Secret des correspondances : 27 septembre 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 16-23.086

·

·

Secret des correspondances : 27 septembre 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 16-23.086
Je soutiens LegalPlanet avec 5 ⭐

27 septembre 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
16-23.086

COMM.

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 septembre 2017

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 1199 F-D

Pourvoi n° Z 16-23.086

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société Galerie X…, société par actions simplifiée, dont le siège est […]                     ,

2°/ M. Maurizio X…, domicilié […]                           ,

contre l’ordonnance rendue le 16 août 2016 par le premier président de la cour d’appel de Versailles, dans le litige les opposant :

1°/ à La Direction Nationale d’Enquêtes Fiscales, dont le siège est […]                                ,

2°/ au directeur général des finances publiques, domicilié […]                         ,

défendeurs à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 4 juillet 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Y…, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Y…, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Galerie X…, de M. X…, de la SCP Foussard et Froger, avocat de la Direction Nationale d’Enquêtes Fiscales et du directeur général des finances publiques, l’avis de M. Z…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’ordonnance attaquée, rendue par le premier président d’une cour d’appel (Versailles,16 août 2016), que, le 12 juin 2015, un juge des libertés et de la détention a, sur le fondement de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, autorisé des agents de l’administration fiscale à effectuer une visite avec saisies dans des locaux et dépendances sis au Vésinet, susceptibles d’être occupés notamment par M. X… et les sociétés Galerie X…, Dickens Corporation Ltd, Hule Ltd et Targetplan Ltd, afin de rechercher la preuve de la fraude de la société Galerie X… au regard de l’impôt sur les bénéfices ; que cette dernière société et M. X…, son président, ont relevé appel de cette autorisation ;

Attendu que la société Galerie X… et M. X… font grief à l’ordonnance de confirmer l’autorisation de visite avec saisies alors, selon le moyen :

1°/ que saisi d’une contestation de la licéité des éléments d’information ou documents fournis au juge des libertés et de la détention par l’administration fiscale, le premier président doit vérifier qu’ils sont obtenus et détenus par cette dernière de manière licite, dès lors qu’ils ont fondé les présomptions de fraude retenues par le juge des libertés et de la détention, de manière exclusive et déterminante ou non ; qu’en l’espèce, il résulte de l’ordonnance attaquée qu’en appel, la société Galerie X… et M. X… se sont prévalus de l’origine illicite de la pièce n° 35 fournie par l’administration fiscale à l’appui de sa requête, et sur laquelle le juge des libertés et de la détention s’est fondé pour autoriser les visites et saisies litigieuses, parce que cette pièce viole le secret de la correspondance et contient de fausses informations données par la poste sur les destinataires de courrier au domicile de M. X… au Vésinet, ce qui a justifié le dépôt d’une plainte pour faux et usage de faux contre la poste ; qu’en limitant son contrôle à la régularité de la mise en oeuvre du droit de communication prévue par les articles L. 81, L 83, L. 85 et L. 102 B du livre des procédures fiscales et aux documents et informations ayant fondé les présomptions de fraude de manière exclusive et déterminante, bien qu’il lui incombât de vérifier si la pièce n° 35 sur laquelle le juge des libertés et de la détention a fondé en particulier les présomptions de fraude litigieuses contre la société Galerie X…, violait ou non le secret de la correspondance et contenait ou non de fausses informations, le président délégué a méconnu son obligation de contrôle et a violé les dispositions de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales ;

2°/ que la transmission par la poste, au titre du droit de communication de l’administration fiscale, de renseignements faux ou couverts par le secret de la correspondance, ne peut rendre licite leur détention et leur utilisation par les agents de l’administration à l’appui d’une demande de visites et saisies domiciliaires ; qu’en l’espèce, il résulte de la pièce numérotée 35, produite par l’administration à l’appui de sa requête au juge des libertés et de la détention, qui comprend la lettre de l’administration adressée à la poste de Croissy-sur-Seine et la réponse sur celle-ci de la poste, que non seulement M. X…, ses deux fils et la société Galerie X… mais aussi les sociétés Dickens Corporation Ltd, Hule Ltd et Targetplan Ltd, sont destinataires de correspondances au […]                          , à l’exclusion de toute autre personne ; que, par ailleurs, les demandeurs faisaient valoir, à l’appui de leurs conclusions d’appel, que la pièce n° 35 violait le secret de la correspondance et contenait de fausses informations, les sociétés Dickens Corporation Ltd, Hule Ltd et Targetplan Ltd, ne recevant pas de courrier au domicile de M. X… au Vésinet et Mme A…, précédente locataire, non visée dans la réponse de la poste, recevant encore régulièrement du courrier d’Axa ; qu’en retenant néanmoins que la pièce n° 35 sur la base de laquelle le juge des libertés et de la détention s’est prononcé, avait été obtenue de manière licite, sous prétexte que les demandeurs ne contestaient pas la régularité de l’exercice par l’administration de son droit de communication, bien que la transmission de ces renseignements par la poste n’ait pu suffire à leur conférer une origine apparemment licite, le président délégué de la cour d’appel de Paris (en réalité : Versailles) a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L. 16 B, de l’article 9 du code civil et de l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits d de l’homme et des libertés fondamentales ;

3°/ que la mise en oeuvre de la procédure de visites et saisies domiciliaires prévue par l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales suppose l’existence de présomptions de fraude à l’établissement ou au paiement de l’impôt sur le revenu, de l’impôt sur les bénéfices ou de la TVA, résultant uniquement d’opérations d’achats ou de ventes sans facture, de l’utilisation ou de la délivrance de factures ou documents ne se rapportant pas à des opérations réelles, de l’omission volontaire d’écritures comptables ou encore de la passation volontaire d’écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts français ; qu’en l’espèce, il résulte de l’ordonnance confirmative attaquée que les sociétés Dickens Corporation Limited et Hule Limited n’auraient qu’une simple adresse de domiciliation en Angleterre où elles ne recevraient ou d’où elles n’expédieraient le plus souvent pas des oeuvres d’art achetées ou vendues à la Galerie X…, qu’elles ne disposeraient pas des moyens matériels et humains nécessaires à leur activité et qu’elles recevraient en France du courrier au domicile de M. X…, enfin, qu’elles auraient des dirigeants ou associés communs avec la société Targetplan, propriétaire puis vendeur de l’habitation de M. X… au Vésinet ; qu’en tirant comme conséquence de ces constatations que les sociétés Dickens Corporation Ltd et Hule Ltd s’interposeraient entre la société Galerie X… et ses partenaires commerciaux afin de majorer ses charges et minorer ses recettes pour diminuer ses bases taxables à l’impôt sur les sociétés, le président délégué de la cour d’appel de Versailles n’a pas caractérisé l’existence de présomptions de fraude à l’encontre de la société Galerie X…, faute d’avoir constaté l’existence de présomptions de liens de dépendance ou capitalistiques entre cette dernière ou son associé et dirigeant et les deux sociétés britanniques Dickens Corporation et Hule ou la société Targetplan, de sorte qu’il a privé sa décision de base légale au regard des exigences de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales et de l’article 561 du code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que l’ordonnance constate que la pièce litigieuse est constituée de la copie de la demande faite, par un inspecteur des finances publiques, au responsable du centre de distribution du courrier afin de déterminer les destinataires du courrier postal à une certaine adresse au Vésinet, les conditions de distribution, l’existence éventuelle d’un ordre de réexpédition et la réponse portée sur le même document ; qu’elle relève que la société Galerie X… et M. X… se bornent à critiquer la réponse des agents de la poste aux questions posées et que la plainte déposée auprès du procureur de la République des chefs de faux et d’atteinte au secret des correspondances est dirigée contre la poste et certains de ses agents ; qu’en cet état, c’est à bon droit qu’elle retient qu’il n’est pas établi que les informations communiquées à l’administration fiscale ont été obtenues de façon illicite et que les demandeurs ne peuvent reprocher à la poste et à ses agents une irrégularité dans la mise en oeuvre des dispositions de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales ;

Et attendu, en second lieu, que, par motifs propres et adoptés, l’ordonnance relève que les destinataires des oeuvres expédiées par la société Galerie X… sont majoritairement situés hors du territoire national, telles les sociétés britanniques Dickens Corporation Ltd et Hule Ltd qui sont installées à une adresse de domiciliation et n’ont déclaré, depuis leur création jusqu’au 30 novembre pour la première et 31 décembre 2013 pour la seconde, ni chiffre d’affaires ni charge salariale aux termes de la consultation de banques de données internationales ; qu’elle ajoute que la comparaison du livre de police de la société Galerie X… et du fichier informatisé de traitement de la taxe sur la valeur ajoutée intra- communautaire de la direction générale des douanes et des droits indirects révèle des discordances entre 2012 et 2014, de nombreuses oeuvres d’art en provenance de ces sociétés britanniques figurant sur le livre de police, cependant que le fichier ne fait état d’aucune vente et d’un seul achat avec elles, et que les courriers échangés avec la société Galerie X…, justifiés par des factures, confirment l’existence de multiples ventes et achats ; que le premier président a pu déduire de ces constatations et appréciations l’existence de présomptions selon lesquelles les sociétés Dickens Corporation Ltd et Hule Ltd s’interposaient sans justification entre la société Galerie X… et ses partenaires commerciaux afin de majorer ses charges et/ou minorer ses recettes, diminuant ainsi ses bases taxables à l’impôt sur les sociétés, sans que celle-ci procède à la passation régulière de ses écritures comptables ;

D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x