Sécurité informatique : 10 janvier 2018 Cour de cassation Pourvoi n° 14-11.413

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Sécurité informatique : 10 janvier 2018 Cour de cassation Pourvoi n° 14-11.413

SOC.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 janvier 2018

Rejet non spécialement motivé

M. X…, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10004 F

Pourvoi n° V 14-11.413

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par M. Hugues Y…, domicilié […]                             ,

contre l’arrêt rendu le 28 novembre 2013 par la cour d’appel d'[…]               chambre A), dans le litige l’opposant à la société Exploitation 13, société à responsabilité limitée, dont le siège est […]                               ,

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 28 novembre 2017, où étaient présents : M. X…, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z…, conseiller référendaire rapporteur, M. Maron, conseiller, M. A…, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. Y…, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Exploitation 13 ;

Sur le rapport de Mme Z…, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. Y….

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir décidé que le licenciement de M. Y… est fondé sur une faute grave et d’avoir en conséquence débouté celui-ci de ses demandes à titre de rappel de salaire pendant la période de mise à pied à titre conservatoire et congés payés y afférents, d’indemnité de préavis et congés payés y afférents, d’indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Aux motifs que « En l’espèce, aux termes de la lettre de licenciement, il est notamment fait grief au salarié :

– De n’avoir pas respecté les procédures imposées concernant les incinérations en ayant laissé traîner, hors sécurité pendant huit jours, des documents confidentiels à détruire ;
– D’avoir engagé la responsabilité de l’entreprise sans en référer au gérant et en signant sans contrôle des certificats de destructions de lettres chèques vierges ;
– D’avoir modifié informatiquement des fichiers commerciaux par destruction ou par création de documents antidatés ;
– D’avoir le 25 octobre 2005, au mépris du principe de confidentialité, transféré un fichier confidentiel interne sur sa messagerie privée YAHOO par le réseau internent ; ce fichier « classeur répertoire.xls » contenant les coordonnés des associés, des salariés, des clients et des prospects de l’entreprise et ne faisant pas partie de ses documents de travail était détenu par la secrétaire de direction sur le poste duquel il s’est introduit sans autorisation, pour en faire une copie sur un support ;
– D’avoir, au cours du mois d’août 2005, téléchargé des fichiers de l’entreprise sur son compte personnel YAHOO malgré une lettre de rappel à l’ordre.

Il lui était rappelé qu’un service de messagerie indépendant sécurisé lui permettait, d’accéder à distance, via internet, aux fichiers de l’entreprise et que les fichiers incriminés appartenant à une société différente de celle où il travaillait n’avaient aucune utilité pour une démarche commerciale.

Il lui est indiqué qu’une plainte pénale a été déposée et que sans préjuger des suites pénales, son comportement en l’état des faits visés sont séparément et ensemble constitutifs de la faute grave.

A l’appui de ses prétentions, la société EXPLOITATION 13 rappelle qu’elle est la seule entreprise à détenir un brevet de collecte sélective de papier sécurisé, que ses clients sont notamment la Police Nationale, la Police Scientifique, la Banque de France
, que pour sécuriser ses informations, elle a mis en place une politique de sécurité informatique, qu’ainsi un membre du groupe de sécurité BEAVER ne peut consulter les fichiers de la société EXPLOITATION 13 s’il n’en a pas les droits, et de la même manière qu’un membre du groupe de sécurité de la société EXPLOITATION 13 ne peut pas consulter les fichiers de BEAVER s’il n’en a pas le droit.

Elle soutient que M. Y… ne possédant aucune autorisation d’accès direct ou héritée sur le répertoire BEAVER a, au mépris de la clause de confidentialité figurant sur son contrat de travail, de l’accord de confidentialité, et de la charte informatique qui lui a été remise, envoyé sur sa messagerie personnelle via le réseau internet des fichiers BEAVER, les extrayant de la protection qui les entourait, toute confidentialité cessant ainsi d’exister.

S’agissant de ce grief, il résulte des pièces tirées de la procédure pénale, et notamment des rapports d’expertise informatique que sur la base des informations communiquées par la société YAHOO, il a été constaté que sur la période comprise entre le 3 décembre 2004 et le 21 avril 2006, M. Y… a envoyé et consulté sur sa boîte mail personnelle privée des fichiers de la société BEAVER, et notamment le fichier plan d’action Dev 13 et le fichier prospect PACA 13.xls.

L’expert relève en outre que M. Y… a transféré à nouveau, entre deux adresses mail personnelles, ces deux fichiers BEAVER, le 3 janvier 2006, alors qu’il n’était plus salarié de la société EXPLOITATION 13.

M. Y… a reconnu, lors d’une confrontation organisée dans le cadre de la procédure pénale, qu’il était bien en possession des fichiers « classeur répertoire » et « plan d’action Dev 13 »
appartenant à la société BEAVER, « qu’il les gardait pour s’en inspirer », et qu’en sa qualité de cadre dirigeant de fait, il en avait le libre accès.

Il convient de relever qu’aux termes de ses écritures, M. Y… qui fonde son argumentation sur l’autorité de la chose jugée au pénal, ne conteste pas avoir transféré, sur son adresse mail, les données informatiques confidentielles appartenant à la société BEAVER.

Il affirme ne pas avoir eu communication de la charte informatique, contrairement aux termes de l’attestation du commissaire aux comptes de la société BEAVER.

Il ne donne par ailleurs aucune explication en réponse à la remarque formulée par l’employeur concernant l’inutilité de cet accès au fichier BEAVER, dans la mesure où il disposait d’un fichier client spécifique à la filiale EXPLOITATION 13 et qu’étant affecté à la partie commerciale et au développement dans les Bouches du Rhône, il n’en avait aucune utilité pour son activité professionnelle.

Si, aux termes la procédure pénale, il n’a pas été démontré que M. Y… ait transféré les fichiers BEAVER à des tiers, et ait commis les infractions pénales qui lui étaient reprochées, le fait d’avoir transféré, à plusieurs reprises, des fichiers confidentiels d’une société dont il n’était ni salarié, ni dirigeant, via internet, au mépris des clauses contractuelles, des accords conventionnels, et des consignes de sécurité informatique, constitue un manquement à ses obligations contractuelles.

En effet, nonobstant le mode d’accès à ces données que M. Y… ait pu utiliser, en les transférant sur le réseau internet, il les a extraites de la protection qui les entourait et a ainsi insécurisé les informations confidentielles détenues par la société BEAVER, dont la spécificité de son activité consiste à assurer à ses clients une confidentialité optimale.

L’argument tiré du fait qu’il n’avait aucun intérêt à divulguer à des tiers des données informatiques appartenant à la société BEAVER eu égard à sa qualité d’actionnaire est inopérant dans la mesure où le transfert des données informatiques via le réseau internet, impliquant nécessairement un risque de fuite, suffit à constituer un manquement à ses obligations contractuelles.

Il y a lieu, à ce titre, de constater, qu’aux termes du courrier électronique en date du 8 novembre 2005 adressé par M. Y… à Me B… (Avocat), il est question de la valorisation de ses parts au sein de la société EXPLOITATION 13 et « d’indemnité prud’hommes » dans l’hypothèse d’une rupture de contrat, ce qui démontre qu’il envisageait, avant même la notification du licenciement, la négociation de ses parts sociales.

S’agissant des autres griefs énoncés dans la lettre de licenciement, il résulte des courriers échangés entre l’employeur et le salarié que les manquements constatés dans le cadre des procédures « sûreté » relatives à la destruction par incinération de documents confidentiels avaient été reprochés à M. Y… dans les mois précédents son licenciement et que M. Y… s’en était expliqué, sans en contester la matérialité.

Il y a lieu en conséquence de relever que les griefs dénoncés dans la lettre de licenciement sont suffisamment établis par l’employeur et non contredits par les pièces fournies par le salarié et constituent, par leur multiplicité, des manquements graves aux obligations contractuelles auxquelles étaient soumis M. Y…, manquements qui justifient eu égard à leur nature et à leur contexte, la mise à pied conservatoire et le licenciement pour faute grave, le maintien du salarié dans l’entreprise s’étant avéré impossible même pendant la durée du préavis.

La mise à pied conservatoire et le licenciement pour faute grave étant justifiés, M. Y… ne peut en conséquence prétendre, sur le fondement des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, à aucune indemnité légale de licenciement, à aucune indemnité au titre de la mise à pied, du préavis, de congés payés y afférents et d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

S’agissant de l’indemnité conventionnelle de licenciement sollicitée, il ne résulte d’aucune des mentions figurant aux contrats, ni d’aucune pièce versée aux débats qu’une telle indemnité a été prévue, il sera dès lors également débouté de ce chef de demande » ;

1/ Alors que lorsque le salarié, poursuivi sur le plan pénal par son employeur, bénéficie d’une relaxe, les faits lui étant reprochés n’étant pas établis ou ne lui étant pas imputables, le licenciement fondé sur cette seule infraction est nécessairement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu’en l’espèce, il est constant que le salarié a été relaxé par la juridiction pénale de l’ensemble des infractions pour lesquelles il était poursuivi, les faits n’étant pas établis, le salarié n’ayant pas, principalement, procédé à un vol de fichiers informatiques de l’employeur, dès lors que ceux-ci étaient en libre accès dans l’entreprise, de sorte qu’il ne pouvait lui être reproché d’avoir frauduleusement transféré ces mêmes fichiers sur sa messagerie internet personnelle, ainsi que l’énonçait la lettre de licenciement ; qu’en retenant néanmoins que ce grief est établi et constitue une faute grave, la Cour d’appel a violé le principe de l’autorité de la chose jugée au pénal, ensemble les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1235-1 du code du travail ;

2/ Alors, en tout état de cause, que manque à son obligation de confidentialité le salarié qui, en violation de ses obligations contractuelles, a volontairement transmis à des personnes extérieures à l’entreprise des informations confidentielles de celle-ci auxquelles il a accès par ses fonctions ; qu’en retenant, en l’espèce, la faute du grave du salarié en raison du manquement à son obligation de confidentialité, après avoir pourtant constaté que ce dernier s’était limité à transférer les données de l’entreprise sur sa messagerie internet personnelle sans en assurer la divulgation auprès de tiers, la Cour d’appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1235-1 du code du travail ;

3/ Alors, en outre, que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu’en relevant que le salarié, en transférant des fichiers informatiques sur sa messagerie internet personnelle, les avait extraits de leur protection et les avait insécurisés, quand la lettre de licenciement se bornait à invoquer un manquement à l’obligation de confidentialité du salarié du fait du simple transfert de ces données sur sa messagerie internet personnelle, sans invoquer le risque de fuites sur laquelle la Cour d’appel s’est ainsi fondée pour juger établi le manquement à l’obligation de confidentialité, la Cour d’appel a méconnu les dispositions de l’article L. 1232-7 du code du travail, ensemble celles des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1235-1 du même code ;

4/ Alors, enfin, que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise ; que ne constitue pas une telle faute le non-respect, à lui seul, des procédures « sûreté » relatives à la destruction par incinération de documents confidentiels de l’entreprise ; qu’en jugeant dès lors, en l’espèce, le licenciement du salarié fondé sur une faute grave en raison du manquement du salarié à ses obligations contractuelles relatives aux procédures « sûreté », la Cour d’appel a de nouveau violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1235-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’avoir débouté M. Y… de sa demande en paiement d’une indemnité au titre de l’obligation de non-concurrence mise à sa charge ;

Aux motifs que « Il est précisé que le versement de l’indemnité, soit 20 % du traitement brut, n’est pas dû en cas de licenciement pour faute grave.

Le licenciement pour faute grave était justifié, M. Y… sera débouté de ce chef de demande » ;

Alors que la cassation de l’arrêt à intervenir sur le premier moyen de cassation, en ce qu’il a jugé le licenciement fondé sur une faute grave, entraînera, par voie de conséquence, en application de l’article 624 du code de procédure civile, l’annulation du chef de l’arrêt concernant le paiement de l’indemnité de non-concurrence, fondé sur la seule justification du licenciement par une faute grave.

 


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