Sécurité des Systèmes : 9 novembre 2017 Cour d’appel de Paris RG n° 16/25815

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Sécurité des Systèmes : 9 novembre 2017 Cour d’appel de Paris RG n° 16/25815
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Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 1

ARRÊT DU 09 NOVEMBRE 2017

AUDIENCE SOLENNELLE

(n° 420 , 15 pages)

Numéros d’inscription au répertoire général : 16/25815 et 16/25816

Décision déférée à la Cour : Annulation des élections professionnelles des 29 Novembre et 1er Décembre 2016

DEMANDERESSES AU RECOURS

Maître [P] [F]

[Adresse 1]

[Adresse 2]

Comparante

Assistée de Me [P] [C] de la SELEURL [P] [C], avocat au barreau de PARIS, toque : [L]

Maître [P] [C]

[Adresse 3]

[Adresse 2]

Comparante

Assistée de Maître [P] [F], du Cabinet [F], avocat au barreau de PARIS, toque : [U]

DÉFENDEURS AU RECOURS

LE BATONNIER DE L’ORDRE DES AVOCATS DE PARIS

[Adresse 4]

[Adresse 5]

LE CONSEIL DE L’ORDRE DES AVOCATS DE PARIS

[Adresse 4]

[Adresse 5]

Représentés par Me Bernard FAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E1429

Maître [Q] [P]

[Adresse 6]

[Adresse 2]

Maître [T] [S]

[Adresse 7]

[Adresse 2]

Représentés et plaidant par Me Michel LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : A0059

INTERVENANT VOLONTAIRE AU RECOURS

Société ELECTION EUROPE

[Adresse 8]

[Adresse 9]

Représentée et plaidant par Me SOUBELET-CAROT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0312

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 28 Septembre 2017, en audience tenue en en audience publique, devant la Cour composée de :

– M. Christian HOURS, Président de chambre

– Mme Marie-Sophie RICHARD, Conseillère

– Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

– Mme Isabelle CHESNOT, Conseillère

– Mme Anne LACQUEMANT, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Lydie SUEUR

MINISTERE PUBLIC :

L’affaire a été communiquée au ministère public, représenté lors des débats par Madame Martine TRAPERO, Substitut Général, qui a fait connaître son avis et qui n’a pas déposé de conclusions écrites antérieures à l’audience.

DÉBATS : à l’audience tenue le 28 Septembre 2017, on été entendus :

– Monsieur HOURS, en son rapport

– Maîtres [C] et [F],

– Maître FAU,

– Maître LEVY,

– Maître SOUBELET-CAROT,

– Madame TRAPERO, substitut du Procureur Général,

en leurs observations,

ARRÊT :

– Contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par M. Christian HOURS, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier.

Les élections pour désigner les successeurs, à compter du 1er janvier 2018, du bâtonnier et du vice-bâtonnier en place de l’ordre des avocats du barreau de Paris se sont déroulées, au scrutin majoritaire à deux tours, les 29 novembre et 1er décembre 2016, avec les résultats suivants :

– 1er tour :

– 11 103 suffrages exprimés sur 29 264 avocats inscrits

– M.[M] [T] et Mme [N] [Z] : 2 836 voix ;

– Mme [Q] [P] et M.[T] [S] : 2812 voix ;

– M. [Q] : 2 146 voix ;

– M.[F] [K] : 2 114 voix ;

– Mme [P] [C] et Mme [P] [F] : 1 195 voix ;

– 2ème tour opposant les deux binômes ayant obtenu le plus grand nombre de voix au premier tour :

– 9 954 suffrages exprimés sur 29 264 avocats inscrits

– Mme [Q] [P] et M.[T] [S] : 5 203 voix ;

– M.[M] [T] et Mme [N] [Z] : 4 751 voix.

Le 9 décembre 2016, Mmes [C] et [F] ont respectivement formé un recours contre ces élections.

Par mémoires visés les 3 mai et 27 septembre 2017, qu’elles reprennent lors de l’audience, Mmes [C] et [F] demandent à la cour de :

– joindre leurs recours pour qu’il soit statué par un seul et même arrêt ;

– prononcer au visa des articles 15 de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971, 5, 6 et 8 et suivants du décret 91-1197 du 27 novembre 1991, P65 du règlement intérieur du barreau de Paris (RIBP) complété par l’annexe 1, des principes généraux du droit électoral visant à assurer la complète information de l’électeur, son libre choix, l’égalité entre les candidats, le secret du vote et la sincérité du scrutin, de la délibération 371-2010 du 21 octobre 2010 de la CNIL, l’annulation des scrutins des 29 novembre et 1er décembre 2016 ;

– débouter le bâtonnier et le conseil de l’ordre de leurs écritures ;

– débouter Mme [P] et M.[S] de leurs demandes et écritures et les déclarer irrecevables à diriger une prétention sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– ordonner la publication de la décision à intervenir au Bulletin du barreau de Paris ;

– condamner l’ordre des avocats de Paris aux entiers dépens.

Le Conseil de l’ordre des avocats du barreau de Paris et le bâtonnier de l’ordre, ès-qualités, par écritures visées les 3 mai et 25 septembre 2017, reprises à l’audience, concluent au rejet de la protestation électorale des requérantes et à leur condamnation aux dépens.

Mes [P] et [S] demandent à la cour, dans leurs écritures des 28 juillet et 25 septembre 2017 qu’ils reprennent en plaidant :

– de rejeter la requête de Mmes [C] et [F],

– de les condamner chacune à payer tant à Mme [Q] [P] qu’à M.[T] [S] la somme de 5 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– de les condamner aux entiers dépens.

Par écritures du 21 septembre 2017 qu’elle reprend en plaidant, la société Election Europe, intervenant volontairement à l’instance, demande à la cour de :

– déclarer recevable son intervention volontaire à titre accessoire ;

– débouter les requérantes de leur demande d’annulation des élections du bâtonnier et du vice-bâtonnier en date des 29 novembre et 1er décembre 2016.

Mmes [C] et [F] demandent à la cour de débouter la société Election Europe de sa demande d’intervention.

La procureure générale donne un avis favorable à la recevabilité, tandis que les autres parties s’en rapportent.

SUR CE,

– Sur la jonction des appels :

Considérant que, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, il convient d’ordonner la jonction des procédures 16-25815 et 16-25816 correspondant aux appels formulés par Mmes [C] et [F], dans les mêmes termes, contre les élections des bâtonnnier et vice-bâtonnier dont elles demandent toutes les deux l’annulation ;

– Sur la recevabilité des appels :

Considérant que les appels de Mmes [C] et [F], interjetés dans les formes et délais légaux et qui ne font d’ailleurs l’objet d’aucune contestation sur ces points, doivent être déclarés recevables ;

– Sur la recevabilité de l’intervention volontaire de la société Elections Europe :

Considérant que la société Election Europe demande à la cour de la déclarer recevable à intervenir volontairement à titre accessoire ;

Considérant que Mmes [C] et [F] s’opposent à cette demande au motif que la société Election Europe poursuit des fins patrimoniales sans justifier d’un intérêt né et actuel, tandis que le bâtonnier et l’ordre des avocats, ainsi que les bâtonnier et vice-bâtonnier élus s’en rapportent, la procureure générale donnant quant à elle un avis favorable à la recevabilité de cette intervention ;

Considérant que l’article 330 du code de procédure civile dispose que l’intervention est accessoire lorsqu’elle appuie les prétentions d’une partie et qu’elle est recevable si son auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie ;

Considérant que la société Election Europe est la société prestataire éditrice et exploitante de la solution logicielle de vote électronique commercialisée sous la dénomination Election Central, qui a été utilisée pour les élections au bâtonnat de Paris, contestées par Mmes [C] et [F], notamment parce que la confidentialité et la sécurité du scrutin n’auraient pas été assurées par ce système informatique ;

Considérant que la société Election Europe, société commerciale dont il n’est pas contesté qu’elle organise de nombreux votes électroniques avec la solution logicielle mise en cause, dispose d’un intérêt matériel manifeste, né et actuel, à défendre les qualités de son système et son image de marque, laquelle serait nécessairement mise à mal si l’élection venait à être annulée pour une raison liée à son matériel ; qu’elle est par conséquent recevable, dans cette seule mesure, à intervenir à titre accessoire pour défendre à la demande d’annulation des élections ;

– Sur les irrégularités reprochées affectant la campagne :

Considérant sur le fond que Mmes [C] et [F] soutiennent que les principes essentiels du droit électoral ont été violés pendant la campagne :

– le bâtonnier de Paris n’a pas mis en oeuvre les moyens suffisants afin de permettre une information complète des électeurs, ce dont témoigne le fort taux d’abstention de plus de 66% (absence de tout panneau d’information au vestiaire et à l’ordre sur les élections, alors que la date des élections a été remaniée par trois fois au cours de deux années et que les avocats étaient amenés à voter le même jour sur six scrutins différents, distribution tardive du bulletin spécial élections, irrégularités affectant un lot de 2 000 bulletins à peine lisibles; ineffectivité des mails de campagne des candidats puisque le taux de pénétration dans les grands cabinets des mails des candidats n’était que de 2 %, alors qu’il aurait fallu généraliser la technique Avogarde permettant l’accès, absence d’organisation par l’ordre de tout débat entre les candidats) ;

– il y a eu pendant cette campagne rupture d’égalité entre les candidats : traitement de faveur réservé à l’UJA, syndicat maison de l’ordre et aux candidats issus de ce syndicat (montant disproportionné des subventions annuelles versées à ce syndicat (environ 60 000 euros par an outre des avantages en nature par mise à disposition de salles pour 21 324 euros en 2016, soit deux tiers des subventions, rupture d’égalité dans l’allocation des salles, les requérantes n’ayant pu, de façon discriminatoire obtenir, à titre onéreux, qu’une salle pendant deux heures à partir de 19h, le 23 novembre 2016, soit 6 jours avant le premier tour de scrutin, l’UJA a assuré un nombre considérable d’événements (10), qui vont porter la candidature [P]-[S], issue de ce syndicat, ‘véritable écurie à candidats’ qui dispose par ailleurs de la part du conseil de l’ordre du monopole des offres de recherche de collaboration assurant un vivier d’électeurs et bénéficie d’une salle gratuite au sein du Palais de justice dans la salle des pas perdus, mauvaise information des requérantes, à qui on avait dit d’abord qu’elles ne disposeraient que de 2 500 caractères, puis de 5 000, pour rédiger leur présentation contre 10 000 pour les autres et qui n’ont eu que quelques jours pour rédiger la fiche de 10 000 caractères contre un mois pour les autres, remise du fichier Avogarde permettant de franchir les ‘firewalls’ (pare-feu) des cabinets d’avocat au seul binôme de candidats [P]/[S] ;

Considérant que le conseil de l’ordre des avocats du barreau de Paris et le bâtonnier de l’ordre, ès-qualités, répliquent que :

– le taux d’abstention de 60,8 % au premier tour est dans la moyenne des taux de participation constatés pour les élections ordinales à Paris depuis 16 années que le vote électronique est pratiqué et est indifférent à la régularité du scrutin, à défaut de quorum à atteindre ;

– l’écart entre le second binôme retenu pour le second tour est de 666 voix pour M.de [Q], 698 voix pour M.[K] et de 1 617 voix pour Mmes [C] et [F] ;

– les principes généraux du droit électoral auxquels le scrutin doit être conforme concernent la régularité des opérations électorales, la liberté de choix, le secret du vote et la sincérité du scrutin ;

– la charge de la preuve de la matérialité des griefs allégués repose sur les requérantes, qui doivent également démontrer que les irrégularités alléguées auraient conduit à une modification de l’ordre des candidats à l’issue du premier tour ;

– l’ensemble des candidatures a donné lieu à des affichages dans les vitrines murales dédiées aux informations de l’ordre, tant à l’entrée des locaux accueillant ses services et le cabinet du bâtonnier qu’au vestiaire des avocats, soit en quatre points stratégiques pour les avocats, ce dont témoigne M.[X], directeur de la communication de l’ordre ; il a été rappelé que l’affichage sauvage serait enlevé ; la liste intégrale des adresses électroniques des avocats a été mise à disposition des candidats ; en outre, dès le 3 août 2016, l’ensemble des avocats ont été avertis par voie électronique du calendrier des élections ordinales (bâtonnier, vice-bâtonnier, 14 nouveaux membres du conseil de l’ordre) avec les précisions sur les dates des scrutins, les dates d’ouverture et de clôture du registre des candidatures ; trois autres communications ont suivi deux mois avant les élections ; deux autres sont encore intervenues, avec un lien, le 10 novembre 2016, vers le bulletin spécial du bâtonnier où figuraient l’ensemble des professions de foi des candidats, rappelant le 28 novembre 2016 les dates et modalités du vote par voie électronique avec à nouveau un onglet pour télécharger le bulletin spécial des déclarations des candidats ; d’autres messages ont annoncé les résultats de l’élection du premier tour, la tenue d’un débat d’entre les deux tours diffusé sur la chaîne Public Sénat, le 29 novembre à 22h30, puis le second tour ;

– il n’y avait pas de risque de confusions entre les différents scrutins organisés le jour du premier tour, ce que démontre le constat d’huissier de la SCP [E] ;

– le bulletin spécial du barreau comportant les déclarations de tous les candidats a été mis en ligne dès le 10 novembre, soit trois semaines avant le scrutin ;

– dès le 21 octobre, les requérantes ont su qu’elles disposaient de 10 000 caractères (4 pages) pour leur texte ; – le problème de façonnage d’un petit nombre de professions de foi a affecté également le binôme [P]-[S] ; les exemplaires concernés ont été retirés et il a été procédé à une nouvelle distribution, l’ensemble du corps électoral ayant été informé de l’incident qui n’a pu avoir la moindre portée sur le résultat du scrutin ; le bulletin a été composé avec les caractères habituels et était parfaitement lisible par un corps électoral habitué à l’écrit ;

– le fichier Avogarde remis aux premiers candidats déclarés, jugé à tort plus performant par les requérantes, a été remplacé par un nouveau fichier à jour, remis à tout le monde ; l’éventuel présence de dispositifs de protection par les avocats destinataires affecte tous les candidats sans entraîner de rupture d’égalité ;

– aucun texte ne disposait qu’un débat devait être organisé entre tous les candidats au premier tour de l’élection ; chaque candidat a pu enregistrer une vidéo d’une durée de cinq minutes, qui a été mise en ligne par l’ordre pour être consultée par l’ensemble du corps électoral, chacun des envois de l’ordre rappelant leur existence et la faculté de les consulter;

– les syndicats professionnels ont organisé, sans que cela entraîne une rupture d’égalité entre les candidats, des confrontations, en particulier, le 9 novembre 2016, dans la salle des criées,; auxquelles les requérantes ont participé ;

– les subventions accordées à l’UJA sont actées dans des délibérations accessibles, qui n’ont pas été attaquées ; l’UJA ne dispose d’aucun monopole pour la consultation d’offres de collaboration disponibles, toute autre organisation syndicale pouvant apporter le même service ; l’UJA n’a soutenu aucun candidat au bâtonnat, ses manifestations ne concernant que les candidats présentés à l’élection au conseil de l’ordre ; le fait que certains candidats aient pu dans le passé être adhérents à cette organisation syndicale ne caractérise aucun manquement au principe d’égalité entre les candidats dont aucune preuve n’est rapportée qu’ils auraient bénéficié par l’ordre d’un financement de leur campagne électorale ; – les requérantes ont bien bénéficié de l’auditorium de la maison du barreau cinq jours avant le premier tour, dans les mêmes conditions que les autres candidats, pour y tenir leur meeting de fin de campagne auquel l’ensemble du corps électoral a été convié par leurs soins; elles ne justifient pas avoir fait des démarches pour obtenir la disposition d’autres salles ;

– le grief d’une prétendue opacité des comptes de l’ordre, sur la base d’un arrêt de février 2016 de la cour d’appel de Paris, soumis à la Cour de cassation, est inopérant car sans rapport avec les opérations électorales en cause ;

Considérant que Mes [P] et [S], respectivement bâtonnier et vice-bâtonnier élus, plaident que :

– les textes applicables en la matière sont l’article 15 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, les articles 5, 6, 8 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 et l’article P65 du règlement intérieur du barreau de Paris, tandis que la décision de la CNIL du 21 octobre 2010, énonçant certaines recommandations, ne saurait ajouter à la légalité applicable aux élections dont le résultat est contesté, un acte administratif, purement interprétatif et non créateur de droit ne pouvant être mis sur le même plan, ni avoir une portée juridique identique à celle des actes législatifs et réglementaires qui organisent et réglementent les élections du bâtonnier d’un ordre d’avocats ;

– la jurisprudence sociale n’est pas transposable à des élections ordinales, le bâtonnier n’étant pas un chef d’entreprise et les avocats n’étant pas des salariés ; les décisions rendues en matière d’élections au bâtonnat apportent la preuve que le juge électoral applique la règle générale de l’appréciation in concreto des effets d’une éventuelle violation d’une règle sur le résultat du scrutin pour qualifier la violation d’un principe général du droit électoral, une fois apportée la preuve de la matérialité du fait invoqué ;

– s’agissant de l’information donnée, les services de l’ordre ont pris les mesures utiles à l’affichage des candidatures et les électeurs ont bénéficié d’une information complète et accessible :

– le 3 août 2016 : les dates des élections ordinales ainsi que les dates d’ouverture du registre, de clôture du registre et de la déclaration des candidatures ont été portées à la connaissance des avocats du barreau de Paris ;

– le 21 septembre 2016 : ces dates ont été rappelées ;

– le 29 septembre 2016 : la liste des candidats au bâtonnat qui s’étaient déjà déclarés, parmi lesquels Mmes [C] et [F], a été portée à la connaissance des avocats du barreau de Paris ;

– le 10 octobre 2016 : la liste de tous les candidats au bâtonnat a été portée à la connaissance des avocats du barreau de Paris ;

– le 10 novembre 2016 : le bulletin spécial élection, comprenant les déclarations des candidats, a été adressé à tous les avocats ;

– le 28 novembre 2016 : le rappel des dates et modalités d’exercice du vote par voie électronique ;

– le 29 novembre 2016 : le rappel de l’heure de clôture du vote, puis l’indication de l’heure du débat de l’entre-deux tours et un rappel, en cours d’après-midi, de l’heure de clôture du scrutin ;

– la simplicité et la clarté du mécanisme des diverses opérations électorales ne pouvaient faire naître aucune confusion dans l’esprit de l’électeur ;

– 13 000 bulletins papier ont été distribués aux toques. La distribution a eu lieu 8 jours avant le premier tour du scrutin ; en parallèle le bulletin « spécial élections », comprenant les professions de foi de tous les candidats, était accessible par internet, près de 3 semaines avant les élections et la liste des candidats avait été rendue publique le 29 septembre, soit deux mois auparavant ;

– le courriel de monsieur [D], s’il reconnaît que des exemplaires défectueux ont été déposés aux toques entre la zone P et la zone K, indique clairement que seuls «quelques numéros du premier lot de 2000 exemplaires livré lundi dernier par l’imprimeur comportaient effectivement des défauts », et précise « toutes les toques de cette zone P et K ont été contrôlées et 7 exemplaires défectueux ont été retrouvés et retirés». Toutes les toques de la zone ont fait l’objet d’une nouvelle distribution ; il s’agissait d’un problème de « fin d’approvisionnement de bac papier » et l’erreur ne portait que sur un nombre très marginal « probablement une dizaine d’exemplaires » sur les 13 000 exemplaires imprimés ; manquaient également les pages des candidats élus : Mme [Q] [P] et M.[T] [S], ce qui n’a en aucun cas entravé leur élection ;

– quelle que soit la qualité des procédés utilisés par l’ordre pour remédier à cet état de chose, il ne saurait être tenu pour responsable des dispositifs placés par ses membres sur leurs équipements informatiques respectifs bloquant les messages électoraux, difficulté qui affecte tous les candidats ;

– les requérantes ne rapportent pas la preuve d’un engagement du bâtonnier d’organiser un débat avant le premier tour et si un tel engagement avait été pris, il n’aurait eu aucune valeur juridique et n’aurait créé aucune obligation de droit, son irrespect éventuel n’aurait pas affecté la validité du scrutin ;

– les requérantes ne démontrent pas l’existence de man’uvres, ni ne démontrent que ce retard d’information ou cette absence d’affichage aurait favorisé la candidature d’un binôme plus que celle d’un autre et aurait ainsi été le « résultat d’une man’uvre» ayant pu avoir sur les résultats du vote, une influence suffisante pour remettre en cause l’élection contestée;

– toute l’argumentation relative à l’atteinte à l’égalité entre les candidats n’est qu’une diatribe contre l’UJA et ressort du combat que les requérantes mènent depuis plusieurs années contre ce syndicat et ses fondateurs ;

– dans son attestation en date du 4 février 2017, M.[U] [R], président de l’UJA de Paris, indique que « l’UJA, syndicat indépendant, n’a soutenu aucun candidat à la fonction de Bâtonnier/ Vice-Bâtonnier’ au cours des élections qui se sont déroulées au Barreau de Paris en 2016 » et ajoute «aucun soutien moral ou matériel n’a en effet été apporté à un quelconque candidat”;

– chacun des candidats a bénéficié de l’auditorium dans les mêmes conditions et à la même époque ;

– il n’est pas justifié en quoi le fait que l’UJA offre, depuis de nombreuses années, une sorte de service de placement des offres de collaboration aurait eu une incidence sur les élections de 2016 et sur l’égalité entre les candidats au bâtonnat et l’idée qu’il y aurait, ainsi, la création d’un « vivier d’électeurs », pour autant que la preuve en soit versée au débat, ne suffit pas à apporter la preuve d’une inégalité entre les candidats UJA et les candidats non UJA, lors de l’élection du bâtonnat de 2016 ;

– l’égalité des candidats s’entend comme une allocation égale de moyens aux candidats en lice et les requérantes sont bien incapables d’articuler un grief précis démontrant que l’ordre aurait alloué à d’autres candidats des moyens différents de ceux dont elles ont bénéficié ; l’artifice qui consiste à formuler ce moyen par l’intermédiaire du syndicat UJA n’est pas pertinent ;

Considérant qu’en matière de contestation d’élections ordinales il appartient aux requérantes de rapporter la preuve de l’existence d’irrégularités au regard des principes généraux du droit électoral dont l’objectif est d’assurer la complète information de l’électeur, son libre choix, l’égalité entre les candidats, le secret du vote et sa sincérité, ainsi que par rapport aux textes spécialement applicables tels que l’article 15 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, les articles 5, 6, 8 et suivants du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 et l’article P65 du règlement intérieur du barreau de Paris ;

Considérant en revanche que les décisions de la CNIL et en particulier celle du 21 octobre 2010, qui énoncent des recommandations dans l’organisation et le déroulement des opérations de vote et de dépouillement, sont dénuées de portée normative ;

Considérant que la jurisprudence électorale en droit social dans le cadre d’un rapport de subordination entre l’employeur et ses salariés n’est pas susceptible d’être transposée à l’élection du bâtonnier et du vice-bâtonnier de Paris où les liens entre le bâtonnier et les avocats sont de nature totalement différente ;

Considérant ensuite que les requérantes doivent rapporter la preuve de la matérialité des irrégularités dénoncées, un simple risque d’irrégularité étant insuffisant, ainsi que faire la démonstration que ces irrégularités ont eu une influence sur les résultats obtenus par les candidats, au point d’avoir pu modifier le résultat des élections, ce qui porte atteinte à la sincérité du scrutin ;

Considérant que le taux d’abstention important constaté pendant les élections contestées, qui est, au demeurant, du même ordre que celui des élections précédentes sur plus d’une quinzaine d’années, est inhérent aux caractéristiques hors normes du barreau de Paris, qui compte plusieurs dizaines de milliers d’avocats inscrits et ne peut se comparer avec des barreaux moins nombreux où les avocats se connaissent davantage et participent plus aux élections ; que le niveau élevé de l’abstention ne peut, en l’absence de fraude ou de manoeuvres, aucunement induire un défaut d’information des électeurs par l’ordre des avocats de Paris ni constituer une irrégularité en l’absence de quorum requis ;

Considérant qu’il n’est en rien démontré que les modifications intervenues de la date des élections ou le fait qu’il y avait, le même jour, à se prononcer sur différents sujets, auraient créé des équivoques, des ambiguïtés ou des incertitudes dans l’esprit des avocats, alors qu’ils sont professionnellement habitués à maîtriser des questions autrement complexes et que le choix des bâtonnier et vice-bâtonnier est un sujet suffisamment important pour faire l’objet de leur part d’une attention toute particulière ;

Considérant s’agissant de l’affichage au palais que la commission électorale du 28 octobre 2016, en présence des requérantes, avait prévu, sans que des contestations aient été notées au compte-rendu, qu’un affichage officiel était seul autorisé, les affiches devant être remises au service de la communication en format A3 en portrait en quatre exemplaires, quatre points d’affichage étant prévus ; que le directeur de la communication à l’ordre atteste que ces dispositions ont bien été exécutées sans que Mmes [C] et [F] démontrent que cela ne serait pas exact ; qu’eu égard à la présence de cet affichage dans les vitrines murales consacrées aux informations de l’ordre et à l’ensemble des mesures de publicité prévues, notamment sur le plan électronique (communications des 3 août, 21 septembre, 29 septembre, 10 octobre, 10 novembre, 28 novembre, 29 novembre 2016, possibilité pour les électeurs d’accéder à des vidéos où les candidats exposaient leur programme), il n’apparaît pas que l’absence de panneaux spécifiques sur tréteaux ait pu nuire à l’information des électeurs ;

Considérant que la tardiveté alléguée par les requérantes de l’information sur le nombre autorisé de caractères dans la profession de foi dont la transmission à l’ordre a donné lieu à une prorogation du délai de trois jours au 27 octobre 2016 n’a manifestement pas handicapé les requérantes qui ont été parfaitement en mesure de livrer leur texte après avoir vivement remercié, par un mail du 24 octobre 2016, le délégué du bâtonnier de les avoir prévenues de la nouvelle date butoir pour l’envoi et des 10 000 caractères autorisés ;

Considérant sur le bulletin spécial ‘déclarations des candidats’ dont les requérantes critiquent la distribution tardive, il est justifié de l’envoi par l’ordre, dès le 10 novembre 2016, soit trois semaines avant le scrutin, d’un message intitulé ‘Elections 2016 : le Bulletin spécial Déclaration des candidats est disponible’ avec rappel des dates des élections du futur bâtonnier et, le cas échéant, du futur vice-bâtonnier et afin de renouveler le tiers des membres du Conseil de l’Ordre, qui se dérouleront conformément aux modalités fixées par l’article P.65 et l’annexe 1 du règlement intérieur du barreau de Paris ; que le message se terminait par l’annonce selon laquelle le Bulletin spécial pouvait être téléchargé pour découvrir les déclarations des candidats ; que chaque communication électronique postérieure effectuée aux dates rappelées ci-dessus a rappelé cette possibilité ;

Considérant dans ces conditions que la distribution à la toque d’une version papier du bulletin, le 21 novembre 2016, à une semaine du scrutin, n’avait qu’un caractère secondaire par rapport à l’information numérique et récapitulatif ;

Considérant que le fait qu’une cinquantaine de bulletins papier malfaçonnés, aient été dans un premier temps distribués, sur un total de 13 000 exemplaires, avant d’être remplacés par des exemplaires exempts de défaut, par le service de la communication de l’ordre, lequel a contrôlé tout le vestiaire, n’a pu sérieusement entacher l’information délivrée aux électeurs, étant observé que cet incident extrêmement marginal a concerné aussi bien les candidats élus au deuxième tour que les requérantes ;

Considérant qu’il n’est pas établi que le bulletin spécial élection, bien que comportant de petits caractères gris, aurait été illisible ;

Considérant sur l’ineffectivité alléguée des mails de campagne que ce phénomène, évoqué au cours de commissions électorales, n’est pas objectivé ni exactement quantifié ; qu’il n’affecterait, aux dires des requérantes, que certains cabinets d’avocats ; qu’en tout état de cause, l’ordre des avocats ne peut être tenu pour responsable des dispositifs pare-feu mis en place par certains grands cabinets ; que ce phénomène, s’il existe, ne peut dès lors être considéré comme un dysfonctionnement dans l’organisation de la campagne ;

Considérant sur l’absence d’organisation d’un débat par l’ordre qu’aucun texte n’imposait à l’ordre d’y procéder, aucune promesse, fût-elle du bâtonnier, ne pouvant en tenir lieu ;

Considérant au demeurant qu’un tel débat a été organisé, le 9 novembre 2016, par une organisation syndicale dans des conditions qui ont été jugées acceptables par les requérantes puisqu’elles y ont participé ainsi que l’ensemble des candidats, lesquels ont pu confronter leurs positions dans la salle des criées du tribunal de grande instance de Paris ;

Considérant en résumé qu’aucun des manquements reprochés par les requérantes n’a privé les électeurs d’une information complète ;

Considérant sur le grief de la rupture d’égalité entre les candidats qu’il repose sur l’allégation d’une collusion entre l’ordre des avocats de Paris et le syndicat majoritaire chez les avocats, l’UJA ;

Considérant qu’il ne peut être question, à l’occasion de ce contentieux de remettre en cause le montant des subventions versées par l’ordre à l’UJA ou les facilités qui lui sont accordées en dehors de toute élection (salle gratuite) à raison de sa représentativité et des services que ce syndicat est susceptible d’apporter à ses adhérents, toutes décisions ayant en leur temps fait l’objet de délibérations, qui n’ont pas été contestées devant la cour ou infirmées ;

Considérant que l’UJA témoigne, par une attestation de son président du 4 février 2017, de sa neutralité dans l’élection dont la régularité est contestée ; que les requérantes ne démontrent pas que ce syndicat ait en réalité fait campagne pour certains candidats ; qu’il ne peut par ailleurs être interdit aux candidats ayant appartenu à l’UJA ou ayant des liens avec ce syndicat de se présenter aux élections ; qu’il n’est pas davantage démontré que ces candidats auraient été avantagés en recevant plus de moyens pour la campagne que les autres en raison de facilités financières ou matérielles ou d’un soutien moral qui leur auraient été spécialement accordés par ce syndicat ;

Considérant que quelles que soient les critiques faites à l’UJA et à la position dominante qu’elle occupe, dès lors qu’il n’est pas démontré par les requérantes que certains candidats aient été avantagés par ce syndicat dans la campagne électorale, il ne peut être reproché à l’ordre d’avoir favorisé une inégalité de traitement entre les candidats ;

Considérant s’agissant de l’usage des salles pour les élections qu’en définitive, Mmes [C] et [F] ont pu bénéficier, trois jours avant le premier tour, ce qui n’est pas le plus mauvais moment de la campagne, de l’auditorium de la maison de l’avocat, place Dauphine, pour y tenir une réunion électorale, dans les mêmes conditions que les autres candidats, soit moyennant une redevance de 282 euros HT ;

Considérant enfin qu’il n’est pas démontré que le logiciel Avogarde, dont le tandem [P]-[S], qui s’était alors porté candidat avant le 12 septembre 2016, a bénéficié comme d’autres dans la même situation avant qu’il ne soit remplacé par un autre système, aurait présenté un avantage technique permettant aux messages envoyés par les candidats de mieux pénétrer les gros cabinets par rapport au système qui lui a succédé, pourtant en principe supérieur et qui a été remis à l’ensemble des candidats dès sa disponibilité ;

Considérant enfin que le grief tenant à une prétendue opacité des comptes de l’ordre est dénué de tout rapport direct avec l’organisation critiquée des élections des bâtonnier et vice-bâtonnier ;

Considérant en conséquence qu’il n’est pas justifié par les requérantes d’une inégalité de traitement entre les candidats pendant la campagne de nature à fausser la sincérité du scrutin;

Considérant que Mmes [C] et [F] soutiennent ensuite que les principes essentiels du droit électoral ont été violés s’agissant de l’organisation matérielle du scrutin :

– irrégularité dans la composition du bureau électoral qui aurait dû comprendre l’avocat électeur le plus âgé et le plus jeune ; absence de production des procès-verbaux signés par le président et les assesseurs ainsi que des listes d’émargement ; envoi irrégulier sous pli simple des codes et identifiants permettant de voter alors qu’il suffit de rajouter le mois et l’année de naissance pour pouvoir voter ;

– irrégularités commises liées au système de vote électronique : indigence des dispositions du RIBP pour ce qui concerne l’organisation du scrutin, absence d’encadrement de l’organisation matérielle du vote électronique, choix de la société Election Europe comme prestataire par le bâtonnier sans appel d’offres depuis 11 ans, absence d’expertise indépendante du système avant le scrutin en violation des exigences de la CNIL, absence de garantie du caractère secret du vote et de sincérité du scrutin selon l’expert [O] de la société Oppida, absence de séparation des données nominatives, le serveur ayant accès au choix de l’électeur, alors que la confidentialité doit être garantie y compris vis à vis du prestataire et des autorités de l’élection, insuffisance des sécurités informatiques s’agissant de la longueur de la clé de chiffrement, scellement incomplet du dispositif de vote électronique, défaut de surveillance du scrutin, déficience des opérations de chiffrement des bulletins pendant le scrutin, violation des règles de contrôle a posteriori ;

Considérant que les requérantes estiment en définitive que :

– l’annulation des scrutins doit être prononcée à raison de ces manquements ;

– l’organisation défectueuse du scrutin étant à la charge du bâtonnier, le binôme élu dans ces circonstances n’est pas recevable à demander une condamnation pour frais irrépétibles;

Considérant que le conseil de l’ordre des avocats du barreau de Paris et le bâtonnier de l’ordre, ès-qualités, font valoir que :

– s’agissant de la composition du bureau, la thèse selon laquelle il aurait dû être constitué des électeurs le plus âgé et le plus jeune, est fantaisiste, les dispositifs en matière d’élections professionnelles dans une entreprise ne pouvant être transposés à des élections ordinales, de sorte que le bureau pouvait être constitué du bâtonnier de l’ordre et de deux membres du conseil qu’il a désignés, étant rappelé que les requérantes pouvaient contrôler les opérations de vote ; aucune liste d’émargement n’est signée pour des votes électroniques et il a été constaté par Me [E], huissier de justice, le vote électronique de l’ensemble des électeurs lors du dépouillement de l’urne ;

– les requérantes n’établissent pas que le dispositif d’envoi des codes pour voter aurait été pris en défaut et que la sincérité du scrutin aurait été altérée ;

– le rapport d’expertise indépendant a été rédigé par la société Oppida, de façon non contradictoire, après seulement une heure d’observations, sur la commande de M.[T] et Mme [Z], candidats, ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour, qui n’ont pas excipé de la moindre irrégularité tenant au secret du vote et à la sincérité du scrutin; la société Election Europe, partenaire hautement crédible, a appliqué la procédure déjà mise en oeuvre avec succès au cours des 16 élections précédentes ; un audit réalisé en a confirmé le caractère satisfaisant pour garantir le secret du vote et la sincérité du scrutin, ce qui a été confirmé à plusieurs reprises par les juridictions judiciaires;

– aucun des griefs des requérantes n’est ainsi de nature à caractériser une atteinte aux principes du droit électoral ou aux textes applicables, qui aurait altéré la sincérité du scrutin, a fortiori dans des proportions remettant en cause le résultat de l’élection ;

Considérant que Mes [P] et [S], respectivement bâtonnier et vice-bâtonnier élus, plaident que :

– les irrégularités invoquées dans la composition du bureau ‘ pour autant que leur matérialité soit établie- ne sont pas de nature à invalider le scrutin, ce d’autant qu’aucune incidence sur le résultat n’est même invoquée ;

-les requérantes n’apportent aucune preuve de l’exigence de la signature d’un procès-verbal et d’une liste d’émargement, ni aucune preuve de la règle qui frapperait de nullité le défaut de tels documents ; aucune preuve de l’incidence sur le résultat des élections n’est même ébauchée ;

– l’outil informatique utilisé pour le vote présentait toutes les garanties nécessaires pour que au moins le secret et la sécurité du vote soient assurés ;

– les requérantes ne versent au débat aucun élément objectif ou matériel qui apporterait la preuve de la réalisation, ne serait-ce que d’une des hypothèses d’atteinte au secret du vote ou d’une des hypothèses d’atteinte à la sincérité du vote ;

– ni les rapports Oppida ni la lettre de Mme [A] n’apportent la preuve de la réalité des défaillances invoquées du système de vote d’Election Europe ;

– les concluants adhèrent totalement aux arguments développés par le bâtonnier sur la qualité et la sécurité du système utilisé par l’ordre ;

– aucun élément ne confirme la réalité de ce qui est dénoncé s’agissant de l’envoi des codes;

– une contestation du type des requérantes est abusive et néfaste, certains des griefs étant étrangers au processus électoral et illustrant un combat contre l’UJA, dont le forum n’est pas le contentieux de l’élection au bâtonnat, ce qui justifie l’octroi par chaque requérante d’une indemnité à chacun des concluants ;

Considérant que la société Election Europe demande à la cour de débouter les requérantes de leur demande d’annulation des élections du bâtonnier et du vice-bâtonnier ; qu’elle soutient que le système informatique mis en place présente toutes les garanties pour la confidentialité et la sécurité du scrutin ;

Considérant sur l’irrégularité invoquée dans la composition du bureau de vote qu’aucun texte applicable à l’élection contestée n’impose que le bureau électoral soit composé du plus vieil avocat électeur et du plus jeune ;

Considérant que le bureau a été constitué du bâtonnier et de deux membres du conseil de l’ordre qu’il a désignés en l’absence de règles différentes ; qu’en tout état de cause, l’irrégularité invoquée ne serait pas de nature à invalider le scrutin, aucune incidence n’étant invoquée sur le résultat du scrutin, alors même que l’article 6 de l’annexe 1 du RIBP autorisait les requérantes à contrôler les opérations de vote, de dépouillement et de décompte des voix ;

Considérant que le vote ayant été entièrement électronique, il ne saurait être reproché par les requérantes l’absence d’une liste d’émargement classique dans le cas d’un vote papier; qu’en revanche, une liste d’émargement électronique a bien été éditée par le système informatique utilisé et transmise à l’ensemble des candidats ou leurs représentants ;

Considérant que le déroulement des opérations de vote a fait l’objet pour les deux tours d’un constat d’huissier de Maître [E], qui a constaté le déroulement des scrutins et leur résultat ; que dans ces conditions l’absence alléguée d’un procès-verbal qu’aucun texte applicable à cette élection ne prévoit, n’a pu avoir de conséquence sur la sincérité du vote;

Considérant sur le grief relatif à l’envoi par la poste des codes pour voter que la crainte des requérantes de voir ceux-ci interceptés par toute personne travaillant au cabinet, d’autant que seule la date de naissance des collaborateurs, connue du patron, est nécessaire pour pouvoir voter à leur place, apparaît vaine dans la mesure où le système informatique est à même de repérer et de signaler toute tentative de voter une seconde fois, étant précisé qu’il n’a pas été fait état d’une telle occurrence ni d’une quelconque plainte d’un avocat qui aurait constaté qu’il ne pouvait pas voter, une autre personne l’ayant fait à sa place ;

Considérant dès lors qu’il n’est pas rapporté la preuve par les requérantes d’irrégularités tenant à l’organisation matérielle du scrutin susceptibles d’avoir influé sur la sincérité du scrutin ;

Considérant s’agissant de l’absence alléguée de mesures propres à garantir le secret et la confidentialité du vote que les requérantes se fondent sur un rapport établi par M.[O], expert de la société Oppida, qui avait été mandaté par les candidats parvenus en tête au premier tour des élections mais qui n’ont pas gagné le second tour sans pour autant avoir cru devoir utiliser ce travail pour critiquer le résultat des élections ;

Considérant ainsi que les requérantes considèrent avec M.[O] que les informations fournies par la société Election Europe lors de la réunion du 21 novembre 2016 ne garantissent pas le fait que cette société ou une autre entité n’accède pas au serveur de vote pendant le scrutin, sans que cela soit détecté, pour récupérer l’expression du vote des électeurs , de sorte que le secret du scrutin ne serait pas garanti ;

Considérant que les rapports sur lesquel se fondent les requérantes ont été établis de façon non contradictoire par M.[O] de la société Oppida, après avoir assisté seulement à l’exposé général qui a été fait, le 21 novembre 2016, pendant deux heures, par la société Election Europe aux différents candidats pour leur présenter le système informatique utilisé et en partie aux opérations de dépouillement les 29 novembre et 1er décembre, de 19 heures à 19 h 30, se bornant selon l’huissier [E] à regarder le poste informatique où se tenait M.[M] de la société Election Europe, sans poser de questions ;

Considérant que M.[G], expert en informatique près les cours d’appel et administrative d’appel de Paris, qui a examiné le rapport dressé par M.[O], considère que les critiques portant sur le secret du vote, révèlent une incompréhension du système de vote de la société Election Europe, des erreurs et que les systèmes de sécurisation proposés par cette société ne répondent à aucune nécessité ; qu’il conclut que le rapport de la société Oppida apparaît plus comme un recueil d’opinions fondées sur des hypothèses souvent erronées que comme un véritable rapport d’expertise qui argumenterait et étayerait par des éléments tangibles et précis des avis circonstanciés ;

Considérant ainsi que M.[G] précise que :

– les différents traitements opérés entre l’expression de son vote par l’électeur et la validation de sa confirmation reçue du serveur de vote, sont gérés comme une transaction unique associée à un numéro de session aléatoire unique ; pendant toute la durée de cette transaction, le chiffrement du bulletin de vote est ininterrompu ; en fin de transaction, le vote de l’électeur est enregistré sous forme anonyme et chiffré dans l’urne permanente où il ne pourra être déchiffré qu’au moment du dépouillement ;

– l’administration du système de vote pendant le scrutin est entièrement contrôlée par l’expert et l’huissier mandatés par l’ordre, ce dispositif interdisant tout accès non autorisé au serveur de vote pendant le scrutin ;

– le serveur de vote n’a pas connaissance de l’identité de l’électeur, ne connaît que le numéro de session attribué aléatoirement pendant le vote de l’électeur, numéro qui est détruit au moment de la validation de son vote par l’électeur ;

– la surveillance du scrutin n’a pas été réalisée, contrairement à ce qu’indique M.[O] par le même expert que celui qui a réalisé l’expertise du logiciel de la société Election Europe puisqu’il s’agissait de M.[X] [W], expert en informatique près la cour d’appel de Paris, alors que l’expertise avait été réalisée par MM.[A] [Y], ex-expert informatique près la cour d’appel de Paris et [E] [J], expert indépendant en matière de vote électronique inscrit sur la liste nationale tenue par la CNIL, tous deux mandatés par la société Election Europe ;

– la surveillance de l’expert [W] a, contrairement à ce qu’indique M.[O], porté sur la totalité des opérations, depuis les tests et la recette du système de vote jusqu’aux opérations de dépouillement, réalisant tout au long un contrôle des modules du logiciel, par calculs réguliers de leurs empreintes numériques ;

– les clés cryptographiques nécessaires au déchiffrement des bulletins de vote pour le dépouillement des résultats sont protégées dans un coffre-fort électronique dont l’accès exige la conjugaison de trois identifiants et mots de passe, conservés respectivement par le bâtonnier et deux membres de la commission électorale ;

Considérant sur les critiques du rapport Oppida de M.[O] à propos de la sincérité du scrutin que l’expert [G] observe que :

– comme indiqué supra, les informations transmises à l’imprimeur par fichier ne sont pas suffisantes pour autoriser le vote effectif puisqu’il faut connaître une information connue de l’électeur, sa date de naissance et, dans l’hypothèse d’un tiers malveillant, l’électeur voulant voter se verrait opposer un message de type ‘a déjà voté’ et s’adresserait à la commission, ce qui n’a pas été le cas dans aucun des deux tours ;

– le logiciel de la société Election Europe, par sa conception et les multiples mécanismes de protection qu’il met en oeuvre, offre un niveau de sécurité tout à fait adapté aux exigences de sécurité d’un scrutin ; il a été contrôlé que les mécanismes de protection ont bien été mis en oeuvre pendant les opérations de vote ;

– à tout moment, le contrôle ‘nombre d’émargés = nombre de bulletins déposés dans chaque urne’ a été effectué par l’expert et l’huissier mandatés par l’ordre, la liste d’émargement, comportant les nom et prénom de chaque électeur, ainsi que l’information ‘a voté ou non’ a été communiquée à l’ensemble des candidats en fin de dépouillement ;

– les opérations de dépouillement ont été réalisées à partir de postes fournis par la société Election Europe mais en mode 100 % navigateur sans nécessité d’installation de logiciel sur le poste et sans réalisation d’aucun traitement sur ces postes dont le rôle se limitait à l’affichage des résultats sous la forme d’un fichier PDF généré sur le serveur de vote ;

– l’ordre des avocats et son prestataire, la société Election Europe, ont mis en place d’importantes mesures techniques, dans le but de sécuriser les opérations de vote intervenues les 29 novembre et 1er décembre 2016 : expertise de la solution de vote par MM.[Y] et [J], audit de sécurité avec tests d’intrusion, de la solution de vote de la société Election Europe par un prestataire spécialisé en sécurité informatique, Docteur [N], audit de sécurité avec tests d’intrusion, de la solution de vote de la société Election Europe, réalisé par un prestataire spécialisé en sécurité informatique, la société Alliacom, opérations de recette préalables à chacun des deux tours, de la solution de vote, sous contrôle de M.[W], expert en informatique, ainsi que de Mes [I] et [E], huissiers de justice, contrôle de l’ensemble des opérations de vote des deux tours par M.[W] et Me [E] ;

Considérant que la société Election Europe, dont il importe peu pour la solution du litige qu’elle ait été choisie sans appel d’offres préalable, rappelle qu’elle a fourni pour l’élection contestée la même prestation que pour les scrutins organisés chaque année par l’ordre des avocats de Paris depuis plus de quinze ans et validés par les juridictions lorsqu’ils ont été contestés ;

Considérant qu’elle décrit avec précision ses diligences avant le scrutin : génération de manière aléatoire des codes identifiants et des mots de passe à usage unique avec une question personnelle (mois et année de naissance) dont la réponse conditionnait la possibilité de se connecter au site de vote, les électeurs pouvant alternativement s’identifier avec la clé Avoclé utilisée pour les services dématérialisés du barreau (RPVA, eCarpa…), test d’intrusion réalisé par un prestataire spécialisé désigné par l’ordre, recette la veille de chaque tour de scrutin, authentification de l’électeur lors des scrutins, saisie de chaque code identifiant valant signature de la liste d’émargement dès validation de son vote par l’électeur, cryptage et stockage dans une urne électronique dédiée sans lien avec la liste d’émargement, de telle manière qu’aucun rapprochement ne puisse être fait entre l’intention de vote et le votant, possibilité pour les membres de la commission électorale de disposer à tout moment au moyen d’un code secret du décompte précis de votants et de bulletins de vote pour chaque scrutin, ouverture des urnes avec trois clés électroniques précédemment créées, introduites simultanément dans le système autorisant le dépouillement des bulletins);

Considérant que la société Europe Election souligne qu’elle perd tout accès à la solution de vote pendant toute la période du scrutin, l’accès ne pouvant être rétabli qu’après remise du mot de passe détenu par moitié par l’huissier et l’expert et qu’aucun rapprochement entre l’intention de vote et son auteur ne peut être fait entre la liste d’émargement et les bulletins de votes conservés dans une urne distincte et mélangés aléatoirement ; que la transaction de vote recourt à des mesures de sécurité préservant le bulletin de vote de la divulgation et de l’altération, le bulletin subissant trois chiffrements successifs : par obfuscation, transport TLS chiffré, chiffrement RSA et signature électronique, tout échange entre le terminal de l’électeur et la plate-forme de la société Election Europe étant réalisé selon un protocole hautement sécurisée (TLS), tandis qu’au moment de son vote le bulletin crypté est conservé dans l’urne électronique lorsque l’électeur confirme son choix au vu de l’image du bulletin, prévenant ainsi tout détournement de son intention de vote et toute altération de cette intention après validation ;

Considérant sur les recommandations de la CNIL en date du 21 octobre 2010 portant recommandation relative à la sécurité des systèmes de vote électronique qu’outre l’absence de portée normative de ces recommandations rappelée supra, la société Europe Election indique avoir, en concertation avec les services de la CNIL, fait évoluer son logiciel Election central, pour arriver à la version 3, exploitée depuis octobre 2015 et utilisée dans l’élection contestée ; qu’elle produit le rapport d’expertise indépendant du 21 octobre 2015, remis à la CNIL, ayant considéré que cette solution respectait les exigences sur la base desquels la CNIL avait établi sa recommandation issue de la délibération du 21 octobre 2010 ;

Considérant que toutes les contestations des requérantes, qui font au demeurant état de simples risques et non de troubles avérés, sont ainsi réfutées ;

Considérant en définitive qu’il n’existe aucun motif sérieux de nature à mettre en doute la régularité des opérations électorales critiquées, la complète information des électeurs, leur liberté de choix, le secret du vote et la sincérité du scrutin ;

Considérant en conséquence que les requérantes doivent être déboutées de l’ensemble de leurs demandes ;

Considérant toutefois qu’en équité il n’y a pas lieu de les condamner sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; qu’elles devront supporter les dépens de cette instance ;

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

– déclare recevables les recours de Mmes [C] et [F] ;

– ordonne la jonction des procédures 16-25815 et 16-25816 sous le seul numéro 16-25815;

– déclare recevable l’intervention volontaire à titre accessoire de la société Election Europe;

– déboute Mmes [P] [C] et [P] [F] de l’ensemble de leurs demandes ;

– dit n’y avoir lieu de les condamner sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– les condamne à supporter les dépens.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

 


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