Sécurité des spectacles : risque maximal

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Sécurité des spectacles : risque maximal
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Le 8 novembre 2013, au Palais des Sports de Paris, lors de la phase de préparation du spectacle, une explosion est survenue, provoquée par la manipulation par un salarié de la NTCA (M. [Y]) d’une disqueuse dans le local technique réservé au stockage des produits pyrotechniques, laquelle a entraîné le décès de M. [E] [O], directeur technique de la NTCA, et plusieurs blessés, six salariés de la NTCA et un salarié de la SEPS.

Par arrêt du 28 novembre 2018 devenu définitif, la cour d’appel de PARIS a confirmé un jugement du tribunal correctionnel de PARIS notamment en ce qu’il a déclaré les sociétés NTCA et SEPS coupables des faits d’homicide et blessures involontaires par la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence dans le cadre du travail, et a fixé à 70% et 30% les parts de responsabilité respectives de la NTCA et de la SEPS.

La compagnie d’assurance a été condamnée à couvrir les dommages occasionnés, le plafond de garantie pour tous les dommages confondus s’établit à 9.000.000 d’euros par sinistre et par an et aucune franchise n’étant applicable, s’agissant du dommage corporel.


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D’APPEL DE PARIS



Pôle 4 – Chambre 8



ARRÊT DU 30 AOÛT 2023



(n°2023/ 132 , 14 pages)



Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/09304 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDVUD



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Avril 2021 -Tribunal de Commerce de Paris RG n° 2019017232





APPELANTES



S.A. ALLIANZ IARD, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité siège social

[Adresse 1]

[Localité 8]

N° SIRET : 542 11 0 2 91



S.A.S. NTCA PRODUCTIONS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social

[Adresse 3]

[Localité 7]

N° SIRET : 501 58 5 8 71



Représentées par Me Eric MANDIN de la SARL MANDIN – ANGRAND AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : J046





INTIMÉES



S.A.S. SOCIETE D’EXPLOITATION DU PALAIS DES SPORTS – SEPS – Société par actions simplifiée immatriculée au RCS de PARIS sous le n°432 071 173, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège.

[Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065 et ayant pour avocat plaidant Me GUIN Jean-Louis, avocat au barreau de PARIS, toque : C1626



S.A. MMA IARD SA

[Adresse 2]

[Localité 5]

N° SIRET : 440 04 8 8 82



Représentée par Me Alain BARBIER de la SELARL BARBIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : J042 et substitué Me Marion SERFATI de la SELARL Barbier et Associés, avocat au barreau du VAL D’OISE, toque : 102







COMPOSITION DE LA COUR :



L’affaire a été débattue le 21 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre

Mme Laurence FAIVRE, Présidente de chambre

M. Julien SENEL, Conseiller



qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Béatrice CHAMPEAU-RENAULT dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.





Greffier, lors des débats : Madame Laure POUPET





ARRÊT : Contradictoire



– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour le 28 juin 2023, prorogé au 05 juillet 2023, puis au 30 août 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.



– signé par Béatrice CHAMPEAU-RENAULT, Présidente de chambre et par Laure POUPET, Greffière présente lors de la mise à disposition.

Exposé du litige




***





EXPOSÉ DU LITIGE :



La société NTCA PRODUCTIONS (ci-après dénommée la NTCA) a pour objet la production d’une comédie musicale ‘1789 les Amants de la Bastille’.



Le 4 janvier 2013, un contrat a été conclu entre la NTCA et la société d’exploitation du Palais des Sports (ci-après dénommée la SEPS) avec notamment pour objet la mise à disposition de la salle du Palais des Sports à PARIS pour y présenter le spectacle pendant la période du 7 novembre 2013 au 5 janvier 2014.



L’activité de la SEPS consiste à fournir aux producteurs de spectacle qui la sollicitent les moyens tant matériels (locaux, installations techniques) qu’humains (techniciens, personnels de billetterie, de salle, de sécurité’), ainsi que les prestations réalisées par ses salariés, nécessaires pour permettre la préparation et la tenue des représentations. La SEPS a souscrit pour cette activité, un contrat d’assurance responsabilité civile professionnelle à effet au 1er janvier 2007 auprès de la société MMA IARD (ci-après MMA), venant aux droits de la société COVEA RISKS par suite de fusion-absorption.



Le 8 novembre 2013, au Palais des Sports de Paris, lors de la phase de préparation du spectacle, une explosion est survenue, provoquée par la manipulation par un salarié de la NTCA (M. [Y]) d’une disqueuse dans le local technique réservé au stockage des produits pyrotechniques, laquelle a entraîné le décès de M. [E] [O], directeur technique de la NTCA, et plusieurs blessés, six salariés de la NTCA et un salarié de la SEPS.



Par arrêt du 28 novembre 2018 devenu définitif, la cour d’appel de PARIS a confirmé un jugement du tribunal correctionnel de PARIS notamment en ce qu’il a déclaré les sociétés NTCA et SEPS coupables des faits d’homicide et blessures involontaires par la violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence dans le cadre du travail, et a fixé à 70% et 30% les parts de responsabilité respectives de la NTCA et de la SEPS.



Parallèlement à cette procédure, les victimes de blessures ont saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale (ci-après dénommé le TASS) d’une action en reconnaissance de la faute commise par la NTCA, leur employeur, tandis que les ayants droits de la victime décédée ont négocié et conclu un accord transactionnel avec la NTCA et la société ALLIANZ, son assureur.



La caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 9] (ci-après dénommée la CPAM) a payé aux victimes les indemnités supplémentaires prévues par le code de la sécurité sociale en cas de faute inexcusable de l’employeur, puis a agi en remboursement à l’encontre de la NTCA s’agissant des victimes salariées de ladite société en vertu des dispositions du même code.



Les sociétés NTCA et ALLIANZ ayant ainsi dû s’acquitter de sommes importantes auprès de la

CPAM et des victimes ou de leurs ayants-droits, elles ont assigné le 18 mars 2019 la société SEPS et la compagnie MMA, son assureur, devant le tribunal de commerce de PARIS sollicitant notamment de les voir condamner à leur rembourser les sommes versées aux victimes, soit directement, soit indirectement par l’intermédiaire de la CPAM.



Par jugement du 13 avril 2021, le tribunal de commerce de PARIS, a :

– dit l’exception d’incompétence soulevée par les sociétés MMA et SEPS irrecevable ;

– condamné solidairement les sociétés MMA et SEPS à payer à la société ALLIANZ la somme totale de 259.241,67 euros avec intérêts de retard au taux légal à compter du 26 mars 2019 et capitalisation des intérêts et l’a déboutée pour le surplus ;

– condamné solidairement les sociétés MMA et SEPS à payer à la société NTCA la somme de 12.944,47 euros, avec intérêts de retard au taux légal à compter du 26 mars 2019, et capitalisation des intérêts, l’a déboutée pour le surplus,

– condamné solidairement les sociétés MMA et SEPS à payer à chacune des sociétés NTCA et ALLIANZ la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les a débouté pour le surplus ;

– débouté les sociétés NTCA et ALLIANZ de leur demande de condamnation in solidum de la société MMA et/ou la SEPS à relever et garantir NTCA et/ou ALLIANZ IARD de l’ensemble des condamnations à intervenir du fait de l’accident survenu le 8 novembre 2013 ;

– débouté la SEPS de sa demande de condamnation de la société MMA à la garantir de l’intégralité des condamnations qui seront mises a sa charge ;

– ordonné l’exécution provisoire de la décision ;

– condamné solidairement les sociétés MMA et SEPS aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 116,25 euros, dont 19,16 euros de TVA.



Par déclaration électronique du 17 mai 2021, enregistrée au greffe le 21 mai, la SA ALLIANZ a interjeté appel du jugement en ce qu’il a :

* condamné solidairement les sociétés MMA et SEPS à payer à la société ALLIANZ la somme totale de 259.241,67 euros avec intérêts de retard au taux légal à compter du 26 mars 2019 et capitalisation des intérêts, débouté pour le surplus ;

* condamné solidairement les sociétés MMA et SEPS à payer à la société NTCA la somme de 12.944,47 euros avec intérêts de retard au taux légal à compter du 26 mars 2019, et capitalisation des intérêts, déboutée pour le surplus ;

* débouté les sociétés NTCA et ALLIANZ de leurs demandes que soient condamnées insolidum la société MMA et/ou la SEPS à relever et garantir NTCA et/ou ALLIANZ de l’ensemble des condamnations à intervenir du fait de l’accident survenu le 8 novembre 2013.





Par déclaration électronique du 17 juin 2021, enregistrée au greffe le 21 juin, la SEPS a elle-même interjeté appel de l’ensemble des dispositions du jugement. Les affaires ont été jointes le 21 février 2022.


Moyens

Par ordonnance du 4 octobre 2022, le conseiller de la mise en état de la chambre a dit qu’il n’était pas compétent pour examiner les demandes formées par la NTCA et ALLIANZ tendant à ce qu’il déclare irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par la SEPS et MMA au fond, dès lors qu’en visant expressément parmi les chefs du jugement entrepris l’exception de procédure jugée irrecevable par le tribunal de commerce la société SEPS l’a déférée à la cour avant même par définition la désignation d’un conseiller de la mise en état et qu’il en est de même des demandes tendant à déclarer irrecevables les exceptions d’incompétence soulevées par la SEPS et MMA qui n’ont pas été soulevées in limine litis devant le conseiller de la mise en état et de celles tendant à déclarer irrecevables les exceptions d’incompétence soulevées par la SEPS et MMA pour la première fois en cause d’appel et enfin la demande tendant à déclarer MMA irrecevable en sa demande d’irrecevabilité des prétentions de NTCA et ALLIANZ au titre de l’indemnisation de [F] [W] et [M] [N] qui s’analyse en une critique du moyen d’irrecevabilité soulevé par la MMA qui relève nécessairement et exclusivement de la compétence de la cour.



Cette ordonnance n’a pas fait l’objet d’un déféré.



Par conclusions notifiées par voie électronique le 28 décembre 2022, les sociétés NTCA et ALLIANZ demandent à la cour au visa des articles 75 et suivants et 564 du code de procédure civile, de l’article 2224 du code civil, de l’article L451-1 du code de la sécurité sociale, de :



– déclarer irrecevables comme prescrites les prétentions formulées pour la première fois par SEPS par conclusions du 23 décembre 2022, à savoir son recours à l’encontre de NTCA et ALLIANZ du chef des indemnités réglées aux salariés de la société NTCA en lien avec l’accident du 8 novembre 2013;

– déclarer irrecevables les exceptions d’incompétence soulevées par la SEPS et MMA qui n’ont pas été soulevées in limine litis ;

– déclarer MMA irrecevable en sa demande d’irrecevabilité des prétentions de la NTCA et ALLIANZ au titre de l’indemnisation de [F] [W] et [M] [N];

– déclarer irrecevables les exceptions d’incompétences soulevées par SEPS et MMA pour la première fois en cause d’appel ;



À défaut,

– déclarer la NTCA et ALLIANZ recevables en leur demande au titre de l’indemnisation de [F] [W] et [M] [N].



Au fond :

Vu ensemble les articles 1353 du code civil et 9 du code de procédure civile

Vu ensemble les articles 1355 du code civil et 480 du code de procédure civile

Vu les articles 1231-1 et 1346 du code civil

Vu les articles 1240, 1241 et 1242 alinéas 1 et 5 du code civil,

Vu l’article L112-6, L121-12, L.124-3 du code des assurances,

Vu l’arrêt rendu le 28 novembre 2018 par la chambre des appels correctionnels de PARIS,

Vu l’arrêt de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation du 22 novembre 2018 n°17-16480,



– INFIRMER le jugement en ce qu’il a :



‘ condamné solidairement les sociétés MMA et la SEDS à payer à la société ALLIANZ la somme totale de 259.241,67 euros avec intérêt de retard au taux légal à compter du 26 mars 2019 et capitalisation des intérêts, déboutés pour le surplus ;

‘ condamné solidairement les sociétés MMA et la SEDS à payer à la société NTCA la somme de 12 944,47 euros, avec intérêts de retard au taux légal à compter du 26 mars 2019, et capitalisation des intérêts, déboutés pour le surplus ;

‘ débouté les sociétés NTCA et ALLIANZ de leurs demandes que soit condamnée in solidum la société MMA et/ou la SEDS à relever et garantir NTCA et/ou ALLIANZ de l’ensemble des condamnations à intervenir du fait de l’accident survenu le 8 novembre 2013 ;



Statuant à nouveau,



– condamner in solidum SEPS et MMA à payer à la compagnie ALLIANZ la somme de 392.600,53 euros, sauf à parfaire, en réparation des préjudices résultant du décès de [E] [O] ;

– condamner in solidum SEPS et MMA à payer à la NTCA la somme de 43.148,24 euros, sauf à parfaire, en réparation des préjudices résultant du décès de [E] [O] ;

– déclarer recevable NTCA et ALLIANZ en leurs demandes relatives aux préjudices de M. [F] [W] et Mme [M] [N], les règlements établissant la subrogation étant survenu après la clôture de l’instruction devant le tribunal de commerce de PARIS.

– condamner in solidum SEPS et MMA à payer à ALLIANZ la somme de 373.554,53 euros, sauf à parfaire, en réparation des préjudices résultant des blessures de [U] [G], [X] [R], [F] [W] et [M] [N] à défaut surseoir à statuer dans l’attente des décisions à intervenir des juridictions saisis par les salariés de NTCA des demandes d’indemnisation complémentaire à l’encontre de leur employeur avec intérêts au taux légal à compter du jour du versement des fonds par ALLIANZ, et capitalisation des intérêts en application de l’article 1343-2 du code civil ;

– condamner in solidum SEPS et MMA à relever et garantir NTCA et/ou ALLIANZ de l’ensemble des condamnations à intervenir du fait de l’accident survenu le 8 novembre 2013 au profit de M. [X] [R], M. [F] [W] et/ou Mme [M] [N] à défaut surseoir à statuer dans l’attente des décisions à intervenir ;



À défaut de recevoir ALLIANZ et NTCA en leur recours subrogatoire à l’encontre de SEPS

et de son assureur de responsabilité MMA :

– CONFIRMER le jugement en ce qu’il a fait application du partage de responsabilité institué par le juge répressif, à savoir 30% pour MMA et SEPS et 70% pour NTCA et ALLIANZ IARD ;

En tout état de cause,

– condamner MMA à garantir la dette de responsabilité de son assuré dans la limite du plafond de garantie applicable aux faits de l’espèce soit 9.000.000 euros par sinistre au titre de la garantie Responsabilité Civile, Chapitre III de la Police d’Assurance 112.028.722 souscrite par SEPS auprès de COVEA RISKS au droit de laquelle vient MMA ;

– débouter SEPS et MMA de l’intégralité de leurs demandes ;

– condamner in solidum SEPS et MMA à payer une indemnité de 15.000 euros à NTCA et ALLIANZ au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel avec application de l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SARL MANDIN ANGRAND AVOCATS.



Par conclusions n° 4 notifiées par voie électronique le 9 février 2023, la SEPS demande à la cour :



A titre principal,



– INFIRMER le jugement en ce qu’il a :

* condamné solidairement les sociétés MMA et SEPS à payer à ALLIANZ la somme totale de 259.241,67 euros avec intérêt de retard au taux légal à compter du 26 mars 2019 et capitalisation des intérêts, ;

* condamné solidairement les sociétés MMA et SEPS à payer à la société NTCA la somme de 12.944,47 euros avec intérêt de retard au taux légal à compter du 26 mars 2019, et capitalisation des intérêts;

– condamné solidairement la société MMA et SEPS à payer à chacune des sociétés NTCA et ALLIANZ la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;



Statuant à nouveau :



Vu la fixation par la cour d’appel de PARIS dans son arrêt du 28 novembre 2018 de la part de responsabilité respective des sociétés NTCA,et SEPS dans les dommages créés aux victimes de l’explosion du 8 novembre 2013,

Vu les sommes réglées respectivement en l’état par les sociétés NTCA et ALLIANZ d’une part, et SEPS et MMA d’autre part en réparation des dommages causés aux victimes de cette explosion,

– condamner la société SEPS et la société MMA au paiement aux sociétés NTCA et MMA d’une

somme de 4.576,76 euros ;

– débouter les sociétés NTCA et/ou ALLIANZ de leur demande de condamner les sociétés SEPS et MMA de les relever et garantir de l’ensemble des condamnations « à intervenir » du fait de l’accident survenu le 8 novembre 2013 au profit de M. [A] [Y], M. [T] [Z], M. [X] [R], M. [F] [W] et/ou Mme [M] [N] ;



En toute hypothèse :



– INFIRMER le jugement en ce qu’il a débouté la SEPS de sa demande de condamner la société MMA à la garantir de l’intégralité des condamnations prononcées à son encontre;

– condamner la société MMA à garantir la SEPS de l’intégralité des condamnations prononcées à son encontre ;

– débouter la NTCA, la société ALLIANZ et la société MMA, de l’ensemble de l’ensemble de leurs autres demandes à l’encontre de la société SEPS,

– condamner la société NTCA, la société ALLIANZ et la société MMA à régler, chacune, à la société SEPS une somme de 30.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens.



Par conclusions récapitulatives n°5 d’appel après jonction notifiées par voie électronique le 30 janvier 2023, la MMA demande à la cour, au visa de l’article L 211-4-1 du code de l’organisation judiciaire, des articles L. 454-1 du code de la sécurité sociale, 1231-6, 1347 et 1353 du code civil, 564 du code de procédure civile, de l’arrêt pénal définitif de cette cour en date du 28 novembre 2018, de :



– INFIRMER le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable l’exception d’incompétence soulevée en raison de la matière, alloué des frais irrépétibles aux sociétés NTCA et ALLIANZ, et mis les dépens à la charge des MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES.



Statuant à nouveau,

– renvoyer les sociétés NTCA et ALLIANZ à mieux se pourvoir devant le tribunal judiciaire de PARIS ;.

– les débouter de leurs demandes de remboursement de frais irrépétibles ;

– les condamner à payer aux sociétés MMA IARD et MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES la somme de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu’en cause d’appel.









Très subsidiairement,

– CONFIRMER le jugement en ce qu’il a limité, à la proportion de 30%, le montant des demandes des sociétés NTCA et ALLIANZ, fixé le montant des condamnations, et arrêté le point de départ des intérêts moratoires au 26 mars 2019 ;

– débouter en conséquence les sociétés NTCA et ALLIANZ de toutes leurs demandes contraires et plus amples, en ce incluse celle relative aux frais irrépétibles ;

– juger irrecevables les demandes nouvelles relatives aux préjudices de M. [Z], M. [Y], M. [R], pour des sommes supplémentaires, et de M. [W], et Mme [N] ;

– juger que la société MMA est bien fondée à se prévaloir d’un plafond de garantie d’un montant de 500.000 euros par année d’assurance ;

– partager les dépens.



Pour plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, il convient de se reporter aux conclusions ci-dessus visées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.



L’ordonnance de clôture a été prononcée le 13 février 2023.

Motivation






MOTIFS DE LA DÉCISION



L’ordonnance du conseiller de la mise en état n’a pas fait l’objet d’un déféré. Il appartient à la cour de statuer sur les exceptions soulevées.



Sur l’exception d’incompétence ratione materiae



Au visa implicite de l’article 75 du code de procédure civile, le tribunal de commerce a déclaré irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par la SEPS et les MMA leur reprochant de ne pas avoir désigné dans le dispositif de leurs conclusions la juridiction de renvoi compétente.



Les sociétés MMA et SEPS sollicitent l’infirmation du jugement et demande à la cour de déclarer le tribunal judiciaire de PARIS compétent dès lors qu’il s’agit d’une incompétence tirée de l’organisation des juridictions, d’ordre public, au visa de l’article L. 211-4-1 du code de l’organisation judiciaire, selon lequel le tribunal de grande instance, désormais tribunal judiciaire, connaît des actions en réparation des dommages corporels et que l’action des sociétés NTCA et ALLIANZ s’inscrit dans les suites directes des faits d’homicide et de blessures involontaires en relation avec l’explosion survenue le 8 novembre 2013 au Palais des Sports, ayant causé la mort de l’un des salariés et occasionné des blessures à plusieurs autres ; qu’il s’agit d’une action en réparation de dommages corporels, sous la forme d’une action récursoire.



La NTCA et ALLIANZ sollicitent la confirmation du jugement et demandent à la cour de déclarer irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par les SEPS et MMA et subsidiairement considèrent que la question n’est pas celle de l’évaluation d’un préjudice corporel qui, aux termes des dispositions de l’article L. 211-4 1° du code de l’organisation judiciaire, relève d’une formation spéciale du tribunal judiciaire mais de statuer sur un recours formé par des commerçants à l’encontre d’autres commerçants.



Sur ce,



L’article 74 du code de procédure civile dispose :

‘ Les exceptions doivent à peine d’irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non recevoir. Il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l’exception seraient d’ordre public (…)’.



L’article 75 du code de procédure civile énonce :

« s’il est prétendu que la juridiction saisie en première instance ou en appel est incompétente, la partie qui soulève cette exception doit, à peine d’irrecevabilité, la motiver et faire connaître dans tous les cas devant quelle juridiction elle demande que l’affaire soit portée ».



Enfin l’article 76 du même code dispose que :

‘Sauf application de l’article 82-1, l’incompétence peut être prononcée d’office en cas de violation d’une règle de compétence d’attribution lorsque cette règle est d’ordre oublic ou lorsque le défendeur ne comparaît pas. Elle ne peut l’être qu’en ces cas.

Devant la cour d’appel et devant la Cour de cassation, cette incompétence ne peut être relevée d’office que si l’affaire relève de la compétence d’une juridiction répressive ou administrative ou échappe à la connaissance de la juridiction française’.



En première instance, ni la SEPS ni les MMA n’ont précisé dans le dispositif de leurs conclusions la juridiction qui aurait été compétente. Dès lors, elles n’ont pas valablement saisi le tribunal de commerce qui n’avait pas l’obligation de soulever d’office l’incompétence. Le tribunal a en conséquence considéré à juste titre qu’elles étaient irrecevables en leur exception de procédure. Le jugement sera confirmé sur ce point.



Par ailleurs la demande ne peut être soulevée régulièrement pour la première fois en cause d’appel et cette incompétence ne peut être relevée d’office devant la cour d’appel.



Sur la recevabilité des prétentions formées pour la première fois par la SEPS par conclusions du 23 décembre 2022



Les sociétés NTCA et ALLIANZ font valoir à titre principal, in limine litis que pour la première fois le 23 décembre 2022, la SEPS a formé une demande tendant à les voir condamner à prendre en charge à hauteur de 70%, correspondant à sa part de responsabilité, les indemnités complémentaires qui ont été payées aux salariés de la NTCA en exécution des décision pénales rendues sur intérêts civils. Elles considèrent que dans le cadre de cette procédure, ni SEPS ni MMA n’ont contesté l’entier droit à indemnisation des victimes et ne leur ont pas opposés un partage de responsabilité. Elles s’opposent à la compensation considérant que cette demande est irrecevable comme prescrite en application de l’article 2224 du code civil selon lequel ces actions se prescrivent par 5 ans à compter du jour ou le créancier de l’obligation savait ou aurait dû savoir qu’il pouvait l’exercer et de l’article L. 451-1 du code de la sécurité sociale qui prive le salarié et ses ayants droit de toute action en droit commun à l’encontre de son employeur.



La SEPS réplique qu’elle est fondée à opposer aux sociétés NTCA et ALLIANZ la compensation des sommes qu’elle a réglées à hauteur de 70 % résultant des condamnations prononcées et a fortiori réglées moins de cinq ans avant ses dernières conclusions. Par ailleurs, les dispositions de l’article L. 451-1 du code de la sécurité sociale ne la prive pas de la possibilité d’opposer cette compensation aux sociétés NTCA et ALLIANZ.



Sur ce,



L’article 564 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009, dispose qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, « les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait » et l’article 565 du même code que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux même fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent.



Par arrêt en date du 28 novembre 2018, la juridiction pénale de la cour d’appel de Paris a statué et fixé définitivement la part de responsabilité des sociétés NTCA et SEPS (70/30). La demande de compensation de la SEPS n’est donc pas prescrite. Elle est recevable à opposer au recours engagé par la NTCA à son encontre la compensation des sommes réclamées avec celles qui ont été réglées par elle mais qui incombaient à la société NTCA. Conformément aux dispositions de l’article 564 du code de procédure civile, cette demande ne peut être considérée comme une demande nouvelle en cause d’appel.



La compensation opposée par la SEPS ne saurait par ailleurs être mise en échec par les dispositions de l’article L. 451-1 du code de sécurité sociale.



Sur la demande des MMA d’irrecevabilité des prétentions d’ALLIANZ et de la NTCA



Vu l’article 564 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009,



Les MMA demandent à la cour statuant au fond de juger irrecevables car nouvelles en cause d’appel les demandes des sociétés ALLIANZ et NTCA relatives aux préjudices subis par M. [Z], M. [Y], M. [R], M. [W] et Mme [N].



Les sociétés ALLIANZ et NTCA considèrent qu’un fait nouveau est survenu et qu’en tout état de cause ces demandes ont le même fondement que les demandes initiales, poursuivent la même fin d’indemnisation du préjudice et constituent le complément de celles formées en première instance.



L’affaire a été plaidée devant le tribunal de commerce de PARIS le 28 septembre 2020.



Concernant Mme [N] et M. [W], le pôle social du tribunal judiciaire de VERSAILLES a rendu ses jugements afférents aux demandes de reconnaissance de la faute inexcusable de leur employeur le 28 janvier 2021 et a fixé l’indemnisation de leurs préjudices complémentaires le 26 août 2022. Il s’agit bien d’un fait nouveau survenu après la clôture de l’instruction devant le premier juge.



Concernant les autres victimes, les demandes ont le même fondement que les demandes initiales, poursuivent la même fin d’indemnisation du préjudice et constituent le complément de celles formées en première instance.



En conséquence les demandes afférentes à l’indemnisation des préjudices subis par M. [Z], M. [Y], M [R], et M. [W], et Mme [N] seront déclarées recevables.



Sur le fond



Sur la qualification de l’action des sociétés ALLIANZ et NTCA



Les sociétés ALLIANZ et NTCA ont assigné au fond devant le tribunal de commerce de PARIS la SEPS et son assureur, MMA, aux fins d’obtenir du tiers responsable les indemnités qui ont été laissées à leur charge du fait de l’accident survenu le 8 novembre 2013.



Le tribunal de commerce a rappelé que la cour d’appel de PARIS avait fixé à 70% et à 30% les parts de responsabilité respectives des sociétés NTCA et SEPS, et que la société NTCA ne disposait que d’une action récursoire contre la SEPS et son assureur pour la part de responsabilité ayant été fixée par la cour d’appel de PARIS, soit 30 %. Il a limité la condamnation de la SEPS et de son assureur à concurrence de la part de responsabilité retenue par le juge pénal, à savoir 30%.



La NTCA et ALLIANZ sollicitent l’infirmation du jugement. Elles soutiennent être subrogés dans tous les droits des victimes : Mme [D] [P], agissant tant en son nom propre qu’en qualité de représentante légale de sa fille mineure [H], héritières de M. [E] [O], M. [T] [Z], M. [A] [Y], M. [X] [R], M. [F] [W] et Mme [M] [N] qu’elles ont désintéressés. Elles prétendent exercer leur recours subrogatoire à l’encontre du tiers responsable identifié par la juridiction pénale, la SEPS et son assureur MMA, et considèrent que le caractère subrogatoire de l’action ainsi exercée leur permet d’exercer les droits et actions des salariés victimes qui disposent d’un droit à indemnisation intégrale à l’égard du tiers responsable, la faute retenue à l’encontre de la NTCA étant inopposable aux salariés victimes.



La SEPS et MMA contestent le caractère subrogatoire de l’action des sociétés NTCA et ALLIANZ et sollicitent la confirmation du jugement. Elles font essentiellement valoir que l’action s’analyse, non en une action subrogatoire, mais en une action en contribution à la dette d’un responsable, contre un autre tiers responsable ; que les sociétés NTCA et ALLIANZ ne sont donc fondées à répéter contre les sociétés SEPS et NTCA qu’à concurrence de la part de responsabilité de 30 % fixée par la cour d’appel de PARIS, et après qu’ait été déduite la part des réparations incombant aux sociétés NTCA et ALLIANZ réglée entièrement par les sociétés SEPS et MMA alors que la cour d’appel de PARIS a fixé la part de responsabilité de la société NTCA à 70 % dans son arrêt du 28 novembre 2018.



Sur ce,



L’arrêt pénal définitif rendu le 28 novembre 2018 a déclaré la NTCA responsable à concurrence de 70% des conséquences de l’explosion litigieuse, tandis que la société SEPS a été retenue responsable à concurrence de 30%.



L’action des sociétés NTCA et ALLIANZ à l’encontre de la SEPS et de MMA doit s’analyser en une action en contribution à la dette d’un responsable contre un autre tiers responsable.



Le codébiteur d’une obligation in solidum qui a exécuté l’entière obligation peut répéter contre l’autre responsable ses parts et portions. Le recours de NTCA contre un autre tiers responsable, et sa subrogation dans les droits des victimes, ne l’autorise à répéter contre ce tiers qu’à concurrence des sommes qu’il a payées qui excèdent ses seules obligations personnelles. Une solution inverse reviendrait à exonérer la NTCA de sa responsabilité pourtant définitivement jugée et constituerait un enrichissement sans cause à son bénéfice. Il en est de même pour les sommes versées aux ayant droits de M. [E] [O] dans le cadre d’un protocole transactionnel.



Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il n’a accueilli les demandes de la NTCA et D’ALLIANZ que dans la proportion de 30% de responsabilité attribuée à la SEPS.



Sur la demande de la NTCA et ALLIANZ de condamnation de la SEPS et MMA à les relever et garantir



Les sociétés NTCA et ALLIANZ demandent à la cour de condamner in solidum la SEPS et MMA à les relever et garantir de l’ensemble des condamnations à intervenir du fait de l’accident survenu le 8 novembre 2013 au profit de M. [A] [Y], M. [T] [Z], M. [X] [R], M. [F] [W] et/ou Mme [M] [N].







Les sociétés SEPS et MMA sollicitent le débouté des sociétés NTCA et ALLIANZ dans la mesure où il ne saurait être prononcé de condamnation pour un préjudice non réellement subi à la date de l’arrêt et au quantum indéfini et hypothétique pour l’avenir.



La SEPS et MMA seront tenues de garantir la NTCA et ALLIANZ dans la seule limite du partage de responsabilité institué par la juridiction répressive, à savoir 70% à la charge de NTCA et 30% à la charge de la SEPS et de son assureur MMA.



Sur la demande de garantie de la société SEPS par les MMA de l’intégralité des condamnations prononcées à son encontre



La SEPS sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande de condamnation de MMA à la garantir de l’intégralité des condamnations qui seront mises à sa charge et le rejet de la demande de MMA de limiter les condamnations qui seraient le cas échéant prononcées contre elle à la somme de 500.000 euros. Elle fait valoir que le sinistre est intervenu dans le cadre de l’exploitation par elle de son activité qui consiste à mettre à disposition du producteur tout à la fois sa salle de spectacle et les services de ses salariés nécessaires tout au long de la préparation du spectacle et de ses représentations. L’activité étant en cours lorsque le sinistre est survenu, c’est le volet « Responsabilité civile- exploitation jusqu’à livraison ou achèvement» de 9.000.000 d’euros qui doit s’appliquer, la prestation de SEPS n’étant encore ni livrée, ni achevée.



La compagnie ALLIANZ sollicite également l’infirmation du jugement faisant valoir que les limites de garantie de MMA doivent être écartées dès lors que la SEPS n’a pas respecté la règlementation du code du travail concernant les mesures à prendre pour éviter les risques liés à l’interférence entre les activités, et installation de matériels de ces deux entreprises ; que l’activité étant en cours lors de l’explosion, c’est bien le volet « Responsabilité civile- exploitation jusqu’à livraison ou achèvement » de 9 000 000 euros qui doit s’appliquer.



La MMA sollicite la confirmation du jugement. Elle ne conteste pas l’existence du contrat d’assurance ainsi que le principe de la garantie responsabilité civile en faveur de son assuré, mais fait valoir que le plafond applicable n’est pas celui de la «responsabilité civile exploitation jusqu’à livraison ou achèvement », mais celui de la « responsabilité civile après livraison » fixé à 500.000 euros, dès lors que la livraison a été effective au sens du contrat la SEPS exerçant une simple activité de loueur de salle.



Sur ce,



La police d’assurance souscrite par SEPS auprès de COVEA RISK sous le numéro 112028722 à effet du 1er janvier 2007 stipule en son chapitre 3 que l’objet du contrat est de :

« garantir le souscripteur et ou l’assuré et ses préposés ou sous-traitants sous réserve des seules exclusions prévues contre toutes les conséquences pécuniaires de la Responsabilité Civile pouvant lui incomber en vertu du droit y compris par la suite de condamnations in solidum du fait d’autrui ou collectif en raison de tous les faits dommageables de type :

* dommages corporels,

* dommages matériels,

* dommages immatériels consécutifs,

* dommages immatériels non consécutifs’



Du fait de son public, ou d’autrui, comme les artistes des spectacles ou de toute personne physique ou morale desquelles il devrait répondre ou avoir à répondre par décision de justice, et qu’il causerait aux tiers, aux Biens confiés qu’il utilise, dans le cadre des Activités assurées, comme celles qui sont générées par la coactivité entre les participants ou du fait d’interférence entre les parties intervenant aux spectacles, activités globale définies ci-avant. »



La police précise encore que :



« La garantie s’exerce quelle que soit la nature de la Responsabilité Civile engagée et quelles que soient les causes du dommage, à concurrence des montants, et sous réserve des franchises fixées par les conditions particulières ou au tableau ci-après, au titre de :

la Responsabilité Civile Exploitation (avant ou pendant livraison et ou réception d’un spectacle ou de la prestation du fait : de l’assuré lui-même, tel que défini avant, de toute personne dont il est civilement responsable et participant au spectacle ou qui sont placées sous sa direction, salariés ou non, des biens immeubles y compris les réserves’.). »



Au chapitre 9, la police d’assurance mentionne, sous forme de tableau, les plafonds de garantie applicables.

Il y est indiqué, à la première ligne, que cette police couvre, jusqu’à 9.000.000 d’euros la responsabilité civile exploitation jusqu’à livraison ou achèvement de l’assuré, « tout dommages confondus dont corporel… ».



La livraison est définie au terme du contrat dans les termes ci-après :

« C’est la remise effective par l’assuré à un tiers de son service, de son bien ou de sa prestation, produit, ouvrage, travail ou production / spectacle, soit définitivement, soit provisoirement ou à titre quelconque dès lors que cette remise donne au nouveau détenteur le pouvoir d’en user et ou d’utiliser le service, le bien ou la prestation et ou les produits dérivés hors de toute intervention ».



Le contrat liant la SEPS à la NCTA incluait la mise à disposition de personnels demeurant sous l’autorité de la SEPS, l’article 5 précisant notamment que les installations techniques et électriques, plateformes et moyens de levage du Palais des Sports, ne pourraient être utilisés que par le personnel du Palais des Sports. Le contrat incluait également l’intervention de salariés de la SEPS pour l’accueil des spectateurs, la billetterie et le bon déroulement du spectacle (chef de salle, inspecteurs, contrôleurs, placeurs, agents de sécurité incendie, techniciens…). Les équipes de SEPS intervenaient donc tout au long de la mise à disposition, non seulement lors de la préparation du spectacle mais elles participaient activement au bon déroulement des représentations y compris jusqu’à la fin de ces dernières. Il ne pouvait y avoir de spectacle sans la participation active de SEPS pendant la préparation et déroulement de celui-ci.





La juridiction pénale a par ailleurs souligné que les salariés de la NTCA intervenaient concomitamment avec ceux de la société SEPS dans ses locaux pour la préparation du spectacle (manquement à l’article R.4212-2 du code du travail), et qu’elle n’avait pas procédé à une analyse des risques avec la société NTCA et arrêté un plan de prévention définissant les mesures prises par chaque entreprise en vue de prévenir les risques compte tenu de l’interférence lié au fait que « certaines man’uvres nécessaires à la préparation du spectacle exigeaient l’intervention en temps réel des salariés de la

SEPS ».



La SEPS soutient donc à juste titre que le spectacle était en cours lorsque l’explosion est survenue et les salariés de la société NTCA ont été blessés ainsi qu’un préposé de la SEPS et que la prestation de SEPS n’étant encore ni livrée, ni achevée.



En page 26 de la police d’assurance, le plafond de garantie pour tous les dommages confondus s’établit à 9.000.000 d’euros par sinistre et par an et aucune franchise n’est applicable, s’agissant du dommage corporel.



La MMA sera en conséquence condamnée à garantir la SEPS de toutes les condamnations qui seraient le cas échéant prononcées à son encontre et liées à l’indemnisation des victimes de l’explosion du 8 novembre 2013. Le jugement sera infirmé sur ce point.



Sur les comptes entre les parties



Les sociétés NTCA et ALLIANZ sollicitent le remboursement de la somme totale de 435.748,77 euros [392.600,53 euros+43.148,24 euros] réglée en réparation du préjudice résultant du décès de leur salarié, M. [E] [O], et de la somme de 373.554,53 euros réglée en réparation des préjudices résultant des blessures de leurs salariés, Mme [N], et Mrs [G], [R] et [W], soit la somme totale de 809.303,30 euros en réparation du préjudice subi par les salariés de NTCA ou leurs ayants droits.



La SEPS ne conteste pas ces sommes mais fait cependant valoir qu’elle a elle-même payé la somme totale en principal de 374.673,06 euros aux salariés de la NTCA à la suite des saisies intervenues sur son compte ainsi qu’à une mise en demeure du 18 novembre 2022 de l’huissier diligenté par M. [Y] ; qu’une compensation à hauteur de 262.271,90 euros doit s’opérer entre les sommes payées de sorte que le jugement devra être infirmé et la condamnation des sociétés MMA et SEPS ramenée à 4.576,76 euros [266.847,90 euros moins 262.271,14 euros).



La société MMA sollicite le rejet des demandes en remboursement des frais irrépétibles auxquelles la société NTCA a été condamnée à titre personnel, en sa qualité d’employeur desdits salariés.



Il convient d’ordonner la réouverture des débats exclusivement sur ce point afin de solliciter l’établissement par les parties d’un tableau détaillé portant mention des sommes qui ont été payées par chacune d’elles en y précisant le nom du bénéficiaire (sommes dont la caisse a fait l’avance précisant à quel titre, sommes versées directement aux victimes ou à leurs ayant droits en indiquant le numéro de la pièce justificative du paiement).



Il est constant que les condamnations au titre des frais irrépétibles représentent des sanctions personnelles liée au fait que la NTCA a été considérée comme perdante. Elle ne dispose d’aucun recours à ce titre contre la SEPS et son assureur. Il n’y aura donc pas lieu d’y inclure les sommes versées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.



Il appartiendra ensuite aux parties en fonction des paiements effectués chacune d’elles de présenter à la cour un décompte des sommes dues conformément aux dispositions du présent arrêt à concurrence d’une répartition de 70/30 (NTCA/SEPS).



L’affaire sera renvoyée à l’audience de mise en état du 24 octobre 2023 à 13H00, Salle Portalis, escalier Z , 2ème étage, et il sera sursis à statuer sur les autres demandes dans l’attente de la production des éléments sollicités.


Dispositif

PAR CES MOTIFS



LA COUR,

statuant publiquement en dernier ressort par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,



CONFIRME le jugement sauf en ce qu’il a débouté la société SEPS de sa demande de garantie à l’encontre de la compagnie MMA IARD,







Dit que l’exception d’incompétence ratione materiae soulevée par les sociétés MMA IARD et SEPS ne peut être soulevée régulièrement pour la première fois en cause d’appel et que cette incompétence ne peut être relevée d’office devant la cour d’appel;



Dit que la société SEPS est recevable à opposer au recours engagé par la société NTCA à son encontre la compensation des sommes réclamées avec celles qui ont été réglées par elle mais qui incombaient à la société NTCA et que cette demande ne peut être considérée comme une demande nouvelle en cause d’appel ;



Dit recevables les demandes de la société NTCA et de la compagnie ALLIANZ afférentes à l’indemnisation des préjudices subis par M. [Z], M. [Y], M. [R], et M. [W] et Mme [N] ;



Condamne que la société SEPS et la compagnie MMA IARD à garantir la société NTCA et la compagnie ALLIANZ dans la limite du partage de responsabilité institué par la juridiction répressive, à savoir 70% à la charge de la société NTCA et 30% à la charge de la société SEPS et de son assureur ;



Condamne la compagnie MMA IARD à garantir la SEPS de toutes les condamnations qui seront le cas échéant prononcées à son encontre et liées à l’indemnisation des victimes de l’explosion du 8 novembre 2013 dans la limite du plafond de garantie applicable de 9.000.000 d’euros pour tous les dommages confondus par sinistre et par an et qu’aucune franchise n’est applicable, s’agissant de dommages corporels ;



Sur les comptes entre les parties et exclusivement sur ce point



Ordonne la réouverture des débats et demande à chacune des parties de :

* procéder à l’établissement d’un tableau détaillé portant mention des sommes qui ont été payées par chacune d’elles en y précisant le nom du bénéficiaire (sommes dont la caisse a fait l’avance en précisant à quel titre, sommes versées directement aux victimes ou à leurs ayant droits et en indiquant le numéro de la pièce justificative du paiement), et ce, sans y inclure les sommes versées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

* en fonction des paiements effectués par chacune d’elles de présenter à la cour un décompte précis des sommes dues conformément aux dispositions du présent arrêt à concurrence d’une répartition de 70/30 (NTCA/SEPS).



Renvoie l’affaire à l’audience de mise en état du 24 octobre 2023 à 13H00, Salle Portalis , escalier Z , 2ème étage, pour vérification de la production des éléments sollicités et surseoit à statuer sur les autres demandes dans cette attente.





LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


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