants confiés ainsi aux membres de l’enseignement public se trouvent sous la surveillance de ces derniers.
L’action récursoire peut être exercée par l’Etat soit contre le membre de l’enseignement public, soit contre les tiers, conformément au droit commun ».
L’article L 412-8 du code de la sécurité sociale évoqué par l’État concerne notamment, 2°a) » les étudiants ou les élèves des établissements d’enseignement technique pour les accidents survenus au cours de cet enseignement ainsi que par le fait ou à l’occasion des stages auxquels il donne lieu ; (‘)
b) les élèves des établissements d’enseignement secondaire d’enseignement spécialisé et les étudiants autres que ceux qui sont mentionnés au a. ci-dessus pour les accidents survenus au cours d’enseignement dispensé en atelier ou en laboratoire ainsi que par le fait ou à l’occasion des stages effectués dans le cadre de leur scolarité ou de leurs études ».
Le document produit par l’État lui-même, intitulé fiche numéro 43 « responsabilité à l’égard des élèves » , précise page 306 que l’article L412-8 2° alinéa a et b du code de la sécurité sociale que ce régime couvre les accidents affectant les élèves de l’enseignement technique dans le cadre de leurs activités scolaires obligatoires.
En l’espèce, l’accident est intervenu à l’occasion d’une activité éducative organisée par l’association sportive affiliée à l’UNSS, à savoir la participation des élèves à un championnat interdépartemental de rugby.
Un tel événement ne concerne donc pas une activité scolaire obligatoire et contrairement à ce que soutient l’État, il résulte de la notification définitive des débours de la CPAM en date du 13 août 2018, que les frais médicaux de 149,23 € ont été pris en charge au risque maladie et non accident du travail.
En conséquence, c’est par de justes motifs que le premier juge a retenu que les dispositions de l’article L911-4 étaient applicables aux dommages survenus à Madame [L] [K] au cours de la compétition sportive organisée par l’association sportive d’établissement.
Pour rechercher la responsabilité de l’État, Madame [K] doit démontrer l’existence d’une faute commise par le professeur d’éducation physique et sportive, Monsieur [R], dont il n’est pas contesté qu’il assurait la surveillance des élèves du lycée [13] d'[Localité 14] et auquel elle reproche de ne pas avoir équipé les élèves d’un protège-dents.
Le premier juge a exactement rappelé que l’obligation de surveillance qui incombe au personnel d’enseignement implique un devoir de vigilance et également de prévention et d’information.
Il a ensuite, par des motifs exacts et pertinents que la cour adopte, retenu que si le protège-dents n’est pas obligatoire, il est cependant fortement recommandé par la fédération française du rugby dont les dispositions sont applicables aux compétitions scolaires et/ou de loisirs organisées par les associations sportives sous la surveillance d’un personnel de corps enseignant comme en l’espèce. Il s’ensuit qu’il incombait à Monsieur [R] d’informer ses élèves ainsi que leurs représentants légaux de l’existence de cette recommandation relative au protège-dents et surtout d’en préconiser fortement le port, la cour rappelant que l’enseignant est tenu d’une obligation de surveillance continue à l’égard de ses élèves.
La preuve que cette information et cette recommandation aient été faites aux élèves n’a pas été rapportée. C’est donc par de justes motifs, que le premier juge a retenu que cette faute est constitutive d’un manquement au devoir d’information et de prévention et qu’elle a généré une perte de chance pour Madame [K] d’éviter les dommages subis lors du choc survenu à l’occasion du match de rugby. Toutefois, contrairement à ce que soutient Madame [K] qui demande l’entière indemnisation de son préjudice, il n’est pas certain que les conséquences de l’accident auraient été totalement évitées par le port du protège-dents si l’information avait été donnée et si son port avait été préconisé par l’enseignant.
L’association sportive du lycée [13] et la mutuelle [12] demandent quant à elles de réduire le taux de perte de chance à une moindre proportion.
Le certificat médical initial du 21 février 2013 du docteur [E] fait état de l’altération des dents n° 11 et 21 (incisives centrales supérieures) dont les angles mésiaux ont été fracturés et à la reconstitution desquelles il a été procédé avec un composite.
Du rapport sur les protège-dents pour activités sportives versé aux débats par Madame [K], il résulte que leur rôle est notamment de réduire les blessures des dents antérieures maxillaires d’à peu près 90 % par amortissement de la force d’impact.
Compte tenu de ces éléments et du préjudice médicalement décrit, c’est par une exacte appréciation des faits de l’espèce que le premier juge a retenu une perte de chance de 90 % à l’aune de laquelle devra être déterminé le préjudice.
Sur la responsabilité de l’association sportive du lycée [13] et de son assureur
L’association sportive du lycée [13] et la mutuelle [12] contestent l’existence d’une faute et font valoir que seul l’État doit répondre des conséquences de l’accident par application de l’article L911-4 du code de l’éducation nationale.
L’association sportive du lycée [13], affiliée à l’UNSS, qui relève du régime de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association est une personne morale de droit privé. Elle est tenue envers ses membres et adhérents d’une obligation contractuelle de sécurité, de prudence et de diligence.
Il n’est pas contesté qu’elle a organisé cette rencontre de rugby, sport de contact exposant les joueurs à des chocs et qui concernait un public d’adolescents.
Son obligation de sécurité, de prudence et de diligence, obligation de sécurité, de moyens certes, mais renforcée, lui imposait dans ces circonstances de mettre à la disposition des équipements adaptés afin d’assurer la sécurité des jeunes joueurs ou à tout le moins et à minima, d’informer les lycéens préalablement à leur engagement sur le terrain, sur les risques encourus, or, il n’est aucunement établi qu’elle ait mis à la disposition des lycéens des protège-dents prévenant les risques d’accident, ni qu’elle ait dispensé cette information sur les risques d’accident.
En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu’il a retenu la responsabilité de l’association sportive du lycée [13] et la garantie de la mutuelle [12], laquelle n’était pas contestée par l’assureur.
Sur l’indemnisation des préjudices
Il y a lieu de constater que l’État n’a pas conclu de ces chefs.
Les conclusions du Docteur [J], chirurgien-dentiste et de son sapiteur le Docteur [Y], psychiatre, ne sont pas contestées.
Il en résulte que les lésions décrites sur les dents 11 et 21 sont en relation directe et certaine avec l’accident sportif scolaire du 20 février 2013. Il n’existait pas d’état antérieur, les dents étaient saines avant l’accident.
La date de consolidation est fixée au 30 janvier 2015 concernant les lésions dentaires et au 20 février 2014 concernant l’état psychique en lien avec l’accident.
L’indemnisation des préjudices sera effectuée sur la base de la perte de chance de 90 % retenue par le premier juge et confirmée par la cour pour les motifs ci-dessus exposés.
Les dépenses de santés actuelles ont été prises en charge par la mutuelle [12] et la CPAM de Bayonne qui a fait mention de frais médicaux à hauteur de 149,23 € dans la notification de ses débours définitifs du 13 août 2018. Compte tenu du taux de perte de chance, la somme revenant à la CPAM est de 134,31 €.
Ni Madame [K], ni les autres parties ne contestent les calculs des préjudices suivants :
– le déficit fonctionnel temporaire partiel sur la base de 23 € par jour pendant 202 jours x 1 % = 46,46 €
– les souffrances endurées évaluées à 3 000 €.
Seule la perte de chance étant contestée, le jugement sera confirmé de ces chefs.
Sur les préjudices dont les évaluations sont contestées
Madame [K] demande de fixer son préjudice esthétique temporaire à la somme de 1 500 €.
L’expert l’a fixé à 0,5/7 en tenant compte de ce que ces incisives centrales sont visibles des tiers et qu’elles ont été réparées avec des résines composites légèrement visibles.
Au regard de ces éléments ce poste de préjudice a exactement été évalué à la somme de 1 000 €.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a alloué à Madame [K] une somme de 900 € après application du taux de perte de chance.
L’existence d’un préjudice d’agrément est contestée par l’association sportive du lycée [13] et son assureur qui concluent au débouté de cette demande. Madame [K] sollicite pour sa part une indemnisation à hauteur de 1 000 €.
L’expert a indiqué qu'[L] [K] a arrêté le handball fin 2013, alors que c’était son sport favori car malgré le port d’un protège-dents, elle a peur de recevoir un nouveau choc sur ses dents. Le sapiteur psychiatre, le docteur [Y] mentionne également une crainte de subir un autre traumatisme au niveau de ses dents qui explique qu’elle ait fait le choix d’arrêter le rugby mais également le handball qui était sa passion.
Il s’ensuit que l’accident du 20 février 2013 a bien eu pour conséquence de faire renoncer Madame [K] aux activités de rugby et de handball qu’elle pratiquait régulièrement auparavant.
Ce préjudice a été exactement évalué à 1 000 € par le premier juge. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a alloué à Madame [K] une somme de 900 € après application du taux de perte de chance de 90 %.
En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il a fixé le préjudice extra patrimonial de Madame [L] [K] à la somme de 4 541,81 € et a condamné in solidum l’État pris en la personne de recteur de l’académie de Bordeaux et l’association sportive du lycée [13], in solidum avec la mutuelle [12], à payer cette somme à Madame [K] en réparation de son préjudice corporel.
Sur les demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
Le jugement sera confirmé de ces chefs dans la limite de la saisine de la cour laquelle n’est saisie d’aucune contestation concernant les frais irrépétibles alloués à la CPAM de Bayonne.
L’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, l’association sportive du lycée [13] d'[Localité 14] et la mutuelle [12] succombant en leur recours seront condamnés in solidum aux dépens de l’appel et déboutés de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Compte tenu de la demande de Madame [L] [K], l’État pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux et l’association sportive du lycée [13] d'[Localité 14] seront condamnés in solidum à lui payer une somme de 3 000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par mise à disposition, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
Confirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour ;
Y ajoutant,
Condamne in solidum l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux et l’association sportive du lycée [13] d'[Localité 14] à payer à Madame [L] [K], la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel.
Déboute l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, l’association sportive du lycée [13] d'[Localité 14] et la mutuelle [12] de leurs demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne in solidum l’État, pris en la personne du recteur de l’académie de Bordeaux, l’association sportive du lycée [13] d'[Localité 14] et la mutuelle [12] aux dépens de l’appel.
Le présent arrêt a été signé par Mme FAURE, Présidente, et par Mme HAUGUEL, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par la magistrate signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,
Sylvie HAUGUEL Caroline FAURE