COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-6
ARRÊT AU FOND
DU 6 MAI 2022
N° 2022/ 156
Rôle N° RG 18/13584 – N° Portalis DBVB-V-B7C-BC532
[B] [R]
EURL VITAME SERVICES TOULON
C/
[F] [Y]
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE MARSEILLE
Copie exécutoire délivrée
le :06/05/2022
à :
Me Claire ROUYER, avocat au barreau de TOULON
Me Céline FALCUCCI, avocat au barreau de TOULON
Me Isabelle PIQUET-MAURIN, avocat au barreau de TOULON
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULON en date du 26 Juillet 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 16/00630.
APPELANTS
Maître [B] [R] mandataire judiciaire de l’EURL VITAME SERVICE TOULON devenue la SARLU ESAD, demeurant [Adresse 3]
représenté par Me Claire ROUYER, avocat au barreau de TOULON
Société VITAME SERVICES TOULON devenue la SARLU ESAD, demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Claire ROUYER, avocat au barreau de TOULON
INTIMEES
Madame [F] [Y]
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2018/013667 du 14/12/2018 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE), demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Céline FALCUCCI, avocat au barreau de TOULON
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE MARSEILLE, demeurant [Adresse 4]
représentée par Me Isabelle PIQUET-MAURIN, avocat au barreau de TOULON
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 08 Février 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Monsieur Ange FIORITO, Conseiller de la chambre, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
M. Philippe SILVAN, Président de chambre
Monsieur Thierry CABALE, Conseiller
M. Ange FIORITO, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Caroline POTTIER.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Avril 2022 puis prorogé au 6 Mai 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 6 Mai 2022,
Signé par M. Philippe SILVAN, Président de chambre et Mme Suzie BRETER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Mme [F] [Y] a été recrutée par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel le 5 avril 2012 par la société VITAME SERVICES TOULON en qualité d’assistante de vie.
Elle a été placée en arrêt maladie à compter du 1er décembre 2014.
Le médecin du travail a rendu un avis le 3 juin 2015 d’inaptitude définitive à son poste de travail en raison d’un danger immédiat.
Mme [Y] a été convoquée le 22 juin 2015 pour un entretien préalable au 1er juillet en vue d’un licenciement.
Mme [Y] a été licenciée par courrier recommandé avec accusé de réception du 18 août 2015, licenciement pour inaptitude physique et physiologique avec impossibilité de procéder au reclassement.
Le 28 juillet 2016, Mme [Y] a saisi le conseil de prud’hommes.
Par jugement du 26 juillet 2018, le conseil de prud’hommes de TOULON a rendu la décision suivante’:
«’DIT que le licenciement de Madame [F] [Y] est sans cause réelle et sérieuse’;
FIXE au passif du redressement judiciaire de l’EURL VITAME SERVICES TOULON représenté par le mandataire judiciaire Maître [B] [R] au profit de Madame [F] [Y] les sommes suivantes’:
238,43’€ de rappel de salaire’;
587,73’€ indemnité légale de licenciement’;
2391,82’€ au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et de 239,18’€ au titre des congés payés afférents’;
14340’€ au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
500’€ d’Article 700 du code de procédure civile’;
ORDONNE la rectification de l’attestation Pôle Emploi’;
DIT n’avoir pas lieu de prononcer l’exécution provisoire de la décision au-delà des dispositions légales applicables’;
DECLARE le présent jugement opposable à Maître [B] [R] es qualité, et au CGEA dans la limite des textes et plafonds réglementaires’;
DIT ET JUGE que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L3253-6 et L3253-8 du CDT que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L3253-19 et L3253-20 et L3253-17 du Code du travail’;
DIT ET JUGE que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement’;
DEBOUTE les parties des autres demandes’;
DIT que les dépens seront passés en frais privilégiés de procédure collective.’»
Le jugement du conseil de prud’hommes de TOULON a été notifié le 3 août 2018 par lettre recommandée avec accusé de réception à la société VITAME SERVICES TOULON et à Maître [B] [R] qui ont interjeté appel par déclaration du 9 août 2018.
Parallèlement, la société VITAME SERVICES TOULON a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de TOULON du 1er septembre 2017, puis a fait l’objet d’un plan de redressement par jugement en date du 18 septembre 2018, Maître [R] étant désigné mandataire judiciaire, puis commissaire à l’exécution du plan.
La clôture de l’instruction a été fixée au 14 janvier 2022. L’affaire a’été plaidée à l’audience de la cour en sa formation collégiale du 8 février 2022′; l’arrêt a été mis en délibéré au 8 avril 2022.
La SARLU VITAME SERVICES TOULON, devenue la société ESAD, suivant conclusions notifiées par RPVA le 8 février 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, demande’de’:
A titre principal,
– réformer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a considéré que le licenciement de Mme [F] [Y] est sans cause réelle et sérieuse’;
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a considéré que la société a respecté la procédure de licenciement, que le harcèlement moral n’est pas établi, en ce qu’il a débouté Mme [F] [Y] de sa demande de rappel de salaire sur frais kilométriques, de sa demande de rappel de congés payés, de sa demande pour perte occasionnée par l’absence de prévoyance en manquement à la convention collective’;
En conséquence,
– débouter Mme [F] [Y] de l’intégralité de ses demandes’;
A titre subsidiaire,
– réformer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a considéré que le licenciement de Mme [F] [Y] est sans cause réelle et sérieuse et a alloué pour ce chef les sommes de’:
. 238,43’€ bruts de rappel de salaire,
. 587,73’€ nets indemnité légale de licenciement,
. 2 391,82’€ bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et de 239,18’€ au titre des congés payés afférents,
. 14 340’€ nets au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
En conséquence,
– constater le caractère excessif et hors de proportion des demandes de Mme [F] [Y]’;
– allouer à Mme [F] [Y] tout au plus la somme de 7 170’€ nets d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
– fixer le cas échéant la somme au passif s’agissant des créances antérieures’;
– opposer les créances au mandataire’;
En tout état de cause,
– réformer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il a alloué à Mme [F] [Y] la somme de 500’€ nets au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;
– condamner Mme [F] [Y] à payer la somme de 800’€ nets au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société ESAD, , énonce que l’employeur a entrepris une recherche de reclassement de Mme [Y]. Elle expose qu’il y a eu des échanges avec le médecin du travail afin d’obtenir des précisions sur les conditions de reclassement, se référant à un courrier du médecin du travail du 18 juin 2015. Elle rappelle que Mme [Y] a été déclarée inapte à tout emploi. Elle explique que l’employeur a quand même fait des recherches, pour des emplois d’assistante de vie, de chauffeur et de responsable secteur, mais sans succès. Elle soutient ne pas avoir méconnu son obligation de reclassement.
Elle explique que l’adhésion à un groupement d’intérêt économique (GIE) ne constitue pas l’adhésion à un groupe, et qu’ainsi il n’y avait pas de recherches de reclassement à effectuer dans ce cadre.
Elle soutient, concernant l’irrégularité de procédure soulevée, que l’employeur a bien notifié la lettre de licenciement. Elle conteste tout harcèlement moral, la salariée ne rapportant aucun élément en laissant supposer l’existence, au visa de l’article L1154-1 du code du travail. La SARLU ESAD expose que la demande de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation conventionnelle de souscrire une prévoyance n’est pas fondée car l’article 6 de la partie VI de la convention collective, sur laquelle Mme [Y] s’appuie, n’est pas applicable en vertu de l’arrêté d’extension du 4 mai 2014.
Mme [F] [Y], suivant conclusions notifiées par RPVA le 3 février 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, demande’de’:
– déclarer ses présentes écritures recevables’;
– ordonner la révocation de l’ordonnance de clôture intervenue le 14 janvier 2022′;
– débouter La société ESAD TOULON, le mandataire et le CGEA de toutes leurs demandes’;
A titre principal, s’agissant de créances antérieures à la procédure,
– confirmer le jugement entrepris et’:
. juger que le licenciement de Madame [F] [Y] est sans cause réelle et sérieuse,
. fixer au passif du redressement judiciaire de La société ESAD TOULON au profit de Madame [F] [Y] les sommes suivantes’:
238,43’€ de rappel de salaire,
587,73’€ indemnité légale de licenciement,
2391,82’€ au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et de 239,18’€ au titre des congés payés afférents,
14 340’€ au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
500’€ d’Article 700 du code de procédure civile,
. ordonner la rectification de l’attestation Pôle Emploi,
. déclarer le présent jugement opposable à Maître [B] [R], ès qualités, et au CGEA dans la limite des textes et plafonds réglementaires,
. juger que ces créances seront opposables au CGEA et garanties dans la limite de ses plafonds’;
Et y ajoutant,
– infirmer le jugement’;
– juger que la salariée a subi une situation de harcèlement moral’;
– constater que Mme [F] [Y] a été déclarée inapte en raison d’un danger immédiat’;
En conséquence,
– fixer au passif de La société ESAD au profit de Madame [F] [Y] les sommes suivantes’:
. 1 euro symbolique en réparation du harcèlement moral’subi,
. 1 195,91’€ (article L1235-5) d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,
. 1 832,33’€ pour maintien de salaire,
. 1 893,52’€ pour rappel de congés payés,
. 367,96’€ pour rappel de salaire sur frais kilométriques,
. 5 500’€ de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation conventionnelle de souscrire une prévoyance’;
– ordonner la remise de l’attestation pôle emploi sous astreinte de 100’€ par jour de retard’;
. juger que ces créances seront opposables au CGEA et garanties dans la limite de ses plafonds’;
A titre subsidiaire et au besoin, si la cour l’estime utile,
– confirmer le jugement entrepris,
– juger que le licenciement de Madame [F] [Y] est sans cause réelle et sérieuse vu le manquement à l’obligation de reclassement,
– condamner La société ESAD, à régler à Mme [F] [Y] les sommes suivantes’:
. 238,43’€ de rappel de salaire,
. 587,73’€ d’indemnité légale de licenciement,
. 2391,82’€ au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et de 239,18’€ au titre des congés payés afférents,
. 14 340’€ au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
. 500’€ d’Article 700 du code de procédure civile,
– ordonner la rectification de l’attestation Pôle Emploi,
. déclarer le présent arrêt opposable à Maître [B] [R], ès qualités, et au CGEA dans la limite des textes et plafonds réglementaires,
Et y ajoutant,
– infirmer le jugement’;
– juger que la salariée a subi une situation de harcèlement moral’;
– constater que Mme [F] [Y] a été déclarée inapte en raison d’un danger immédiat’;
En conséquence,
– condamner La société ESAD, à régler à Mme [F] [Y] les sommes suivantes’:
. 1 euro symbolique en réparation du harcèlement moral’subi,
. 1 195,91’€ (article L1235-5) d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,
. 1 832,33’€ pour maintien de salaire,
. 1 893,52’€ pour rappel de congés payés,
. 367,96’€ pour rappel de salaire sur frais kilométriques,
.5 500’€ de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation conventionnelle de souscrire une prévoyance,
– ordonner la remise de l’attestation pôle emploi sous astreinte de 100’€ par jour de retard’;
– déclarer le présent arrêt opposable à Maître [B] [R], ès qualités, et au CGEA dans les limites des textes et des plafonds’réglementaires ;
En tout état de cause,
– assortir les condamnations des intérêts au taux légal avec anatocisme’;
– condamner la SARLU ESAD à payer une somme de 2 500’€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile’et les entiers dépens distraits au profit de Maître FALCUCCI.
Sur la demande de révocation de l’ordonnance de clôture, Mme [Y] expose qu’il ressort que l’employeur a été cédé à un acquéreur qui est in bonis, et qu’aucune écriture n’a été prise par le mandataire.
Mme [Y] énonce notamment ne pas avoir reçu de lettre de licenciement, et avoir écrit une lettre à son employeur à ce titre le 20 août 2015′; elle explique que l’absence de lettre de licenciement fait que celui-ci est intervenu sans motif et donc qu’il doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse. Elle expose avoir contesté le solde de tout compte par courrier recommandé du 27 août 2015.
Mme [Y] soutient que l’obligation de reclassement n’a pas été respectée car il y avait des possibilités de permutation au niveau du personnel dans le cadre du GIEC’; elle se réfère à ce sujet à la lettre de licenciement qui, selon elle, le démontre. Elle allègue que l’employeur n’a fait aucune proposition de poste et que pour cette raison son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Mme [Y] fait état d’un calcul erroné de la part de son employeur s’agissant des congés payés, le nombre exact étant de 47,5 jours. Elle explique avoir droit à un maintien de salaire du 3 juillet au 18 août 2015.
Elle invoque le manquement de l’employeur à son obligation conventionnelle de cotiser à une prévoyance au visa de la partie VI de la convention collective.
Elle explique que l’employeur ne lui a pas remboursé comme il convenait ses frais kilométriques.
L’UNEDIC Délégation AGS CGEA de MARSEILLE, suivant conclusions notifiées par RPVA le 14 janvier 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé, demande’de’:
– ordonner la révocation de l’ordonnance prononçant la clôture de l’instruction le 14 janvier 2022′;
Au principal,
– mettre hors de cause’l’UNEDIC Délégation AGS CGEA de MARSEILLE, la société ESAD, venant aux droits de la société VITAME SERVICES étant in bonis ;
Subsidiairement,
– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes le 26 juillet 2018 en ce qu’il a débouté Mme [Y] de ses demandes de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral, de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure, de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de cotiser à une caisse de prévoyance, de rappel de congés payés, de rappel de salaire sur frais kilométriques’;
– infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes le 26 juillet 2018 en ce qu’il a considéré que le licenciement de Mme [F] [Y] est sans cause réelle et sérieuse et lui a alloué des sommes au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, du solde de l’indemnité légale de licenciement, de l’indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents, de rappel de salaire’;
– débouter Mme [F] [Y] de ses demandes’;
Infiniment subsidiairement,
– réduire les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
– juger qu’en l’état du plan de redressement en date du 18 septembre 2018, la garantie de l’AGS ne pourra être que subsidiaire conformément aux dispositions de l’article L 3253-20 du code du travail’;
En tout état de cause,
– fixer toutes créances en quittance ou deniers’;
– dire et juger que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux articles L 3253-6 à 8 du code du travail (anciens articles L 143.11.1 et suivants) que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-15 (ancien article L 143.11.7) et L 3253-17 (ancien article L 143.11.8) du code du travail’;
– dire et juger que la garantie de l’AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l’article D 3253-5 du code du travail’;
– dire et juger que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement’;
– dire et juger que les demandes d’astreinte et d’article 700 du code de procédure civile ne rentrent pas dans le cadre de la garantie de l’AGS.
L’UNEDIC Délégation AGS CGEA de MARSEILLE sollicite la révocation de l’ordonnance de clôture pour lui permettre de faire valoir ses conditions de garantie au regard de la situation de la société ESAD venant aux droits de la société VITAME SERVICES. Elle énonce qu’elle doit être mise hors de cause car l’employeur, qui a conclu en son seul nom, est in bonis’; elle précise qu’il n’y a pas de mention au Kbis du redressement et du plan de redressement par voie de continuation.
Sur le fond, s’agissant du licenciement, l’UNEDIC Délégation AGS CGEA de MARSEILLE reprend l’argumentation de l’employeur, à savoir pour l’essentiel que ce dernier a satisfait à son obligation de recherche de reclassement. Elle rappelle que la recherche de reclassement au sein d’un groupe ne doit être réalisée que lorsque l’existence dudit groupe est établie, la permutation de tout ou partie du personnel devant être possible, ce qui n’est pas le cas dans le cadre du GIE concerné par le présent litige.
S’agissant du surplus des demandes de Mme [Y], l’UNEDIC Délégation AGS CGEA de MARSEILLE, pareillement, développe des moyens similaires à ceux de l’employeur.
MOTIVATION
Sur la demande de révocation de l’ordonnance de clôture
la cour constate que Mme [Y] et La société ESAD, ont conclu postérieurement à la date de la clôture, et que l’UNEDIC Délégation AGS CGEA de MARSEILLE a conclu le jour de la clôture. Par ailleurs, La société ESAD représentée par Maître [B] [R], ès qualités, ne s’oppose pas à la demande de révocation formulée par Mme [Y]’et les AGS ; il y sera donc fait droit.
Sur le licenciement
Par avis du 3 juin 2015, le médecin du travail a conclu à une inaptitude définitive de Mme [Y] à son poste de travail en raison d’un danger immédiat, l’avis précisant que l’inaptitude concernait tous les postes de l’entreprise.
Mme [Y] a été par la suite licenciée par courrier recommandé avec accusé de réception du 18 août 2015 pour inaptitude physique et physiologique avec impossibilité de procéder au reclassement. Aucune pièce ne démontre que l’inaptitude est liée à une maladie professionnelle ou un accident du travail.
L’article L 1226-2 du code du travail, applicable à l’époque du licenciement énonce’:
«’Lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités.
Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise.
L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en ‘uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.’»
L’employeur a l’obligation de rechercher un reclassement aussi bien dans l’entreprise qu’au sein du groupe auquel l’entreprise appartient. L’obligation de reclassement est une obligation de moyens.
Mme [Y] reproche à son employeur un manquement à son obligation de recherche de reclassement au sein du GIEC auquel il appartenait.
La société ESAD verse aux débats un courrier du 18 juin 2015 adressé en réponse à l’employeur par le médecin du travail dans lequel celui-ci explique qu’il n’est pas en mesure d’indiquer une quelconque orientation en matière de préconisations pour la recherche d’un poste de reclassement, qu’il s’agisse du type de poste à proposer, d’une mutation, transformation ou aménagement de poste. Le médecin précise qu’il n’est pas prévu légalement que la recherche s’étende à d’autres entreprises que celle employant Mme [Y].
L’employeur énonce avoir quand même fait des recherches, pour des emplois d’assistante de vie, de chauffeur et de responsable secteur, mais n’en rapporte pas la preuve. Il convient toutefois de constater que Mme [Y] ne conteste pas que le reclassement était impossible au sein de l’entreprise.
La lettre de licenciement du 18 août 2015 cependant précise expressément’: «’Toute mesure de reclassement au sein du GIEC s’avère inadaptée.’» Il en découle du propre aveu de l’employeur que celui-ci estimait qu’un reclassement était possible dans le cadre du GIEC. Cependant il ne produit aucune pièce justifiant des recherches qu’il aurait effectuées et qui n’auraient pas abouti. la cour considère par conséquent que l’employeur ne démontre pas avoir respecté son obligation de recherche de reclassement’; le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur la demande de rappel de salaire
Mme [Y] sollicite à titre principal, dans le dispositif des conclusions produites par son avocate, à la fois la confirmation du jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il lui a alloué la somme de 238,43’€ pour un rappel de salaire, et son infirmation en ce qu’il lui a refusé la somme 1 832,33’€ au même titre.
Le rappel de salaire concerne la période du 3 juillet au 18 août 2015. Mme [Y] ne fournit aucune explication sur le fondement légal de sa demande mais elle ressort manifestement de l’application de l’article L1226-4 alinéa 1er du code du travail. La société ESAD ne conteste pas, quant à son principe, la demande de paiement d’un rappel de salaire’; elle ne conteste que le quantum réclamé.
L’employeur, en effet, expose que Mme [Y] a déjà reçu la somme de 1593,90’€ et qu’il ne reste dû que celle de 145’€ nets. La SARLU ESAD, pour justifier ses dires, produit, sans plus de commentaires, un bulletin de paie qui mentionne un paiement de 1593,90’€ au titre des «’Heures normales exo ADD’» et treize pages de relevés du compte bancaire de l’entreprise souscrit auprès de la BANQUE POPULAIRE COTE D’AZUR, pareillement sans aucun commentaire’; un bulletin de paie ne démontre pas la réalité d’un paiement et les relevés de compte sont inexploitables en l’absence d’explication, la cour ne retrouvant pas les paiements concernés. La société ESAD explique, de plus, s’appuyer sur un chèque établi par le cabinet d’expertise comptable justifiant selon elle d’un solde de 145’€, chèque dont la cour n’a pas trouvé traces dans les pièces communiquées. Ainsi la cour considère que l’employeur ne justifie pas du paiement. Il sera fait droit à la demande de Mme [Y] pour la somme de 1 832,33’€.
Sur la demande au titre de l’indemnité légale de licenciement
Le conseil de prud’hommes a alloué à Mme [Y] la somme de 587,73’€ nets dont Mme [Y] réclame la confirmation, Mme [Y] à la lecture du jugement n’ayant reçu que la somme de 224,87’€ sur une indemnité due de 812,60’€. La société ESAD énonce que Mme [Y] a reçu le solde demandé et reproduit dans ses conclusions un extrait de son relevé de compte bancaire pour justifier du paiement, ainsi que les treize pages de relevés du compte bancaire de l’entreprise souscrit auprès de la BANQUE POPULAIRE COTE D’AZUR. L’avocate de la société ESAD n’a pas cru utile de préciser sur quelle page la cour serait en mesure de retrouver la trace du paiement. la cour a examiné lesdites pages et n’a pas trouvé les sommes mentionnées dans les conclusions. la cour considère que la société ESAD ne justifie pas de son paiement’; il sera fait droit à la demande de Mme [Y].
Sur la demande au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
La société ESAD demande qu’il ne soit pas alloué plus de 7 170’€ à Mme [Y], le conseil de prud’hommes ayant fixé une somme d’un montant de 14340’€ pour 12 mois de salaire. Elle expose que Mme [Y] a une ancienneté inférieure à 3 ans et ne justifie pas d’un préjudice.
L’article L 1235-3 du code du travail, en vigueur à la date du licenciement, énonce’:
«’Si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L 1234-9.’»
Il sera alloué à Mme [Y], compte tenu de son ancienneté et sur la base d’un salaire mensuel de 1195’€ bruts, une indemnité équivalente aux six derniers mois de salaire, soit 7 170’€.
Sur la demande de rappel de congés payés
Mme [Y] sollicite le paiement de la somme de 1 893,52’€. Dans le cadre des conclusions de son avocate, il est mentionné’: «’le nombre de jours de congés payés est erroné 30 jours en cours + le nombre N-1 10 jours + les congés payés de l’année en cours pour juin juillet et août 2015. SOIT 47.5 jours de congés payés soit la somme de 1893.52’». Le conseil de Mme [Y] ne fournit pas plus d’explications, ne produit aucune pièce, et se contente de ce libellé laconique.
La société ESAD énumère par voie de conclusions les décomptes des jours de congés pris par année, du 31 mai 2011 au 25 mars 2015, Mme [Y] ayant été recrutée le 5 avril 2012 et les congés se calculant du 31 mai N-1 au 1er juin N, décomptes auxquels Mme [Y] n’a pas cru opportun de répondre. La société ESAD ne produit également aucune pièce à l’appui de son énoncé mais expose que Mme [Y] a été réglée de ses droits.
Face au déficit d’explications de Mme [Y] à qui il revient de justifier ses prétentions en sa qualité de demandeur, la cour ne peut que constater que la demande n’est pas fondée.
Sur la demande au titre du harcèlement moral
Dans la partie discussion des conclusions produites par l’avocate de Mme [Y], aucun moyen n’est invoqué à l’appui de la demande au titre du harcèlement moral. Ainsi la cour, faute de moyens, n’a pas à examiner cette prétention qui sera rejetée.
Sur la demande d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement
Il ressort de l’article L.’1235-2 du code du travail le salarié, indemnisé au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, ne peut prétendre au paiement d’une indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement. Mme [Y] sera par conséquent déboutée de sa demande de ce chef.
Sur la demande de rappel de salaire sur frais kilométriques
Mme [Y] expose avoir été remboursée à tort de ses frais kilométriques sur la base de 0,47 €. Sur la base des explications laconiques de son avocate, elle précise que «’l’employeur encaissait les frais kilométriques 0.56’€ et remboursait les salariés 0.47’€.’» Elle se réfère à des bulletins de paie, non produits à ce titre.
La société ESAD réplique que Mme [Y] confond la facturation des frais kilométriques aux clients, en l’espèce la somme de 0,56 euro qui représente une moyenne de l’indemnité kilométrique, avec l’indemnité kilométrique attribuée aux salariés. Elle explique par ailleurs que la convention collective des services à la personne fixe un montant minimum de l’indemnité kilométrique due aux salariés à hauteur de 0,12 euro par kilomètre’; elle produit les dispositions de la dite convention applicables en la matière du 1er novembre 2014 au 1er juillet 2016, confirmant le montant de l’indemnité à 0,12 euro par kilomètre. La demande de Mme [Y] est par conséquent infondée.
Sur la demande de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation conventionnelle de souscrire une prévoyance
Mme [Y] s’appuie sur la partie VI de la convention collective imposant selon elle l’obligation de souscription que l’employeur n’aurait pas respectée’; elle réclame la somme de 5 500’€ correspondant à sa perte de salaire au regard de la différence entre son salaire et les indemnités journalières qui lui ont été versées par la Sécurité sociale, après déduction des compléments de salaire de novembre 2014 au 31 mai 2015 qu’elle aurait dû percevoir. Elle ne produit aucune pièce explicative à l’appui de sa demande.
La société ESAD énonce qu’en vertu de l’arrêté d’extension du 4 mai 2014, la partie VI relative à la protection sociale est exclue de l’extension. L’arrêté est produit aux débats’; il est en date du 3 avril 2014, et non 4 mai 2014, et s’intitule «’Arrêté portant extension de la convention collective nationale des entreprises de services à la personne (n° 3127).’»
Le dernier alinéa de son article 1 expose’: «’La partie VI relative à la protection sociale est exclue de l’extension en tant qu’elle prévoit un régime conventionnel de prévoyance fondé sur une clause de désignation d’organismes assureurs et une clause de migration, pris en application de l’article L. 912-1 du code de la sécurité sociale, déclaré contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2013-672 DC du 13 juin 2013.’»
Mme [Y] s’appuie par conséquent sur des dispositions qui ne s’appliquent plus’; sa demande est infondée.
Sur le surplus des demandes’:
Mme [Y] sollicite la fixation d’une astreinte de 100’€ par jour de retard’; elle n’en justifie aucunement le fondement dans ses conclusions. Il ne sera donc pas fait droit à sa demande.
Les intérêts légaux sont de droit, et il sera fait droit à la demande de capitalisation, au visa de l’article 1343-2 du Code civil, les parties adverses ne s’y opposant pas.
L’UNEDIC Délégation AGS CGEA de MARSEILLE énonce qu’au vu de l’extrait du registre du commerce et des sociétés du 12 janvier 2022 versé aux débats, la société ESAD semble être in bonis.
Il ressort cependant de l’acte de cession de parts sociales du 7 avril 2021 de la société ESAD versé aux débats par celle-ci à la demande de la cour que, par assemblée générale du 19 novembre 2018, la société VITAME SERVICES TOULON est devenue la SARLU ESAD. Par ailleurs, il est de principe que l’AGS ne peut refuser sa garantie au motif que l’entreprise dont la cessation de paiement a justifié l’ouverture de la procédure collective, se trouve à nouveau’in bonis’par l’effet du du’plan de redressement’. La demande de mise hors de cause n’est donc pas fondée.
Le licenciement ne résultant pas d’une cause réelle et sérieuse, il conviendra en conséquence de faire application des dispositions de l’article L 1235-4 du code du travail et d’ordonner le remboursement par l’employeur des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour de la présente décision et ce dans la limite de deux mois d’indemnités de chômage.
la cour, au vu des contestations émises à ce titre par la société ESAD, considère qu’en raison de l’équité le conseil de prud’hommes a fait une juste appréciation des demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens.
S’agissant de la procédure d’appel, l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et chaque partie supportera la charge des dépens qu’elle a engendrés.
PAR CES MOTIFS
la cour, Statuant publiquement et par jugement contradictoire,’après en avoir délibéré conformément à la loi,
DIT la société ESAD, venant aux droits de la société VITAME SERVICES TOULON, représentée par Maître [B] [R], ès qualités de mandataire judiciaire, recevable en son appel’;
PRONONCE la révocation de l’ordonnance de clôture et fixe la date de la nouvelle clôture au jour de l’audience de plaidoirie’;
INFIRME le jugement du 26 juillet 2018 du conseil de prud’hommes de TOULON en ce qu’il a fixé au passif du redressement judiciaire de la société VITAME SERVICES représenté par le mandataire judiciaire Maître [B] [R] au profit de Mme [F] [Y] la somme de 238,43’€ au titre d’un rappel de salaire et la somme de 14 340’€ au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
Statuant à nouveau,
FIXE passif du redressement judiciaire de la société VITAME SERVICES représentée par Maître [B] [R], mandataire judiciaire, aux droits de laquelle vient la société ESAD, les sommes suivantes’:
. 1 832,33’€ au titre d’un rappel de salaire,
. 7 170’€ au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse’;
CONFIRME le jugement pour le surplus’;
DIT que les condamnations seront assorties des intérêts au taux légal avec anatocisme’;
ORDONNE le remboursement par La société ESAD, , des indemnités de chômage versées à Mme [F] [Y] du jour de son licenciement au jour de la présente décision et ce dans la limite de deux mois d’indemnités de chômage’;
DIT n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile’;
DIT que chaque partie supportera la charge des dépens qu’elle a engendrés.
Le Greffier Le Président