Services à la personne : 15 juin 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 20/00004

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Services à la personne : 15 juin 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 20/00004

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 15 JUIN 2022

N° RG 20/00004

N° Portalis DBV3-V-B7E-TVMD

AFFAIRE :

[G] [R]

C/

S.A.R.L. CLEYADE SAINT-GERMAIN

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Novembre 2019 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Saint-Germain-en-Laye

N° Section : Commerce

N° RG : 18/00202

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

– Me Béranger BOUDIGNON

– Me Christine LUSSAULT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUINZE JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant fixé au 02 mars 2022 prorogé au 06 avril 2022 prorogé au 18 mai 2022 prorogé au 15 juin 2022 les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :

Madame [G] [R]

née le 25 Avril 1987 à [Localité 5] (Roumanie), de nationalité Roumaine

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Béranger BOUDIGNON, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1704

APPELANTE

****************

SARL CLEYADE SAINT-GERMAIN

N° SIRET : 519 617 286

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Christine LUSSAULT de la SELEURL CL AVOCAT, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0637 substitué par Me Clémentine FAGES , avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 janvier 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Jean-Yves PINOY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Jean-Yves PINOY, Conseiller,

Madame Perrine ROBERT, Vice-président placé,

Greffier lors des débats : Madame Carine DJELLAL,

FAITS ET PROCÉDURE,

Madame [G] [R] a été embauchée le 21 octobre 2013 par la S.A.R.L. Cleyade Saint-Germain par contrat à durée indéterminée à temps partiel pour 14heures par semaine, en qualité d’assistante ménagère.

Par avenant du 1er janvier 2015, la durée du travail a été fixée à temps plein.

En dernier lieu, la salariée occupait la fonction de gouvernante.

La société a pour activité les services à la personne, emploie au moins 11 salariés et relève de la convention collective nationale des services à la personne.

Le 11 avril 2018, la société a convoqué la salariée à un entretien préalable à une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement fixé au 20 avril 2018, assortie d’une mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre datée du 25 avril 2018, la société lui a notifié son licenciement pour cause réelle et sérieuse et l’a dispensée de l’exécution de son préavis de deux mois.

Mme [R] a saisi le conseil de prud’hommes de Saint Germain en Laye le 04 juillet 2018 afin de contester son licenciement et d’obtenir le versement de diverses sommes.

Par jugement du 28 novembre 2019, auquel la cour renvoie pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes de Saint Germain en Laye a :

– condamné la Sarl. Cleyade Saint-Germain à verser à Mme [R] la somme de 183,02 euros à titre de complément d’indemnité compensatrice de préavis’;

– condamné la Sarl Cleyade Saint-Germain à verser à Mme [R] la somme de 79,43 euros à titre de complément d’indemnité compensatrice de congés payés’;

– condamné la Sarl Cleyade Saint-Germain à verser à Mme [R] la somme de 71,64 euros à titre de complément d’indemnité légale de licenciement’;

– dit que la procédure de licenciement de Mme [R] est régulière’;

– dit que le licenciement de Mme [R] est fondé sur une cause réelle et sérieuse’;

– débouté Mme [R] du reste de ses demandes.

– débouté la Sarl Cleyade Saint-Germain de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

– laissé les dépens à la charge de chacune des parties pour ce qui la concerne.

Par déclaration du 1er janvier 2020, Mme [R] a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 05 août 2020, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, Mme [R], appelante, demande à la cour de :

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :

– dit et jugé que la procédure de son licenciement est régulière ;

– dit et jugé que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

– débouté du reste de ses demandes.

Et Statuant a Nouveau :

A titre principal :

– dire et juger que la privation de ses outils de travail et son congédiement de la société Cleyade Saint-Germain, le 10 avril 2018, constitue un licenciement verbal ;

– dire et juger que son licenciement verbal intervenu le 10 avril 2018 est irrégulier et sans cause réelle et sérieuse ;

A titre subsidiaire :

– dire et juger que les griefs exposés dans sa lettre de licenciement ne sont ni réels, ni sérieux ;

En conséquence :

– condamner la société Cleyade Saint Germain à lui verser les sommes suivantes :

– 10 391,23 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– 5 000 euros en réparation du préjudice résultant des conditions vexatoires de son licenciement ;

En tout état de cause :

– réformer sur le quantum le jugement entrepris en ce qu’il a :

– condamné la S.A.R.L. Cleyade Saint-Germain à lui verser la somme de seulement 183,02euros à titre de complément d’indemnité compensatrice de préavis, outre 18,30 euros de congés payés y afférents ;

– condamné la Sarl Cleyade Saint-Germain à lui verser la somme de seulement 79,43 euros à titre de complément d’indemnité compensatrice de congés payés ;

– condamné la Sarl Cleyade Saint-Germain à lui verser la somme de seulement 71,64 euros à titre de complément d’indemnité légale de licenciement ;

– condamner la société Cleyade Saint-Germain à lui verser les sommes suivantes :

– 49,74 euros à titre de complément d’indemnité compensatrice de préavis, outre 4,97 euros d’indemnité compensatrice de congés payés, en sus des sommes qui lui ont déjà été allouées au titre du jugement entrepris (183,02 euros bruts + 18,30 euros bruts) ;

– 102,36 euros bruts à titre de complément d’indemnité compensatrice de congés payés, en sus des sommes qui lui ont déjà été versées en exécution de l’ordonnance du 6 septembre 2018 (227,57 euros bruts) et du jugement entrepris (79,43 euros bruts).

– 116,05 euros à titre de complément d’indemnité légale de licenciement, en sus des sommes qui lui ont déjà été allouées au titre du jugement de première instance (71,64 euros nets) ;

– 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel outre les entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de Maître Béranger Boudignon ;

– fixer le décompte des intérêts légaux sur les sommes à caractère de salaires et l’indemnité légale de licenciement à compter de la date de réception (3 juillet 2018) par l’intimée de la convocation devant le bureau de conciliation du Conseil des prud’hommes ;

– ordonner la capitalisation des intérêts.

– ordonner à la société Cleyade Saint-Germain de lui remettre des documents de fin de contrat (bulletin de paie, certificat de travail, solde de tout compte, attestation Pôle Emploi) conformes au jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, dans la limite de 5 000 euros.

– débouter la société Cleyade Saint-Germain de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles à l’encontre de Madame [R].

Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 05 mai 2020, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Cleyade Saint Germain, intimée, demande à la cour de :

– recevoir la société Cleyade Saint-Germain en ses présentes écritures et y faisant droit,

– confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a jugé que :

. le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

. la procédure de licenciement est régulière,

En conséquence,

– débouter Mme [R] de l’ensemble de ses demandes à ce titre,

Subsidiairement,

– cantonner le montant des éventuels dommages et intérêts à la charge de la Cleyade Saint-Germain à l’équivalent de trois mois de rémunération,

– confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a débouté Mme [R] de ses demandes au titre des prétendues conditions vexatoires de son licenciement,

– infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a condamné la société Cleyade Saint Germain au paiement des sommes suivantes :

– 183,02 euros à titre de complément d’indemnité compensatrice de préavis

– 79,43 euros à titre de complément d’indemnité de congés payés

– 71,64 euros à titre de complément d’indemnité légale de licenciement,

Et statuant à nouveau,

– juger qu’aucune somme n’est due à Mme [R] à titre des rappels de salaire,

A titre subsidiaire,

– cantonner le montant des rappels de salaires sollicités aux montants alloués en première instance,

En tout état de cause,

– débouter Mme [R] de ses demandes relatives :

– au décompte des intérêts légaux à compter du 3 juillet 2018 ,

– subsidiairement, juger que ceux-ci ne s’appliquent que sur le solde des condamnations éventuellement mises à la charge de la société Cleyade Saint-Germain ,

– condamner Mme [R] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 24 novembre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Aux termes de l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles et si un doute subsiste, il profite au salarié.

Ainsi, l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.

Aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, il est reproché à la salariée les faits suivants :

 » le 9 avril 2018, nous avons été alertés par une de vos collègues sur votre attitude déloyale vis-à-vis de l’entreprise. A cette occasion des copies de documents nous été transmis et des témoignages de salariés ont été recueillis.

Le 10 avril 2018, je vous ai reçue avec votre supérieure hiérarchique Madame [T] [I], directrice régionale, pour vous donner la possibilité de vous expliquer sur ces faits, ce que vous avez refusé de faire.

Nous avons donc dû nous résoudre à vous convoquer à un entretien préalable.

Les copies des documents en notre possession et les témoignages de salariés démontrent deux choses :

Vous avez demandé, de manière réitérée, à plusieurs salariés de  » Cleyade Saint Germain de quitter l’entreprise pour vous rejoindre dans une structure concurrente que vous avez le projet de créer. De plus vous avez demandé à ces salariés d’inciter leurs clients à quitter  » Cleyade Saint Germain  » pour les suivre dans cette nouvelle structure.

Vous avez gravement dénigré, oralement et par écrit, auprès de certains membres du personnel de  » Cleyade Saint Germain « , votre nouvelle responsable d’agence et vous avez manifesté clairement votre intention de provoquer son échec dans la prise de fonction de son nouveau poste.

En dépit des éléments que nous détenons et nous vous avons décrits lors de l’entretien du 20 avril 2018, vous avez persisté à nier les faits qui vous sont reprochés et vous n’avez fourni aucune explication permettant un début de compréhension de la situation.

Votre déloyauté avérée envers  » Cleyade Saint Germain  » fait courir un risque inacceptable à l’entreprise.

En outre, votre dénigrement envers votre responsable hiérarchique est de nature à mettre en péril le fonctionnement de la structure hiérarchique de l’entreprise.  »

Madame [R] soutient avoir été licenciée verbalement le 10 avril 2018 lors d’un entretien avec Madame [I], sa supérieure hiérarchique, en présence de Monsieur [E], gérant de la société.

Elle affirme avoir été convoquée à cet entretien le matin même et s’être vu reprocher d’avoir suggéré à certains membres du personnel de l’entreprise de rejoindre une société concurrente. Il lui aurait été proposé une rupture conventionnelle et indiqué qu’en cas de refus, elle s’exposait à des poursuites judiciaires. Après son refus, la société aurait repris l’ensemble du matériel de mis à sa disposition : véhicule, tablette et téléphone.

Madame [R] s’est présentée le lendemain 11 avril 2018 à son poste de travail et confirme que son employeur lui a adressé ce jour là, un courrier de convocation à un entretien préalable en vue d’un licenciement assorti d’une mise à pied à titre conservatoire.

La salariée conteste les faits reprochés au cours de cet entretien.

La Sarl Cleyade soutient que l’allégation d’un licenciement verbal est mal fondée. Elle rappelle qu’une mise à pied à titre conservatoire a été signifiée à la salariée sur son lieu de travail le 11 avril 2018 confirmée par l ‘envoi d’un courrier recommandé avec avis de réception le même jour, la convoquant à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement.

Au cours de son entretien préalable du 20 avril 2018, les faits reprochés lui ont été rappelés et ont ensuite été énoncés dans la lettre de licenciement lui ayant été adressée le 25 avril 2018, ils constituent selon elle des faits suffisamment probants pour justifier un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur le licenciement verbal allégué

Madame [R] soutient avoir a été évincée de la société Cleyade Saint Germain par un licenciement verbal intervenu le 10 avril 2018, date à laquelle son employeur lui a demande de lui restituer sur le champ tous ses outils de travail.

Elle considère que c’est à cette date précise que son contrat de travail a été rompu par son employeur qui l’a privée de l’ensemble de ses outils de travail et l’a ainsi congédiée en l’empêchant d’accomplir son travail.

L’employeur fait valoir qu’il n’a pas procédé au retrait de l’ensemble des outils de travail de la salariée le 10 avril 2018 et qu’aucune preuve n’est rapportée à ce titre.

Il ressort de la lettre de licenciement que le 9 avril 2018, alerté par une collègue de la salariée sur son attitude déloyale envers son employeur et sa nouvelle responsable d’ agence à travers des documents et témoignages, la société a souhaité rencontrer dès le lendemain, le 10 avril, Madame [R] afin de recueillir ses explications.

Il n’est établi par aucune pièce versée aux débats, témoignages ou attestations que dès le 10 avril 2018 la salariée ait du remettre à son employeur l’ensemble de ses outils de travail.

Ce n’est que 11 avril 2018, alors que Madame [R] était présente sur son lieu de travail ainsi qu’elle le reconnaît elle-même, que l’employeur a pris la décision de sa mise à pied à titre conservatoire et lui a adressé le même jour un courrier de convocation à un entretien préalable à une mesure éventuelle de licenciement.

La salariée ne rapporte pas la preuve du licenciement verbal qu’elle invoque.

Sur la cause réelle et sérieuse

La salariée conteste l’ensemble des faits reprochés dans la lettre de licenciement ainsi que l’authenticité de deux témoignages produits par son employeur. Face à sa contestation deux témoins ont été convoqués par des Conseillers rapporteurs désignés par les premiers juges afin d’être entendus.

Un seul témoin s’est rendu à sa convocation fixée au 20 février 2019, l’autre ayant déclaré craindre de rencontrer Madame [R].

Lors de son audition, Madame [P], témoin, a confirmé être l’auteur d’une attestation établie avec ses propres mots et sans contrainte, confirmant l’ intention de Madame [R] de créer une société en détournant des clients et des salariés de la Sarl Cleyade et sa volonté d’obtenir la place de la nouvelle responsable d’agence, à laquelle elle cherchait à nuire.

Il ressort également des pièces produites que les faits reprochés ont été rapportés par une autre salariée de la société, Mme [O], qui témoigne avoir été approchée par Madame [R] qui lui a demandé de quitter son employeur et de la suivre au sein d’une structure concurrente.

Mme [O] rapporte des dénigrements de la salariée à l’encontre de Madame [M] [X], Responsable d’agence embauchée le 1er avril 2018 et lui aurait indiqué que cette dernière  » n’était pas compétente « , ou encore que  » Cleyade va couler avec cette nouvelle Responsable d’agence’

Madame [P], fournit un témoignage similaire et produit des messages téléphoniques échangés avec la salariée qui confirment ces faits.

Il ressort de ces messages que Madame [R] écrivait notamment :

 » Tu exagères de nous lâcher comme ça. On a besoin de toi, il te dis n’importe quoi, les clients on les force pas à venir et ils feront ce qu’ils veulent. C’est une chance pour toi de te sortir de là, et [F] ne te demandera jamais d’argent si c’est ça le problème. Moi je te ferai évoluer alors que t’as aucune chance chez Cleyade tu le sais.  »

S’agissant de la responsable d’agence, Madame [X], Madame [R] indique dans ces messages :

 » Il faut vraiment qu’elle dégage, moi je la charge, t’es bête de l’aider elle fera rien pour toi, ça se voit, elle est fausse elle te fais croire qu’elle t’aime bien mais non c’est pour te mettre dans sa poche. Suis moi toi avant qu’il soit trop tard !  »

Lors de son audition, Madame [P] a précisé ses explications relatives au comportement de Madame [R] avant son licenciement :

 » Madame [R] m’a fait part de son intention de créer une société et m’a demandé de la rejoindre mais je considérais que j’avais trop peu d’ancienneté. Ceci s’est produit avant l’arrivée de Madame [X].

Madame [R] m’a suggéré de récupérer des clients et des salariés  » côté Ménage « , ainsi que Madame [O]. J’ai été choquée par cette dernière partie de la proposition et j’ai décidé d’informer ma supérieure, Madame [I] qui m’a demandé de témoigner.

Suite à l’arrivée de Madame [X], Madame [R] nous a dit qu’elle souhaitait sa place et s’est mise à la critiquer. Elle m’a suggéré de cacher l’agenda des rendez-vous ou certains dossiers de clients pour nuire à Madame [X].

Je déclare également que, quand j’ai voulu une fois ranger mes câbles informatiques avant de partir parce que j’ai un ordinateur portable, Madame [R] m’a dit de les laisser traîner pour faire tomber Madame [X].

Concernant les échanges sur Whatsapp, je précise que j’avais bien deux messageries : une pro et une perso. Je confirme l’exactitude des messages qui sont produits mais ce n’est pas moi qui les ai imprimés. Par contre, je ne peux pas produire le téléphone de l’époque car il est tombé en panne depuis. J’ai changé de téléphone il y a environ un an. J’ai transmis les messages à Madame [I] qui me les as demandé pendant le licenciement de Madame [R], bien avant qu’on me demande d’établir une attestation pour la procédure. Il y avait des dates Whatsapp quand j’ai transmis les messages à Madame [I].

Je n’ai pas de crainte particulière vis-à-vis de Madame [R] et je ne m’oppose pas à ce qu’on réunisse l’ensemble des Parties pour leur lire mon témoignage. Par contre, je sais que Madame [O] a toujours peur de Madame [R] et m’a dit qu’elle l’avait menacée sur Facebook ».

La société Cleyade a ensuite communiqué les messages Whatsapp conservés sur les téléphones de Madame [I] et Madame [E], confirmant leur authenticité.

S’agissant des griefs évoqués par la lettre de licenciement, Madame [R] produit sept témoignages identiques établis par des salariées de la société qui expliquent ‘ne pas avoir été approchées par Madame [R]’ pour la suivre dans une  » structure concurrente « .

Elles affirment également que Madame [R] n’a  » jamais proféré envers Madame [X] la moindre critique « .

Ces témoignages de salariées dont il est établi qu’elles ont toutes quitté l’entreprise, ne viennent pas contredire les motifs de licenciement, confirmés par les explications de Mesdames [P] et [O].

Un courriel adressé par Madame [I] le 23 avril 2018 à la salariée et rédigé en ces termes :

 » Tout s’est passé tellement vite, que je pense souvent à toi en me demandant ce qu’il t’a pris de réagir ainsi vis-à-vis de [M]’ J’avais de beaux projets pour toi, cela me désole fortement’, n’est pas non plus de nature à venir contredire la réalité des manquements de la salariée à l’encontre de Madame [M] [X]. Il confirme en outre les tentatives restées vaines de la société de trouver une alternative au licenciement.

Les comportements déloyaux et le dénigrement adoptés par Madame [R] qui ont conduit à son licenciement sont dès lors établis.

Il ressort de ces éléments que la salariée a eu des agissements de nature à porter atteinte au bon fonctionnement de la société Cleyade Saint-Germain, aux salariés eux-mêmes, et a adopté un comportement déloyal à l’encontre de son employeur, ce qui caractérise une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Ces faits reprochés à Madame [R] n’autorisaient pas son maintien à son poste.

Le jugement sera confirmé en ce sens.

Sur les rappels de salaire au titre du préavis et des congés payés et sur la régularisation de l’indemnité légale de licenciement

L’article L. 1234-3 dispose que :  » La date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement au salarié fixe le point de départ du préavis.  »

Le courrier de notification de son licenciement à Madame [R] lui a été adressé le 25 avril 2018 par la société et reçu selon cette dernière le 27 avril alors que la société soutient qu’il a été reçu la veille 26 avril.

Aucun avis de réception n’est versé aux débats.

Il n’est pas établi que la date de première présentation de la notification lettre de licenciement soit antérieure au 27 avril 2018.

La lettre de licenciement ayant été présentée le 27 avril 2017, le contrat de travail de la salariée a pris fin le 26 juin 2018.

La moyenne des salaires des trois derniers mois, s’établit à 1 983 euros.

Concernant l’indemnité compensatrice de préavis, il y a dès lors lieu d’accorder un complément de salaire correspondant à 1 jour travaillé supplémentaire, soit 91,51 euros (1 983 / 21,67 x 1). Le jugement est infirmé sur cette somme.

Concernant le solde de congés payés, il y a également lieu d’accorder à la salariée un complément de salaire correspondant à 23,06 jours ouvrés, diminué de l’indemnité de congés payés déjà versée dans le cadre du solde de tout compte (1 803,20 euros) et de la provision accordée en audience de conciliation du 8 septembre 2018 (227,57 euros), soit 79,43 euros:

((1 983 / 21,67 X 23,06) – 1 803,20 – 227,57) . Le jugement est confirmé.

Concernant l’indemnité légale de licenciement, Madame [R] ayant été embauchée le 21 octobre 2013 et son contrat ayant pris fin le 26 juin 2018, son ancienneté au moment de la rupture du contrat était de 4 ans et 8 mois complets. Il y a donc lieu de lui accorder un complément d’indemnité légale de licenciement, au-delà de l’indemnité versée initialement, soit 71,64 euros

Le jugement est confirmé.

Sur l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Le licenciement de Madame [R] qui repose sur une cause réelle et sérieuse, n’ouvre droit à aucune indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement qui a débouté la salariée de sa demande à ce titre est confirmé.

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure vexatoire

La cause réelle et sérieuse de licenciement est établie, la salariée ne démontre pas en quoi la procédure de licenciement à son encontre présenterait un caractère vexatoire, le seul fait que sa mise à pied conservatoire soit injustifiée en l’absence de faute grave retenue, ne suffisant pas à caractériser l’existence d’un licenciement brutal et vexatoire.

Le jugement déféré qui a débouté Madame [R] de sa demande à ce titre est confirmé.

Sur les demandes accessoires

Mme [R] qui succombe supportera les dépens.

Eu égard à la situation des parties, il n’est pas inéquitable de laisser à leur charge respective les frais irrépétibles engagés dans la présente instance.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

INFIRME partiellement le jugement du conseil de prud’hommes de Saint Germain en Laye en date du 28 novembre 2019 et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

CONDAMNE la société Cleyade Saint-Germain à payer à Madame [G] [R] la somme de 91,51 euros à titre de complément de salaire sur préavis ;

CONFIRME pour le surplus les dispositions non contraires du jugement entrepris ;

REJETTE les demandes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [G] [R] aux dépens de première instance et d’appel.

– Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– Signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Carine DJELLAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LA PRÉSIDENTE,

 


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