ARRET N° 22/115
R.G : N° RG 21/00044 – N° Portalis DBWA-V-B7F-CGTX
Du 20/05/2022
[H]
C/
S.C.P. BR ASSOCIES, MANDATAIRE LIQUIDATEUR DE L’ASSOCIATI ON CAD’HOME
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE FORT-DE-FRANCE
COUR D’APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU 20 MAI 2022
Décision déférée à la cour : jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de FORT DE FRANCE, du 20 Mai 2020, enregistrée sous le n°
APPELANTE :
Madame [C] [B] [H]
[Adresse 2]
[Localité 4] (MARTINIQUE)
Représentée par Me Ferdinand EDIMO NANA, avocat au barreau de MARTINIQUE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/002019 du 14/01/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de FORT DE FRANCE)
INTIMEES :
S.C.P. BR ASSOCIES, MANDATAIRE LIQUIDATEUR DE L’ASSOCIATI ON CAD’HOME
[Adresse 5]
[Localité 3]
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 3] prise en la personne de son représentant légal en exercice
[Adresse 1]
[Localité 3]/FRANCE
Représentée par Me Catherine RODAP, avocat au barreau de MARTINIQUE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 18 mars 2022, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Emmanuelle TRIOL, Conseillère présidant la chambre sociale, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :
– Madame Emmanuelle TRIOL, Présidente
– Madame Anne FOUSSE, Conseillère
– Monsieur Thierry PLUMENAIL, Conseiller
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Rose-Colette GERMANY,
DEBATS : A l’audience publique du 18 mars 2022,
Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l’arrêt fixée au 20 mai 2022 par mise à disposition au greffe de la cour.
ARRET : Réputé Contradictoire
***************
EXPOSE DU LITIGE :
Suivant contrat à durée déterminée du 6 septembre 2010, Mme [C] [H] a été embauchée par l’ASSOCIATION CAD’HOME en qualité d’auxiliaire de vie sociale jusqu’au 5 mars 2011 inclus pour faire face à un surcroit d’activité, pour 22heures hebdomadaires et une rémunération brute mensuelle de 1 024,29 euros.
Suivant contrat à durée déterminée du 3 mars 2011, la salariée a continué à travailler pour l’ASSOCIATION CAD’HOME en qualité d’auxiliaire de vie sociale, jusqu’au 5 septembre 2011 inclus pour faire face à un surcroit d’activité, pour 21 heures hebdomadaires et une rémunération brute mensuelle de 1 019,64 euros.
Elle a ensuite signé avec la même association un contrat à durée indéterminée et à temps plein, le 6 septembre 2011, en qualité d’auxiliaire de vie sociale et pour une rémunération brute mensuelle de 1 699,40 euros.
Un avenant au contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel modulé a été conclu à compter du 2 juillet 2012, suivant lequel la durée mensuelle de travail effectif de la salariée pourra varier à la hausse comme à la baisse du tiers de la moyenne mensuelle, soit entre 70 heures et 131,63 heures, sur tout ou partie de l’année.
Un second avenant signé le 31 juillet 2012 a porté la durée mensuelle de travail à 112,67 heures à compter du 1er août 2012 et pour une rémunération brute mensuelle de 1 284,21 euros.
Suivant une fiche médicale d’aptitude du 14 janvier 2015, Mme [H] a été déclarée inapte temporaire par le médecin du travail et la salariée a été placée en arrêt de travail jusqu’au 1er mars 2015. Le 5 mars 2015, le médecin du travail a rendu un avis d’aptitude à la reprise du travail à temps partiel thérapeutique à 50% et le 10 mars 2015, le médecin de Mme [H] a prescrit ce temps partiel pour raison médical du 10 mars au 5 juin 2015.
Par courriers recommandés du 7 mars 2015, l’ASSOCIATION CAD’HOME a notifié à la salariée deux avertissements.
Puis par lettre recommandée du 30 mars 2015, Mme [H] a été convoqué à un entretien préalable pour le 13 avril 2015 et par courrier recommandé du 23 avril 2015, la salariée a reçu la notification de son licenciement pour faute grave.
La lettre est rédigée comme suit :
(‘) «Nous vous informons que notre appréciation de la situation nous conduit à poursuivre la procédure de licenciement initiée à votre encontre pour les raisons qui vous sont citées ci-après.
Comme vous le savez, de par son agrément et sa certification QUALISAP, notre association de services à la personne que vous avez intégré le 10 mai 2010 (‘) est soumise à une réglementation stricte concernant notamment la qualité du service rendu, la satisfaction clientèle, le suivi des réclamations clients et la traçabilité des actions correctives, dans la mesure où nous intervenons auprès de personnes dites vulnérables.
Le 7 mars 2015, vous avez reçu un premier avertissement disciplinaire pour le fait que vous refusiez de dire bonjour en arrivant chez l’une de nos bénéficiaires et que vous refusiez également d’y faire le ménage alors que l’entretien du cadre de vie faisait pourtant parti de vos missions. Au vu de votre attitude, cette bénéficiaire a demandé un changement immédiat d’intervenante à domicile.
Le 7 mars 2015 vous avez reçu un second avertissement disciplinaire pour non-respect de vos horaires de travail chez un de nos bénéficiaires et non-respect des procédures puisque vous êtes partie avant l’heure sans autorisation de sortie de notre part. À cela s’ajoutent des allégations mensongères concernant vos conditions de travail chez ce même bénéficiaire d’ailleurs très affecté par cela et qui suite à vos propos a également souhaité un changement d’intervenante.
Le 23 mars 2015, nous avons reçu un courrier de plainte de Madame [P], s’ur d’une de nos bénéficiaires, dans lequel elle vous accuse «d’accumuler les mauvaises manières», de ne pas faire votre travail, de «ne rien respecter ni personne», et que sa s’ur «est très affectée par ce comportement au point de se rendre malade». Elle vous accuse également de ne pas respecter les horaires, de partir facilement une heure avant l’heure prévue au planning et «de faire signer de faux horaires» à sa s’ur «qui n’est pas consciente des écrits qui lui sont présentés». Elle considère dans son courrier que vous avez «abusé de la faiblesse» de sa s’ur.
Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur un tel courrier qui pourrait avoir de graves conséquences pour vous et pour notre structure si Madame [P] décidait de porter plainte auprès des autorités.
L’abus de faiblesse sur une personne vulnérable est un comportement inadmissible et totalement incompatible avec notre déontologie qui est d’ailleurs décrite à l’article trois du titre Ier de notre convention collective nationale de la branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile.
Aussi, nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien, même temporaire, dans notre structure.
Votre licenciement prendra effet à la date d’envoi du présent courrier, soit le 24 avril 2015, sans préavis ni indemnité de rupture».
Le 8 septembre 2015, Mme [H] a adressé à son employeur un courrier de contestation du reçu pour solde de tout compte et un courrier rectificatif du précédent.
Le 21 juillet 2016, Mme [C] [H] a saisi le conseil de prud’hommes de Fort de France en contestation de son licenciement et pour obtenir le paiement de différentes indemnités et sommes d’argent.
Par jugement contradictoire du 20 mai 2020, le conseil de prud’hommes a :
dit que le licenciement de Mme [H] est fondé,
débouté la demanderesse de l’ensemble de ses demandes,
l’a condamnée aux entiers dépens.
Le conseil a, en effet, considéré que la procédure de licenciement a été respectée et que le licenciement de la salariée pour faute grave est justifié.
Par déclaration électronique du 18 février 2021, Mme [C] [H] a relevé appel du jugement.
Par acte d’huissier de justice du 6 avril 2021, la déclaration d’appel a été signifiée à la SCP BR ASSOCIES, es qualité de mandataire liquidateur de l’ASSOCIATION CAD’HOME, à personne habilitée.
Par conclusions transmises par la voie électronique le 17 mai 2021 et signifiée au mandataire liquidateur de l’ASSOCIATION CAD’HOME, l’appelante demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de :
condamner solidairement Me [W], es qualités de liquidateur judiciaire de l’ASSOCIATION CAD’HOME et l’ASSOCIATION CAD’HOME à lui payer les sommes suivantes et à les fixer au passif :
12 000,00 euros, à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
1 284,21 euros, à titre d’indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,
1 154,69 euros, à titre d’indemnité légale de licenciement,
2 568,42 euros, à titre d’indemnité compensatrice de préavis,
103,56 euros, à titre de congés payés sur le préavis,
1 284,21 euros, au titre du non-respect de la clause de non-concurrence,
5 386,06 euros, à titre de rappel d’heures supplémentaires payées à 25 % pour les années 2010 à 2015,
230,58 euros, à titre de rappel d’heures supplémentaires payées à 50 % pour les années 2010 à 2015,
546,72 euros, à titre de rappel d’heures de travail effectuées non-payées, correspondant aux temps de déplacement entre deux clients pour les années 2011 à 2015,
1 594,60 euros, à titre d’indemnité pour non-respect des temps de repos hebdomadaires,
1 500,00 euros, à titre de discrimination liée à l’état de santé,
3 000,00 euros, à titre de dommages et intérêts pour discrimination syndicale,
3 000,00 euros, à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
2 000,00 euros, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
dire l’arrêt commun et opposable à l’AGS qui garantira les sommes fixées par l’arrêt à intervenir.
Au soutien de sa demande au titre de l’indemnité de procédure, elle indique que le courrier de convocation à l’entretien préalable n’a pas respecté le délai de 5 jours ouvrables entre la date de réception de la convocation par la salariée et la date de tenue de l’entretien.
Ensuite, elle fait valoir que l’employeur ne rapporte pas la preuve de la faute grave. Elle souligne que les griefs formulés à son encontre ne sont pas établis. Elle souligne encore que la notification d’une première sanction épuise son pouvoir disciplinaire, le licenciement ne pouvant être justifié par des faits antérieurs à mars 2015.
Elle affirme encore que le licenciement étant abusif, elle a droit au préavis et à l’indemnité de licenciement.
Elle fait valoir avoir produit des tableaux justifiant des heures de travail supplémentaires effectuées.
Elle souligne encore être victime de discrimination en raison de son appartenance à la CSTM et de son état de santé, ses conditions de travail entrainant une dégradation de son état.
Elle rappelle que le temps passé entre deux clients est du temps de travail effectif qui lui est dû.
Elle souligne que son employeur n’a pas déclaré les heures réellement travaillées et s’est donc rendu coupable de travail dissimulé.
Par conclusions remises au greffe le 15 juillet 2021 et signifiées le 21 juillet 2021 au mandataire liquidateur de l’ASSOCIATION CAD’HOME, l’ASSOCIATION UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE FORT DE France demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et subsidiairement de dire que sa garantie ne saurait excéder les limites de sa garantie légale.
A l’appui de ses prétentions, elle rappelle que les deux avertissements n’ont pas été contestés par Mme [H]. Elle souligne que la lettre de licenciement est précise et circonstanciée. Elle fait valoir que l’ASSOCIATION CAD’HOME a fait un récapitulatif des précédents manquements qui ont déjà été sanctionnés puis a énoncé le dernier manquement professionnel justifiant le licenciement, l’abus de confiance.
Elle rappelle que l’indemnité pour procédure non-respectée et l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne se cumulent pas.
Elle ajoute que la faute grave interdit à la salariée de prétendre à une indemnité légale de licenciement, à l’indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés sur ce préavis.
S’agissant de la clause de non-concurrence, elle expose qu’elle a été supprimée dans l’avenant et que Mme [H] fait une confusion entre clause de non-concurrence et la clause de loyauté.
Sur les heures supplémentaires, elle rappelle d’abord la prescription de trois ans. Elle ajoute que les tableaux produits par Mme [H] ont été établis par ses soins.
Sur le rappel d’heures au titre des déplacements entre deux clients, elle fait valoir que la prescription de trois ans s’applique encore, que la salariée ne justifie pas de sa réclamation à l’employeur et que la pièce produite a aété établie par la salariée.
Sur le repos hebdomadaire, elle affirme que Mme [H] n’apporte aucune preuve du non-respect du repos hebdomadaire par l’employeur.
Elle nie encore tout lien entre les sanctions prononcées et l’état de santé de la salariée ou son appartenance syndicale. Elle affirme encore que Mme [H] ne peut cumuler deux indemnités sur le même chef. Elle insiste sur l’absence de preuve de la discrimination syndicale.
S’agissant du travail dissimulé, elle rappelle qu’il appartient à Mme [H] de démontrer que son employeur déclare moins d’heures que le nombre d’heures effectivement travaillées.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 22 novembre 2021.
MOTIFS DE L’ARRET :
Sur le licenciement pour faute grave :
Aux termes de l’article L 1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.
Suivant les termes de l’article L 1235-1 du même code, le juge à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties (‘) ; il justifie dans le jugement qu’il prononce le montant des indemnités qu’il octroie; si un doute subsiste, il profite au salarié.
La lettre de licenciement, qui fixe les données du litige, comporte les motifs retenus par l’ASSOCIATION CAD’HOME pour justifier le licenciement de Mme [C] [H] pour faute grave. La cour doit donc rechercher si ces éléments sont réels et corroborées par les pièces produites aux débats.
La faute grave est celle qui rend impossible le maintien de la salariée dans l’entreprise. Le juge doit vérifier si les faits méritent la qualification de faute grave, voire de faute et si le licenciement ainsi prononcé pour faute grave est proportionné aux faits commis par la salariée.
Dans la lettre de licenciement, il est reproché à Mme [H] des faits qui ont fait l’objet d’un courrier de plainte de la s’ur d’une bénéficiaire du service à la personne, le 23 mars 2015. Or, cette lettre de Mme [P] expose ceci : «je me suis présentée à vos bureaux le 12 janvier 2015 vous informant du comportement de Mme [H] qui assure la prestation d’ASV au domicile de ma s’ur. En effet, Mme [H] accumule les mauvaises manières, ne fait pas son travail (‘). Depuis le début de sa prestation, elle ne respecte pas les horaires, part facilement une heure avant son heure de fin et fait signer de faux horaires à ma s’ur, qui n’est pas consciente des écrits qui lui sont présentés (‘)». Il en ressort que l’employeur était informé des griefs reprochés à sa salariée dès le 12 janvier 2015, et non le 23 mars 2015 comme indiqué dans la lettre de licenciement. Or, Mme [H] a fait l’objet d’un avertissement, le 7 mars 2015, pour des faits déjà signalés par Mme [P]. Au 7 mars 2015, l’employeur pouvait parfaitement reprocher à Mme [H] l’ensemble des éléments qui ont été portés à sa connaissance dès le 12 janvier 2015. En notifiant cet avertissement à l’encontre de sa salariée, l’ASSOCIATION CAD’HOME a épuisé son pouvoir disciplinaire et elle ne peut donc plus sanctionner Mme [H] à nouveau pour des faits antérieurs à la première sanction puisqu’elle avait déjà connaissance de ces faits et qu’elle ne démontre pas que ces derniers se sont répétés. Cette répétition ne saurait d’ailleurs avoir lieu puisque Mme [H] a été en arrêt maladie de mi-janvier jusque début mars 2015.
Ces faits qualifiés abusivement «d’abus des faiblesses» sont les seuls motifs contenus dans la lettre de licenciement. En effet, les deux avertissements notifiés le 7 mars 2015 sont déjà des mesures disciplinaires et les faits qui ont conduit à leur prononcé ne peuvent être sanctionnés une seconde foir par un licenciement pour faute.
Dès lors, les motifs énoncés par l’ASSOCIATION CAD’HOME ne peuvent constitués une faute de la salariée, encore moins une faute grave. Le licenciement de Mme [H] est donc dépourvu d’une cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris est infirmé de ce chef.
Sur les demandes en paiement du fait du licenciement :
Sur l’indemnité pour non-respect de la procédure :
Aux termes de l’article L1235-2 du code du travail dans sa version applicable au litige, si le licenciement d’un salarié survient sans que la procédure requise ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge impose à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.
Cependant, la jurisprudence considérait déjà, avant la modification de cet article de loi par l’ordonnance du 22 septembre 2017, que le salarié ne pouvait cumuler cette indemnité avec celle due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Au surplus, Mme [H] échoue à démontrer que le délai de convocation n’a pas été respecté, faute d’apporter aux débats un avis de réception du courrier de réception comportant une date lisible.
Cette demande est donc rejetée.
Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :
Aux termes de l’article L 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.
Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9.
L’ASSOCIATION CAD’HOME se trouve en liquidation judiciaire; la réintégration de la salariée est donc sans objet.
Le salaire brut mensuel de Mme [H] est de 1 284,21 euros. Il convient de lui octroyer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse égale à 8 mois de salaire, eu égard aux circonstances particulières qui ont entouré son licenciement et son ancienneté, soit la somme de 10 273,68 euros.
Sur l’indemnité légale de licenciement :
Aux termes de l’article L 1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte deux ans d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.
Le taux de cette indemnité est différent suivant que le motif du licenciement est économique ou personnel.
Les modalités de calcul sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.
Selon l’article R 1234-2 du même code dans la version applicable au litige, ans le cas d’un licenciement pour motif personnel, l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un dixième de mois de salaire par année d’ancienneté.
A partir de dix ans d’ancienneté, cette indemnité minimum s’élève à un dixième de mois de salaire plus un quinzième de mois par année d’ancienneté au-delà de dix ans.
Mme [H] comptait 4 ans et 7 mois d’ancienneté.
L’indemnité se calcule comme suit :
1 284,21 x 1/10 x 4 + 1 284,21 x 1/10 x 7/12= 588,60 euros
Mme [H] a droit à une indemnité légale de licenciement de 588,60 euros.
Sur l’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents :
Aux termes de l’article L 1234-1 3emme du code du travail, l’indemnité compensatrice de préavis est de deux mois si le salarié compte plus de deux ans d’ancienneté.
Il est octroyé à Mme [H] la somme de 2 568,42 euros au titre de l’indemnité, outre celle de 256,84 euros, au titre des congés payés afférents.
3- Sur les autres demandes en paiement au titre du contrat de travail :
Sur la demande au titre du non-respect de la clause de non-concurrence :
Il est constant que le premier avenant au contrat de travail a supprimé la clause de non-concurrence.
Dès lors, la demande est rejetée.
Sur le non-respect du repos hebdomadaire :
Mme [H] ne démontre pas que l’ASSOCIATION CAD’HOME contrevenait à la règle du repos hebdomadaire.
La demande est donc rejetée.
Sur la demande au titre du temps de déplacement entre deux clients :
Lorsque le salarié se déplace, au cours d’une journée de travail, pour aller d’un lieu de travail à un autre, ce temps de déplacement doit être considéré comme un temps de travail effectif puisque le salarié est à la disposition de son employeur et ne peut vaquer à des occupations personnelles.
Cependant, Mme [H] ne produit pas de justificatifs probants des temps passés entre deux lieux de travail.
Sa demande est donc rejetée.
Sur les heures supplémentaires :
Aux termes de l’article L 3121-28 du code du travail, toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.
Suivant les dispositions de l’article L 3121-36 du même code, à défaut d’accord, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire (…) donnent lieu à une majoration du salaire de 25% pour chacune des huit premières heures hebdomadaires. Les heures suivantes donnent lieu à une majoration de 50%.
L’article L 3171-4 du même code, explique qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.
Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Il est indiqué à l’article L 3245-1 du même code que l’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois dernières années précédant la rupture du contrat.
Cette durée de prescription existe depuis la loi du 14 juin 2013 et s’applique aux prescriptions en cours à compter du 16 juin 2013, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée de cinq ans prévue par la loi antérieure.
Le contrat de travail de Mme [H] a été rompu, le 24 avril 2015. La prescription se compte depuis cette date. Elle peut donc réclamer le paiement des heures supplémentaires effectuées à compter du 24 avril 2011.
Pour preuve des heures supplémentaires effectuées, il appartient à Mme [H] de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non-rémunérées qu’elle prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
A cet effet, Mme [H] produit un tableau des heures de travail accomplies, ses plannings et ses fiches de vacation. Les éléments qu’elle apporte sont conformes aux dispositions de son contrat de travail et de ses avenants. L’ASSOCIATION CAD’HOME est taisante en cause d’appel.
Les éléments présentés par Mme [H] sont suffisamment précis pour être pris en considération et faire la preuve des heures de travail effectivement effectuées.
La cour, après s’être livrée au calcul des heures énoncées, compte tenu de la prescription ci-avant rappelée, constate que Mme [H] a accompli à compter du 24 avril 2011 et jusqu’au 24 avril 2015, 314 heures supplémentaires donnant lieu à la majoration de 25% et 6,5 heures supplémentaires donnant lieu à la majoration de 50%.
Il est donc dû à Mme [H] la somme de 4 505,20 euros au titre des heures supplémentaires restées impayées.
4 – Sur les dommages et intérêts du fait de la discrimination :
Aux termes de l’article L 1132-1 du code du travail, (‘) aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte (‘) en raison de (‘) ses activités syndicales ou mutualistes, (‘) de son état de santé.
Suivant les dispositions de l’article L 1132-4 du même code, toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul.
Mme [H] n’a pas agi en justice pour demander la nullité de son licenciement pout discrimination. Elle a formé des demandes aux fins de voir juger que son licenciement est dépourvu d’une cause réelle et sérieuse.
A supposer la discrimination établie, la salariée ne peut cumuler les dommages et intérêts pour licenciement nul et licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Au demeurant son préjudice a été entièrement réparé puisque la cour a octroyé à Mme [H], au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, une somme représentant huit mois de salaire alors qu’au titre du licenciement nul, elle aurait eu droit à un montant représentant six mois de salaire, en application des dispositions de l’article L 1235-11 du code du travail.
5 – Sur la demande de dommages et intérêts au titre du travail dissimulé :
Aux termes de l’article L 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur (‘) de se soustraire intentionnellement (..) de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli (‘)
Selon les dispositions de l’article L 8223-1 du même code, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
L’intention de dissimulation de l’employeur est appréciée souverainement par le juge.
En l’espèce, les courriers de contestation du solde de tout compte du 8 septembre 2015 par lesquels Mme [H] réclame le paiement d’heures supplémentaires impayées sont insuffisants à démontrer que l’ASSOCIATION CAD’HOME connaissait les heures de travail effectivement accomplies par la salariée mais a intentionnellement omis de les faire figurer sur les bulletins de paie.
La demande de dommages et intérêts est donc rejetée.
6 – Sur la garantie de l’AGS et la fixation des sommes au passif :
Contrairement à la demande de Mme [H], la cour ne peut condamner l’ASSOCIATION CAD’HOME ou son mandataire liquidateur, es qualités, au paiement des sommes qui lui sont dues au titre du présent arrêt.
Du fait de la liquidation judiciaire prononcée à l’encontre de l’ASSOCIATION CAD’HOME, la juridiction fixe au passif de l’employeur l’ensemble des condamnations prononcées.
S’agissant de la garantie de l’AGS, elle ne peut concerner que les sommes dues en vertu du contrat de travail.
7 – Sur les dépens et les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile :
L’ASSOCIATION CAD’HOME, représentée par Me [W], es qualités de mandataire liquidateur est condamnée aux dépens et il est fixé au passif de l’association liquidée la somme de 2 000,00 euros, en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La Cour,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et, statuant à nouveau,
Dit que le licenciement de Mme [C] [H] pour faute grave est dépourvu d’une cause réelle et sérieuse,
Fixe au passif de l’ASSOCIATION CAD’HOME, représentée par Me [W], es qualités de mandataire liquidateur de l’ASSOCIATION CAD’HOME les sommes suivantes :
10 273,68 euros, au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
588,60 euros, au titre de l’indemnité légale de licenciement,
2 568,42 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 256,84 euros, au titre des congés payés afférents,
4 505,20 euros au titre des heures supplémentaires restées impayées,
Dit que l’ASSOCIATION UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE FORT DE France garantira l’ensemble de ses sommes dans les limites et conditions légales et réglementaires attachées à cette garantie,
Déboute Mme [C] [H] de ses autres demandes,
Condamne l’ASSOCIATION CAD’HOME, représentée par Me [W], es qualités de mandataire liquidateur de l’ASSOCIATION CAD’HOME, aux dépens,
Fixe au passif de l’ASSOCIATION CAD’HOME liquidée la somme de 2 000,00 euros an bénéfice de Mme [C] [H], en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Et ont signé le présent arrêt Mme Emmanuelle TRIOL, Présidente et Mme Rose-Colette GERMANY, Greffier
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,