C3
N° RG 21/03151
N° Portalis DBVM-V-B7F-K66D
N° Minute :
Notifié le :
Copie exécutoire délivrée le :
FONDS D’INDEMNISATION DES
VICTIMES DE L’AMIANTE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
CHAMBRE SOCIALE – PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU VENDREDI 07 AVRIL 2023
Appel d’une décision (N° RG 18/00593)
rendue par le pôle social du tribunal judiciaire d’ANNECY
en date du 10 juin 2021
suivant déclaration d’appel du 26 juillet 2021
APPELANTE et intimée incidente :
La SAS [13] prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 3]
[Localité 5]
représentée par Me Sylvie GALLAGE-ALWIS de la SELEURL SELARLU SYLVIE GALLAGE, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Nikita YAHOUEDEOU, avocat au barreau de PARIS
INTIMES et appelants incidents :
Le FONDS D’INDEMNISATION DES VICTIMES DE L’AMIANTE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 2]
[Localité 7]
représenté par Me Muriel MIE de la SELARL CENTAURE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES substituée par Me Laura D’OVIDIO, avocat au barreau de LYON
La CPAM de Haute-Savoie, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité
[Adresse 1]
[Localité 6]
comparante en la personne de Mme [A] [M], régulièrement munie d’un pouvoir
COMPOSITION DE LA COUR :
LORS DES DEBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
M. Jean-Pierre DELAVENAY, président,
Mme Isabelle DEFARGE, conseillère,
M. Pascal VERGUCHT, conseiller,
Assistés lors des débats de Mme Chrystel ROHRER, greffier, et de Mme Fatma DEVECI, greffier stagiaire en pré-affectation
DÉBATS :
A l’audience publique du 02 février 2023,
M. Jean-Pierre DELAVENAY, président, chargé du rapport, Mme Isabelle DEFARGE, conseillère et M. Pascal VERGUCHT, conseiller ont entendu les représentants des parties en leurs conclusions et plaidoiries,
Et l’affaire a été mise en délibéré à la date de ce jour à laquelle l’arrêt a été rendu.
EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE
M. [YA] [GI], employé par la société [15], usine du Giffre, entre 1963 et 1994, date de fermeture de cette usine, en qualité d’ouvrier de fabrication polyvalent, s’est vu diagnostiquer un cancer broncho-pulmonaire primitif, en lien avec une exposition à l’amiante, suivant certificat médical initial du 29 février 2016 avec une date de première constatation au 7 septembre 2011.
Le 20 juillet 2016, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM) de la Haute-Savoie a reconnu le caractère professionnel de cette pathologie. Une rente a été attribuée à M. [GI] sur la base d’un taux d’Incapacité Permanente Partielle (IPP) de 80 % à compter du 1er mars 2016, date de consolidation.
Parallèlement, M. [GI] a saisi le Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante (FIVA) et a accepté, le 20 décembre 2016, l’offre d’indemnisation faite pour un total de 26 400 euros au titre de :
– Préjudice d’incapacité fonctionnelle : non indemnisé.
Taux d’incapacité permanente réévalué de 100 à 40 % selon le barème FIVA, ce qui correspond à une indemnisation inférieure à l’indemnisation versée par l’organisme social de telle sorte qu’ aucune somme n’a été versée à ce titre (article 53 IV al 1 de la loi).
– Autres préjudices extra-patrimoniaux :
Souffrances morales 12 600 euros
Souffrances physiques 6 400 euros
Préjudice d’agrément 6 400 euros
Préjudice esthétique 1 000 euros
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 6 juillet 2018, le FIVA, subrogé dans les droits de M. [GI], a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de la Haute-Savoie aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.
Par jugement du 10 juin 2021 (RG 18/00593), le pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy a :
– déclaré recevable l’action du FIVA,
– dit que la maladie professionnelle diagnostiquée chez M. [GI] le 29 février 2016 (tableau 30 bis) est la conséquence de la faute inexcusable de la SAS [13] venant aux droits de la société [15], son ancien employeur,
– ordonné la majoration de l’indemnisation servie à M. [GI],
– dit que la majoration de l’indemnisation servie à M. [GI] suivra l’évolution éventuelle du taux d’IPP reconnu à la victime,
– débouté le FIVA de sa demande visant à dire qu’en cas de décès de la victime résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant,
– fixé l’indemnisation complémentaire de M. [GI] comme suit :
– 5 000 euros au titre des souffrances physiques,
– 10 000 euros au titre des souffrances morales,
– 1 000 euros au titre du préjudice esthétique,
– rejeté la demande d’indemnisation au titre du préjudice d’agrément,
– condamné la CPAM de la Haute-Savoie à payer au FIVA la somme de 16 000 euros au titre des préjudices subis par M. [GI],
– débouté la SAS [13] de sa demande visant à inscrire au compte spécial les dépenses afférentes à la majoration de rente,
– débouté la SAS [13] de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SAS [13] à payer au FIVA la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la SAS [13] au paiement des dépens,
– ordonné l’exécution provisoire du jugement.
Le 26 juillet 2021, la SAS [13] a interjeté appel de cette décision notifiée le 28 juin.
Le FIVA a formé un appel incident en ce que le tribunal judiciaire l’a débouté de sa demande visant à dire qu’en cas de décès de la victime résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant.
Les débats ont eu lieu à l’audience du 2 février 2023.
La caisse primaire d’assurance maladie de Haute Savoie a formé appel incident à l’audience pour solliciter condamnation de l’employeur en cas de reconnaissance de la faute inexcusable à lui rembourser les sommes dont elle devra faire l’avance.
Les parties ont été avisées de la mise à disposition au greffe de la présente décision le 7 avril 2023.
EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
La SAS [13] au terme de ses conclusions d’appelant n° 3 notifiées par RPVA le 4 novembre 2022 reprises à l’audience demande à la cour de :
– infirmer le jugement du tribunal judiciaire d’Annecy du 10 juin 2021, sur les points soulevés dans sa déclaration d’appel du 26 juillet 2021,
Et, à titre principal,
– prononcer sa mise hors de cause, suivant autorité de la chose jugée du jugement définitif du Tribunal Judiciaire d’Annecy du 5 octobre 2020,
A titre subsidiaire,
– prononcer sa mise hors de cause n’ayant jamais été l’employeur de M. [GI] et n’ayant pas hérité du passif attaché au contrat de travail de M. [GI] ou au site du Giffre,
A titre plus subsidiaire,
– acter du fait que sa responsabilité ne peut être engagée pour la période de travail de M. [GI] antérieure au décret du 17 août 1977,
– juger que le FIVA ne démontre pas la faute inexcusable de la société [15], quelle que soit la période de travail de M. [GI],
– juger que le FIVA ne démontre pas de lien de causalité entre la faute inexcusable alléguée de la société [15] et la maladie de M. [GI],
– débouter en conséquence, le FIVA de toutes ses demandes à son encontre,
En tout état de cause,
– débouter la CPAM de tout recours récursoire éventuel à son encontre,
– statuer sur la demande qui a été omise dans le jugement rendu le 10 juin 2021 et par conséquent, compléter ce jugement en ajoutant à son dispositif qu’il :
– Prend acte de la renonciation de la CPAM de Haute-Savoie de ne pas engager son action récursoire à l’encontre de la société [13],
– Juge par conséquent la CPAM de Haute-Savoie ne pourra engager son action récursoire à l’encontre de la société [13],
– ordonner la mention du jugement à intervenir sur la minute et sur les expéditions du jugement complété,
– condamner le FIVA à lui verser une indemnité de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La SAS [13] demande sa mise hors de cause, soutenant sur sa qualité d’employeur que, par jugement devenu définitif du 5 octobre 2020, le tribunal judiciaire d’Annecy lui a déclaré inopposable la décision de prise en charge de la maladie de M. [GI] considérant qu’elle « n’a jamais été l’employeur de M. [GI] et donc que ce dernier, lors de l’exposition au risque considéré sur le site de Giffre, n’est jamais intervenu au profit de la société [13] ».
Elle indique en outre que :
– sa responsabilité au titre de l’exposition éventuelle à l’amiante de M. [GI] ne peut être recherchée alors que le site était exploité par [15] puis [15],
– elle n’a pas repris le passif lié au site du Giffre, en plus de ne pas avoir repris le passif lié au contrat de travail de M. [GI], tous deux restés au sein du groupe [8] ; elle affirme que les sociétés [15] et [12] ont contractuellement prévu les contrats de travail qui seraient transmis avec leur passif et que le contrat de travail de M. [GI] n’y figure pas ;
– l’usine du Giffre a fermé en 1994 et elle rappelle avoir été créée en 2006, soit 12 ans après la fermeture du site et 19 ans après le départ du salarié (en 1987).
À titre subsidiaire elle prétend en substance qu’aucune recherche de responsabilité de l’employeur ne peut être faite pour la période antérieure à 1977, date d’interdiction de l’amiante et que pour la période postérieure, il n’est pas rapporté la preuve par le FIVA que l’exposition des salariés de la société [15] à l’amiante aurait perduré.
Le FIVA selon ses conclusions récapitulatives n° 2 notifiées par RPVA le 23 décembre 2022 et reprises à l’audience demande à la cour de :
A titre principal,
– déclarer l’appel recevable, mais mal fondé,
– confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu’il l’a débouté de sa demande visant à dire qu’en cas de décès de la victime résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant,
Et, statuant à nouveau sur ce point :
– dire qu’en cas de décès de la victime imputable à sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant.
Subsidiairement, et avant dire droit sur l’ensemble des demandes si la cour devait considérer que l’une des conditions du tableau n’était pas réunie, il est demandé de :
– désigner un Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles (CRRMP), selon les règles en vigueur, avec pour mission en substance de dire, par un avis motivé, si la pathologie présentée par M. [GI], objet du certificat médical du 29/02/2016, figurant au tableau n°30 bis des maladies professionnelles, a été directement causée par son travail habituel au sein de la SAS [13], venant aux droits de la société [15],
– renvoyer l’examen des demandes à la première audience utile après réception de l’avis du CRRMP,
Y ajoutant,
– condamner la SAS [13] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la partie succombante aux dépens.
Sur la qualité d’employeur de la société actuellement dénommée [13], il fait valoir que sa demande à l’encontre de la société [13] est recevable dès lors que la société [15] au sein de laquelle a travaillé M. [GI], a changé de dénomination sociale pour devenir la société [13], les deux ayant conservé le même numéro d’immatriculation au RCS.
Sur les conditions de travail de M. [GI], il soutient que ce dernier a été exposé aux poussières d’amiante sur le site du Giffre, à l’occasion de la manipulation de gaines, de filtres, de manchettes et de joints constitués d’amiante et utilisés à des fins d’isolation thermique.
Il ajoute que de nombreux collègues de travail de M. [GI] confirment ces conditions de travail et notamment l’absence de mesures de protection respiratoires efficaces, ainsi que l’absence d’information des salariés sur les dangers de l’amiante.
La caisse primaire d’assurance maladie de Haute Savoie a relevé appel incident du jugement à l’audience et demandé que l’employeur soit condamné à lui rembourser les sommes dont elle a fait l’avance.
Elle demande que le dispositif du jugement déféré soit complété sur ce point.
Pour le surplus de l’exposé des moyens des parties au soutien de leurs prétentions il est renvoyé à leurs conclusions visées ci-dessus par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIVATION
– 1. Sur l’autorité de chose jugée du jugement RG 16/1452 du 5 octobre 2020 du tribunal judiciaire d’Annecy (pièce [13] 5).
Selon l’article 480 du code de procédure civile : ‘Le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l’autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu’il tranche.
Le principal s’entend de l’objet du litige tel qu’il est déterminé par l’article 4″.
L’autorité de la chose jugée ne s’attache donc qu’à ce qui fait l’objet du jugement et a été tranché au dispositif.
Les motifs au soutien nécessaire du dispositif n’ont pas autorité de chose jugée mais permettent seulement d’éclairer la portée du dispositif d’une décision.
Par le jugement précité du 5 octobre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy statuant sur le recours de la société [13] contre la décision de prise en charge de la caisse du 27 juillet 2016 de la maladie professionnelle de M. [GI] a :
– déclaré recevable en la forme le recours exercé par la société [13] ;
– déclaré la décision de prise en charge de la maladie déclarée le 23 mai 2016 par M. [GI] au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d’assurance maladie de Haute-Savoie inopposable à la société [13] ;
– débouté la société [13] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la caisse primaire d’assurance maladie de Haute-Savoie aux dépens ;
– rejeté toute autre demande plus ample ou contraire.
D’autre part l’article 1355 du code civil dans sa rédaction postérieure au 1er octobre 2016 dispose que :
‘L’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité’.
Enfin selon l’article 53-VI de la loi n° 2000-1257 du 23 décembre 2000, le Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante est subrogé, à due concurrence des sommes versées, dans les droits que possède le demandeur contre la personne responsable du dommage ainsi que contre les personnes ou organismes tenus à un titre quelconque d’en assurer la réparation totale ou partielle dans la limite du montant des prestations à la charge des dites personnes.
Il intervient devant les juridictions civiles, y compris celles du contentieux de la sécurité sociale, notamment dans les actions en faute inexcusable, et devant les juridictions de jugement en matière répressive, même pour la première fois en cause d’appel, en cas de constitution de partie civile du demandeur contre le ou les responsables des préjudices ; il intervient à titre principal et peut user de toutes les voies de recours ouvertes par la loi.
C’est dans ce cadre qu’après avoir fait une offre d’indemnisation acceptée par M. [GI], le FIVA subrogé dans ses droits a saisi par lettre recommandée du 6 juillet 2018 la juridiction du contentieux de la sécurité sociale en reconnaissance de la faute inexcusable de la société [13], procédure ayant abouti au jugement querellé du 10 juin 2021 ayant reconnu cette faute inexcusable de la Société [13], en tant qu’employeur de M. [GI], à l’origine de la pathologie cancer broncho pulmonaire décrite au certificat médical initial du 29 février 2016.
Le jugement déféré du 10 juin 2021 s’inscrit donc dans les relations entre le FIVA subrogé dans les droits du salarié victime et son employeur, en présence de la caisse à qui ce jugement doit seulement être déclaré commun et opposable, puisque devant faire l’avance des indemnités accordées au salarié selon le dernier alinéa de l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale : ‘La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l’employeur’.
Dès lors, le jugement intervenu le 5 octobre 2020 en ce qu’il a déclaré la reconnaissance de maladie professionnelle par la caisse primaire d’assurance maladie inopposable à la société [13], n’a autorité de chose jugée qu’entre les parties à cette instance, soit d’une part la caisse primaire d’assurance maladie de Haute Savoie, en qualité de défenderesse à la procédure en inopposabilité de la reconnaissance de maladie professionnelle et, d’autre part, la société [13], mais absolument pas le FIVA subrogé dans les droits de M. [GI] qui n’étaient, l’un comme l’autre, pas partie à cette instance.
Quant au risque éventuel de contrariété de motifs et d’incohérence des décisions de justice, il ne peut être opposé à la présente cour qui n’a été saisie que de l’appel d’un seul de ces jugements.
– 2. Sur la mise hors de cause de la SASU [13] immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Chambéry sous le n° 642 005 177.
La société [13] explique que l’usine où travaillait M. [GI] a été rachetée en 1967 par la société [16] qui a fusionné en 1971 avec la société [15] (ndr : PUK : [15]), devenue [15] en 1976 (ndr : PEM) et qui a fermé en 1994.
En 2004 les sociétés [15] et [15] ont été acquises par le groupe [8] qui a revendu en 2005 [15] au groupe [12], lequel a créé [13] l’année suivante en 2006.
La société [13] a versé aux débats l’annexe au contrat de cession [15] / [12] relatif aux sites cédés à [12] et l’annexe portant liste des contrats de travail en cours et cédés sur lesquelles l’usine du Giffre et le contrat de travail de M. [GI] ne figurent pas, et pour cause, puisque son contrat de travail s’est achevé en 1994, en même temps que la fermeture de cette usine.
Pour autant la cour relève que la société [13] n’a pas produit le contrat de cession lui même qui seul aurait permis de déterminer la qualification juridique exacte de l’opération, les droits et obligations du vendeur et de l’acquéreur en découlant par conséquence, les éventuelles garanties d’actif et de passif et recours éventuels entre cédant et cessionnaire, échappant au demeurant à la compétence de la juridiction du contentieux de la sécurité sociale.
Les dispositions de l’article L. 1224-1 du code du travail relatives à la cession des contrats de travail en cours lors d’une modification de la situation juridique de l’employeur n’ont donc pas vocation à s’appliquer à une opération intervenue plus de dix années après le terme de ce contrat de travail, ayant pris fin en 1994.
En tout état de cause, sont en revanche applicables les dispositions de droit commun du droit civil et commercial que la société [13] demande d’appliquer (cf ses conclusions page 12) quant à l’unicité de la personnalité morale d’une société.
Article 1842 du code civil :
‘Les sociétés autres que les sociétés en participation visées au chapitre III jouissent de la personnalité morale à compter de leur immatriculation’.
Article 1844-3 du code civil :
‘La transformation régulière d’une société en une société d’une autre forme n’entraîne pas la création d’une personnalité morale nouvelle. Il en est de même de la prorogation ou de toute autre modification statutaire’.
Article 1844-4 du code civil :
‘Une société, même en liquidation, peut être absorbée par une autre société ou participer à la constitution d’une société nouvelle, par voie de fusion.
Elle peut aussi transmettre son patrimoine par voie de scission à des sociétés existantes ou à des sociétés nouvelles’.
Article 1844-7 du code civil :
‘La société prend fin :
1° par l’expiration du temps pour lequel elle a été constituée, sauf prorogation effectuée conformément à l’article 1844-6 ;
2° par la réalisation ou l’extinction de son objet ;
3° par l’annulation du contrat de société ;
4° par la dissolution anticipée décidée par les associés ;
5° par la dissolution anticipée prononcée par le tribunal à la demande d’un associé pour justes motifs, notamment en cas d’inexécution de ses obligations par un associé, ou de mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société ;
6° par la dissolution anticipée prononcée par le tribunal dans le cas prévu à l’article 1844-5 ;
7° par l’effet d’un jugement ordonnant la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif;
8° pour toute autre cause prévue par les statuts’.
Article R. 123-220 du code de commerce :
‘L’Institut national de la statistique et des études économiques est chargé de tenir un répertoire national incluant, lorsqu’ils relèvent du Registre national des entreprises, ou qu’ils emploient du personnel salarié, sont soumis aux obligations fiscales des entreprises ou sollicitent des transferts financiers publics :
1° Les personnes physiques exerçant de manière indépendante une profession non salariée ou une activité accessoire dont les revenus sont soumis à l’imposition au titre des bénéfices industriels et commerciaux, ou aux bénéfices non commerciaux, ou à la taxe sur la valeur ajoutée ;
2° Les particuliers employeurs, à l’exception de ceux dont le salarié exerce :
a) Les activités de services à la personne définies à l’article L. 7231-1 du code du travail;
b) Les activités d’accueil des enfants selon les modalités prévues à l’article L. 421-1 du code de l’action sociale et des familles ;
c) Les activités d’accueil de majeurs réalisées selon les modalités prévues à l’article L. 442-1 du code de l’action sociale et des familles ;
d) Les activités d’employé de maison dans les conditions mentionnées au 3° de l’article L. 722-20 du code rural et de la pêche maritime ;
e) Les activités artistiques mentionnées à l’article L. 7121-2 du code du travail ;
3° Les loueurs en meublé non professionnels ;
4° Les personnes morales de droit public ou de droit privé ;
5° Les institutions et services de l’Etat et des collectivités territoriales ;
5° bis Les assujettis uniques en matière de taxe sur la valeur ajoutée mentionnés à l’article 256 C du code général des impôts ;
6° Les sociétés de fait, sociétés en participation et autres groupements de droit privé non dotés de la personnalité morale ;
7° Les établissements de toutes les entités ci-dessus énumérées ;
Les personnes morales en formation sont inscrites au répertoire national mentionné au premier alinéa ;
Un arrêté du ministre chargé de l’économie précise les modalités d’inscription au répertoire et d’attribution d’un numéro unique d’identification, la durée de conservation des données collectées, ainsi que les conditions d’information des personnes concernées et celles de l’exercice de leurs droits relatifs à l’accès, à la rectification, à la limitation et à la portabilité de leurs données’.
Article R 123-31 du code de commerce :
‘L’immatriculation au registre du commerce et des sociétés a un caractère personnel. Nul ne peut être immatriculé plusieurs fois à un même registre’.
Article R. 123-228 du code de commerce :
‘Sauf en application des deux premiers alinéas de l’article L. 613-4 du code de la sécurité sociale, l’indication de la cessation des entreprises, personnes physiques ou morales, soumises à l’immatriculation au Registre national des entreprises, ne peut intervenir que lorsque la radiation de ce registre a été faite’.
À ce titre, le FIVA a versé aux débats un bulletin de paie de M. [YA] [GI] d’octobre 1986 (pièce 7) dont il ressort qu’il est employé de la société [15] ayant comme numéro d’identification SIRET le [N° SIREN/SIRET 4].
La SASU [13] immatriculée au registre du commerce et des sociétés sous le même numéro 642 005 177 d’après les extraits K Bis fournis par le FIVA (pièces 9 et 12) est donc, quelle que soit sa dénomination actuelle, la continuation de la personnalité morale de l’employeur de M. [GI] et en supporte les obligations afférentes, sauf à en rapporter la preuve contraire ce qu’elle n’a pas fait.
Il n’a en effet pas été démontré que la personnalité morale de l’employeur de M. [GI] aurait subsisté sous une autre forme pour répondre des obligations nées de l’exécution de son contrat de travail.
La demande de mise hors de cause de la Société [13] ne peut donc être accueillie.
– 3. Sur la faute inexcusable.
En vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers celui-ci d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés par l’entreprise, et le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable, au sens de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.
3-1. La dangerosité de l’amiante est connue depuis le début du XXème siècle comme source de diverses pathologies multiformes pouvant se révéler des années après la cessation de l’exposition au risque.
En 1906 le professeur [T] a publié un rapport au bulletin de l’inspection du travail suite au décès de trente ouvrières qui travaillaient dans une filature d’amiante.
Le professeur [E] a fait paraître une étude dans la revue la médecine du travail en 1930 sur l’amiante et l’asbestose.
Ainsi la fibrose pulmonaire liée à l’amiante a été introduite au tableau 30 des maladies professionnelles par l’ordonnance 45-1724 du 2 août 1945 et l’asbestose par le décret n° 50-1082 du 31 août 1950, avec un délai de prise en charge déjà particulièrement long (5 ans) qui a été augmenté au fil des actualisations des tableaux 30 (dix ans pour l’asbestose à compter de 1980 et désormais 35 à 40 ans selon les pathologies).
Le décret 55-1212 du 13 septembre 1955 a inscrit l’inhalation des poussières d’amiante dans la liste indicative des activités exposant au risque du tableau 30 des maladies professionnelles.
L’INRS a publié depuis 1967 des notes mettant en garde sur les risques professionnels liés à l’amiante source de diverses pathologies et les mesures de prévention à adopter.
D’autres études des professeurs [JS] (1954), Doll (1956), [RP] (1960) et [ER] (1965) ont porté sur le caractère cancérogène de l’amiante et ont été publiées dans des revues professionnelles, tandis qu’une réunion d’expert sur l’amiante et ses risques pour la santé des travailleurs s’est tenue en 1973 sous l’égide du bureau international du travail.
À compter du décret n° 77-949 du 17/08/1977, les établissements où le personnel est exposé à l’inhalation de poussières d’amiante, notamment par tous produits ou objets susceptibles d’être à l’origine d’émission de fibres d’amiante, devaient procéder mensuellement à une mesure de l’atmosphère des lieux de travail par un organisme spécial agréé.
Les lésions pleurales bénignes ont été introduites au tableau 30 par le décret n° 85-630 du 19 juin 1985.
Considérant son importance, sa taille et la nature de son activité et procédés utilisés (aciéries), la SASU [13] venant aux droits de [15] ne pouvait l’ignorer et ne peut soutenir que sa connaissance du risque de maladies professionnelles liées à l’amiante n’aurait débuté qu’à compter du décret du 24 décembre 1996 ayant interdit l’utilisation de l’amiante à compter du 1er janvier 1997 ou ne pouvait même pas exister avant le décret précité du 17 août 1977, ayant imposé des mesures d’empoussièrement de l’air ambiant des lieux de travail.
3-2. Sur l’exposition aux poussières d’amiante, la SASU [13] soutient qu’il ne peut être fait état des éléments de l’enquête administrative menée par la caisse primaire d’assurance maladie versés aux débats par le FIVA au motif que la décision du 20 juillet 2016 de prise en charge par la caisse de la maladie de M. [GI] lui a été déclarée inopposable par le jugement précité du 5 octobre 2020 (RG 16/1452).
Elle n’a toutefois pas explicité le fondement juridique de sa demande d’écarter des débats une pièce régulièrement produite aux débats par une partie (le Fiva) et soumise à la contradiction et cette demande d’écarter des débats les éléments découlant de l’enquête de la caisse primaire d’assurance maladie ne sera donc pas retenue.
À ce titre il ressort de l’enquête que M. [GI] a travaillé de 1963 à 1994 soit durant 30 ans comme ouvrier de fabrication polyvalent, couleur, régleur au sein de l’usine du Giffre de Marignier ayant fermé à cette date.
Selon l’enquêteur cette usine utilisait l’amiante et ses dérivés pour :
– l’isolation des gaines protégeant le refroidissement des électrodes ;
– les filtres ;
– les manchettes de protection ;
– les joints d’étanchéité des fours.
M. [GI] portait des équipements de protection ignifugés et, toujours d’après l’enquêteur, les salariés étaient continuellement dans une atmosphère de particules d’amiante à cause de la chaleur ambiante régnant dans les ateliers, que de nombreux travailleurs de cette usine ont été reconnus en maladie professionnelle au titre de l’exposition à l’amiante.
Ces conclusions de l’enquêteur de la caisse sont étayées par des avis de l’inspection du travail nécessairement basés sur des constatations de ce service rendus à propos d’autres salariés en 2013 et 2014 selon lesquels :
‘L’usine du Giffre des établissements [15] était équipée de matériaux amiantés utilisés pour protéger les installations des chaleurs extrêmes générées par les fours de fonderie.
Le minerai était fondu pour créer des pièces de manganèse qui étaient ensuite travaillées. Les fours étaient protégés par des matériaux amiantés tout comme les systèmes de circulation de l’eau servant à refroidir les pièces qui étaient protégées par des calorifugeages amiantés (rouleaux d’amiante souple extrêmement friable).
L’ensemble des installations était protégé de cette chaleur extrême par des matériaux amiantés très émissifs dans la mesure où ils se dégradaient très rapidement.
L’atmosphère des ateliers était saturée de poussières d’amiante due notamment à cette dégradation, ce qui exposait l’ensemble des salariés intervenant dans l’entreprise.
Des bavettes amiantées servaient à protéger les pièces de manganèse lors des opérations de broyage, de concassage et de tamisage qui pouvaient durer jusqu’à une semaine. Ces éléments devaient être changés fréquemment compte tenu de leur dégradation. Ces bavettes aussi appelées resistos étaient travaillées et découpées à la disqueuse ou au ruban pour obtenir la forme et la dimension attendue directement dans l’atelier où était regroupé l’ensemble des salariés.
Aucun système d’aspiration ou de captation des poussières n’était utilisé. D’importantes couches de poussières (10 à 15 centimètres) étaient régulièrement soufflées par les salariés chargés de l’entretien des fours et du bâtiment’.
Le FIVA a ainsi justifié d’attestations d’exposition à l’amiante par le docteur [C] [LX], médecin du travail de l’entreprise de 1975 à 2007, de 18 autres salariés ([DH] [W], [LB] [XE], [F] [G], [ZS] [P], [MT] [WR], [IW] [CL], [O] [H], [S] [H], [BP] [X], [HE] [N], [AC] [L], [UD] [Z] [PU], [R] [V], [AT] [Y], [FM] [VM], [D] [UR], [IA] [I], [K] [U]) ayant occupé des fonctions au sein de cette entreprise de mécanicien d’entretien, agent de maintenance, forgeron, agent de fabrication, conducteur ou chef de four, maçon, manoeuvre et électricien pour des périodes comprises entre 1948 et 1994, qui établissent sans conteste une exposition généralisée des ouvriers et agents de maîtrise aux poussières d’amiante sur le site du Giffre, quelles que soient leurs attributions et quand bien même cette usine ne figure pas sur la liste des établissements ouvrant droit à l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (ACAATA).
M. [GI] a travaillé au sein de cette entreprise durant plus de trente ans.
Son exposition est aussi en tant que de besoin confirmée par les attestations de divers collègues de travail de M. [GI] reproduites ci-dessous :
– M. [DH] [W] : ‘M. [GI] [YA] employé dans cette usine [15], usine du [Localité 14] de 1963 comme agent polyvalent de fabrication couleur aux fours 4-5-8. Cette usine sidérurgique dans la fabrication de divisions [11] et autres. Cette entreprise utilisait de l’amiante et ses dérivés dans ses ateliers, ouverts à tous vents. M. [GI] a travaillé dans des conditions inimaginables par la chaleur et portait des équipements ignifugés en amiante, la respiration des poussières lourdes et l’inhalation de fibres de particules d’amiante sans protections respiratoires qu’il devait subir. Devant ce fait M. [GI] n’a jamais été informé des dangers qu’il y avait pour sa santé au travail. C’est pour cela que la maladie a bien été reconnue par le corps médical comme d’autres collègues de travail, voire même décédés’.
– Mme [B] [OK] : ‘Ayant travaillé à [15] de 1974 à 1994 (fermeture) en tant qu’aide chimiste au laboratoire. Dans le cadre de ma profession j’ai eu l’occasion de constater que M. [GI] travaillait comme couleur, agent de fabrication polyvalent se trouvant dans des conditions de travail difficiles entouré par des protections près de sources de chaleur qui diffusaient des particules d’amiante dans toute l’usine. Moi-même j’ai des nodules au poumon. Le laboratoire avait aussi des plaques d’amiante où nous posions nos creusets chauds et entouraient nos fours (petits) à 1200°. M. [GI] [YA] ainsi que tous les salariés étaient exposés aux particules d’amiante dans toute l’usine’.
– M. [LB] [XE] : ‘je suis rentré dans l’usine comme agent d’entretien au service dépannage des fours. Four 5 – four 8 four rotatif où nous devions changer les manches et les isolants des résistances et des plaques de contact électrique tout cela entouré d’amiante les canalisations de l’arrivée de l’eau de refroidissement étant aussi entourées d’amiante. Au four rotatif, les manches pour les poussières étaient en amiante et on travaillait sans aucune protection nous avions des masques en papier et des lunettes que nous ne pouvions supporter à cause de la chaleur. A chaque journée de travail c’était une exposition à l’amiante quel que soit le lieu où l’on demandait notre présence. Je soussigné M. [XE] [LB] atteste avoir travaillé avec M. [YA] [GI] et avec (lui) subi le contact de l’amiante pendant 24 ans sans jamais savoir qu’il (y) avait danger pour notre santé et pour celle de mes collègues de travail et avoir été reconnu en maladie professionnelle’.
– M. [F] [G] : ‘M. [GI] [YA], ouvrier polyvalent et couleur travaillait comme l’ensemble du personnel, sans aucune protection. Toutes les installations de l’entreprise étaient protégées par de l’amiante. L’ensemble du personnel par sa polyvalence devait se déplacer continuellement vers les installations protégées par de l’amiante. J’ai travaillé à l’usine Péchiney de l’usine du Giffre de 1977 à 1994″.
‘Les établissements [15] étaient une entreprise équipée de fours électriques afin de produire des ferro-alliages pour l’industrie sidérurgique (40 000 volts et 2200°) L’ensemble des systèmes de refroidissement et d’isolation étaient protégé par de l’amiante en plaque ou en bande. Mon travail d’agent d’entretien et de maintenance m’a exposé journellement au contact de l’amiante. Nos tenues ignifugées (EPI) étaient constituées avec un pourcentage d’amiante. Notre association [10] dénombre plusieurs décès et de nombreuses personnes contaminées par l’amiante’
– M. [PG] [YW] : ‘Je soussigné [YW] [PG] ouvrier d’entretien à la maintenance de l’usine atteste avoir travaillé et connu M. [YA] [GI] de 1975 à 1988 on travaillait sans aucune protection avec des masques en papier et des lunettes que nous ne pouvions supporter à cause de la chaleur. L’exposition à l’amiante était permanente quel que soit le lieu dans l’usine. Nous devions changer les manches et isolants des résistances et des plaques de contact électrique tout cela entouré d’amiante. Je soussigné [YW] [PG] atteste avoir subi le contact de l’amiante pendant mon emploi à l’usine du Giffre sans jamais savoir s’il y avait danger pour ma santé et pour celle de mes collègues de travail’.
– M. [J] [CL] : ‘J’atteste avoir travaillé à Pechiney usine du Giffre 1957 à 1994 et usine de [Localité 9] 1994 à 2000.
J’étais en fabrication au four qui contenait des électrodes qui contenaient de l’amiante, les plaques de contact et résistances entourées d’amiante, nous descendions dans la voûte des fours pour allonger les électrodes deux fois dans la porte, nous avions beaucoup de bavettes de protection en amiante autour du four, nous avions des bleus de travail ignifugés qui contenaient de l’amiante ainsi que des tabliers de protection qui contenaient de l’amiante, l’air était complètement vicié par les poussières lourdes avec des particules d’amiante nous n’avions aucune protection’.
– M. [S] [H] : ‘Embauché en 1958 et licencié en 1994 pour fermeture pendant toutes ces années j’ai travaillé à la fabrication comme polyvalent principalement au four 4 – four 5 four 8, chaque hiver à l’arrêt des fours pour remise en état nous étions mes camarades et moi sous les ordres du personnel de l’entretien pour démonter et remonter les gaines qui alimentent le refroidissement des électrodes nous devions même refaire l’isolation de ces gaines si celle-ci était défectueuse. Cette isolation n’était autre que des bandes d’amiante que nous enroulions autour des gaines. Un autre secteur où nous étions en contact avec de l’amiante à la fabrication du molybdène lorsqu’en fin d’équipe nous devions nettoyer la cheminée et les filtres, la trappe de la cheminée était isolée par de l’amiante et les filtres que nous devions secouer pour faire tomber la poussière étaient en amiante, bien d’autres secteurs dans l’usine nous étions en continu avec de l’amiante mais pendant toutes ces années on ignorait le danger qu’elle avait sur nous’.
Ces attestations sont précises, circonstanciés et concordantes et ne sont pas établies toutes sur le même modèle comme soutenu.
Quand bien-même elles le seraient, il n’est pas surprenant qu’émanant de salariés ayant partagé une même communauté de travail pendant des années, elles présentent des similitudes.
Enfin le fait que ces salariés se soient constitués en association de victimes de l’amiante (Comité Amiante Prévenir et Réparer) et ayant pu pour leur compte solliciter la prise en charge de leurs pathologies ne suffit pas à en contester la véracité.
La condition du tableau 30 Bis relative à la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer un cancer broncho pulmonaire primitif est donc satisfaite puisque il résulte de ce qui précède que M. [GI] a réalisé habituellement au cours de sa carrière :
– des travaux d’isolation utilisant des matériaux contenant de l’amiante ;
– des travaux de pose et de dépose de matériaux isolants à base d’amiante ;
– des travaux d’usinage, de découpe et de ponçage de matériaux contenant de l’amiante ;
– des travaux d’entretien ou de maintenance effectués sur des équipements contenant des matériaux à base d’amiante.
3-3. Enfin quant aux mesures prises pour préserver les salariés qu’il s’agisse de protections individuelles ou collectives, de mesures d’empoussièrement des ateliers, la Société [13] du fait de l’absence de toute pièce versée aux débats à ce propos n’en a justifié d’aucune.
La faute inexcusable de la Société [13] venant aux droits de l’employeur de M. [GI] sera donc retenue.
La désignation de la maladie relevant du tableau 30 Bis déclarée par M. [GI] soit un cancer broncho pulmonaire n’est pas contestée par la Société [13], de même que le respect du délai de prise en charge de 40 ans ou de la durée d’exposition de 10 ans prévus au tableau.
L’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale dispose que :
‘Est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d’exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime.
Peut être également reconnue d’origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux évalué dans les conditions mentionnées à l’article L434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.
Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l’origine professionnelle de la maladie après avis motivé d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles’.
La réunion des conditions du tableau 30 bis des maladies professionnelles dispense donc le FIVA de devoir rapporter la preuve de l’existence d’un lien de causalité entre cette faute et la pathologie développée par M. [GI], contrairement à ce qui est soutenu par la Société [13] puisque ce lien est présumé pour les cas de maladies professionnelles visés au 1er alinéa de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale.
Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a dit que la maladie professionnelle diagnostiquée chez M. [GI] est la conséquence de la faute inexcusable de la société [13] venant aux droits de la société [15] son ancien employeur.
4. L’appel principal de la SASU [13] et l’appel incident du FIVA sont limités et ne remettent pas en cause l’évaluation globale des préjudices complémentaires de M. [GI] à la somme de 16 000 euros se décomposant en 5 000 euros au titre des souffrances physiques, 10 000 euros pour les souffrances morales, 1 000 euros au titre du préjudice esthétique, de même que le débouté de la demande d’indemnisation au titre du préjudice d’agrément.
Le FIVA n’entend qu’obtenir l’infirmation du jugement en ce qu’il a été débouté de sa demande visant à dire qu’en cas de décès de la victime résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant.
L’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale prévoit que lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitué dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants.
L’article L 452-2 du même code précise ainsi que la victime ou ses ayants droit reçoivent une majoration des indemnités en capital ou en rente qui leur sont servies.
L’article L. 461-1 déclare, sous réserve des dispositions spécifiques du titre sixième, applicables aux maladies professionnelles les dispositions du livre IV du code de la sécurité sociale précitées.
Il s’en déduit donc que le principe de majoration de la rente consécutif à la reconnaissance de faute inexcusable à l’origine d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle reste acquis au conjoint survivant.
Le jugement en ce qu’il a débouté le FIVA de cette demande sera donc infirmé et il sera fait droit à cette demande de l’intimé.
5. La SASU [13] pour sa part demande que le jugement soit réformé en ce qu’il l’a débouté de sa demande visant à inscrire au compte spécial les dépenses afférentes à la majoration de rente.
M. [GI] a été déclaré consolidé par la caisse primaire d’assurance maladie et s’est vu attribuer un taux d’incapacité permanente de 80 % assorti d’une rente à partir du 1er mars 2016.
L’article D. 242-6-5 du code de la sécurité sociale relatif à l’assiette, taux et calcul des cotisations dues par les entreprises prévoit que :
‘La valeur du risque mentionnée à l’article D. 242-6-4 pour le calcul du taux brut collectif comprend :
1° La totalité des prestations et indemnités, autres que les rentes, versées au cours de la période triennale de référence ; les indemnités en capital sont affectées d’un coefficient fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget ; sont exclues les indemnités en capital versées après révision ou rechute;
2° Les capitaux représentatifs des rentes notifiées au cours de la période triennale de référence aux victimes atteintes, à la date de consolidation initiale de leur état de santé, d’une incapacité permanente afférente à l’accident ou à la maladie concernés, à l’exception de l’incapacité permanente reconnue après révision ou rechute ;
3° Les capitaux correspondant aux accidents et maladies mortels dont le caractère professionnel a été reconnu au cours de la même période, que la victime ait ou non laissé des ayants droit.
Un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget fixe les bases d’évaluation forfaitaire des capitaux mentionnés aux 2° et 3°.
Les dépenses engagées par les caisses d’assurance maladie par suite de la prise en charge de maladies professionnelles constatées ou contractées dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget ne sont pas comprises dans la valeur du risque mais sont inscrites à un compte spécial.
Lorsque des recours sont engagés contre les tiers responsables d’accidents du travail, le montant des prestations et indemnités afférentes à ces accidents du travail est déduit de la valeur du risque au prorata du pourcentage de responsabilité mis à la charge du tiers responsable par voie amiable ou contentieuse’.
De même l’article D. 242-6-7 du code de la sécurité sociale dispose que :
‘L’accident du travail ou la maladie professionnelle ayant donné lieu à une incapacité temporaire est classé de manière définitive dans une des catégories définies à l’article D. 242-6-6, le 31 décembre de l’année qui suit celle de sa déclaration, sans prise en compte de l’incapacité temporaire reconnue après rechute.
L’accident du travail ou la maladie professionnelle ayant donné lieu à une incapacité permanente est classé de manière définitive dans une des catégories définies à l’article D. 242-6-6 lors de la première notification du taux d’incapacité permanente ou en cas de décès lors de la reconnaissance de son caractère professionnel, sans prise en compte de l’incapacité permanente reconnue après révision ou rechute ou du décès survenu après consolidation.
L’accident du travail ou la maladie professionnelle donnant lieu à une incapacité temporaire puis à une incapacité permanente est classé dans les catégories d’incapacité temporaire et d’incapacité permanente correspondantes.
Les maladies professionnelles constatées ou contractées dans des conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget ne sont pas imputées au compte de l’employeur mais sont inscrites à un compte spécial.
L’accident du travail résultant d’une agression perpétrée au moyen d’armes ou d’explosifs n’est pas imputé au compte de l’employeur lorsque celle-ci est attribuable à un tiers qui n’a pu être identifié.
Lorsque des recours sont engagés contre les tiers responsables d’accidents du travail, les montants des coûts moyens correspondant aux catégories dans lesquelles sont classées ces accidents sont proratisés selon le pourcentage de responsabilité mis à la charge du tiers responsable par voie amiable ou contentieuse’.
Selon l’arrêté du 16 octobre 1995 pris pour l’application de l’article D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale relatif à la tarification des risques d’accidents du travail et des maladies professionnelles (article 2) :
‘Sont inscrites au compte spécial, conformément aux dispositions des articles D. 242-6-5 et D. 242-6-7, les dépenses afférentes à des maladies professionnelles constatées ou contractées dans les conditions suivantes :
1° La maladie professionnelle a fait l’objet d’une première constatation médicale entre le 1er janvier 1947 et la date d’entrée en vigueur du nouveau tableau de maladies professionnelles la concernant ;
2° La maladie professionnelle a fait l’objet d’une première constatation médicale postérieurement à la date d’entrée en vigueur du tableau la concernant, mais la victime n’a été exposée au risque de cette maladie professionnelle qu’antérieurement à la date d’entrée en vigueur dudit tableau, ou la maladie professionnelle reconnue en application des troisième et quatrième alinéas de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale a été constatée postérieurement au 29 mars 1993, mais la victime n’a été exposée au risque de cette maladie professionnelle qu’antérieurement au 30 mars 1993 ;
3° La maladie professionnelle a été constatée dans un établissement dont l’activité n’expose pas au risque mais ladite maladie a été contractée dans une autre entreprise ou dans un établissement relevant d’une autre entreprise qui a disparu ou qui ne relevait pas du régime général de la sécurité sociale ;
4° La victime de la maladie professionnelle a été exposée au risque successivement dans plusieurs établissements d’entreprises différentes sans qu’il soit possible de déterminer celle dans laquelle l’exposition au risque a provoqué la maladie ;
5° La maladie professionnelle reconnue en application des troisième et quatrième alinéas de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale a été constatée entre le 1er juillet 1973 et le 29 mars 1993 ;
6° La maladie est reconnue d’origine professionnelle en lien avec une infection par le SARS-CoV2, sur la base du tableau n° 100 ‘ Affections respiratoires aiguës liées à une infection au SARS-CoV2 ‘ ou en application de l’alinéa 7 de l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale’.
Enfin, l’article L. 242-5 du code de la sécurité sociale dispose que les décisions relatives au taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles et au classement des risques dans les différentes catégories sont notifiées à l’employeur par la caisse d’assurance retraite et de la santé au travail (CARSAT) compétente, tandis que l’article L. 311-16 du code de l’organisation judiciaire donne spécialement compétence à la cour d’appel d’Amiens pour les litiges relatifs à ces décisions des CARSAT se rapportant à la tarification visés à l’article L. 142-1-7° du code de la sécurité sociale.
Par conséquent il ressort des dispositions précitées qu’en l’absence de décision de la CARSAT, c’est à dire avant la notification de son taux de cotisation à l’employeur, les litiges relatifs à l’inscription au compte spécial sont de la compétence des juridictions du contentieux général, étant rappelé que selon l’article R. 241-1 du code de la sécurité sociale : ‘En vue de la tarification des risques d’accident du travail et de maladie professionnelles, les caisses primaires et les unions de recouvrement sont tenues de fournir aux caisses d’assurance retraite et de la santé au travail, tous les éléments financiers susceptibles de faire connaître les dépenses et les recettes, soit par employeur, soit par branche d’activité’.
En l’occurrence, la demande d’inscription au compte spécial de la société [13] venant aux droits de [15] employeur de M. [GI] n’est pas fondée, puisque sa pathologie liée à l’amiante provient de son exposition dans un seul établissement, l’usine du Giffre, où il a travaillé durant plus de vingt ans jusqu’à la cessation de cette exposition au risque et que cet établissement n’avait pas de personnalité juridique distincte de celle de son employeur, [15], aux droits de laquelle la société [13] ayant le même numéro d’immatriculation au RCS intervient.
Sont ainsi applicables les dispositions de l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale dans leur rédaction en vigueur au 1er avril 2013 selon lesquelles ‘la majoration est payée par la caisse qui en récupère le capital représentatif auprès de l’employeur dans des conditions déterminées par décret’.
À titre surabondant, l’article 14 du code de procédure civile prévoit que nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée, que l’article 332 du même code permet au juge d’inviter les parties à mettre en cause tous les intéressés dont la présence lui paraît nécessaire à la solution du litige or la CARSAT dont dépend la Société [13] n’a pas été appelée en cause pour que l’arrêt à intervenir lui soit déclaré opposable.
Le jugement sera donc également confirmé en ce qu’il a débouté la société [13] de sa demande d’inscription au compte spécial.
– 6. Sur la demande de rectification pour omission de statuer du jugement déféré RG 18/00593 du 10 juin 2021 du tribunal judiciaire d’Annecy et l’appel incident de la caisse primaire d’assurance maladie.
La société [13] a présenté au tribunal judiciaire d’Annecy le 26 juillet 2021 une requête en omission de statuer qui a été transmise à la présente cour du fait de l’appel du jugement.
Elle demande ainsi à la cour de :
– statuer sur la demande qui a été omise dans le jugement rendu le 10 juin 2021 et par conséquent, compléter ce jugement en ajoutant à son dispositif qu’il :
– prend acte de la renonciation de la CPAM de ne pas engager d’action récursoire à l’encontre de la société [13],
– juger par conséquent que la CPAM de Haute-Savoie ne pourra engager son action récursoire à l’encontre de la société [13],
– ordonner la mention du jugement à intervenir sur la minute et sur les expéditions du jugement complété.
Pour sa part la caisse primaire d’assurance maladie de Haute Savoie a entendu relever appel incident et demande de condamner l’employeur à la garantir des sommes dont elle devra faire l’avance.
L’article 463 du code de procédure civile dispose que la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s’il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
Il ressort de la note d’audience du 1er avril 2021 du tribunal judiciaire d’Annecy au cours de laquelle l’affaire a été évoquée avant sa mise en délibéré et le jugement rendu par ce tribunal le 10 juin 2021 déféré à la cour que :
‘CPAM s’en rapporte.
cond. employeur rembt sommes versées M. [KF]
pas pour le dossier M. [GI]’
D’autre part le dossier transmis par la juridiction de première instance à la cour d’appel ne comporte aucune conclusion écrite déposée par la caisse primaire d’assurance maladie.
Le tribunal n’était donc saisi d’aucune demande de la caisse primaire d’assurance maladie.
Par son rapport à justice équivalent à une protestation de principe, la caisse primaire d’assurance maladie ne s’était pas associée à la demande du FIVA de reconnaissance de la faute inexcusable. Elle n’a donc formulé aucune demande en première instance.
Sa demande de condamnation à remboursement de l’employeur ne peut donc pas être considérée comme l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de prétentions antérieures et doit s’analyser en une demande nouvelle et partant irrecevable comme formulée pour la première fois en appel.
Dès lors la demande de la caisse de condamnation de l’employeur au remboursement des sommes dont elle doit faire l’avance ne relève pas de l’omission de statuer.
La société [13] n’est pas non plus recevable à demander la rectification pour omission de statuer du jugement déféré sur un chef de demande dont le tribunal n’était pas saisi et la demande de ‘donner acte’ ne constitue pas une prétention claire et précise susceptible d’entraîner des conséquences juridiques au sens de l’article 4 du code de procédure civile sur laquelle il y aurait lieu de statuer.
Enfin, la cour ne peut statuer que sur un litige né et actuel et la SASU [13] est partant dépourvu d’intérêt à agir actuel pour faire juger que la caisse primaire d’assurance maladie de Haute Savoie ne pourra, à l’avenir, engager une action récursoire à son encontre, dont la cour n’est pas saisie.
L’appel incident de la caisse primaire d’assurance maladie et sa demande nouvelle de condamnation de l’employeur formulée pour la première fois en appel seront donc déclarés irrecevables et la SASU [13] déboutée de sa demande de rectification du jugement pour omission de statuer, faute d’objet à cette demande.
7. La SASU [13] qui succombe supportera les dépens et n’est donc pas fondée à solliciter l’indemnisation de ses frais irrépétibles par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Il parait équitable d’allouer au FIVA la somme complémentaire de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour ses frais irrépétibles d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement RG n° 18/00593 rendu le 10 juin 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire d’Annecy en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a :
– débouté le Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante de sa demande visant à dire qu’en cas de décès de la victime résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant
Statuant à nouveau,
Dit qu’en cas de décès de la victime imputable à sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant.
Déclare irrecevable l’appel incident de la caisse primaire d’assurance maladie de Haute Savoie et sa demande de condamnation de la Société [13] à lui rembourser les sommes dont elle devra faire l’avance.
Déboute la SASU [13] de sa demande de rectification du jugement déféré pour omission de statuer.
Y ajoutant,
Condamne la SASU [13] aux dépens d’appel.
Déboute la SASU [13] de sa demande par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne la SASU [13] à verser au Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante la somme complémentaire de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par M. Jean-Pierre Delavenay, président et par Mme Chrystel Rohrer, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier Le président