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28 mai 2020
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG n°
19/10171
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Délégation Premier Président
ORDONNANCE
DU 28 MAI 2020
N°2020 /0004
Rôle N° RG 19/10171 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BEPNI
SA MAG ASSET MANAGEMENT
Société NECKER GESTION PRIVEE
C/
DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Romain CHERFILS
Me Jean DI FRANCESCO
Décision déférée au Premier Président de la Cour d’Appel :
Ordonnance rendue le 12 Juin 2019 par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de NICE
APPELANTES
SA MAG ASSET MANAGEMENT Société de droit suisse,
prise en la personne de son représentant légal en exercice
domiciliée [Adresse 3] (SUISSE)
représentée par Me Romain CHERFILS , avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE et Me Fanny PENCHE, avocat au barreau de BORDEAUX
Société NECKER GESTION PRIVEE Société de droit mauricien,
prise en la personne de son représentant légal en exercice
domiciliée [Adresse 9] (ILE MAURICE)
représentée par Me Romain CHERFILS , avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE et Me Fanny PENCHE, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMEE
DIRECTION GENERALE DES FINANCES PUBLIQUES et spécialement la DIRECTION NATIONALE D’ENQUETES FISCALES,
représentée par Me Jean DI FRANCESCO de la SELARL URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS
DÉBATS ET DÉLIBÉRÉ
L’affaire a été débattue le 05 Mars 2020 en audience publique devant
Madame Rachel ISABEY, Conseiller,
déléguée par ordonnance du Premier Président .
Greffier lors des débats : Mme Mélissa NAIR.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 08 Avril 2020.
En raison des conditions sanitaires liées au COVID 19 et aux mesures de procédure civile exceptionnelles mises en oeuvre, le délibéré a été prorogé au 28 mai 2020.
ORDONNANCE
Contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 28 mai 2020
Signée par Madame Rachel ISABEY, Conseiller et Mme Mélissa NAIR, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSE DU LITIGE
Par ordonnance en date du 12 juin 2019, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nice a autorisé des agents de l’administration des finances publiques à procéder à des opérations de visite et de saisie domiciliaires à l’encontre de la société de droit suisse MAG ASSET MANAGEMENT et de la société de droit mauricien NECKER GESTION PRIVEE dans les locaux et dépendances situés :
– [Adresse 6] susceptibles d’être occupés par [WV] [U],
– [Adresse 5] susceptibles d’être occupés par [WV] [U] et/ou [I] [T].
Par déclaration d’appel en date du 25 juin 2019, la SA MAG ASSET MANAGEMENT et la société NECKER GESTION PRIVEE ont interjeté appel de cette ordonnance.
A l’audience du 5 mars 2020, les sociétés SA MAG ASSET MANAGEMENT et NECKER GESTION PRIVEE ont repris leurs conclusions déposées le 24 février 2020, aux termes desquelles elles sollicitent:
– l’infirmation de l’ordonnance querellée,
– la restitution par l’administration des pièces et documents saisis en vertu de cette ordonnance et l’interdiction de les utiliser,
– la condamnation du directeur général des finances publiques à leur verser à chacune la somme de 10 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
En défense, le directeur général des finances publiques a sollicité le bénéfice de ses conclusions adressées le 24 février tendant :
– à la confirmation de l’ordonnance déférée ;
– au rejet des demandes des appelantes ;
– à la condamnation des appelantes au paiement de la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Il est fait référence aux écritures susvisées des parties pour l’exposé de leurs moyens.
MOTIFS DE LA DECISION
La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance d’autorisation du juge des libertés et de la détention n’est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité. L’appel est ainsi recevable.
La SA MAG ASSET MANAGEMENT et la société NECKER GESTION PRIVEE contestent la régularité de la procédure d’autorisation et le bien fondé de l’ordonnance déférée.
1- sur la régularité de la procédure d’autorisation
Les appelantes invoquent l’absence d’habilitation de l’agent qui a sollicité l’autorisation de visite domiciliaire auprès du juge des libertés et de la détention, de contrôle effectif du juge des libertés et de la détention et de mention du droit de se faire assister d’un conseil.
1-1- sur l’habilitation de l’agent de l’administration
Les appelantes exposent que l’habilitation de l’inspecteur des finances publiques qui a présenté la requête n’a pas été communiquée par l’administration fiscale. Elles soutiennent par ailleurs que l’habilitation que M. [TY] aurait reçu le 2 septembre 2015 de Mme [P], était devenue caduque à la date de la requête dès lors que Mme [P] n’était plus en fonction et que le directeur général des finances publiques qui l’avait déléguée avait lui-même été remplacé.
Le directeur général des finances publiques réplique qu’aucun texte n’impose que la décision d’habilitation soit annexée à la requête et communique en tout état de cause la dite décision. Il fait en outre valoir que l’habilitation de M. [TY] était toujours valable.
L’article L. 16 B du livre des procédures fiscales prévoit simplement que l’ordonnance du juge comporte notamment le nom et la qualité du fonctionnaire habilité qui a sollicité et obtenu l’autorisation de procéder aux opérations de visite. Or sont fondés à saisir l’autorité judiciaire d’une demande d’autorisation les agents de la direction générale des finances publiques habilités à effectuer des visites et saisies domiciliaires.
En l’espèce l’ordonnance entreprise, constate, par une mention qui vaut jusqu’à inscription de faux, que l’habilitation de M. [TY] lui a été présentée.
Cette mention est suffisante pour établir la réalité de cette présentation, alors qu’aucun texte n’impose que les décisions d’habilitation des agents de l’administration fiscale soient annexées à la requête.
L’administration fiscale produit la décision du directeur général des finances publiques en date du 2 septembre 2015 habilitant [O] [TY], inspecteur des finances publiques, à effectuer les visites et procéder aux saisies prévues par l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales. Cette habilitation donne qualité à [O] [TY] de saisir l’autorité judiciaire d’une demande d’autorisation de visite domiciliaire.
Par ailleurs cette habilitation donnée par Mme [P], administratrice des finances publiques, disposant alors elle même d’une délégation du directeur général des finances publiques, était toujours valable à la date de la requête. En effet une habilitation subsiste au remplacement de l’autorité délégante et de l’autorité délégataire, tant qu’elle n’a pas fait l’objet d’une révocation, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Le moyen tiré de l’absence d’habilitation de l’agent qui a présenté la requête au juge sera en conséquence rejeté.
1-2- sur le contrôle du juge
Les sociétés SA MAG ASSET MANAGEMENT et NECKER GESTION PRIVEE estiment que l’ordonnance querellée ne répond pas à l’exigence d’un tribunal indépendant et impartial et viole les dispositions des articles 6-1 et 8 de la CEDH.
Il sera rappelé en préambule que les dispositions de l’article L 16 B du livre des procédures fiscales et le recours qu’elles prévoient devant le premier président de la cour d’appel permettent aux contribuables de contester en droit et en fait, la régularité et le bien-fondé de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant la visite domiciliaire et la saisie, ainsi que le déroulement des opérations, leur garantissant ainsi un contrôle juridictionnel effectif de la régularité de l’ordonnance répondant aux exigences de la CEDH.
Les appelantes reprochent au juge des libertés et de la détention d’avoir accordé une autorisation générale permettant une saisie massive de données sans que l’administration justifie des modalités de collecte des informations. Or aucune disposition de l’article L 16 B n’oblige le juge à préciser dans son ordonnance d’autorisation les modalités techniques de saisie ni les critères de sélection des données que les agents fiscaux appliqueront lors des opérations et il peut autoriser la recherche de tous documents ou supports d’information dès lors qu’ils illustrent la fraude présumée. Le juge n’est de même pas tenu de préciser dans son ordonnance les mesures nécessaires au respect de la vie privée et du secret des correspondances et les atteintes portées le cas échéant au secret relèvent du seul contrôle de la régularité des opérations. Or les sociétés SA MAG ASSET MANAGEMENT et NECKER GESTION PRIVEE n’ont pas formé de recours contre le déroulement des opérations de visite et de saisie, de sorte que les moyens relatifs à la saisie massive de données et aux méthodes d’investigation numériques lors des opérations sont inopérants.
Les sociétés SA MAG ASSET MANAGEMENT et NECKER GESTION PRIVEE prétendent par ailleurs que le juge n’a pas procédé à un contrôle effectif de la licéité des pièces produites par l’administration. Elles soutiennent que l’administration a produit des pièces et informations recueillies par la consultation de banques de données étrangères et que cette collecte de données nominatives personnelles est contraire au Réglement Général des Données Personnelles ( RGPD) et aux recommandations de la CNIL.
Le directeur général des finances publiques réplique que la consultation de sites publics a concerné des informations publiées relatives aux sociétés visées par la fraude, non assimilable à un traitement informatisé de données personnelles, et qu’en tout état de cause la requête était fondée sur d’autres éléments laissant présumer des agissements frauduleux.
L’examen des pièces soumises au juge des libertés et de la détention ne révèle aucune utilisation d’un traitement informatisé de données personnelles mais la consultation de base de données publiques pour recueillir des informations sur des sociétés étrangères. Par ailleurs le premier juge ne s’est pas fondé exclusivement sur ces éléments pour délivrer son autorisation, mais les a mis en perspective avec d’autres informations, notamment avec les éléments issus de l’exercice par l’administration de son droit de communication ou des bases et dossiers fiscaux.
Le moyen tiré de l’absence de contrôle effectif du juge sera ainsi rejeté.
1-3 Sur la mention du droit d’être assisté d’un conseil
Les sociétés SA MAG ASSET MANAGEMENT et NECKER GESTION PRIVEE font grief au juge des libertés et de la détention de ne pas avoir mentionné dans son ordonnance le droit pour les personnes visées par la fraude ou pour les occupants des lieux visités de la possibilité de se faire assister d’un conseil .
Aux termes de l’article L 16 B du libre des procédures fiscales l’ordonnance autorisant les opérations de visite et de saisie comporte :
a) L’adresse des lieux à visiter ;
b) Le nom et la qualité du fonctionnaire habilité qui a sollicité et obtenu l’autorisation de procéder aux opérations de visite ;
c) L’autorisation donnée au fonctionnaire qui procède aux opérations de visite de recueillir sur place, dans les conditions prévues au III bis, des renseignements et justifications auprès de l’occupant des lieux ou de son représentant et, s’il est présent, du contribuable mentionné au I, ainsi que l’autorisation de demander à ceux-ci de justifier pendant la visite de leur identité et de leur adresse, dans les mêmes conditions.
d) La mention de la faculté pour le contribuable de faire appel à un conseil de son choix.
L’exercice de cette faculté n’entraîne pas la suspension des opérations de visite et de saisie.
Or en l’espèce l’ordonnance entreprise mentionne cette faculté. Le moyen est donc infondé.
2- sur le bien fondé de l’autorisation
Aux termes de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, l’autorité judiciaire peut autoriser l’administration à effectuer une visite domiciliaire lorsqu’il existe des présomptions qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement de l’impôt sur le revenu ou les bénéfices ou de la TVA pour rechercher la preuve de ces agissements.
Les appelantes dénoncent l’absence de présomptions de fraude et le fait que l’administration se serait abstenue de produire des éléments à décharge.
Sur les présomptions de fraude à l’égard de la société MAG ASSET MANAGEMENT :
La société SA MAG ASSET MANAGEMENT a pour objet la gestion de fortune, toutes activités de conseil et d’assistance, dans les domaines financiers du crédit immobilier, de l’assurance vie et de la négociation immobilière.
Son siège social est situé [Adresse 1], avec une nouvelle adresse au 21 novembre 2018 [Adresse 2]. La base de données ORBIS recense 9 sociétés à la première adresse et 40 à la seconde. Le conseil d’administration est constitué de [B] [T] (président du conseil) et d'[F] [K] (membre disposant de la signature individuelle).
[B] [T] est domicilié à l’Ile Maurice mais a déclaré en Suisse plusieurs adresses, dont certaines correspondent aux adresses successives de la société. Il est par ailleurs propriétaire de deux maisons [Adresse 11] en Haute Savoie, pour lesquelles il est mentionné comme 1° occupant sur l’avis de taxe d’habitation 2018 . Son épouse est domiciliée à cette adresse, il est titulaire de plusieurs comptes bancaires ouverts à la CRACM avec cette adresse.
Ainsi s’il n’est pas contesté que M. [T], résident suisse puis mauricien, puisse avoir des centres d’intérêt dans ces pays, les pièces versées par l’administration fiscale permettent de présumer qu’il dispose également d’intérêts personnels et économiques sur le territoire français.
[F] [K], administrateur de la société, exerce la profession d’avocat en Suisse, étant l’un de fondateurs du cabinet DGE à [Localité 7] dont il dirige un département. Ces circonstances pouvaient laisser présumer que ses activité professionnelles ne lui permettaient pas d’assurer réellement la gestion de la société SA MAG ASSET MANAGEMENT.
Par ailleurs une partie de l’équipe dirigeante et managériale de la société SA MAG ASSET MANAGEMENT est domiciliée en France.
Ainsi [WV] [U] (domiciliée dans les Alpes-Maritimes) est “chief executive officer” de la société SA MAG ASSET MANAGEMENT depuis le 13 juin 2013, elle dispose de la signature individuelle et a déclaré percevoir des salaires de la société SA MAG ASSET MANAGEMENT de 130 039 € en 2015, 229 834 € en 2016, 258 601 € en 2017 et 395 491 € en 2018.
[S] [C]( domicilié lui aussi dans les Alpes-Maritimes), également directeur de la société SA MAG ASSET MANAGEMENT, détient 4 % du capital de la société SAS TAILOR CAPITAL et déclare des salaires versés par la société SA MAG ASSET MANAGEMENT de 242 359 €en 2015, 376 532 en 2016, 253 372 en 2017 et 190 042 € en 2018.
[X] [A] (domicilié dans les Alpes-Maritimes), directeur, a déclaré des salaires du même ordre versés par la société SA MAG ASSET MANAGEMENT.
[M] [W] (domiciliée en Haute Savoie), qui déclare travailler comme responsable administrative au sein de la société SA MAG ASSET MANAGEMENT, dispose de la signature collective à deux dans la société .
En conséquence il a pu être présumé que la société disposait d’un centre opérationnel et décisionnel en France, le fait que Mme [U], M. [C], M. [A] et Mme [W] soient déclarés comme salariés de droit suisse étant inopérant quant au lieu d’exercice de leur activité.
Enfin le juge des libertés et de la détention a relevé que [Z] [N], [H] [V], [L] [R] et [D] [J], tous domiciliés dans les Alpes-Maritimes, déclarent être salariés de la société SA MAG ASSET MANAGEMENT. S’il ressort des pièces produites par les appelantes que la société SA MAG ASSET MANAGEMENT emploie également des salariés à ses deux adresses à [Localité 7], il n’en demeure pas moins que les pièces versées révèlent également que parmi les gestionnaires de fortune, la grande majorité réside à l’étranger dont 13 en France.
La société SA MAG ASSET MANAGEMENT fait partie avec la SAS TAILOR CAPITAL (société française ayant son siège à [Localité 10]) et la société NECKER GESTION PRIVEE d’un groupe de sociétés de gestion.
Au 31 décembre 2014 le capital de la société SAS TAILOR CAPITAL était détenu à 25 % par [B] [T] et à 7,34 % par la société MAG ASSET MANAGEMENT et depuis le 31 décembre 2015 la société de droit mauricien FINANCIERE AVA (ayant son siège social à la même adresse que la société NECKER GESTION PRIVEE) en détient 32,34 % des actions.
La société SA MAG ASSET MANAGEMENT a perçu des commissions de la société TAILOR CAPITAL de 4 058 831 € en 2014 et de plus de 2 millions en 2015, 2016 et 2017 et des commissions d’autres sociétés françaises pour des montants très inférieurs. Si les appelantes justifient du fait que les flux avec la société TAILOR CAPITAL correspondent à des rétrocessions de commissions suite à des souscriptions des fonds de la société TAILOR CAPITAL pour des clients, il pouvait être présumé qu’une partie des souscriptions étaient faite pour des clients français.
Il n’est d’ailleurs pas contesté par les appelantes que la société SA MAG ASSET MANAGEMENT exerce une partie de son activité au profit de clients français. En outre, comme le constate le directeur général des finances publiques, l’extrait du rapport d’audit LBA du 29 mars 2019, produit au soutien de l’appel, mentionne que les principaux pays d’activité des équipes de la société SA MAG ASSET MANAGEMENT sont Monaco, l’Italie et la France, ce que confirment les attestations des établissements bancaires qui témoignent que, si la clientèle française ne représente pas l’essentiel des avoirs et actifs gérés par la société SA MAG ASSET MANAGEMENT, la France est le second pays de résidence des clients.
Le rappel par les sociétés appelantes des règles “Cross Border”, interdisant notamment le démarchage actif et la réalisation d’opérations auprès de clients français sur le territoire français n’est enfin pas de nature à démontrer l’absence réelle d’activité sur le territoire.
Au regard de l’ensemble de ces éléments le juge des libertés et de la détention a pu valablement considérer que si, certes, la société SA MAG ASSET MANAGEMENT disposait en Suisse de locaux et de moyens humains pour exercer une partie de son activité, il pouvait être aussi présumé qu’elle développait une partie de son activité en France à partir de son centre décisionnel et de son équipe de gestionnaires de fortune, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes.
Sur les présomptions de fraude à l’égard de la société NECKER GESTION PRIVEE
La société NECKER GESTION PRIVEE, installée à l’Ile Maurice depuis 2014, est une société dont les activités sont réalisées hors du pays.
Elle est située [Adresse 8]. Selon la base de données ORBIS, 54 sociétés sont répertoriées à cette adresse.
La société NECKER GESTION PRIVEE indique sur son site internet une autre adresse de contact : Suite [Adresse 4].
Les deux adresses correspondent également aux adresses de la société JURISTAX, société fournissant des services d’administration de fonds à l’Ile Maurice.
Pour l’expédition de correspondances en 2017 et 2018 la société NECKER GESTION PRIVEE indique l’adresse “[Adresse 12]”, adresse commune à celles de la société de gestion de fortune PLURIGESTION et de la société NECKER FUND MANAGEMENT LLC.
La société NECKER GESTION PRIVEE est présidée par [B] [T]. [E] [Y], directeur et [RB] [G], directeur commercial, domiciliés à l’Ile Maurice, ont été salariés de la société MAG ASSET MANAGEMENT.
La société NECKER GESTION PRIVEE exerce une activité de gestion de fortune et de conseil en investissement, similaire à celle de la société MAG ASSET MANAGEMENT.
Comme la société MAG ASSET MANAGEMENT, elle a perçu des commissions de la part de la société TAILOR CAPITAL (895 546 € en 2017).
Enfin il résulte des documents fournis par l’administration fiscale qu’elle envoie des documents vers la France, à destination de particuliers ou de banques. Mme [U], gestionnaire de fortune domiciliée en France de la société MAG ASSET MANAGEMENT, précédemment citée, a notamment été destinataire de tels documents.
La société NECKER GESTION PRIVEE, créée en 2014, ne déclare des salariés que depuis mars 2016 et des gestionnaires de fortune que depuis 2019. L’administration fiscale relève à juste titre que les appelantes, pour justifier de locaux propres à l’exploitation à l’Ile Maurice, verse un contrat de juillet 2016 de mise à disposition de locaux par la société OMEGA, fournisseur de services, pour des locaux composés d’un seul bureau et d’une salle de réunion pour 4 personnes et un contrat de bail de juin 2019.
Il a pu dans ces conditions, être présumé que la société NECKER GESTION PRIVEE n’avait bénéficié de moyens matériels et humains en adéquation avec son activité à l’Ile Maurice que depuis 2019 et avait pu développer une partie de son activité auprès de clients français en ayant recours à du personnel de la société MAG ASSET MANAGEMENT, situé sur le territoire français, sans souscrire les déclarations fiscales correspondantes.
Sur la déloyauté de l’administration :
Les sociétés SA MAG ASSET MANAGEMENT et NECKER GESTION PRIVEE font valoir que l’administration n’a pas produit les éléments à décharge, qu’elle aurait pu obtenir par l’échange de renseignements sur la base de conventions fiscales bilatérales conclues avec la Suisse et l’Ile Maurice.
Mais comme le répond justement le directeur général des finances publiques, aucun texte n’impose au juge de vérifier si l’administration pouvait recourir à d’ autres modes de preuve. Pour permettre la mise en oeuvre d’une procédure de visite domiciliaire, l’article L. 16 B exige seulement l’existence de présomptions de fraude à l’impôt sur le revenu, sur les bénéfices où à la TVA, par l’un des agissements qu’il prévoit et le juge apprécie souverainement l’existence de ces présomptions sans être tenu de s’expliquer sur la proportionnalité de la mesure qu’il ordonne.
Le moyen sera également rejeté.
L’ensemble des moyens étant écarté, il convient de confirmer l’ordonnance entreprise.
Les sociétés SA MAG ASSET MANAGEMENT et NECKER GESTION PRIVEE qui succombent au litige seront déboutées de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge de l’administration fiscale les frais, non compris des dépens, qu’elle a exposés pour la présente procédure. Il convient de lui allouer à ce titre la somme de 1 000 €.
Les sociétés SA MAG ASSET MANAGEMENT et NECKER GESTION PRIVEE supporteront en outre les dépens de l’instance.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement,
Déclarons recevable l’appel formé par la société SA MAG ASSET MANAGEMENT et la société NECKER GESTION PRIVEE contre l’ordonnance d’autorisation du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nice en date du 12 juin 2019 ;
Confirmons ladite ordonnance ;
Rejetons en conséquence les demandes de restitution et d’interdiction d’utilisation des pièces saisies ;
Déboutons la société SA MAG ASSET MANAGEMENT et la société NECKER GESTION PRIVEE de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons la société SA MAG ASSET MANAGEMENT et la société NECKER GESTION PRIVEE à payer au directeur général des finances publiques la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamnons la société SA MAG ASSET MANAGEMENT et la société NECKER GESTION PRIVEE aux dépens.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE