ARRET
N° 185
S.A.S. [7]
C/
CARSAT NORMANDIE
COUR D’APPEL D’AMIENS
TARIFICATION
ARRET DU 23 JUIN 2023
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N° RG 22/04265 – N° Portalis DBV4-V-B7G-IR2I
DECISION DE LA CARSAT NORMANDIE EN DATE DU 29 juin 2022
PARTIES EN CAUSE :
DEMANDEUR
S.A.S. [7] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée et plaidant par Me TREVET, avocat au barreau de PARIS substituant Me Guillaume BREDON de la SAS BREDON AVOCAT, avocat au barreau de PARIS
ET :
DÉFENDEUR
CARSAT NORMANDIE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 9]
Représentée et plaidant par Mme [U] [M] dûment mandatée
DÉBATS :
A l’audience publique du 07 Avril 2023, devant M. Pascal HAMON, Président assisté de Monsieur Jean-Pierre LANNOYE et Monsieur Pierre COURTOIS, assesseurs, nommés par ordonnances rendues par Madame la Première Présidente de la Cour d’appel d’Amiens les 03 mars 2022, 07 mars 2022, 30 mars 2022 et 27 avril 2022.
M. Pascal HAMON a avisé les parties que l’arrêt sera prononcé le 23 Juin 2023 par mise à disposition au greffe de la copie dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme Audrey VANHUSE
PRONONCÉ :
Le 23 Juin 2023, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. Pascal HAMON, Président et Mme Blanche THARAUD, Greffier.
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DECISION
La société [7] exerce une activité de mandataire sur le marché des services à la personne.
Elle emploie 13 salariés.
Elle se voit appliquer les codes risques 93.ONC « Services personnels divers (y compris cabinets de graphologie, agences matrimoniales) » et 85.3AB « Services d’aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères…) ».
La caisse d’assurance retraite et de la santé au travail de Normandie (ci-après la CARSAT ou la caisse) a appliqué le taux résultant de ces codes risques.
Par courrier du 11 mai 2022, la société [7] a contesté ce classement pour six de ces établissements situés à [Localité 8], [Localité 5], [Localité 9] (2), [Localité 6] et [Localité 4].
Par décision du 29 juin 2022, la CARSAT a rejeté le recours de la société [7] en date du 11 mai 2022 et a maintenu l’application des taux résultant des précédents codes risques.
Par acte d’huissier de justice délivré le 30 aout 2022, la société [7] a fait assigner la CARSAT Normandie d’avoir à comparaître devant la cour d’appel d’Amiens à l’audience du 7 avril 2023.
Par conclusions visées par le greffe le 21 septembre 2022, la société [7] s’en rapportant à ses conclusions prie la cour de :
Déclarer son action recevable ;
Infirmer la décision de la CARSAT de modifier le classement des établissements de la société [7] au titre de l’assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles ;
Juger que l’activité des établissements de la société [7] doit être classée sous le code risque 74.1GB « Groupement d’employeurs. Coopératives d’activité et d’emploi. Services divers rendus principalement aux entreprises non désignées par ailleurs » à compter de leurs dates respectives de créations en termes de tarification ;
Ordonner à la CARSAT de recalculer en conséquence les taux de cotisation AT/MP des établissements de la société [7] située [Adresse 3] à compter de leurs dates respectives de création en termes de tarification ;
Condamner la CARSAT à verser à la société [7] la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens de l’instance.
Au soutien de ses demandes, la société [7] fait valoir qu’elle dispose d’un intérêt à agir dès lors que les codes risques auxquels elle est soumise ont une incidence sur les taux des cotisations d’accidents du travail de ses établissements.
En outre, la société [7] souligne qu’elle est un intermédiaire en prestations de services à la personne et que les contrats la liant à ses clients sont des mandats de réalisation des formalités administratives de paiements. Aussi, la société demanderesse soutient qu’elle n’est pas l’employeur des salariés de maison intervenant au domicile des particuliers. Partant, elle fait valoir qu’elle n’effectue que des tâches administratives et que les numéros de risques actuels auxquels elle est soumise ne sont pas appropriés à son activité principale.
Au surplus, la société [7] fait valoir que la Caisse ne justifie pas son classement sous les codes risques 93.0NC et 85.3AB auxquels elle reste soumise.
La caisse de retraite et santé au travail de Normandie par conclusion du 7 avril 2023 visés par la greffe s’en rapportant à ses conclusions demande à la cour de:
PRONONCER l’irrecevabilité pour forclusion du recours pour les taux de cotisation accidents du travail et maladies professionnelles
-2020 des établissements 00029, 00037, 00045,
-2021 des 00029, 00037, 00045, 00052 et 00060, -2022 des établissements 00029, 00037, 00045, 00052 et 00060.
Juger que toute éventuel modification du classement de ces établissements ne pourrait en tout état de cause avoir lieu qu’à compter de l’exercice 2023.
Confirmer le classement des établissements 00078, 00037, 00045, 00060, 00029 de la Société [7] sous le code risque 93.ONC.
Confirmer le classement de l’établissement 00052 sis à [Localité 6] sous le code risque 85.3AB pour les exercices 2021 et 2022 et sous le code risque 93.0NC à effet du 1 et janvier 2023.
Confirmer la décision de la CARSAT du 29 juin 2022 par laquelle elle a rejeté le recours gracieux de la Société [7].
Débouter la société [7] de l’ensemble de ses demandes.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des prétentions et moyens
Motifs
Sur la forclusion
L’article R 142-1-A-III du Code de la sécurité sociale dispose que « III.- S’il n’en est disposé autrement, le délai de recours préalable et le délai de recours contentieux sont de deux mois à compter de la notification de la décision contestée. Ces délais ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision contestée ou, en cas de décision implicite, dans l’accusé de réception de la demande. ».
En d’autres termes, le recours de l’employeur doit donc être introduit dans un délai de deux mois à compter de la date de réception de la notification par la CARSAT du taux de cotisation AT/MP.
Au cas où le requérant aurait, au préalable, dans le délai de 2 mois suivant la notification du taux, saisi la CARSAT d’une réclamation gracieuse, le délai de recours devant la cour d’appel d’Amiens court du jour où est notifiée la décision de la CARSAT sur le recours gracieux.
Les établissements concernés sont les suivants :
-78 [Localité 8]
-29 [Localité 5]
-45 [Localité 9]
-52 [Localité 6]
-60 [Localité 4]
-37 [Localité 9]
Sur les taux 2020
La CARSAT de NORMANDIE demande à la cour de prononcer la forclusion du recours pour les taux de cotisations 2020 des accidents du travail et maladies professionnelles des établissements 29 [Localité 5], 37 [Localité 9], 45[Localité 9].
La société n’ayant pas contesté ces éléments, il y a lieu de faire droit à cette demande de forclusion
Sur les taux 2021
La CARSAT NORMANDIE demande à la cour de prononcer la forclusion du recours pour les taux de cotisation 2021des accidents du travail et maladies professionnelles des établissements 29, 37, 45, 52 et 60.
Au regard des dispositions visées à l’ancien article R. 143-21 du Code de la sécurité sociale, les taux de cotisation d’accidents du travail deviennent définitifs à l’issue du délai de deux mois suivant leur notification à l’employeur.
Les articles 665 et suivants du nouveau code de procédure civile disposent cependant que la date de remise d’une notification par voie postale est, à l’égard de la partie à laquelle elle est faite, la date de réception de la lettre.
Il appartient donc à la partie qui soutient qu’un recours est irrecevable comme anticipé de rapporter la preuve de l’inobservation des délais dans lesquels ce recours doit être exercé.
Dans le cas présent, la caisse régionale d’assurance maladie doit donc, pour opposer l’irrecevabilité de la contestation du taux 2021 et sans renverser la charge de la preuve, établir soit la date de l’émargement ou du récépissé contre lequel a été effectuée la remise du pli, soit la date de réception apposée par l’administration des postes lors de la remise de la lettre à son destinataire.
La caisse régionale d’assurance maladie ne verse aux débats aucun document de nature à administrer la preuve requise, de sorte que les délais de recours n’ont pu commencer à courir pour la contestation du taux 2021.
En conséquence, la fin de non-recevoir opposée par la caisse régionale d’assurance maladie de Normandie doit être écartée pour le taux 2021.
Sur les taux 2022
La CARSAT NORMANDIE demande à la cour de prononcer la forclusion du recours pour les taux de cotisation 2022des accidents du travail et maladies professionnelles des établissements 29, 37, 45, 52 et 60.
Les décisions de taux annuelles à effet au 1er janvier 2022 ont été notifiées de manière dématérialisée à la société.
En l’espèce, l’introduction d’un recours gracieux par la Société n’a eu lieu que le 11 mai 2022 alors que pour les établissements 29, 37, 45, 52 et 60, les taux de cotisation accidents du travail maladies professionnelles avaient été notifiés depuis le 11 janvier 2022 à défaut de consultation de la décision dans un délai de 15 jours soit depuis plus de deux mois.
Seul le taux de cotisation accidents du travail maladies professionnelles de l’établissement 78 sis à [Localité 8] créé le 13 juin 2022 a été notifié le 3 août 2022.
Les taux de cotisation accidents du travail et maladies professionnelles 2022 des établissements 29, 37, 45, 52 et 60 sont donc devenus définitifs. Il y a lieu de faire droit à la demande de forclusion relevée par la carsat de Normandie.
Sur le classement des établissements de la société [7]
Les statuts de la société [7] précisent que « la société a pour objet les services à la personne à leur domicile ainsi que l’assistance administrative de ces personnes ».
La société [7] se définit comme un intermédiaire en prestations de services à la personne. Elle décrit son activité comme consistant à mettre en relation des employés de maison et des particuliers employeurs, en qualité de mandataire et à réaliser les formalités administratives qui incombent à ses clients en leur qualité d’employeur.
La société [7] estime dès lors qu’elle n’est pas l’employeur des employés de maison qui interviennent au domicile des particuliers. Elle s’occupe en revanche de la prise en charge des tâches administratives et formalités à la place de ses clients « particuliers employeurs ».
La carsat considère qu’il n’y a pas à faire une telle distinction conformément à la jurisprudence, le code risque choisi par ses services s’applique aux établissements offrant des prestations tant par le placement de travailleurs auprès de personnes physiques employeurs que par la fourniture de prestations de services aux consommateurs, la nature de l’activité du cotisant étant strictement identique dans les deux cas.
Il y a lieu de rappeler que aux termes de l’alinéa 2 de l’article D. 242-6-1 du code de la sécurité sociale
« Le taux de la cotisation due au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles est déterminé par établissement.
« Le classement d’un établissement dans une catégorie de risque est effectué en fonction de l’activité exercée selon une nomenclature des risques et des modalités fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale
En l’espèce, la société [7] conteste le classement de ses établissements sous le code risque 93.0NC « Services personnels divers (y compris cabinets de graphologie, agences matrimoniales) » et le classement sous le code risque 85.3AB « Services d’aide sociale à domicile (auxiliaires de vie, aides ménagères » de l’établissement 52 en 2021 et 2022 et sollicite son reclassement sous le code risque 74. IGB « Groupements d’employeurs. Coopératives d’activité ct d’emploi. Services divers rendus principalement aux entreprises non désignés par ailleurs ».
La cour observe d’abord que le KBIS de la société mentionne « activité de service à la personne à domicile ».
Il apparaît au vu des déclarations d’activités par la société auprès du CFE que les activités déclarées sont les suivantes : pour l’établissement 29 « services à la personne à domicile et assistance administrative de ces personnes » puis « aide à domicile », pour les établissements 37 et 45 « aide à domicile » ; pour l’établissement 60 « service à la personne à domicile et assistance administrative de ces personnes ménage et repassage chez les » puis « aide à domicile » ; pour l’établissement 78 « aide à domicile » .
La cour relève par ailleurs qu’il résulte des pièces produites par la société que son activité, exercée par les coordinatrices et responsables de secteur, consiste à recruter des aides à domicile, organiser, suivre et assurer la qualité des prestations d’aide à domicile. La fonction de ces salariés est d’analyser les besoins des clients, de superviser et de contrôler la qualité de la prestation. Le code risque 85.3 AB ne fait aucune distinction suivant que l’activité est exercée en mode prestataire ou en mode mandataire, la nature de l’activité du cotisant étant strictement identique dans les deux cas. La société exerce en conséquence une activité de services d’aide sociale à domicile.
Il y a lieu par ailleurs de constater que le classement revendiqué par la société74. IGB « Groupements d’employeurs. Coopératives d’activité et d’emploi. Services divers rendus principalement aux entreprises non désignés par ailleurs » concerne essentiellement les services accordés aux entreprises donc à des professionnels ce qui est en contradiction avec son activité auprès des particuliers. Le groupement d’employeurs permet à ses membres de se regrouper pour employer une main-d »uvre qu’ils n’auraient pas, seuls, les moyens de recruter.
Dans ces conditions, il ressort de l’ensemble des pièces produites par les parties que la société exerce une activité principale de service d’aide à domicile et de gestion de celui ‘ci. La cour constate dès lors que les codes risque 93.0NC « Services personnels divers (y compris cabinets de graphologie, agences matrimoniales). » et le code risque 85.3AB « Services d’aide sociale à domicile auxiliaires de vie, aides ménagères » sont les plus adaptés à l’activité réelle de la société nonobstant son fonctionnement dans le cadre de mandat administratif.
Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter l’ensemble des demandes de la société [7] au titre de la modification de son classement.
Sur l’article 700 et sur les dépens
La société [7] qui succombe en ses prétentions, est déboutée de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile, et condamné au paiement des dépens conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Par ces motifs
La cour, statuant par un arrêt rendu par mise à disposition greffe, contradictoire, en dernier ressort,
Déclare irrecevable pour forclusion la contestation de la société et [7] au titre du taux des années 2020 et 2022.
Déclare recevable son recours en contestation du taux de l’année 2021.
Mais le déclarant mal fondé
Déboute la société de l’ensemble de ses demandes,
Condamne la société aux dépens,
Le Greffier, Le Président,