ET N° 22/
CE/CM
COUR D’APPEL DE BESANCON
ARRET DU 10 JUIN 2022
CHAMBRE SOCIALE
Contradictoire
Audience publique
du 15 Octobre 2021
N° de rôle : N° RG 21/00795 – N° Portalis DBVG-V-B7F-EL2O
S/appel d’une décision
du POLE SOCIAL DU TJ DE VESOUL
en date du 12 mars 2021
code affaire : 88D
Demande en remboursement de cotisations, prestations ou allocations indues.
APPELANTE
Société [9],
[Adresse 1]
représentée par Me Christian MARQUES, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Christine MAYER BLONDEAU, avocat au barreau de BESANCON
INTIMEE
URSSAF DE FRANCHE COMTE,
[Adresse 8]
représenté par Me Séverine WERTHE, avocat au barreau de BESANCON
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile l’affaire a été débattue le 15 Octobre 2021, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur ESTEVE Christophe, Président de Chambre, entendu en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:
Monsieur Christophe ESTEVE, Président de Chambre
Madame Bénédicte UGUEN-LAITHIER, Conseiller
Mme Florence DOMENEGO, Conseiller
qui en ont délibéré,
Mme Cécile MARTIN, Greffier lors des débats
Les parties ont été avisées de ce que l’arrêt sera rendu le 10 Décembre 2021 par mise à disposition au greffe, le délibéré a été prorogé au 21 janvier 2022, le 04 février 2022, le 25 février 2022, le 11 mars 2022, le 25 mars 2022, le 13 mai 2022 et le 10 juin 2022.
**************
Statuant sur l’appel formé le 5 mai 2021 par l’association [9] d’un jugement rendu le 12 mars 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Vesoul qui, dans le cadre du litige l’opposant à l’URSSAF de Franche-Comté, a notamment :
– débouté le [9] de l’intégralité de ses demandes,
– confirmé les décisions de la commission de recours amiable en date du 15 octobre 2020,
– confirmé le refus de faire droit à la demande de remboursement des cotisations patronales versées par ses quatre établissements,
– mis les dépens à la charge du [9],
Vu les conclusions visées par le greffe le 29 juillet 2021 aux termes desquelles l’association [9], appelante, demande à la cour de :
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :
– déclaré le recours de l’association [9] non fondé,
– débouté l’association [9] de toutes ses demandes,
– confirmé les décisions de la Commission de Recours Amiable de l’URSSAF de Franche-Comté du 15 octobre 2020,
– confirmé le refus de faire droit à la demande de remboursement des cotisations patronales versées pour les quatre établissements de l’association [9],
– dit que les dépens seront à la charge de l’association [9],
– déclarer l’exonération de cotisations patronales en application des dispositions de l’article L. 241-10 III du code de la sécurité sociale applicable à l’association [9] sur les rémunérations de ses agents exerçant au sein de son foyer de vie [11] (Siret [N° SIREN/SIRET 2]), son foyer de vie [13] (Siret [N° SIREN/SIRET 5]), son foyer d’hébergement [10] (Siret [N° SIREN/SIRET 3]) et son foyer d’hébergement [7] (Siret [N° SIREN/SIRET 4]),
– ordonner la restitution par l’URSSAF de Franche-Comté, avec intérêts à compter de la lettre du 27 septembre 2019, de la somme correspondant aux cotisations patronales versées indûment durant la période :
– de janvier 2018 à décembre 2018 pour le foyer de vie [11],
– de septembre 2016 à décembre 2018 pour le foyer de vie [13],
– de janvier 2018 à décembre 2018 pour le foyer d’hébergement [10],
– de janvier 2018 à décembre 2018 pour le foyer d’hébergement [7],
– condamner l’URSSAF de Franche-Comté à verser à l’association [9] la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner l’URSSAF de Franche-Comté aux entiers dépens,
Vu les conclusions visées par le greffe le 14 octobre 2021 aux termes desquelles l’URSSAF de Franche-Comté, intimée, demande à la cour de :
– confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a :
– déclaré le recours non fondé,
– débouté le [9] de l’intégralité de ses demandes,
– confirmé les décisions de la commission de recours amiable en date du 15 octobre 2020,
– confirmé le refus de faire droit à la demande de remboursement des cotisations patronales versées par ses quatre établissements,
– dit que les dépens seront à la charge du [9],
– condamner le [9] à lui payer la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– le condamner aux dépens d’appel,
La cour faisant expressément référence, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux conclusions susvisées soutenues à l’audience,
SUR CE,
EXPOSE DU LITIGE
Née le 1er janvier 2019 du rapprochement entre l’ADAPEI de Haute-Saône et l’AGEI de Côte-d’Or, l’association [9] (ci-après l’association), dont le siège est situé à [Localité 14], accueille dans ses établissements des personnes handicapées.
Par quatre courriers adressés le 27 septembre 2019 à l’URSSAF de Franche-Comté, l’association a sollicité le bénéfice du dispositif d’exonération de cotisations patronales « aide à domicile » concernant les salariés de ses quatre foyers d’hébergement suivants :
– le foyer de vie [11] ([Localité 12]),
– le foyer de vie [13] ([Localité 14]),
– le foyer d’hébergement [10] ([Localité 14]),
– le foyer d’hébergement [7] ([Localité 6]).
Par quatre courriers en date du 27 novembre 2019, l’URSSAF de Franche-Comté a refusé de faire droit à ces demandes.
Par requête en date du 6 février 2020, l’association a contesté ces décisions devant la commission de recours amiable, qui n’a pas statué dans le délai imparti.
C’est dans ces conditions que le 6 avril 2020, l’association a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Vesoul de la procédure qui a donné lieu au jugement entrepris.
Par quatre décisions du 15 octobre 2020 notifiées le 23 novembre 2020, la commission de recours amiable a rejeté le recours de l’association, laquelle les a également contestées devant la juridiction de première instance.
MOTIFS
1- Sur la demande tendant au bénéfice de l’exonération des charges patronales prévue à l’article L. 241-10 III du code de la sécurité sociale :
L’article L241-10 III du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige dispose :
« Sont exonérées de cotisations patronales d’assurances sociales et d’allocations familiales les
rémunérations versées aux aides à domicile employées sous contrat à durée indéterminée ou sous
contrat à durée déterminée pour remplacer les salariés absents ou dont le contrat de travail est
suspendu dans les conditions prévues à l’article L. 1242-2 du code du travail, par les structures
suivantes :
1° Les associations et entreprises déclarées dans les conditions fixées à l’article L. 7232-1-1 du même code pour l’exercice des activités concernant la garde d’enfant ou l’assistance aux personnes âgées ou handicapées ;
2° Les centres communaux ou intercommunaux d’action sociale ;
3° Les organismes habilités au titre de l’aide sociale ou ayant passé convention avec un organisme
de sécurité sociale.
Cette exonération s’applique à la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l’exécution
des tâches effectuées au domicile à usage privatif :
a) Des personnes mentionnées au I ;
b) Des bénéficiaires soit de prestations d’aide ménagère aux personnes âgées ou handicapées au titre de l’aide sociale légale ou dans le cadre d’une convention conclue entre les structures susmentionnées et un organisme de sécurité sociale, soit des prestations mentionnées au deuxième alinéa de l’article L. 222-3 du code de l’action sociale et des familles ou des mêmes prestations d’aide et d’accompagnement aux familles dans le cadre d’une convention conclue entre ces structures et un organisme de sécurité sociale, dans la limite, pour les tâches effectuées au bénéfice des personnes visées au a du I du présent article, du plafond prévu par ce même a.
Le bénéfice du présent III ne peut s’appliquer dans les établissements, centres et services mentionnés aux 2° et 3°, au b du 5° et aux 6°, 7°, 11° et 12° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles, au titre des prestations financées par les organismes de sécurité sociale en application de l’article L. 314-3 du même code.
Un décret détermine les modalités d’application de l’exonération prévue par le présent III et notamment :
-les informations et pièces que les associations, les centres communaux et intercommunaux d’action sociale et les organismes visés au précédent alinéa doivent produire auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale du régime général ;
-les modalités selon lesquelles les organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale du régime général vérifient auprès des organismes servant les prestations mentionnées aux
b, c, d et e du I ou les prestations d’aide ménagère visées au précédent alinéa que les personnes au titre desquelles cette exonération a été appliquée ont la qualité de bénéficiaires desdites prestations.
Les rémunérations des aides à domicile ayant la qualité d’agent titulaire relevant du cadre d’emplois des agents sociaux territoriaux en fonction dans un centre communal ou intercommunal d’action sociale bénéficient d’une exonération de 100 % de la cotisation d’assurance vieillesse due au régime visé au 2° de l’article R. 711-1 du présent code pour la fraction de ces rémunérations remplissant les conditions définies au présent III. »
L’association soutient remplir l’ensemble des dispositions légales pour bénéficier de l’exonération sollicitée, ce que conteste l’URSSAF.
Les points en litige sont les suivants : les conditions relatives à l’éligibilité de la structure au dispositif d’exonération aide à domicile, la qualité des salariés concernés ainsi que leurs conditions d’emploi et la nature de leurs interventions, le lieu de l’activité salariée considérée.
Il doit être précisé qu’aux termes de ses conclusions (page 7) l’URSSAF ne conteste pas en revanche la qualité des bénéficiaires de l’aide à domicile, dans la mesure où elle écrit : « Si les personnes handicapées prises en charge sont titulaires de la prestation de compensation du handicap, elles entreraient dans le champ du dispositif d’exonération aide à domicile. Il semble que cela soit bien le cas en l’espèce. », l’appelante communiquant au demeurant plusieurs pièces en ce sens.
Il convient d’examiner successivement les trois points litigieux :
1-1- Sur les conditions relatives à l’éligibilité de l’association :
Contrairement à l’argumentation de l’appelante, l’URSSAF soutient que l’association ne peut se fonder exclusivement sur l’habilitation délivrée par le président du conseil départemental.
Elle considère que l’association devrait également disposer d’une autorisation du directeur général de l’agence régionale de santé en application des articles L. 312-1, 7° et L. 313-3, d) du code de l’action sociale et des familles, ou, si l’on se réfère à la version applicable jusqu’au 1er avril 2010 de ce dernier article, d’une autorisation préfectorale.
Elle ajoute qu’en application de l’article L. 241-10 III du code de la sécurité sociale, il est également possible de produire comme justificatif une copie de l’agrément délivré par l’Etat sur le fondement des articles L. 7232-1 et suivants du code du travail, sous réserve qu’il ne s’agisse pas de prestations financées sur des crédits d’assurance maladie.
Elle fait valoir encore qu’en application de la circulaire du ministère de l’économie et des finances du 11 avril 2019, pour bénéficier des avantages fiscaux et sociaux du secteur (TVA à taux réduit et exonération de charges sociales), il est nécessaire de compléter l’agrément ou l’autorisation par une déclaration enregistrée auprès de la Direccte.
En vertu de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles dans sa rédaction applicable au litige, sont des établissements et services sociaux et médico-sociaux, au sens dudit code, les établissements et les services, dotés ou non d’une personnalité morale propre, énumérés par ce texte et en particulier, au 7°, les établissements et les services, y compris les foyers d’accueil médicalisé, qui accueillent des personnes handicapées, quel que soit leur degré de handicap ou leur âge, ou des personnes atteintes de pathologies chroniques, qui leur apportent à domicile une assistance dans les actes quotidiens de la vie, des prestations de soins ou une aide à l’insertion sociale ou bien qui leur assurent un accompagnement médico-social en milieu ouvert ;
L’article L. 313-3 du même code dans sa rédaction applicable au litige dispose :
« L’autorisation est délivrée :
a) Par le président du conseil départemental, pour les établissements et services mentionnés aux 1°, 6°, 7°, 8°, 11° et 12° du I de l’article L. 312-1 et pour les lieux de vie et d’accueil mentionnés au III du même article L. 312-1, lorsque les prestations qu’ils dispensent sont susceptibles d’être prises en charge par l’aide sociale départementale ou lorsque leurs interventions relèvent d’une compétence dévolue par la loi au département ;
b) Par le directeur général de l’agence régionale de santé pour les établissements et services mentionnés aux 2°, 5°, 6°, 7°, 9°, 11° et 12° du I de l’article L. 312-1 et pour les lieux de vie et d’accueil mentionnés au III du même article, lorsque les prestations qu’ils dispensent sont susceptibles d’être prises en charge par les organismes d’assurance maladie ;
(…)
d) Conjointement par le président du conseil départemental et le directeur général de l’agence régionale de santé, pour les établissements, les services et les lieux de vie et d’accueil dont l’autorisation relève simultanément des a et b du présent article, ainsi que pour ceux dont l’autorisation relève du 3° du I de l’article L. 312-1 ;
(…) ».
Il ressort de ces dispositions que l’autorisation conjointe du président du conseil départemental et du directeur général de l’agence régionale de santé n’est requise que lorsque les prestations dispensées par l’établissement sont susceptibles d’être prises en charge par les organismes d’assurance maladie.
Or, au cas présent, aucun élément ne permet de retenir que les foyers d’hébergement considérés dispensent des prestations susceptibles d’être prise en charge par les organismes d’assurance maladie.
Au contraire, les arrêtés de renouvellement de l’autorisation de fonctionnement et de l’habilitation à recevoir des bénéficiaires de l’aide sociale pris le 20 décembre 2016 par le président du conseil départemental font uniquement état des missions suivantes, pour ce qui concerne les foyers « [7] » de [Localité 6] et « [10] » de [Localité 14] :
– offrir aux personnes accueillies une prise en charge éducative visant à développer leurs potentialités et à faciliter leur insertion sociale. A terme, et dans la mesure du possible, une intégration en milieu ordinaire de vie est recherchée. Pour atteindre cet objectif, l’établissement mettra en place, pour chacun de ses résidents, un projet individuel de vie, réajusté périodiquement en fonction de l’évolution de la personne handicapée ;
– assurer l’hébergement des personnes accueillies et leur entretien, moyennant une contrepartie financière acquittée par la personne handicapée à titre de contribution à ses frais de séjour.
Les missions visées par les arrêtés concernant les foyers « [11] » de [Localité 12] et « [13] » de [Localité 14] sont quant à elles définies comme suit :
– assurer de façon permanente un hébergement complet des personnes accueillies et leur entretien, moyennant une contrepartie financière acquittée par la personne handicapée à titre de contribution à ses frais de séjour ;
– mettre en place des activités ludiques et d’éducation permettant d’assurer le développement personnel des personnes accueillies ;
– mettre en oeuvre les soutiens médico-sociaux adaptés à chaque individu.
Quant à la circulaire du ministère de l’économie et des finances du 11 avril 2019 dont se prévaut l’URSSAF sans toutefois la produire, qui est dépourvue de tout effet normatif, elle n’est pas opposable par l’URSSAF, et spécialement pas dans le cadre du présent litige.
En effet, d’abord, elle n’émane pas du ministre chargé de la sécurité sociale.
Ensuite, elle est postérieure aux périodes d’exonération litigieuses et, compte tenu de sa teneur, ne se limite pas à expliciter et à interpréter les dispositions législatives et réglementaires antérieures, qu’elle cite page 17 dans un chapitre II-1 consacré à la déclaration : « Les règles et les procédures de déclaration sont prévues par les articles L. 7232-1-1 à L. 7232-9 et par les articles R. 7232-16 à R. 7232-22 du code du travail. »
Aux termes des dispositions de l’article L. 7232-1-1 du code du travail, « à condition qu’elle exerce son activité à titre exclusif, toute personne morale ou entreprise individuelle qui souhaite bénéficier des 1° et 2° de l’article L. 7233-2 [taux de TVA réduit et crédit d’impôt] et de l’article L. 7233-3 [exonération de charges sociales] déclare son activité auprès de l’autorité compétente dans des conditions et selon des modalités prévues par décret en Conseil d’Etat ».
Cependant, la loi n° 2010-853 du 23 juillet 2010 dont est issu ce texte dispose aussi en son article 31-II : « A condition d’exercer à titre exclusif ou d’être dispensée de cette condition, toute personne morale ou entreprise individuelle disposant d’un agrément en cours de validité délivré antérieurement à l’entrée en vigueur du décret prévu à l’article L. 7232-1-1 bénéficie des dispositions des articles L. 7233-2 et L. 7233-3 », ce qui est le cas de l’appelante.
Il doit en outre être rappelé que l’article L. 7233-3 précité auquel fait référence tant l’article L. 7232-1-1 que la circulaire du 11 avril 2019, qui disposait que « la personne morale ou l’entreprise individuelle déclarée qui exerce, à titre exclusif, une activité de services à la personne rendus aux personnes physiques est exonérée de cotisations patronales de sécurité sociale dans les conditions prévues au III bis de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale », a été abrogé par la loi de finances du 29 décembre 2010.
La cour ne saurait donc statuer en fonction de la circulaire ministérielle du 11 avril 2019 opposée par l’URSSAF.
En outre, l’association ne relève pas du 1° de l’article L241-10 III du code de la sécurité sociale (les associations et entreprises déclarées dans les conditions fixées à l’article L. 7232-1-1 du même code pour l’exercice des activités concernant la garde d’enfant ou l’assistance aux personnes âgées ou handicapées), mais du 3° de ce texte (les organismes habilités au titre de l’aide sociale ou ayant passé convention avec un organisme de sécurité sociale).
Dans ces conditions, il n’est pas établi que l’association ne puisse se fonder exclusivement sur l’habilitation délivrée par le président du conseil départemental pour être éligible à l’exonération de cotisations sociales prévue par l’article L241-10 III du code de la sécurité sociale, ainsi que l’a retenu à bon droit le premier juge.
1-2- Sur les conditions tenant aux salariés :
L’article L. 241-10 III du code de la sécurité sociale vise les salariés aides à domicile, ce qui exclut notamment les salariés exerçant des activités ayant un caractère éducatif. Il précise que l’exonération s’applique à la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l’exécution
des tâches effectuées au domicile à usage privatif des bénéficiaires.
Comme l’exposait l’association dans ses demandes initiales auprès de l’URSSAF, « l’exonération des cotisations patronales d’assurances sociales et d’allocations familiales est totale pour la fraction (c’est la cour qui souligne) de la rémunération versée en contrepartie de l’exécution des tâches effectuées chez les personnes visées ci-dessus », de sorte qu’elle précisait que « l’exonération de cotisations patronales demandée ne couvre que la rémunération des heures d’assistance aux personnes handicapées ».
Elle confirme dans ses conclusions avoir formulé une demande d’exonération « portant sur le personnel assurant ces missions (exclusion du personnel administratif et médical) et chargé de l’accompagnement quotidien des adultes handicapés : aide à la toilette, aide au lever, aide à l’habillement, aide à la gestion du logement et activités relationnelles essentiellement ».
Or, les seuls documents qu’elle communique (plannings et fiches emploi constituant ses pièces n° 8, 20-1, 20-2 et 20-3) ne permettent pas de déterminer la proportion des heures de travail consacrées par ses salariés à l’aide à domicile, étant de surcroît observé que certaines fiches emploi versées aux débats (aide médico-psychologique, accompagnant éducatif et social, moniteur, éducateur et animateur) ne décrivent pas des activités d’aide à domicile proprement dites mais essentiellement des activités éducatives.
Il en résulte que les conditions d’exonération tenant à l’activité des salariés ne sont pas réunies en l’état, ainsi que l’a retenu à juste titre le premier juge.
1-3- Sur le lieu de l’activité salariée :
Ainsi qu’il a été dit, l’article L. 241-10 III du code de la sécurité sociale dispose que l’exonération s’applique à la fraction des rémunérations versée en contrepartie de l’exécution des tâches effectuées au domicile à usage privatif des bénéficiaires.
Il s’agit d’un dispositif incitatif ayant pour finalité de favoriser le maintien à leur domicile des personnes dépendantes (handicapées ou âgées).
Pour mettre un terme aux tentatives des établissements accueillant des personnes dépendantes de bénéficier de ce dispositif, le législateur a modifié l’article L. 241-10 III du code de la sécurité sociale en remplaçant les termes « chez les » bénéficiaires par l’expression « au domicile à usage privatif » de ces derniers (article 14 de la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 de financement de la sécurité sociale pour 2011).
Au cas présent, l’association soutient que dans ses quatre foyers elle met à disposition de l’usager un hébergement privatif, constitué d’une chambre individuelle et spacieuse comprenant une salle de bains « (lavabo, WC et douche) », que le résident y établit sa résidence principale, fiscale, et y est inscrit « le plus souvent » sur les listes électorales et que ces appartements privatifs sont loués directement au groupe par les bénéficiaires.
Elle en conclut que l’intervention des salariés du groupe se fait au sein de structures privatives, lieu de résidence effective et indépendante au sein duquel le bénéficiaire peut prétendre au bénéfice d’aides personnalisées, et non au sein d’hébergements collectifs.
Mais d’une part, les foyers de l’association ne sont pas des logements-foyers au sens des dispositions de l’article L. 633-1 du code de la construction et de l’habitation.
D’autre part, à l’examen des justificatifs communiqués et comme le soutient avec pertinence l’URSSAF, les personnes handicapées hébergées dans les quatre foyers considérés ne bénéficient que d’un espace privatif (chambre individuelle avec, le cas échéant, sanitaires), et non d’un domicile à usage privatif au sens de la loi.
A cet égard, il ressort des règlements de fonctionnement des foyers de l’association que les espaces privatifs ne sont pas tous nécessairement équipés de sanitaires, trois de ces règlements mentionnant : « le lieu de vie privatif ainsi que la salle de bains et les toilettes (s’ils sont privatifs) ».
Ils ne sont par ailleurs pas équipés de cuisine, comme l’a relevé le premier juge.
D’autres dispositions contenues dans ces règlements de fonctionnement démontrent qu’il ne s’agit pas de domiciles à usage privatif, tels par exemple le fait que le foyer dispose d’un double de la clé de la chambre ou du studio (le résident est quant à lui en possession d’une clé selon son autonomie) et le fait qu’il soit interdit au résident dans son espace privatif de percer, mettre des chevilles, peindre ou bricoler.
Dans ces conditions, les documents produits relatifs au bénéfice de l’APL (MSA) ou de l’allocation logement (CAF) accordé aux personnes handicapées sont insuffisants à établir que ceux-ci disposent d’un domicile à usage privatif au sens des dispositions légales susvisées, étant précisé qu’aucun contrat de bail n’est versé aux débats.
En considération des développements qui précèdent, le jugement entrepris sera dès lors confirmé en toutes ses dispositions.
2- Sur les frais irrépétibles et les dépens d’appel :
En application de l’article 700 du code de procédure civile, il apparaît équitable d’allouer à l’URSSAF la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles qu’elle a dû exposer devant la cour.
L’association [9] qui succombe n’obtiendra aucune indemnité sur ce fondement et supportera les dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne l’association [9] à payer à l’URSSAF de Franche-Comté la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne l’association [9] aux dépens d’appel.
Ledit arrêt a été prononcé par mise à disposition au greffe le dix juin deux mille vingt-deux et signé par M. Christophe ESTEVE, président de chambre, et Mme Cécile MARTIN, greffier.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,