Sécurité informatique : 21 avril 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 19/04772

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Sécurité informatique : 21 avril 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 19/04772

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

11e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 AVRIL 2022

N° RG 19/04772 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TUXY

AFFAIRE :

[Z] [T]

C/

Etablissement Public [Localité 7]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Novembre 2019 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE

N° Section : E

N° RG : F17/02287

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Eric COHEN

Me Grégory CHASTAGNOL de la SELAS FACTORHY AVOCATS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [Z] [T]

né le 27 Décembre 1981 à [Localité 6] ([Localité 3])

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Stéphanie ARENA de la SELEURL ARENA AVOCAT, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 637 – Représentant : Me Eric COHEN, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1958

APPELANT

****************

Etablissement Public [Localité 7]

N° SIRET : 833 718 794

[Adresse 1]

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représentant : Me Grégory CHASTAGNOL de la SELAS FACTORHY AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0061 substitué par Me Salim DJEDAINI, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 Mars 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Hélène PRUDHOMME, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Greffier lors des débats : Madame Sophie RIVIERE,

Le 12 octobre 2012, M. [Z] [T] était embauché par l’établissement Defacto (qui a fusionné avec l’aménageur de La Défense Sainte-Arche) en qualité de responsable des systèmes d’information, par contrat à durée indéterminée.

Le contrat de travail n’était pas régi par une convention collective.

L’entreprise considérait que M. [T] excédait de façon récurrente ses prérogatives en se positionnant sur des projets qui ne relevaient pas de ses fonctions et prenait des initiatives qui dépassaient le cadre de ses responsabilités, avait des carences dans la gestion et le pilotage du service systèmes d’information production et déléguait l’exécution de missions qui lui étaient personnellement affectées. Le salarié contestait ces affirmations et affirmait qu’il se contentait de suivre les instructions de l’établissement.

Le 9 juin 2017, l’établissement public [Localité 7] convoquait M. [T] par courrier à un entretien préalable en vue de son licenciement. L’entretien se déroulait le 19 juin2017. Le 22 juin 2017, il lui notifiait son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Le 24 août 2017, M. [T] saisissait le conseil des prud’hommes de Nanterre.

Vu le jugement du 26 novembre rendu en formation paritaire par le conseil de prud’hommes de Nanterre qui a’:

– Dit et jugé que le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. [T] est parfaitement fondé,

– Dit et jugé que la convention de forfait jours est parfaitement valable,

– Débouté purement et simplement M. [T] de l’intégralité de ses demandes,

– Dit que les éventuels dépens seront à la charge de M. [T].

Vu l’appel interjeté par M. [T] le 19 décembre 2019

Vu les conclusions de l’appelant, M. [Z] [T], notifiées le 31 janvier 2022 et soutenues à l’audience par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d’appel de :

– Infirmer le jugement en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau.

– Juger le licenciement de M. [T] dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

– Juger nulle ou, à tout le moins, inopposable, la convention de forfait-jours annuelle

– Juger que l’établissement public [Localité 7] a commis des fautes à l’occasion de l’exécution du contrat de travail ;

En conséquence, condamner l’établissement public [Localité 7] à lui payer les sommes de :

– 35 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 18 231 euros à titre de rappels de salaires pur heures supplémentaires et 1 823 euros au titre des congés payés y afférents,

– 34 752 euros à titre d’indemnité pur travail dissimulé,

– 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

– 3 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Vu les écritures de l’intimé, l’établissement public [Localité 7], notifiées le 15 juin 2020 et développées à l’audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d’appel de’:

– Dit et jugé que le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. [T] est parfaitement fondé,

– Dit et jugé que la convention de forfait jours est parfaitement valable ;

– Débouté purement et simplement M. [T] de l’intégralité de ses demandes ;

– Dit que les éventuels dépens seront à la charge de M. [T].

À titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour devait entrer en voie de condamnation :

– Limiter le montant des dommages et intérêts à 3 mois de salaires, soit 17’376 euros bruts. Dans l’hypothèse où la cour considérerait que les demandes de dommages et intérêts formulées par M. [T] sont fondées, dire et juger que les dommages et intérêts alloués à ce titre s’entendent comme des sommes brutes avant CSG, CRDS et charges sociales.

En tout état de cause :

– Débouter M. [T] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner M. [T] à verser à l’établissement public [Localité 7] 3’500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner M. [T] aux entiers dépens.

Vu l’ordonnance de clôture du 7 février 2022.

SUR CE,

Sur l’exécution du contrat de travail’:

Sur les heures supplémentaires

M. [T] demande tout d’abord de juger nulle ou, à tout le moins, inopposable, la convention de forfait-jours annuelle, en faisant valoir, d’une part, qu’il ne disposait pas de l’autonomie requise pour être soumis à une telle convention, et d’autre part, se référant à l’accord d’entreprise du 7 février 2014, qu’il n’a pas bénéficié des garanties formelles prévues, notamment du suivi requis, destinés à préserver une durée de travail raisonnable ; l’établissement public [Localité 7] fait valoir en réplique que la convention de forfait est valable dans la mesure où les responsabilités du salarié lui conféraient l’autonomie requise et que ce dernier a bénéficié d’un suivi régulier de sa charge de travail ;

Sur le premier point, étant rappelé que l’article L. 3121-43 du code du travail prévoit que peuvent relever du forfait jour « les cadres qui disposent d’une autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l’horaire collectif’» et que le contrat de travail signé des parties prévoyait expressément une convention de forfait-jours, il est avéré qu’en sa qualité de responsable des systèmes d’information, niveau 7 catégorie IV puis de chef du service niveau 8 catégorie IV, M. [T] bénéficiait d’une totale autonomie dans l’organisation de son travail, ce que confirme sa fiche de poste prévoyant notamment que ce dernier « maîtrise son organisation, « manage une équipe » et « pilote un projet » ;

En ce qui concerne le second point, l’accord conclu entre Defacto et la CGT le 7 février 2014, impose en son article 7.1.5, à la fois :

– « un entretien annuel individuel pour faire le point avec le salarié sur sa charge de travail,

l’amplitude de ses journées de travail, son organisation de travail au sein de l’entreprise, l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale, sa rémunération. (…)

– un entretien individuel complémentaire sur demande du salarié : les parti es conviennent qu’en complément de cet entretien annuel, les salariés pourront solliciter, à tout moment, un entretien pour faire le point avec leur hiérarchie sur leur charge de travail, en cas de surcharge.

– un bilan bimensuel : en outre, un bilan bimensuel sera également réalisé pour vérifier l’adéquation de la charge de travail au nombre de jours travaillés’» ;

Si les comptes rendus d’entretien annuel d’évaluation contenaient une partie 5 intitulée « organisation et charge de travail (cadres au forfait jour) », ils font surtout ressortir que M. [T] était soumis à une très forte charge de travail, l’augmentation de son périmètre et le caractère mouvant de la définition de celui-ci et les interrogations du salarié à cet égard, et des absences de mentions sur l’amplitude de journée et/ou l’articulation vie professionnelle / vie personnelle et familiale ;

En outre, il n’est justifié de la mise en ‘uvre d’aucun bilan bi-mensuel pourtant aussi prévu par l’accord précité ;

Il s’ensuit que la convention individuelle de forfait jours n’est pas opposable à M. [T], qui est en mesure par suite de revendiquer des heures supplémentaires selon le droit commun ;

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable ;

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées ; après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant ;

En l’espèce, M. [T] sollicite la somme totale de 18 231 euros à titre de rappels de salaires pour heures supplémentaires sur une période comprise entre fin avril 2014 et mai 2017, outre 1 823 euros au titre des congés payés y afférents ;

Il produit notamment, outre les éléments déjà relevés faisant ressortir sa charge de travail’:

– des éditions des badgeages de fin avril 2014 à mai 2017 édités par Defacto,

– des tableaux d’heures supplémentaires établis par semaine ;

Le salarié produit ainsi des éléments préalables suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies pour permettre à l’employeur d’y répondre utilement ;

L’employeur ne produit’pas d’autre élément relatif aux durées hebdomadaires de travail de M. [T] ;

Il fait toutefois justement valoir que les badgeages sur lesquels s’est fondé M. [T] pour élaborer ses tableaux récapitulatifs d’heures supplémentaires ne tiennent pas compte des temps de pause ni des temps de repas ;

Au vu de l’ensemble des éléments produits, la cour retient que M. [T] a bien effectué des heures supplémentaires non rémunérées, mais dans une proportion moindre que celle revendiquée ; elle lui alloue la somme totale de 6 323 euros à titre de rappels de salaires pur heures supplémentaires sur une période comprise entre fin avril 2014 et mai 2017, outre 632,30 euros au titre des congés payés afférents ;

S’agissant de la demande de dommages et intérêts pour travail dissimulé, la dissimulation d’emploi salarié prévue par l’article L.8221-5 du code du travail n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, mentionné sur les bulletins de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué ; une telle intention, qui ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie ;

En l’espèce le caractère intentionnel du travail dissimulé n’est pas démontré ; il est rappelé que M. [T] était soumis à une convention de forfait-jours ; l’inopposabilité de cette dernière ne suffit pas, en l’absence d’autre élément probant, à rapporter la preuve du caractère intentionnel du travail dissimulé ;

Le rejet de cette demande est en conséquence confirmé ;

Sur l’exécution fautive du contrat de travail

M. [T] sollicite des dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail ;

Il invoque tout d’abord une absence totale de contrôle de sa charge de travail ;

Si des manquements de l’employeur ont été en partie retenus à ce titre, M. [T] ne justifie pas avoir subi un préjudice précis et distinct de celui déjà indemnisé au titre du rappel d’heures supplémentaires ;

D’autre part ses fonctions étaient définies dans son contrat de travail et sa fiche de poste et si des évolutions de son périmètre ont été relevées ponctuellement, il ne justifie pas non plus d’un préjudice précis et distinct subi à ce titre ;

Le rejet de cette demande est en conséquence également confirmé ;

Sur la rupture du contrat de travail’:

Sur le licenciement

En application de l’article L. 1232-1 du code du travail, un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ;

L’insuffisance professionnelle constitue un motif suffisamment précis et matériellement vérifiable ;

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ;

En l’espèce, l’établissement public [Localité 7] invoque, au soutien de l’insuffisance professionnelle qu’elle invoque, trois types de reproches à l’encontre de M. [T] :

– son comportement visant à excéder ses prérogatives en se positionnant sur des projets qui ne relevaient pas de ses fonctions et en prenant des initiatives qui dépassaient le cadre de ses responsabilités ;

– ses carences dans la gestion du service systèmes d’information production ;

– son attitude consistant à déléguer l’exécution de certaines de ses tâches qui lui étaient pourtant personnellement affectées, tous éléments que conteste le salarié ;

Au sujet du premier reproche, l’employeur produit des courriels, notamment celui du 20 mars 2017 adressé par M. [O], directeur financier et juridique de l’établissement à M. [T] (« Pour rappel, en tant que CPSI sur le projet HSAE, rien ne doit être lancé sans qu'[L] l’ait validé préalablement. Je vous remercie donc à l’avenir de vous conformer à cette règle’»), du même M. [O] dans l’entretien annuel d’évaluation du 6 février 2017, (« un effort particulier doit être porté sur la clarté de sa communication») et par courriel du 14 mars 2017 où il indiquait que « dans la mesure où ce projet a été conduit par [L] et [Y], il me semble préférable que ce soit eux qui participent à cette interview », ou de M. [D], manager de transition, indiquant que si « [Z] [T] est intelligent, volontariste et travailleur, mais il a un gros problème de communication tant écrite qu’orale [‘] et un manque de confiance en lui, au niveau surtout des projets et de leur management, qui l’amène à surenchérir sur des éléments qu’il ne maîtrise pas forcément, ou même pire, qui ne sont pas de son ressort, d’où de nombreux et réguliers quiproquos avec les équipes’», et qu’ «’il doit (…) perdre un peu de certitudes, apprendre à se remettre en cause et ne plus post-rationaliser ses erreurs’» ;

Toutefois, ces éléments demeurent très insuffisants à établir que M. [T] s’érigeait en interlocuteur unique de Mme [J] ni même qu’il cherchait délibérément à excéder ses missions ;

Il ressort à ce sujet des motifs précédents que M. [T] était soumis à une très forte charge de travail par son employeur, l’augmentation de son périmètre et le caractère mouvant de la définition de celui-ci, et les interrogations du salarié à cet égard ; par exemple, l’entretien annuel d’évaluation au titre de l’activité de 2015 faisait ressortir « l’ inadéquation entre les demandes des opérationnels et la taille de l’équipe SI et son plan de charge. [Z] espère donc que (‘) les demandes de renouvellement futures seront acceptées, puis qu’il y ait rapidement une clarification du périmètre (‘) », l’employeur reconnaissant par ailleurs son esprit d’équipe et que « les objectifs sont totalement atteints. [Z] a fait une très bonne année 2015 malgré les nombreuses sollicitations non planifiées des métiers. (‘) » et que « [Z] a donc un plan de charge 2016 plus soutenu que sur le périmètre 2015 avec en plus un rôle sur l’exploitation qui n’est plus seulement sur le périmètre SI de gestion, mais aussi sur celui du SI industriel, ce qui rajoute un 3ème niveau sur son périmètre » ; l’entretien annuel d’évaluation du 6 février 2017 faisait encore ressortir que « (‘) [Z] espère (…) qu’il y ait rapidement une clarification du périmètre attendu de lui sur la production SI au regard des recrutements en cours » et qu’il « considère que certains des objectifs sont fortement conditionnés par un contexte et des éléments qui sont extérieurs de son champ d’action. (‘) », tandis que son évaluateur soulignait sa «’capacité à travailler en transverse’» et indiquait : «’Je renouvelle à [Z] ma confiance et compte sur lui en 2017’» en ajoutant que « [Z] doit continuer à travailler en mode projet, même lorsque les limites de responsabilité ne sont pas encore clairement définies » ;

En outre, l’appelant fait justement valoir, au sujet du lancement d’un POC sur l’outil Wallix et la mobilisation d’une ligne de crédit de 50 000 euros dans le budget d’une direction opérationnelle qu’il avait comme prérogative l’élaboration et la gestion du budget de son service, mais également, la faculté de proposer les investissements nécessaires dans la gestion du SI, et a ainsi pu proposer cette provision (en indiquant dans son courriel «’à discuter’»), ce qui ne s’analyse pas en une décision unilatérale, étant ajouté que son supérieur par courriel du même jour n’a pas souhaité prendre en compte le lancement du projet associé ;

Il n’est pas démontré non plus par l’employeur que M. [T] ait pris l’initiative de lancer le projet « Active Directory » sans concertation ni autorisation de sa hiérarchie ;

Enfin, s’agissant de l’interview auprès de Nintex, M. [T] a seulement répondu en évoquant un accord de principe à la demande qui lui a été adressée par mail du 14 mars de Circum, tout en proposant «’également à [Y] de participer à cet échange’» et n’a pas formulé d’observation une fois que, dans la soirée, son supérieur l’a informé que « dans la mesure où ce projet a été conduit par [L] et [Y], il me semble préférable que ce soit eux qui participent à cette interview » ;

S’agissant en second lieu des «’carences’» reprochées à M. [T], l’organisation d’un rendez-vous avec son équipe sur la téléphonie bureautique, même jugée non prioritaire par l’employeur, ceci dans un contexte de déménagement, ne s’analyse pas en une insuffisance professionnelle ; concernant le problème de connexion au serveur le 18 mai 2017, le courriel du lendemain émanant de la société Claranet faisait apparaître que « le problème provenait de ressources que Nintex Forms ne parvenait pas à charger’» ; enfin, si l’employeur de M. [T] lui reproche encore d’avoir «’négligé d’organiser la documentation de référence de votre service’», il n’est pas justifié que l’absence de modification à ce titre, ni plus généralement sur le niveau de sécurité informatique, ait justifié depuis son recrutement en 2012, aucune critique ni directive au salarié à cet égard ; M. [T] justifie au surplus du recours à la société Claranet afin de renforcer le niveau de sécurité ; M. [T] ne peut pas non plus être tenu responsable des changements intervenus sur les licences IBM, auxquelles son employeur a par la suite renoncé ;

Le reproche qui lui est fait par ce dernier d’avoir délégué l’exécution de certaines de ses tâches qui lui étaient pourtant personnellement affectées, se rapporte enfin au seul marché TMA de l’outil HSAE et M. [T] justifie avoir, dès le mois d’avril 2016, alerté de manière précise son employeur des difficultés concernant ce projet ;

Plus généralement, il n’est pas justifié d’alertes substantielles précises et/ou justifiées adressées à M. [T] dont les évaluations faisaient en revanche ressortir les qualités professionnelles ;

Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, l’insuffisance professionnelle alléguée n’est pas suffisamment caractérisée ; le licenciement s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En conséquence, le jugement est infirmé de ce chef ;

Sur les conséquences financières

A la date de son licenciement, M. [T] avait une ancienneté de quatre ans au sein de l’entreprise qui employait de façon habituelle plus de 11 salariés ;

En application de l’article L1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige, il peut prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure au montant brut des salaires qu’il a perçus pendant les six derniers mois précédant son licenciement ;

Tenant compte notamment de l’âge, de l’ancienneté du salarié et des circonstances de son éviction, étant observé que M. [T] n’apporte pas d’éléments relatifs à sa situation professionnelle ni personnelle postérieure au licenciement, il convient de condamner l’employeur au paiement d’une indemnité totale de 34 800 euros à ce titre ;

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera infirmée de ces deux chefs et par application de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens d’appel seront mis à la charge de l’établissement public [Localité 7]’;

La demande formée par M. [T] au titre des frais irrépétibles en cause d’appel sera accueillie, à hauteur de 3 000 euros ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement,

Infirme le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a rejeté les demandes formées au titre du travail dissimulé et pour exécution fautive du contrat de travail,

Statuant de nouveau des dispositions infirmées et y ajoutant,

Dit que la convention individuelle de forfait jours n’est pas opposable à M. [T],

Dit le licenciement de M. [Z] [T] dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne l’établissement public [Localité 7] à payer à M. [Z] [T] les sommes suivantes :

– 6 323 euros à titre de rappels de salaires pour heures supplémentaires sur la période comprise entre fin avril 2014 et mai 2017 et 632,30 euros au titre des congés payés afférents,

– 34 800 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 3 000 euros à titre d’indemnité pour frais irrépétibles de procédure,

Condamne l’établissement public [Localité 7] aux dépens de première instance et d’appel.

Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme’Sophie RIVIERE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER Le PRÉSIDENT

 


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