Services à la personne : 7 décembre 2022 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/02156

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Services à la personne : 7 décembre 2022 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/02156

07/12/2022

ARRÊT N°454

N° RG 21/02156 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OE4T

PHD/CO

Décision déférée du 15 Avril 2021 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE – 2020F02757

M.ARNAL

S.A. LCL LE CREDIT LYONNAIS

C/

[R] [B]

S.A.S. BDR ET ASSOCIES

infirmation

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

***

ARRÊT DU SEPT DECEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX

***

APPELANTE

S.A. LCL LE CREDIT LYONNAIS

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Olivier THEVENOT de la SELARL THEVENOT MAYS BOSSON, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [R] [B]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Laurent SOUCAZE-SUBERBIELLE de la SELARL LOYVE AVOCATS, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.S. BDR ET ASSOCIES SAS BDR ET ASSOCIES, prise en la personne de Maître [D] [C], en qualité de Mandataire Liquidateur de Monsieur [R] [B]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Sébastien BRUNET-ALAYRAC de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUS

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Octobre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant P. DELMOTTE, Conseiller ,chargé du rapport, I.MARTIN DE LA MOUTTE Conseiller. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

P. DELMOTTE, conseiller

I. MARTIN DE LA MOUTTE, conseiller

Greffier, lors des débats : A. CAVAN

MINISTERE PUBLIC:

Représenté lors des débats par M.JARDIN, substitut général,, qui a fait connaître son avis.

ARRET :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par V. SALMERON, présidente, et par C. OULIE, greffier de chambre.

Exposé du litige

M. [B] exerçait à titre individuel une activité de ‘nettoyage de tous types de locaux, lavage de vitres’.

Par jugement du 17 mars 2011, le tribunal de commerce de Toulouse a ouvert le redressement judiciaire de M. [B] ; un plan de redressement par voie de continuation a été arrêté par jugement du 18 octobre 2012.

Par jugement du 26 janvier 2017, le tribunal de commerce de Toulouse a prononcé la résolution du plan et la liquidation judiciaire de M. [B] et désigné M. [C], ultérieurement remplacé par la SAS [C] et associés puis par la SAS BDR et associés mandataires judiciaires, prise en la personne de [D] [C](le liquidateur), en qualité de liquidateur.

La société LCL Le Crédit Lyonnais (la banque) a déclaré à titre hypothécaire sa créance au passif de cette liquidation judiciaire, à concurrence de la somme de 244 043, 20€ représentant le solde d’un prêt immobilier.

Parallèlement, la Sarl Aedis Proximité(la société Aedis), ayant pour gérant M. [B] et pour activités l’aide et le service à la personne, l’entretien de la maison et les travaux ménagers, les petits travaux de jardinage, les prestations de petit bricolage, les activités qui concourent directement et exclusivement à coordonner et délivrer des services à la personne, a été immatriculée le 14 mars 2013 au registre du commerce et des sociétés.

Par jugement du 16 novembre 2017, le tribunal de commerce de Toulouse a ouvert le redressement judiciaire de la société Aedis puis a arrêté le plan de redressement de cette société par jugement du 2 novembre 2018, M. [C] étant désigné commissaire à l’exécution du plan.

Par jugement du 15 octobre 2020, le même tribunal a prononcé la résolution du plan de redressement de la société Aedis, prononcé la liquidation judiciaire de la société, fixé la date de cessation des paiements au 15 octobre 2020 et désigné la société [C] et associés, prise en la personne de M. [D] [C], en qualité de liquidateur.

Par acte d’huissier du 30 novembre 2020, la SAS [C] et associés, agissant en qualité de liquidateur de M. [B], a assigné la banque devant le tribunal de commerce de Toulouse à l’effet, sur le fondement des articles L.622-7 et L.641-3 du code de commerce,

– de voir constater que les paiements réalisés par M. [B] par l’intermédiaire de la société Aedis au profit de la banque, à compter du 6 janvier 2017, constituent des paiements relatifs à une créance antérieure

– de voir prononcer au principal la nullité des paiements effectués par la société Aedis au profit de la banque à compter du 26 janvier 2017.

Par acte d’huissier du 16 février 2021, le liquidateur appelé dans la cause M. [B].

Par jugement du 15 avril 2021, le tribunal, prononçant la jonction des deux instances, a

– débouté la banque de ses demandes,

– dit que les paiements réalisés par M. [B] par l’intermédiaire de la société Aedis au profit de la banque, à compter du 26 janvier 2017, constituaient des paiements relatifs à une créance antérieure,

– prononcé la nullité des paiements effectués par la société Aedis au profit de la banque à compter du 26 janvier 2017,

– ordonné à la banque de communiquer au liquidateur de M. [B], un décompte actualisé des sommes encaissées intervenues jusqu’à ce jour,

– condamné la banque au remboursement de la somme de 33 434€ outre les sommes encaissées à compter du 17 juin 2019 jusqu’à la décision à intervenir,

– condamné la banque à payer au liquidateur la somme de 1500€ en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [B] à payer à son liquidateur la somme de 500€ en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 10 mai 2021, la banque a relevé appel de cette décision.

Vu les conclusions RPVA du 22 juillet 2021 de la banque demandant à la cour :

– d’infirmer le jugement,

– A titre principal, de déclarer irrecevable pour défaut d’intérêt à agir, l’action de la SAS BDR et associés, prise en la personne de M. [D] [C], agissant en qualité de liquidateur de M. [B],

– A titre subsidiaire,

+ de débouter le liquidateur de sa demande en nullité des paiements réalisés par la société Aedis à compter du 26 janvier 2017,

+ de débouter le liquidateur de sa demande en remboursement de la somme de 33 434€ outre les sommes perçues à compter du 17 juin 2019,

+ de débouter le liquidateur de sa demande de production d’un décompte actualisé des sommes encaissées jusqu’à ce jour, sous astreinte de 1000€ par jour de retard,

– En tout état de cause,

+ de condamner la SAS BDR et associés, prise en la personne de M. [D] [C], pris en sa qualité de liquidateur de M. [B] à lui rembourser la somme de 46 934€ réglée au titre de l’exécution provisoire, avec intérêts au taux légal à compter du 14 juin 2021

+ de condamner le liquidateur à lui payer la somme de 2000€ en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Vu les conclusions RPVA du 20 octore 2021 de M. [B] demandant à la cour :

– d’infirmer le jugement,

– A titre principal,

de juger la liquidateur irrecevable à agir,

– A titre subsidiaire,

+ de juger que les paiements effectués par la société Aedis ne sont pas nuls,

+ de juger que la banque n’a procédé à aucun remboursement,

+ d’ordonner au liquidateur de restituer les sommes perçues au titre de l’exécution provisoire bénéficiant au jugement attaqué,

+ de condamner le liquidateur au paiement de la somme de 3000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Vu les conclusions RPVA du 10 janvier 2022 du liquidateur demandant à la cour :

– de débouter la banque de ses demandes,

– de constater que les paiements réalisés par M. [B] et par l’intermédiaire de la société Adeis au profit de la banque à compter du 26 janvier 2017 constituent des paiements relatifs à une créance antérieure,

– de confirmer le jugement,

– de condamner la banque à procéder au remboursement de la somme de 46 934€ correspondant aux montants encaissés pour la période du 17 juin 2019 au 19 mai 2021,

– de condamner la banque à lui payer la somme de 3000€ en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Suivant avis du 10 juin 2022, communiqué aux parties via le RPVA, le ministère public a estimé que le jugement attaqué devait être confirmé, mais seulement pour les paiements effectués par M. [B] par l’intermédiate de la société Aedis, à compter du 30 novembre 2017.

La clôture de l’instruction du dossier est intervenue le 3 octobre 2022.

Motifs

Aux termes de l’article L.622-7 I, du code de commerce, le jugement ouvrant la procédure emporte, de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture, à l’exception du paiement par compensation de créances connexes, la compensation ne constituant pas l’objet du litige.

La règle de l’interdiction des paiements des créances antérieures est applicable en matière de liquidation judiciaire en vertu de l’article L.641-3, alinéa 1, du code de commerce.

Le liquidateur de M. [B], qui agit dans l’intérêt collectif des créanciers, est recevable à agir, comme tout intéressé, pour voir annuler le paiement passé en violation des dispositions précitées.

Cependant, seuls sont interdits, en vertu des dispositions précitées, les paiements effectués par le débiteur.

Le liquidateur de M. [B] soutient que les virements effectués et dissimulés par M. [B] à l’aide ou par l’intermédiaire de la société Aedis constituent manifestement des paiements préférentiels intervenus au détriment de la liquidation judiciaire.

Or, indépendamment de la cause des paiements qui est indifférente, il est constant que les paiements litigieux ont été effectués par la société Aedis laquelle constitue une personne juridique distincte de M. [B] et dont le patrimoine, sur lequel ont été opérés les paiements , est également distinct

du patrimoine propre de M.[B].

Jamais, le liquidateur de M. [B] n’a invoqué une quelconque confusion des patrimoines entre M. [B] et la société Aedis, non plus que la fictivité de cette société.

Pas davantage, le liquidateur de M. [B] n’établit que ces paiements résultent d’un concert frauduleux ou d’un stratagème organisé entre la banque, bénéficiaire des paiements, la société Aedis et M. [B].

Il convient de surcroît de relever que la SAS BDR [C], qui agit en qualité de liquidateur de M. [B], demande d’annuler des paiements effectués par une société tierce, en l’occurrence la société Aedis, qui n’a jamais été appelée à l’instance et qui est pourtant directement concernée par l’annulation de ces paiements ; le jugement critiqué, en violation manifeste du principe de la contradiction, a annulé les paiements effectués par la société Aedis sans avoir exigé que cette société, fût-elle, elle-même en liquidation judiciaire, soit appelée à l’instance.

Dès lors, les paiements litigieux n’ayant pas été effectués par M. [B], débiteur en liquidation judiciaire, le jugement attaqué doit être infirmé en toutes ses dispositions et le liquidateur doit être débouté de son action.

En revanche, la banque ne peut solliciter la condamnation du liquidateur à restituer les sommes qu’elle a versées en application du jugement désormais infirmé, qui était assorti de l’exécution provisoire de plein droit.

En effet, la créance de restitution de la banque, résultant de l’infirmation du jugement portant condamnation au profit du liquidateur du débiteur, n’est pas née pour les besoins du déroulement de la procédure collective et ne constitue pas davantage la contrepartie d’une prestation fournie au débiteur au sens de l’article L.622-17, alinéa 1, du code de commerce.

Il en résulte que cette créance postérieure, non éligible au traitement préférentiel, doit être déclarée par la banque à la liquidation judiciaire de M. [B] dans les conditions prévues par les articles L.622-24, alinéa 7, et L.641-3, alinéa 4, du code de commerce.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions ;

Déclare recevable l’action du liquidateur de M. [B] fondée sur les articles L.622-7 et L.642-3 du code de commerce ;

Au fond, déboute la la SAS BDR et associés, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de M. [B], de son action fondée sur les articles L.622-7 et L.642-3 du code de commerce ;

Dit n’y avoir lieu à prononcer condamnation au paiement du liquidateur au titre des sommes versées par la société Le Crédit Lyonnais par suite de l’exécution provisoire dont était assorti le jugement attaqué ;

Constate que la créance de restitution de la société Le Crédit Lyonnais, née de l’infirmation du jugement attaqué, doit être déclarée à la liquidation judiciaire de M. [B] dans les conditions des articles L622-24, alinéa 7 et L. 641-3, alinéa 4, su code de commerce ;

Condamne la SAS BDR et associés, ès qualités, au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société Le Crédit Lyonnais, de M. [B] et de la SAS BDR et associés, ès qualités.

Le greffier La présidente.

 


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