Secret des correspondances : 8 septembre 2022 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/02337

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Secret des correspondances : 8 septembre 2022 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/02337
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8 septembre 2022
Cour d’appel de Bordeaux
RG n°
20/02337

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION B

————————–

ARRÊT DU : 8 septembre 2022

PRUD’HOMMES

N° RG 20/02337 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LTAS

SARL Unipersonnelle [S]

c/

Madame [U] [I]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée aux avocats le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 juin 2020 (R.G. n°F18/00246) par le Conseil de Prud’hommes – Formation de départage d’ANGOULEME, section industrie, suivant déclaration d’appel du 08 juillet 2020,

APPELANTE :

SARL Unipersonnelle [6] immatriculée au RCS d’ANGOULEME sous le n° [N° SIREN/SIRET 3], agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]

Représentée par Me Claire LE BARAZER de la SCP CLAIRE LE BARAZER & LAURÈNE D’AMIENS, avocat au barreau de BORDEAUX

Assistée de Me BADETS-PEAN, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

[U] [I]

née le 05 Août 1975 à [Localité 5]

de nationalité Française

Profession : Chef cuisinier, demeurant [Adresse 1]

Représentée et assistée par Me Arianna MONTICELLI de la SELARL MONTICELLI – SOULET, avocat au barreau de CHARENTE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 11 mai 2022 en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Paule Menu, présidente,

Monsieur Hervé Ballereau, conseiller,

Madame Elisabeth Vercruysse, vice-présidente placée,

qui en ont délibéré.

greffière lors des débats : Mme Sylvaine Déchamps,

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Le délibéré a été prorogé pour motif médical.

Exposé du litige

Selon un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 4 mars 2017, la société unipersonnelle [6] exploitant trois boulangeries dans le département de la Charente a engagé Mme [I] en qualité de vendeuse.

Par avenant du 23 octobre 2017, le contrat de travail de Mme [I] a été régularisé en contrat de travail à temps plein. Le gérant de la société, [Y] [6] vivait alors en couple avec Mme [I].

A compter du 15 janvier 2018, Mme [I] a été placée en arrêt maladie.

Par avis du 17 avril 2018, le médecin du travail a déclaré Mme [I] inapte à tout poste de travail.

Par courrier du 3 mai 2018, la société [6] a convoqué Mme [I] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 15 mai 2018.

Le 18 mai 2018, Mme [I] a été licenciée pour inaptitude.

Le 11 décembre 2018, Mme [I] a saisi le conseil de prud’hommes d’Angoulême aux fins de :

voir juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

voir condamner la société [6] au paiement de diverses sommes :

à titre de rappel de salaire de mars 2017 à janvier 2018, outre les congés payés y afférents,

à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

à titre de dommages et intérêts pour dépassement des durées maximales de travail,

à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents,

à titre de reliquat de l’indemnité de licenciement,

sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les frais éventuels d’exécution,

se voir remettre les documents de fin de contrat rectifiés.

Par jugement de départage du 12 juin 2020, le conseil de prud’hommes d’Angoulême a:

écarté des débats la pièce n°8 produite par Mme [I],

dit que l’inaptitude de Mme [I] ayant conduit à son licenciement ne présente pas une origine professionnelle,

dit que le licenciement de Mme [I] repose sur une cause réelle et sérieuse,

débouté Mme [I] de ses demandes au titre :

des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

de l’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés y afférents,

du reliquat de l’indemnité de licenciement,

de l’indemnité pour travail dissimulé,

des dommages et intérêts pour dépassement des seuils de durée et non-respect du repos obligatoire,

condamné la société [6] à payer à Mme [I] les sommes suivantes :

28 254,42 euros au titre des heures supplémentaires de mars 2017 à janvier 2018, outre 2 825,44 euros de congés payés y afférents,

2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné la société [6] à remettre à Mme [I] dans un délai de 15 jours à compter de la notification du présent jugement :

un certificat de travail rectifié,

les bulletins de paie de mars 2017 à 2018 rectifiés,

une attestation Pôle emploi rectifiée,

condamné la société [6] aux entiers dépens de l’instance,

dit n’y avoir lieu de mettre à la charge de l’employeur les sommes éventuellement dues par la créancière au titre de l’article A 444-32, 2° du code du commerce, dont elle est au surplus dispensée en application de l’article R 444-55 du même code, s’agissant des créances nées de l’exécution d’un contrat de travail,

ordonné l’exécution provisoire du jugement.

Par déclaration du 8 juillet 2020, la société [6] a relevé appel du jugement.

Par ordonnance de référé du 17 septembre 2020, le premier président de la cour d’appel de Bordeaux a débouté la société [6] de sa demande d’arrêt de l’exécution provisoire assortissant les dispositions du jugement de départage.

Par ses dernières conclusions du 11 avril 2022, la société [6] sollicite de la Cour qu’elle:

rejette l’appel incident de Mme [I],

infirme le jugement déféré,

déboute Mme [I] de toutes ses demandes,

confirme le rejet des débats les courriers échangés entre la société [6] et son ancien conseil comme constituant des correspondances privées couverts par la confidentialité des échanges entre un avocat et son client,

déboute Mme [I] de ses demandes :

d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

de dommages et intérêts pour dépassement des durées maximales de travail,

d’indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents,

sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

fasse droit à la demande formulée par la société [6] de condamner Mme [I] au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

la condamne aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions du 23 décembre 2020, Mme [I] sollicite de la Cour qu’elle :

confirme le jugement déféré en ce qu’il a :

condamné la société [6] à lui payer les sommes suivantes, lesquelles porteront intérêt au taux légal à compter du jugement de première instance, :

28 254,42 euros au titre des heures supplémentaires de mars 2017 à janvier 2018, outre 2 825,44 euros de congés payés y afférents,

2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,

1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

ordonné la remise des documents de fin de contrat rectifiés, sauf à affecter cette obligation d’une astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

infirme le jugement déféré pour le surplus,

condamne la société [6] à lui verser les sommes suivantes :

1 383,60 euros nets à titre de reliquat de l’indemnité de licenciement, avec intérêt au taux légal depuis mars 2018,

5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour dépassement des durées maximales de travail,

32 329 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

10 332 euros à titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

5 166 euros bruts à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre 516,60 euros bruts de congés payés y afférents, avec intérêt au taux légal depuis mars 2018,

2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens et frais éventuels d’exécution,

déboute la partie adverse de ses demandes.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 avril 2022.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

Motifs de la décision

Sur la demande de rejet de la pièce n° 8 communiquée par Mme [U] [I]

Il s’agit d’un échange de courriels entre M. [6] et son avocat reçu sur la messagerie professionnelle de l’intéressé. La production de cette pièce par Mme [I] constitue une atteinte au secret des correspondances entre un avocat et un client tel que prévu par l’article 66-5 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques. C’est donc à bon droit que le premier juge l’a écartée des débats.

Sur la demande de rappel de salaires au titre des heures complémentaires et supplémentaires

Il résulte des articles L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.

Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce, le contrat de travail à temps partiel en date du 4 mars 2017 souscrit par Mme [I] prévoit une durée de travail hebdomadaire de 23 heures répartie comme suit :

– Lundi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi de 15h30 à 19h

– Dimanche de 7h30 à 13h

– Mardi, repos

Par avenant du 23 octobre 2017, la durée du travail a été portée à 35 heures par semaine et son poste de travail a été fixé à la boulangerie d'[Localité 4].

Au soutien de sa demande en paiement de la somme de 28.254,42 euros à titre de rappel de salaires pour heures complémentaires et supplémentaires pour la période de mars 2017 à janvier 2018, Mme [I] présente les éléments suivants :

– ses agendas 2017-2018 détaillant les heures de travail quotidien et ses bulletins de paie,

– des attestations de deux anciens salariés, le premier, M. [O], déclare que Mme [I] a travaillé jusqu’en août 2017 les week-end et jours de fêtes au laboratoire de la patisserie d'[Localité 4] alors qu’elle occupait, par ailleurs, le poste de vendeuse dans une autre boulangerie et assurait régulièrement des remplacements des vendeuses en leur absence; le deuxième attestant, M. [G], confirme la présence la nuit de Mme [I] au laboratoire d'[Localité 4], d’abord le week-end, puis durant la semaine, pour faire face aux commandes et achalander les magasins ; il indique, en outre, que lors de son départ en juin 2017, Mme [I] a repris son poste de travail comme patissier. Enfin, les deux témoins font état de la participation de Mme [I] à la foire de [Localité 8] une fois par mois.

– une attestation d’une cliente, Mme [F], certifiant avoir été servie par Mme [I] à la boulangerie de [Localité 7] le samedi 24 juin 2017 à 20h et le dimanche 25 juin après- midi, en contradiction avec ses horaires contractuels,

– un courrier de Mme [I] du 26 janvier 2018 par lequel elle dénonce à l’employeur des conditions de travail inappropriées en raison, notamment, d’une surcharge de travail se traduisant par au moins 5 heures supplémentaires par jour dont une partie était réglée en espèces, et sollicite une rupture conventionnelle.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre.

L’employeur a répondu le ler février 2018 à ce courrier de la salariée en contestant la réalité des heures supplémentaires réclamées et en imputant la demande de rupture conventionnelle à la fin de leur relation affective actée le 8 janvier.

Il produit des feuilles d’heures de présence mensuelles récapitulant les heures d’arrivée et de départ de la salariée pour chaque journée de travail sur l’intégralité de la relation de travail.

Toutefois, ces documents ne sont pas signés par l’employeur, ni par la salariée et les décomptes horaires ne coincident pas avec les heures travaillées indiquées sur les bulletins de paie; ainsi, en mars 2017, le décompte de l’employeur mentionne une durée mensuelle du travail de 95,5 heures et le bulletion de paie 92 heures. A l’inverse, en novembre 2017, l’employeur règle 55 heures de nuit au lieu des 38 heures de nuit figurant sur le décompte et en décembre 2017, l’employeur décompte 104,5 heures de travail et en rémunèrent 151,67 heures et 4,33 heures supplémentaires. Des journées de travail (20 mars 2017, 15 mai 2017) sont notées sur le décompte alors que la salariée rapporte la preuve qu’elle était absente.

Le décompte de l’employeur ne mentionne pas non plus :

– les heures effectuées lors de la foire de [Localité 8] où les témoins déclarent qu’elle y tenait un stand une fois par mois,

– les heures de travail de nuit et les livraisons à compter de 6 heures du matin évoquées par les anciens salariés entre mars et août 2017

– les heures de travail de nuit réalisées en octobre 2017 alors que des échanges sms et des photographies en établissent la réalité.

Ces multiples contradictions ôtent au décompte de l’employeur sa valeur probante.

Les attestations fournies par l’employeur dont une partie émane de salariés ou d’anciens salariés dont deux ont été ses compagnes faisant état de la loyauté de M. [6] à leur égard et du respect des horaires de travail et du règlement des heures supplémentaires ne sont pas de nature à remettre en cause les constats énoncés ci-dessus sur la situation personnelle de Mme [I] dont le statut de compagne de M. [6] a justifié, selon certains témoins qui décrivent un comportement se rapprochant de celui d’une ‘patronne’, un investissement plus important dans le fonctionnement quotidien de l’entreprise.

S’il résulte de ces éléments, la preuve de l’existence d’heures complémentaires et supplémentaires réalisées par Mme [I] qui en a exigé le paiement dés le mois de janvier 2018, la cour relève, cependant, des incohérences dans le décompte des heures déclarées.

Ainsi, l’employeur justifie que M.[6] bénéficiait d’une résidence alternée de ses deux enfants les semaines paires et que Mme [I] les conduisait régulièrement à l’école le matin de sorte que celle-ci ne peut valablement prétendre qu’elle travaillait toutes les nuits et tous les matins.

Au total, la cour dispose des éléments d’appréciation pour fixer le montant des rappels de salaires pour heures complémentaires comme suit :

– mars 2017 : 93,30 euros

– avril 2017 : 382,02 euros

– mai 2017 : 80,89 euros

– juin 2017 : 1348,23 euros

– juillet 2017 : 4676,63 euros

– août 2017 : 4293,81 euros

– septembre 2017 : 2278,82 euros

Sous- total : 13.153,70 euros

et le montant des rappels de salaires pour heures supplémentaires comme suit :

– octobre 2017 : 1649,66 euros

– novembre 2017 : 1749,16 euros

– décembre 2017 : 1884,43 euros

– janvier 2018 : 703,14 euros

Sous-total : 5986,39 euros

Au total, l’employeur est donc débiteur d’une somme de 19140,09 euros outre les congés payés afférents. Le jugement sera réformé en ce sens.

Le salaire de référence composé de la moyenne des salaires d’octobre à décembre 2017 outre les heures supplémentaires allouées sera fixé à la somme de 3405,01 euros.

Sur le travail dissimulé

Aux termes de l’article L8221-5 al 2 du code du travail, est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à la délivrance d’un bulletin de paie ou d’un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie.

La confusion entre vie professionnelle et vie privée entretenue par les parties ne permet pas de caractériser l’intention de dissimulation exigée par les dispositions sus-visées de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulée présentée par Mme [I].

Sur la demande de dommages et intérêts pour dépassement des seuils de durée du temps de travail et non respect du repos obligatoire

Selon les articles L 3121-34 et L 3121-35 du code du travail, les durées maximales de travail journalières et hebdomadaires ne peuvent respectivement excéder 10 heures et 48 heures de travail.

Conformément aux régles de l’Union européenne qui fixe le seuils en la matière, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve que les heures de travail réalisées par les salariés ne dépassent pas ces seuils.

En l’espèce, l’employeur conteste les dépassements des durées maximales de travail sans contredire utilement sur ce point les décomptes établis par la salariée faisant état, par exemple, de l’accomplissement en juillet 2017 de 345 heures de travail dans le mois lorsque Mme [I] a été amenée à remplacer un patissier qui avait quitté son emploi, remplacement admis par M. [6] lors de l’entretien préalable.

Ces dépassements n’ont pas été suivis de repos minimal obligatoire et ont contribué à l’altération de l’état de santé de Mme [I]. Le préjudice en résultant sera réparé par une somme de 2000 euros à titre de dommages et intérêts. Sur ce point, le jugement sera réformé.

Sur la demande de dommages et intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail

Mme [I] ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui réparé au titre du non respect du temps de travail tant en ce qui concerne les heures supplémentaires que les seuils des durées maximales de travail journalières et hebdomadaires. Dés lors, la demande de dommages et intérêts sera rejetée. Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur le licenciement

Lorsque l’inaptitude a été causée par le comportement fautif de l’employeur, le licenciement pour inaptitude est sans cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, le médecin du travail a prononcé un avis d’inaptitude le 17 avril 2018 en mentionnant que tout maintien de la salariée dans son emploi sera préjudiciable à son état de de santé. Le dossier médical de Mme [I] établi par le médecin du travail mentionne son état très dégradé sur un plan psychologique motivant la prise d’anti dépresseurs.

Le 25 janvier 2018, Mme [K], psychologue, a rédigé un rapport relatif à la situation de Mme [I] mettant en évidence un épuisement psychique important.

Le compte rendu de l’entretien préalable au cours duquel Mme [I] était assistée d’un conseiller du salarié fait état de la surcharge de travail alléguée par la salariée et de la réponse de l’employeur indiquant : ‘oui, c’est moi qui l’ait mise à la pâtisserie pour m’aider et elle n’a pas refusé, elle était d’accord, je ne l’ai pas forcée’.

Si la rupture amoureuse à l’initiative de M. [6] a nécessairement eu des effets sur l’état de santé psychique de Mme [I], il ressort, néanmoins, des réclamations constantes de la salariée sur le rappel des heures supplémentaires et sur sa surcharge de travail, de la dégradation des conditions de travail retenues par la cour et relevées par le médecin du travail, que l’inaptitude a été au moins partiellement causée par le comportement fautif de l’employeur.

Il en résulte que le licenciement doit être déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Dés lors, Mme [I] peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis d’un mois de salaire compte tenu de son ancienneté dans l’entreprise, soit la somme de 3405,01 euros outre les congés payés afférents ainsi qu’à un solde d’indemnité de licenciement de 762,80 euros (1200,26 – 437,42).

La perte injustifiée de son emploi justifie de lui allouer la somme de 6810 euros sur le fondement de l’article L 1235-3 du code du travail au regard de son ancienneté dans l’entreprise, des circonstances du licenciement et de son retour à l’emploi.

Le jugement sera réformé en ce sens.

Sur les autres demandes

L’employeur remettra à Mme [I] un bulletin de paie, un solde tout compte et une attestation Pôle Emploi rectifiés conformément aux dispositions de la présente décision sans qu’il soit besoin d’assortir cette décision d’une astreinte.

Les sommes accordées à titre de rappel de salaire produisent des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant le bureau de conciliaion et d’orientation du conseil de prud’hommes ; les sommes accordées à titre d’indemnité produisent des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision.

Tenue aux dépens, la société [6] versera à Mme [I] la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ces motifs

La cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a écarté des débats la pièce n°8 du bordereau de pièces de Mme [I] et a rejeté la demande d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé

L’infirme pour le surplus et statuant à nouveau dans cette limite

Condamne la société [6] à payer à Mme [I] les sommes suivantes :

– 19140,09 euros à titre de rappel de salaires pour heures complémentaires et heures supplémentaires, outre les congés payés afférents

– 2000 euros pour non respect des durées maximales du travail

– 3405,01 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents

– 762,80 euros à titre de solde d’indemnité de licenciement

– 6810 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Dit que les sommes accordées à titre de rappel de salaire produisent des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant le bureau de conciliaion et d’orientation du conseil de prud’hommes

Dit que les sommes accordées à titre d’indemnité produisent des intérêts au taux légal à compter du prononcé de la présente décision

Ordonne à la société [6] de remettre à Mme [I] un bulletin de paie, un solde tout compte et une attestation Pôle Emploi rectifiés conformément aux dispositions de la présente décision

y ajoutant

Condamne la société [6] à payer à Mme [I] la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Condamne la société [6] aux dépens.

Signé par Marie-Paule Menu, présidente et par Sylvaine Déchamps, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

S. Déchamps M.P. Menu

 


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