Sécurité des Systèmes : 22 juin 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 18/09070

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Sécurité des Systèmes : 22 juin 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 18/09070

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 18/09070 – N° Portalis DBVX-V-B7C-MDRD

[K]

C/

Sociéte SEB DEVELOPPEMENT

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de LYON

du 06 Décembre 2018

RG : 17/03428

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 22 JUIN 2022

APPELANT :

[O] [K]

né le 07 Avril 1966 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par Me Sylvaine CHARTIER de la SELARL CHARTIER-FREYCHET AVOCATS, avocat au barreau de LYON substituée par Me Sophie FREYCHET de la SELARL CHARTIER-FREYCHET AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société SEB DEVELOPPEMENT

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SCP ELISABETH LIGIER DE MAUROY & LAURENT LIGIER AVOUÉS ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Jean-baptiste TRAN-MINH de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Eliette LACROIX, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 21 Mars 2022

Présidée par Joëlle DOAT, Présidente magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Joëlle DOAT, présidente

– Nathalie ROCCI, conseiller

– Antoine MOLINAR-MIN, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 22 Juin 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 15 avril 2003 prenant effet le 5 mai 2003, Monsieur [O] [K] a été embauché par la société Groupe Seb Moulinex en qualité d’ingénieur recherche thermique, statut cadre, position II, indice 135 de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972.

Dans le cadre du plan de sauvegarde de l’emploi de la société Groupe Seb Moulinex en date du 19 septembre 2009, un dispositif a été mis en place pour favoriser la mobilité des salariés concernés par la fermeture du site de [Localité 2] où travaillait M. [K] et une convention provisoire de mise à disposition de personnel à but non lucratif au sein du groupe Seb a été conclue le 24 mars 2010 entre la société Groupe Seb Moulinex, la société Seb Développement et M. [O] [K] pour la période du 1er avril 2010 au 30 septembre 2010, en vertu de laquelle il a été convenu que M. [K] occuperait la fonction d’ingénieur documentation au sein de l’établissement de Seb Développement à [Localité 4].

Un nouveau contrat de travail a été signé le 15 juin 2011 entre monsieur [K] et la société Seb Développement, le salarié étant engagé à compter du 1er juillet 2011 en qualité d’ingénieur documentation avec reprise d’ancienneté au 5 mai 2003.

Par lettre recommandée en date du 11 janvier 2012, la société Seb Développement a convoqué monsieur [K] à un entretien préalable à son licenciement, fixé au 23 janvier 2012.

La société Seb Développement a notifié à monsieur [K] son licenciement pour cause réelle et sérieuse le 27 janvier 2012.

Par requête en date du 2 février 2015, M. [K] a saisi le conseil de prud’hommes de Lyon en lui demandant de dire que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse. A deux reprises, l’affaire a été radiée, puis réinscrite.

M. [K] a demandé au conseil de prud’hommes de condamner la société Seb Développement à lui verser diverses sommes à titre de dommages et intérêts au titre de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de l’indemnité forfaitaire de déplacement prévue dans le plan de sauvegarde de l’emploi et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Par jugement en date du 6 décembre 2018, le conseil de prud’hommes a :

– dit que le licenciement pour cause réelle et sérieuse est fondé

en conséquence,

– débouté monsieur [K] de l’intégralité de ses demandes,

– débouté la société Seb Développement de toutes ses demandes ,

– condamné monsieur [O] [K] aux dépens.

Monsieur [O] [K] a interjeté appel de ce jugement, le 31 décembre 2018.

Monsieur [K] demande à la cour :

– d’infirmer le jugement

sur la rupture du contrat de travail

– de constater que son licenciement ne repose sur aucune cause réelle, ni sérieuse,

– de condamner la société Seb développement à lui verser la somme de 76 030,56 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (18 mois de salaire),

sur l’indemnité forfaitaire de mobilité

– de condamner la société Seb Développement à lui verser la somme de 6 238,40 euros à titre de rappel d’indemnité forfaitaire de mobilité prévue dans le cadre du PSE,

sur l’exécution déloyale du contrat de travail

– de condamner la société Seb Développement à lui verser la somme de 12 671,76 euros nets (3 mois de salaire) à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

en tout état de cause

– ‘les intérêts de droit à compter du jour de la demande’,

– de débouter la société Seb Développement de l’intégralité de ses demandes

– de condamner la société Seb Développement à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

La société Seb Développement demande à la cour :

– d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– de confirmer le jugement pour le surplus

à titre subsidiaire,

– de réduire le montant des dommages et intérêts susceptibles d’être alloués à M. [K] au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse à trois mois de salaire

en tout état de cause,

– de débouter M. [K] de la demande qu’il formule au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de condamner M. [K] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, équivalente à celle qu’il formule, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance et d’appel.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 février 2022.

SUR CE :

Sur la demande de rappel d’indemnité forfaitaire de mobilité

En vertu de l’article 1.3.1 du plan de sauvegarde de l’emploi « pour encourager la mobilité, il est convenu d’attribuer aux salariés concernés une indemnité de mobilité forfaitaire fixée à 25.000 euros bruts pour toute acceptation de mutation. Cette indemnité est soumise à la CSG/CRDS ».

Il a été convenu entre M. [K] et l’entreprise, selon lettre du 11 février 2011 « un maintien de [ses] revenus par versement d’un complément, par avance sur la prime de mobilité (soit environ 600 euros net / mois) pour les mois pris en charge par le CIF notamment (à titre indicatif 6 mois) ».

L’employeur ajoute dans cette lettre que M. [K] a perçu depuis le 13 septembre 2010 au titre du complément de revenu à valoir sur la prime de mobilité un complément d’un montant de 779,80 euros mensuels bruts, soit un total à fin janvier de 3 587,20 euros bruts.

Par lettre du 15 juin 2011, l’employeur a rappelé à M. [K] que, d’un commun accord, il avait été convenu qu’il commencerait à percevoir l’indemnité de mutation en complément des 80 % de son salaire pris en charge durant son ‘FONGECIF’ et que le solde de 18 761,60 euros lui serait versé une fois qu’il aurait intégré les effectifs de Seb Développement.

Il ressort de la lecture des bulletins de salaire de M. [K] qu’il a bien bénéficié d’un maintien de son salaire pendant la période de formation et qu’un reliquat de 18 761,60 euros lui a été versé sur son bulletin du mois de juillet 2011, si bien qu’il a été rempli de ses droits.

Il convient de confirmer le jugement qui a rejeté la demande de rappel d’indemnité forfaitaire de mobilité formée par le salarié.

Sur la demande de dommages et intérêts fondée sur l’exécution déloyale du contrat de travail

L’article L. 1222-1 du code du travail rappelle que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

M. [K] invoque  les manquements suivants commis par l’employeur :

– le non-respect de ses engagements envers lui, en faisant valoir que l’employeur s’était engagé à maintenir les conditions contractuelles et conventionnelles dont il bénéficiait au sein de la société Groupe Seb Moulinex dans le cadre de sa mutation et qu’un avenant contractuel avec évolution à un poste d’ingénieur brevet devait être régularisé dès l’obtention de son diplôme du ‘CEIPI’

– le comportement de l’employeur lors de son déménagement 

– le non-respect par la société de la charte informatique du groupe.

M. [K] ne justifie pas d’un engagement de la société Seb Développement de maintenir les conditions contractuelles et conventionnelles dont il bénéficiait au sein de la société Groupe Seb Moulinex. Il ne précise pas du reste dans ses conclusions quelles clauses auraient dû être maintenues à son profit.

Les courriels rédigés par ses soins le 31 août 2010 et le 21 juin 2011 : ‘ j’ai bien noté que mon intitulé de poste d’ingénieur documentation devra évoluer vers ingénieur brevet par avenant à l’issue de ma formation, suivant nos différents échanges de mails de septembre 2010″ ne suffisent pas à démontrer que l’employeur avait pris un tel engagement à cet égard.

M. [K] a en tout état de cause accepté de signer le contrat de travail aux clauses et conditions qui y figurent, contrat en vertu duquel il était affecté au poste d’ingénieur documentation à compter du 1er juillet 2011.

Le premier manquement allégué n’est en conséquence pas établi.

M. [K] reproche ensuite à l’employeur d’avoir tardivement accepté le devis de déménagement qu’il lui avait présenté, ce qui l’a contraint à faire modifier ledit devis moyennant un coût plus élevé pour la société.

Il ne prétend pas cependant que ce coût supplémentaire est resté à sa charge.

Aucun manquement de l’employeur dans le cadre de l’exécution du contrat de travail n’est établi de ce chef.

Enfin, M. [K] expose que la société Seb Développement n’a pas respecté la procédure prévue par la charte informatique du groupe, à savoir qu’en cas de constat d’une situation anormale, les gestionnaires des ‘TIC’ informent immédiatement la hiérarchie de l’utilisateur et la direction des ressources humaines concernée, que celles-ci, en liaison avec l’utilisateur dûment appelé veillent à mettre un terme rapide aux situations rencontrées dans le respect de la réglementation et de la jurisprudence applicables et que l’utilisateur a le devoir d’apporter sans délai toutes explications utiles sur les faits survenus, soutenant que, si tel avait été le cas, il aurait pu apporter une réponse à son employeur sur le prétendu manquement qui lui était reproché.

Il ressort des pièces produites que la société a effectué des investigations sur l’ordinateur utilisé par le salarié dont, sans demander d’explication à ce dernier, elle s’est ensuite servie pour lui reprocher notamment, à l’appui de la mesure de licenciement, des connexions abusives.

A supposer qu’il s’agisse d’un manquement fautif de l’employeur, M. [K] ne justifie pas avoir subi pendant l’exécution de la relation de travail un préjudice en lien avec ce non-respect de la charte informatique.

En conséquence, la demande en dommages et intérêts fondée sur l’exécution déloyale du contrat de travail doit être rejetée, le jugement étant confirmé sur ce point.

Sur le licenciement

En application de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement individuel doit reposer sur une cause réelle et sérieuse.

Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

L’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables, qu’il doit reprendre dans la lettre de licenciement prévue par l’article L.1232-6 du code du travail, cette lettre fixant ainsi les limites du litige.

Aux termes de la lettre de licenciement du 27 janvier 2012, la société Seb développement reproche au salarié :

– de ne pas avoir pris ses dispositions pour organiser sa vie professionnelle et sa vie privée, si bien qu’il a demandé à son employeur de lui octroyer au minimum une journée de congé par semaine et les vacances de la zone de [Localité 2] et de [Localité 6] pour pouvoir accueillir ses enfants

– de s’être absenté le 6 janvier 2012 après-midi, le 13 janvier 2012 après-midi et le 20 janvier 2012 sans avoir obtenu l’autorisation de son supérieur hiérarchique

– le 13 novembre 2011, d’avoir ‘pris la liberté de passer une nuit à l’hôtel dans la mesure où vous aviez décidé de faire le trajet [Localité 2]-[Localité 5] avec votre véhicule, sans même que nous ayons donné notre accord au préalable. Nous en avons pris connaissance lors de la présentation de votre note de frais sans qu’elle ne soit justifiée’

– une insuffisance professionnelle

– ‘un temps passé sur internet depuis le dernier trimestre 2011 sept fois supérieur aux autres utilisateurs (…) faits d’autant plus graves que nous avons pu constater que vous avez délibérément changé votre proxy dans le but de dissimuler l’intégralité de votre temps passé sur internet’

premier grief

M. [K] a écrit le 1er décembre 2011 à son supérieur hiérarchique M. [N] pour lui rappeler leur entrevue du 28 novembre 2011 ayant eu pour objet son souhait de ‘pouvoir s’absenter les vendredis, et plus particulièrement les vendredis après-midi, et une grande partie des congés scolaires de la zone [Localité 6]’ pour des raisons familiales.

M. [N] lui a répondu le même jour qu’il notait ses demandes d’absences hebdomadaires pour raisons familiales, consultait ses collègues ‘RH’ pour déterminer une réponse adéquate et revenait vers lui dès que possible.

La société qui ne justifie pas de la réponse annoncée et ne reprend pas ce grief parmi les manquements fautifs qu’elle énonce dans ses conclusions devant la cour n’explique pas en quoi cette demande de M. [K] à son employeur constituerait une faute professionnelle ou une cause sérieuse de licenciement.

Le grief n’est dès lors pas fondé.

deuxième grief

La société n’établit pas qu’il existait une procédure d’autorisation préalable d’absence que le salarié n’a pas respectée.

Le salarié produit la fiche de gestion des temps hebdomadaires du mois de janvier 2012 montrant qu’il a pris une demi-journée de RTT les vendredis après-midi 6, 13 et 20 janvier et une journée de RTT le vendredi 27 janvier 2012. Cette fiche est signée par le chef de service.

La faute reprochée n’est dès lors pas établie.

troisième grief

Le plan de sauvegarde de l’emploi prévoit que « dans le cas où des contraintes particulières empêcheraient le transfert immédiat du salarié muté, celui-ci se verrait proposer dans la limite de 12 mois et de 24 mois pour les plus de 50 ans :

– la possibilité d’effectuer des allers/retours hebdomadaires vers son domicile, pris en charge par la société sur la base du remboursement des frais kilométriques (0,34 Euros/km) et péage autoroutier ou d’un billet de train selon la procédure voyage en vigueur dans le Groupe /’/ ».

Il ressort des pièces produites que le salarié a bien présenté les justificatifs aux fins de prise en charge de ses frais kilométriques.

Il ne saurait sérieusement être reproché à celui-ci d’avoir utilisé sa voiture plutôt que le train à la date litigieuse, le plan de sauvegarde de l’emploi laissant la possibilité de recourir à l’un ou l’autre de ces modes de transport, ni d’avoir demandé le remboursement de sa nuit d’hôtel, l’employeur étant libre d’y procéder ou non.

La société ajoute dans la lettre de licenciement sans donner d’exemple précis : ‘vos notes de frais ont souvent été saisies et transmises par anticipation de la période concernée, en l’absence de l’ensemble des justificatifs et sans aucune certitude que les voyages allaient être effectués et les montants identiques à ceux déclarés’.

Rien n’empêchant la société d’attendre d’avoir reçu du salarié les justificatifs correspondants avant de lui rembourser ses frais, le reproche est incompréhensible.

Le troisième grief n’est pas fondé.

quatrième grief

L’insuffisance professionnelle, sans présenter un caractère fautif, traduit l’inaptitude du salarié à exercer de façon satisfaisante, conformément aux prévisions contractuelles, les fonctions qui lui ont été confiées et les objectifs qui lui ont été fixés. Si l’employeur est juge des aptitudes professionnelles de son salarié et de son adaptation à l’emploi et si l’insuffisance professionnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, elle doit être caractérisée par des faits objectifs et matériellement vérifiables.

L’employeur reproche au salarié son insuffisance professionnelle en ces termes :

Les frais engagés par l’entreprise dans le cadre de votre mutation et de votre formation s’élèvent à plus de 45 000 euros.

Nous constatons après un bilan de fin d’année de l’activité du service de la propriété industrielle, que vous êtes bien en dessous des attentes par rapport aux missions qui vous incombent et cela plus de 6 mois après votre arrivée au sein de SEB Développement. Sur une période équivalente vous avez effectué 40% de moins de missions que vos collègues junior.

Ainsi, nous avons dû accroître notre recours à la sous-traitance dans la mesure où vous ne réalisez que 7 recherches brevet de couvercle de poignée de maintien vertical sur 11, 8 recherches brevet fond d’article aminci sur 12 demandés. Vous n’effectuez que 2 textes quand votre collègue ingénieur junior en effectue le même nombre mais en supervise deux de plus en sous-traitance.

De même, alors que dans le même temps qu’une autre de vos collègues junior vous effectuez le même nombre de recherches, elle effectue 820 sélections et diffusions de documents ainsi 200 classements, quand vous ne réalisez que 2 textes.

M. [K] fait valoir :

– qu’il occupait un poste d’ingénieur documentation et non d’ingénieur brevet junior, mais que la société lui a confié les missions d’un ingénieur brevet en sus de ses missions d’ingénieur documentation, de sorte qu’elle ne peut comparer ses performances à celles de ses collègues ingénieurs brevet

– qu’il n’a jamais reçu de mise en demeure concernant une prétendue insuffisance professionnelle

– qu’il a toujours eu de bonnes appréciations sur son travail au cours de ses presque dix années passées au service du groupe Seb

– que l’employeur ne démontre pas avoir mis en oeuvre un accompagnement spécifique à son intention, ni lui avoir laissé un temps suffisant pour s’adapter à de nouvelles fonctions

– qu’il a rempli 90 % de l’objectif fixé à un ingénieur brevet ayant deux ans de pratique.

La société fait valoir en réponse que, non seulement le salarié avait connaissance des objectifs qui lui étaient assignés, mais qu’il a bénéficié d’actions d’accompagnement dans le cadre de sa prise de fonctions.

****

M. [K] a suivi une formation diplômante dans le cadre d’un congé-formation d’une durée de six mois sur la période du 13 septembre 2010 au 13 mai 2011 et obtenu le 25 novembre 2011 deux diplômes d’études internationales de la propriété industrielle, option marques, dessins et modèles et option brevets d’invention.

Son nouveau contrat de travail au poste d’ingénieur documentation n’ayant pris effet que le 1er juillet 2011, les courriels de l’employeur des 14 et 15 septembre 2010 ne peuvent être invoqués pour démontrer l’insuffisance qui lui est imputée.

L’employeur se fonde au surplus sur les éléments suivants :

– le courriel du 2 septembre 2010 aux termes duquel M. [N], supérieur hiérarchique de M. [K] lui souhaite des études fructueuses et lui indique ‘à titre indicatif, nous attendons pour les documentalistes pas moins de 4 RBL par mois en sus de leurs travaux de veille à comparer à un RBLpar mois et un tableau de revendication par mois que tu as effectué pendant les quatre mois de stage chez nous ; à ton retour, nous reprendrons la pratique de la documentation brevet, puis nous poursuivrons au fur et à mesure de tes progrès vers l’élaboration de texte etc… ‘

– un courriel envoyé le 15 novembre 2011 par M. [N] à M. [K] pour lui fournir les objectifs et résultats attendus et les indicateurs quantitatifs et qualitatifs : deux recherches thématiques par mois (sept par trimestre, vingt huit par an ), un acte de litige et opposition par mois (quatre par trimestre, seize par an), une description de brevet par mois (quatre par trimestre, seize par an) et un acte d’obtention de brevet par mois (huit par trimestre, trente deux par an)

– un courriel du 16 décembre 2011 de M. [N] à M. [K] lui annonçant que, sur la période 15 novembre-15 décembre, « si l’activité RBL compense le nombre de lettres officielles attendues, nous sommes encore loin du compte en ce qui concerne des dossiers plus lourds plus importants tels que la rédaction de brevet ‘, et ajoutant ‘je te propose de faire le point fin janvier’

– un courriel du 16 janvier 2012 dans lequel M. [N] interroge l’ingénieur brevet de son département sur l’activité de M. [K] ‘du 15 décembre à aujourd’hui’, la réponse de l’ingénieur brevet du 17 janvier 2012 et le courriel de ce même jour de M. [N] à destination de l’ingénieur brevet avec copie à M. [K] concluant : ‘je ne comptabilise pour une période donnée que les dossiers accomplis (livrés) et avec qualité. Les dossiers en cours seront comptabilisés en 2012 au fur et à mesure de leur achèvement, donc pour le quatrième trimestre 2011, j’en reste à (…)

J’estime que cela reste quand même très très modeste (insuffisant) pour tout un trimestre même pour un débutant. Nous suivrons donc l’évolution au trimestre suivant’.

A supposer que ces seuls courriels émanant du supérieur hiérarchique permettent de démontrer que M. [K] a traité un nombre insuffisant de dossiers par rapport à ce qui était attendu de lui compte-tenu des exigences de son poste, ils ne peuvent à eux seuls caractériser une insuffisance de résultat traduisant son incapacité à exécuter ses fonctions, d’autant plus qu’il est surtout fait état d’insuffisances dans la rédaction des brevets et que l’employeur ne prouve pas qu’il s’agissait d’une tâche relevant des fonctions d’ingénieur documentation.

Par ailleurs, l’évaluation du directeur est faite sur une période de deux mois seulement, du 15 novembre 2011 au 15 janvier 2012, alors que le salarié vient de prendre ses fonctions d’ingénieur documentation.

L’employeur ne démontre pas du reste que l’évaluation du nombre de dossiers traités devait se faire au mois le mois et non sur une période plus longue puisque le tableau figurant au courriel du 15 novembre 2011 contient des ‘objectifs’ par mois, par trimestre et par an.

Il n’établit pas qu’il a demandé des explications à M. [K] sur les insuffisances qu’il relève, ni cherché à savoir quelles difficultés il pouvait rencontrer, avant de le licencier au motif notamment d’une insuffisance professionnelle, tandis qu’il résulte des courriels ci-dessus que le directeur avait prévu d’effectuer un point avec le salarié à la fin du mois de janvier et qu’il attendait de voir les résultats du trimestre suivant.

Il ne peut enfin être tiré aucune conséquence du nombre de travaux que Mme [X], salariée du département propriété industrielle (dont on ne connaît pas la fonction exacte) déclare elle-même avoir effectués au quatrième trimestre 2011 dans les domaines suivants : recherche en antériorité de brevets, veille et autres, dans le courriel qu’elle adresse le 17 janvier 2012 à M. [N] à la demande de ce dernier, en l’absence de toute possibilité de comparaison entre les tâches qui lui étaient attribuées et celles incombant à M. [K] (auquel on n’a pas demandé de dresser la liste de ses travaux), et en l’absence de justification des ‘objectifs’ impartis à cette salariée.

L’insuffisance professionnelle reprochée à M. [K] n’est donc pas établie.

cinquième grief

Par courriel du 16 décembre 2011, M. [P], responsable sécurité des systèmes d’information du groupe, apporte au directeur des ressources humaines de la société les informations que ce dernier lui a demandées ‘concernant le surf internet de M. [K] en novembre et décembre 2011″, dont il ressort, selon les conclusions de l’employeur, que le salarié aurait passé plus de 90 heures sur le site free.fr, 87 heures sur le site boursorama.com,47 heures sur le site fortuneo.fr et 4 heures sur facebook.com et ajoute qu’il ‘semble que l’utilisateur ait surfé en utilisant deux proxies (…) si cet utilisateur n’est pas amené à se déplacer sur les sites dont la liste est fournie, cela s’apparente davantage à une volonté de camoufler son surf : il a manuellement modifié son proxy.’

Toutefois, M. [P] indique dans le même courriel qu’« un navigateur laissé ouvert sur une page d’information qui se remet à jour en automatique va être considéré comme du surf actif en continu et va générer des temps de surf considérables », ce qui est corroboré par le témoignage de M. [J], directeur d’exploitation, produit par le salarié.

Celui-ci atteste que le fait que les sites de facebook ou de twitter soient ‘techniquement accédés par le navigateur de l’utilisateur ne signifie pas pour autant que l’utilisateur consulte activement ces sites , mes tests indiquent que la page boursoram.com est actionnée toutes les 15 secondes sans que j’aie effectué la moindre action sur ce site web’ et ‘qu’il est possible d’obtenir des traces de connexion internet durant de longues périodes sans que cela implique que l’utilisateur ait consulté ou utilisé le site en question sur cette période’.

Par ailleurs, la société ne rapporte pas la preuve de ce que M. [K] était le seul utilisateur de son poste de travail. En effet, une copie d’écran produite par le salarié mentionne sept utilisateurs, outre M. [K], sous l’intitulé ‘documents and settings’.

Dans ces conditions, la réalité des connexions dépassant un seuil tolérable de consultation à titre personnel imputées au salarié n’est pas prouvée.

Enfin, les affirmations de M. [P] dans son courriel du 16 décembre 2011 ne permettent pas de démontrer que M. [K] a effectué une manipulation informatique du ‘proxy’ aux fins de dissimuler l’intégralité de (son) temps passé sur internet.

Le cinquième grief n’est en conséquence pas fondé.

Aucun des faits reprochés à M. [K] à l’appui de son licenciement n’étant établi, le licenciement prononcé est dépourvu de cause réelle et sérieuse, contrairement à ce qu’a dit le conseil de prud’hommes dont le jugement sera infirmé sur ce point.

Compte-tenu des circonstances du licenciement, de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise (huit ans et huit mois), de son âge (45 ans), de son salaire mensuel moyen de 3 899 euros, de sa situation professionnelle, à savoir que l’entreprise qu’il a créée en février 2013 a été radiée le 30 septembre 2014 et qu’il a été indemnisé par Pôle Emploi du 11 juin au 30 septembre 2012, en 2013, du 1er janvier au 31 décembre 2014 et du 1er juin 2015 au 30 juin 2016, de ce qu’il occupe un emploi à temps partiel depuis 2018 et était toujours à la recherche d’un (autre) emploi le 3 mai 2021, et qu’il a contracté un prêt pour l’achat d’un bien immobilier à [Localité 5] au mois de décembre 2011 remboursable sur 28 ans, M. [K] a subi un préjudice matériel et moral consécutif à la perte injustifiée de son emploi, qu’il convient de réparer en condamnant la société Seb Développement à lui payer la somme de 40 000 euros bruts à titre de dommages et intérêts, en application de l’article L1235-3 ancien du code du travail.

En application de l’article L 1235-4 ancien du code du travail, M. [K] disposant du’ne ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise comptant plus de onze salariés, il convient de condamner d’office la société Seb Développement à rembourser à Pôle emploi les allocations de chômage qui ont été versées au salarié dans la limite de quatre mois d’indemnités.

La société Seb Développement, partie perdante pour l’essentiel, doit être condamnée aux dépens de première instance et d’appel et à payer à M. [K] la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement :

CONFIRME le jugement en ce qu’il a rejeté la demande en paiement d’un rappel d’indemnité forfaitaire de mobilité et la demande de dommages et intérêts fondée sur l’exécution déloyale du contrat de travail formées par M. [K]

L’INFIRME pour le surplus de ses dispositions

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la société Seb Développement à payer à M. [K] la somme de 40 000 euros bruts en réparation du préjudice causé par son licenciement injustifié

CONDAMNE d’office la société Seb Développement à rembourser à Pôle emploi les allocations de chômage qui ont été versées au salarié dans la limite de quatre mois d’indemnités

CONDAMNE la société Seb Développement aux dépens de première instance et d’appel

CONDAMNE la société Seb Développement à payer à M. [K] la somme de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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