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27 octobre 2011
Cour d’appel de Paris
RG n°
11/05265
Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 2 – Chambre 1
ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2011
AUDIENCE SOLENNELLE
(n° 316 , 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 11/05265
Décision déférée à la Cour : décision du 22 Février 2011 rendue par le Conseil de discipline de l’ordre des avocats de PARIS
DEMANDEUR AU RECOURS:
M. [H] [D]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 08 Septembre 2011, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant la Cour composée de :
– Monsieur François GRANDPIERRE, Président
– Madame Jeannine DEPOMMIER, Président
– Madame Brigitte HORBETTE, Conseiller
– Madame Dominique GUEGUEN, Conseiller
– Madame Marguerite-Marie MARION, Conseiller
qui en ont délibéré
GREFFIER, lors des débats : Melle Sabine DAYAN
MINISTERE PUBLIC :
L’affaire a été communiquée au Procureur Général, représenté lors des débats par Mme Jocelyne KAN, Substitut du Procureur Général qui a fait connaître son avis.
M. LE BATONNIER DE L’ORDRE DES AVOCATS DU BARREAU DE PARIS ES-QUALITES D’AUTORITE DE POURSUITE:
Ordre des Avocats de Paris
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Albert CASTON,
Avocat au Barreau de Paris
Toque P 156
DÉBATS : à l’audience tenue le 08 Septembre 2011, ont été entendus :
– Mme [Z] [K], en son rapport
– M. [H] [D], en ses observations et demandes
– Me Albert CASTON, avocat représentant M. le Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Barreau de Paris ès-qualités d’autorité de poursuite, en ses observations
– Mme Jocelyne KAN, substitut du Procureur Général, en ses observations
– M. [H] [D], en ses nouvelles observations, ayant eu la parole en dernier
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur François GRANDPIERRE, président et par Melle Sabine DAYAN, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
* * *
Par arrêté en date du 22 Février 2011, notifié à l’intéressé le 22 février 2011, le conseil de discipline de l’ordre des avocats de Paris a dit que M. [H] [D] s’est rendu coupable de manquements aux principes essentiels de confraternité, de délicatesse et de modération, a en conséquence violé les dispositions de l’article 1.3 du Règlement Intérieur du Barreau de Paris et a prononcé à son encontre la sanction de l’avertissement.
La COUR :
Vu le recours formé à l’encontre de cet arrêté par M. [H] [D] par déclaration enregistrée au greffe selon procès-verbal en date du 9 mars 2011,
Vu les conclusions déposées le 15 juillet 2011 et soutenues à l’audience par M. [D], qui demande à la cour d’infirmer l’arrêté en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
-d’annuler la décision de poursuites et la citation introductive de la procédure disciplinaire,
-de dire irrecevable la demande de poursuite disciplinaire devant les premiers juges faute d’avoir été précédée d’un rapport disciplinaire impartial et contradictoire,
subsidiairement au fond,
-de le relaxer des fins de la poursuite disciplinaire exercée à son encontre,
avec condamnation du bâtonnier de l’ordre des avocats de Paris, ès qualités, à lui payer la somme de 10 000 € pour abus manifeste de son pouvoir disciplinaire, la somme de 3000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer les entiers dépens,
Entendus en leurs observations orales à l’audience publique du 8 septembre 2011, M. [D], M. le représentant de l’Autorité de poursuite, M. le procureur général, M. [D] ayant été mis en mesure de répliquer et ayant eu la parole en dernier.
SUR CE :
Considérant que le recours de M. [D], formé dans le délai d’un mois de l’arrêté querellé, est recevable en la forme ;
Sur les moyens de nullité de la procédure disciplinaire :
Considérant que l’appelant, pour demander l’annulation de la décision de poursuite, de la citation introductive de la procédure disciplinaire, et invoquer l’irrecevabilité de la demande de poursuite, faute d’avoir été précédée d’un rapport disciplinaire impartial et contradictoire, développe l’argumentation suivante ;
Considérant que M. [D], rappelant que les pouvoirs exercés par le Bâtonnier en matière de poursuite disciplinaire sont des pouvoirs propres, fait valoir que dans son cas, le Bâtonnier en la personne de M. [F] a transféré son propre pouvoir et a cru devoir prendre des instructions auprès du délégué du barreau de Rouen, M. [N] [B], ancien bâtonnier, chargé au sein dudit barreau de suivre cette affaire, en lui écrivant une lettre du 1 er octobre 2009 à laquelle M. [B] a répondu par une lettre du 9 novembre 2009 en ces termes :
‘M. le bâtonnier [Y] [S] estime que la phrase de notre confrère [H] [D] ‘ il me semble cependant que le jugement implicite que vous émettez ainsi sur les compétences de notre confrère, rejoint, par sa sévérité, celui que je m’étais permis de formuler sur sa bonne foi’ ne peut rester sans suite’, ce qui suffirait à établir, selon l’appelant, que M. [B] n’a pas formulé une appréciation qui lui aurait été propre mais s’en est remis à celle de M. [Y] [S], plaignant ; que cette confusion des rôles, l’autorité de poursuite méconnaissant ses pouvoirs légaux et abdiquant ses pouvoirs entre les mains du plaignant, doit en conséquence entraîner la nullité des poursuites ;
Considérant, s’agissant de la citation, que M. [D] fait valoir qu’elle ne satisfait pas aux exigences posées par les dispositions claires de l’article 192 du décret du 27 novembre 1991, texte qui prévoit ‘qu’à peine de nullité, elle doit comporter l’indication précise des faits à l’origine des poursuites ainsi que la référence aux dispositions législatives ou réglementaires précisant les obligations auxquelles il est reproché à l’avocat poursuivi d’avoir contrevenu’ ; qu’il observe, ‘sur les termes et le ton des courriers incriminés’, qu’elle ne contient pas d’indication des passages ainsi incriminés et contrevient aux exigences de précision découlant de l’article 183 du décret précité, qu’elle ne fait état d’aucun texte prohibant l’utilisation du papier à en-tête professionnel dans une affaire privée, ce d’autant que la qualité d’avocat constitue à la fois un titre et une fonction, l’usage du titre d’avocat dans la vie sociale courante, même hors de tout contexte professionnel, n’ayant rien de répréhensible, que cette méconnaissance ne lui permet pas d’avoir efficacement connaissance des griefs qui lui sont faits et que la citation aurait dû viser l’article 1.4 du règlement intérieur du barreau de Paris, relatif à la discipline ;
Considérant, sur l’irrégularité de l’instruction, que M. [D] soutient que le rapporteur commis, Mme [O] [L], – bien que dûment informée par sa lettre du 3 juin 2010, du caractère irrégulier de la présence au dossier d’une lettre, adressée le 22 mars 2010 par M. [P] [G], coordinateur de l’autorité de poursuite, à M. [S], libellée comme suit :
‘dans cette affaire, je vous informe qu’une procédure disciplinaire a été ouverte à l’encontre de M. [D].
Cela étant, comme vous le savez, le conseil de l’ordre des avocats ne prend à l’encontre des confrères qui manquent à leurs obligations déontologiques que des sanctions disciplinaires d’ordre professionnel;
Si vous entendez que des mesures civiles ou pénales soient prises, il convient que vous saisissiez les juridictions de droit commun.’, dont l’appelant estime qu’elle est la réponse à une lettre de M. [S] à l’ordre des avocats pour réactiver la poursuite en faisant état de sa qualité de bâtonnier, alors qu’il était censé ne pas la suivre à ce titre dès lors qu’il était plaignant, – n’a pas accepté de donner suite à la demande de M. [D] de communication de la lettre adressée par M. [S] qu’il considère être une pièce essentielle et par une lettre du 8 juin 2010, a esquivé par une pirouette en lui confirmant que l’intégralité des pièces du dossier lui avait été communiquée et qu’il lui était loisible de consulter tout le dossier au greffe disciplinaire ; que le rapporteur aurait dû faire le nécessaire auprès de son confrère [G], nécessairement en possession de cette correspondance, que de même, il lui a demandé l’organisation d’une confrontation avec M. [S] et l’appréhension, au domicile de cet avocat, du dossier qu’il avait constitué pour son client, M. [T], demande restée sans suite de la part du rapporteur, censé accomplir sa mission dans l’équité et l’impartialité et en procédant aux actes d’instruction réclamés par l’avocat poursuivi ; que M. [D] conclut pour ces motifs, faute de rapport disciplinaire établi selon les règles prescrites et comportant au surplus des appréciations téméraires à son endroit, sans qu’il n’ait à rapporter la preuve d’un grief, à la partialité manifeste du rapporteur, cause de nullité de l’instruction en application de l’article 6 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et à l’irrecevabilité par voie de conséquence de la demande de sanction portée devant le conseil de discipline ;
Considérant que l’arrêté déféré, saisi des mêmes moyens de nullité, en a débouté M. [D] par des motifs qui ne sont pas critiquables et que la cour approuve ;
Considérant qu’en effet, sur la nullité prétendue de la poursuite, lorsque M. [D] soutient que le Bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris aurait en l’espèce délégué son pouvoir propre d’engager la procédure disciplinaire au délégué du Bâtonnier de Rouen, lequel l’aurait lui-même subdélégué au Bâtonnier de Rouen, par ailleurs plaignant, il ne prend pas en compte la nature des faits à l’origine de la poursuite, relevant d’une difficulté déontologique intervenue non seulement entre deux confrères n’appartenant pas au même barreau, mais avec cette circonstance particulière supplémentaire que le confrère plaignant se trouve être le Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Barreau de Rouen ; que le Bâtonnier de l’ordre des avocats du Barreau de Paris, saisi dans une telle configuration, a donc pertinemment interrogé, avant d’engager les poursuites, non pas le plaignant lui-même, mais conformément à l’article 187 du décret du 27 novembre 1991, le représentant ad hoc du Conseil de l’Ordre du Barreau de Rouen, se trouvant être M. Le Bâtonnier [B], lequel s’est effectivement pour sa part adressé, avant de répondre au Bâtonnier de Paris, au Bâtonnier [S], non pas en sa qualité de Bâtonnier mais en sa qualité de plaignant, ce afin de connaître, comme dans toute éventuelle poursuite déontologique, la position et l’avis du plaignant ; que ces circonstances ne sauraient caractériser une quelconque délégation par l’Autorité de Poursuite de ses pouvoirs propres, ladite Autorité n’étant jamais liée par la teneur des avis qu’elle recueille et pas davantage dans cette affaire, étant observé qu’ aucune des correspondances échangées, figurant toutes au dossier disciplinaire dont M. [D] a eu connaissance dans son intégralité, n’est susceptible de laisser présumer qu’il en ait été en l’occurrence différemment ;
Considérant en second lieu que la citation délivrée à M. [H] [D] le 7 octobre 2010, rappelant la situation administrative de M. [D], lequel a prêté serment le 7 février 1990, a été admis au tableau le 11 mars 1997 et exerce à titre individuel, a porté à sa connaissance, dans les termes ci-après littéralement rapportés, les faits fondant la poursuite;
Les faits :
Le 12 juin 2009, l’ordre des avocats à la cour d’appel de Rouen a, sous la signature d’un ancien bâtonnier de l’ordre, M. [N] [B] – l’affaire intéressant le bâtonnier en exercice du barreau de Rouen M. [Y] [S] – saisi le bâtonnier du barreau de Paris d’une réclamation dirigée contre M. [H] [D], auquel il faisait essentiellement grief d’avoir utilisé son papier à en- tête professionnel à l’occasion d’un litige entièrement privé l’opposant à M. [T], président de la société Hippique et Urbaine de Rouen, par ailleurs médecin de son état, dont le bâtonnier de Rouen, M. [Y] [S] était le conseil.
Le plaignant considérait en outre que M. [D], à cette occasion, avait manqué à la loyauté, la modération et la courtoisie.
Par lettre en date du 3 juillet 2009, le bâtonnier du barreau de Paris a demandé à M. [D] de cesser d’utiliser son papier à en-tête et de faire état de sa qualité d’avocat dans le litige qui l’opposait au docteur [T], lui faisant grief par ailleurs, d’avoir à tort donné des leçons de déontologie au bâtonnier [S], et lui conseillait en outre vivement de se faire assister d’un avocat dans le cadre du litige privé qui l’opposait au docteur [T].
M. [H] [D] a refusé de se rendre à l’invitation de M. le bâtonnier, de même qu’il a refusé expressément de répondre à la convocation qui lui a été adressée par la commission de déontologie le 4 décembre 2009 ;
Considérant que l’acte de citation poursuit en indiquant que le bâtonnier a décidé, par un acte de saisine et d’ouverture de l’instance disciplinaire en date du 22 mars 2010, d’ouvrir une procédure disciplinaire à l’encontre de M. [H] [D], avocat pour :
-manquement aux principes essentiels édictés à l’article 1.3 du Règlement intérieur du barreau de Paris et notamment ceux de confraternité, délicatesse et courtoisie,
acte de saisine notifié à M. [H] [D] par courrier recommandé avec demande d’avis de réception en date du 22 Mars 2010 ;
Que l’acte de citation comporte un paragraphe intitulé ‘ discussion’, qui indique :
En effet, il est constant que le litige opposant M. [D] à la société Hippique et Urbaine de Rouen puis à son président, le docteur [T], est d’ordre privé.
Dès lors il ne fait aucun doute que M. [D] ne devait, en aucune façon, dans les lettres qu’il a adressées directement à la partie adverse ou à l’avocat de cette dernière, le bâtonnier [Y] [S], utiliser son papier à en-tête professionnel.
Nonobstant le caractère privé du litige, et par application de l’article 183 du décret du 27 novembre 1991, M. [D] a néanmoins manqué à plusieurs des principes essentiels de l’exercice de la profession.
A cet égard, les termes et le ton des courriers qu’il a adressés au bâtonnier [S] les 10 mars et 15 mars 2009, comme ceux qui lui étaient destinés dans les courriers qu’il a adressés en réponse aux demandes d’explication du bâtonnier sont de nature à constituer un manquement aux principes essentiels édictés à l’article 1.3 du Règlement Intérieur du barreau de Paris et notamment ceux de confraternité, modération et délicatesse édictés à l’article 1.3 du barreau de Paris.
Considérant que la lecture de la citation délivrée, telle que ci-dessus reproduite, montre qu’elle satisfait amplement aux dispositions de l’article 192 du décret du 27 novembre 1991; qu’en particulier, elle n’emploie pas de termes généraux mais permet à M. [D] de connaître les griefs qui lui sont faits ; que sur son degré de précision et sur l’absence de visa d’un texte précis auquel il aurait contrevenu, c’est inexactement que l’appelant, invoquant à l’appui de ses dires l’article 183 dudit décret, prétend d’une part que tous les passages incriminés de ses propres correspondances auraient dû être visés dans la citation et que d’autre part, aucun texte n’interdit l’usage à titre privé du papier à en-tête professionnel ; que l’appelant raisonne comme s’il lui était reproché des infractions comme en matière de droit de la presse ou à caractère pénal, alors que les manquements déontologiques d’un avocat se caractérisent au regard des principes essentiels de sa profession mentionnés dans le Règlement Intérieur que l’intéressé connaît parfaitement et s’est engagé à respecter ; qu’enfin l’absence de visa de l’article 1.4 du Règlement Intérieur ne fait pas grief à M. [D] et ne saurait entraîner la nullité de la citation, ce texte, intitulé 1.4 Discipline, ainsi libellé :
‘La méconnaissance d’un seul de ces principes, règles et devoirs, constitue en application de l’article 183 du décret du 27 novembre 1991 une faute pouvant entraîner une sanction disciplinaire.’ se trouvant de facto à la connaissance de l’appelant lorsqu’il fait l’objet d’une citation délivrée au visa de l’article 1.3 du Règlement Intérieur à lui seul parfaitement explicite ;
Considérant, sur la régularité de l’instruction, que M. [D] soutient en premier lieu qu’il a en vain demandé au rapporteur de se faire produire le courrier, qu’il suppose circonstancié, qui a été envoyé par M. Le Bâtonnier [S] et auquel M. [G], coordinateur de l’autorité de poursuite, a nécessairement répondu le 22 mars 2010, ce qu’il déduit des termes utilisés dans le courrier qu’il considère constituer une réponse ; que toutefois l’existence même d’un tel courrier en demande, dont la production aurait éventuellement pu être utile durant l’instruction disciplinaire, n’est ni établie ni même plausible, dès lors que la réponse du 22 mars est une lettre -type adressée aux plaignants ; que le rapporteur ne saurait en conséquence se voir reprocher de n’avoir pas tenté d’obtenir à tout prix une correspondance inexistante ; qu’en second lieu, l’appelant ne saurait reprocher au rapporteur l’absence de confrontation, la décision négative de ce dernier sur le fait d’entendre le plaignant ou de le confronter relevant de son pouvoir d’appréciation et n’ayant pas causé grief à M. [D] au regard des faits matériellement parfaitement constants de l’espèce, qu’il est au surplus heureux que le rapporteur ait bien évidemment refusé de donner suite à la demande non seulement infondée mais même parfaitement irrégulière formée auprès de lui par M. [D] allant jusqu’à souhaiter une appréhension au domicile de M. [S] du dossier constitué pour son client, M. [T] ; qu’enfin, le rapporteur, conformément à sa mission, a donné son avis sur l’attitude de M. [D], qu’il ne saurait lui être pour ce seul motif, reproché un manque d’impartialité par l’appelant, lequel, à tort, estime pouvoir se livrer à une analyse par le menu de tous les termes utilisés ou de l’appréciation portée, termes au demeurant parfaitement courtois tant en eux-mêmes que pour l’intéressé, ce qui ne justifie pas de s’appesantir davantage sur cette simple argumentation, non susceptible d’invalider en quelque manière l’instruction disciplinaire; qu’en conséquence, M. [D] sera débouté de tous ses moyens de nullité ;
Sur le fond :
Considérant que l’appelant conteste avoir commis une faute en utilisant son papier à en-tête d’avocat alors qu’il n’était pas dans l’exercice de ses fonctions, aucun texte du règlement intérieur du barreau de Paris ne prohibant une telle utilisation et n’étant pour ce motif visé, d’autant qu’en l’espèce, ses interlocuteurs ne pouvaient se méprendre sur la qualité en laquelle il agissait ; qu’à ce propos, il fait valoir que M. [S] est de mauvaise foi puisqu’il utilise lui-même un papier à en -tête de nature à tromper ses clients, voire des confrères ou des magistrats, sur son barreau principal de rattachement ; que l’extension des cas de prétendus manquements à des principes dits essentiels ne saurait satisfaire au principe de prévisibilité de la loi pénale, tel que posé à l’article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ;
Considérant que M. [D], dès lors qu’on lui reproche la correspondance par lui adressée le 10 mars 2009 à M. [S], souligne encore qu’il convient de la mettre en rapport avec les termes de la lettre à laquelle elle répond, que lui a adressé M. [S] ce même 10 mars 2009, conçue de manière intentionnellement blessante, dont en particulier la formule ‘ ne sachant à qui je m’adresse’ constitutive d’une impertinence puisque M. [S] le connaissait pour avoir été en relation d’affaires avec lui ; qu’il y est accusé de manière diffamatoire d’avoir violé le secret des correspondances entre avocats et d’avoir mis en avant sa qualité d’avocat dans le différend privé l’opposant à M. [T], se terminant par la remarque ‘ une affaire privée qui concerne votre inscription dans un club d’équitation, à moins que vous ne pratiquiez ce sport en costume professionnel’ laquelle vise évidemment, en supposant qu’il pratiquerait l’équitation en robe d’avocat, à tenter de le ridiculiser ; que s’agissant de l’autre correspondance qu’on lui reproche, celle du 15 mars 2009, elle fait seulement suite à une lettre de M. [S] du 11 mars précédent, ainsi rédigée: ‘ la confiance que je vous ai témoignée me donne effectivement des pieds de plomb, en face d’un contradicteur polymorphe. Je vous dispense dorénavant de m’écrire ‘ mon cher confrère’. En revanche, je me réserve, pour vos écrits précédents, et peut-être pour vos oeuvres futures car je ne doute pas que vous soyez fécond et imaginatif, d’interroger telle autorité ordinale, afin que soient rappelées, dans l’intérêt général, les limites de la règle qu’en qualité d’avocat, vous semblez allègrement transgresser.’ ; qu’il voit dans ces affirmations une assertion diffamatoire, un ton injurieux, une lourde ironie dans le dernier paragraphe avec une menace claire de M. [S] d’abuser de sa qualité de bâtonnier pour déclencher des poursuites disciplinaires à son encontre s’il poursuivait son action ; qu’ainsi, il estime avoir répondu à de telles correspondances par des lettres appropriées, ne contenant pas, ce qu’admet l’arrêté déféré lui-même, d’éléments caractérisant une injure ou une diffamation et conteste le grief retenu toutefois par l’arrêté qui lui reproche d’avoir usé de persiflage, estimant que la profession d’avocat implique une certaine dose de polémique, considérée usuellement au barreau comme une arme oratoire parfaitement licite ; qu’enfin, M. [D], lorsque l’arrêté déféré entend le quereller sur les termes de sa correspondance adressée au bâtonnier de l’époque, pour sa défense, dont M. [S] n’a pas qualité à se prévaloir, voit dans un tel procédé la négation du droit à un procès équitable, dès lors qu’il doit pouvoir présenter librement sa défense, sans avoir à craindre d’être inculpé sur les termes de celle-ci ;
Considérant sur le fond que par des motifs également pertinents et que la cour approuve, l’arrêté déféré a retenu l’existence de deux manquements successifs de M. [D], commis dans les circonstances précises suivantes ; que l’arrêté rappelle qu’ayant souhaité s’inscrire à une leçon d’équitation auprès de l’association dénommée société hippique et urbaine de Rouen dont le président était le docteur [T] et ayant obtenu un rendez-vous, M. [D] s’est vu informé aux jour et heure convenus que la reprise à laquelle il s’était inscrit n’aurait pas lieu en raison de l’existence d’un ancien litige l’ayant opposé aux dirigeants de l’association ; qu’il a déposé deux plaintes à l’encontre de M. [T], auprès de l’ordre des médecins de Rouen le 8 janvier 2009, puis, cette plainte ayant été classée, auprès du conseil départemental de l’ordre des médecins le 9 février 2009 en alléguant divers manquements imputés au docteur [T] lui-même dans l’exercice de sa profession de médecin ; qu’une audience de médiation a été fixée au 11 mars, en prévision de laquelle M. [S], bâtonnier et avocat du Docteur [T], a indiqué à M. [D] qu’il sollicitait un renvoi de l’audience, étant indisponible à la date fixée, lequel renvoi a toutefois posé difficulté, au demeurant pour des motifs légitimes, ce qu’a fait valoir M. [D] ; que lors des échanges épistolaires ultérieurs, M. [D] s’est systématiquement adressé à M. [S] en utilisant son papier à en-tête professionnel, puis a écrit les courriers des 10 et 15 mars 2009 en des termes polémiques qui sont rappelés dans l’arrêté ; qu’il a ensuite écrit au bâtonnier de Paris, lequel l’avait interpellé le 3 juillet 2009 ; que dans les deux cas, il a usé d’un persiflage un peu dérisoire excédant essentiellement les limites de la modération : qu’il ne saurait invoquer pour sa défense que les termes des courriers de M. Le Bâtonnier [S] n’auraient pas été davantage conformes aux règles de courtoisie ou de modération qu’on exige de lui, cette situation, à la supposer même démontrée, mais qui n’est pas le débat, étant sans influence dès lors qu’elle ne saurait en aucune manière dispenser M. [D] de ses propres obligations de modération en particulier lorsqu’il est en mesure de constater qu’il a commis le premier une erreur en utilisant son papier à en tête professionnel; que l’arrêté, qui pour ce motif, ne repose en aucune manière ni sur la négation du droit à un procès équitable, ni sur un grief imprévisible, doit être approuvé dès lors qu’il se fonde d’abord, non pas sur le ton polémique auquel a eu recours mais dans un second temps M. [D], mais sur un manquement très précis et très concret, directement à l’origine de l’ouverture de la procédure disciplinaire, soit le fait que l’avocat ne pouvait utiliser son papier à en- tête professionnel pour traiter ses affaires privées, afin de prévenir ‘le mélange des genres’ ; que M. [D] a à cet égard incontestablement manqué aux principes tirés d’une règle ancienne et constante, manquement néanmoins anodin dans le contexte puisque dans le cadre de ses relations avec un autre avocat usant de la même qualité et désireux d’obtenir un renvoi à titre ‘ confraternel’ ; que ce manquement une fois relevé autorisait d’autant moins M. [D] à revendiquer de pouvoir user et abuser dans ses correspondances ultérieures du ton polémique, sauf à manquer de contrôle de sa plume et, de fait, de modération ; qu’en conséquence, l’arrêté déféré sera confirmé en ce qu’il a retenu deux manquements, le premier tenant à l’usage irrégulier du papier à en tête professionnel et le second en un manquement à la modération dans le ton des correspondances, ainsi que dans le quantum de la peine prononcée, soit l’avertissement, sanction qui est justifiée ;
Sur les demandes de M. [D] tenant au caractère abusif de la procédure :
Considérant que la nature même d’une poursuite disciplinaire n’autorise pas la personne poursuivie à la qualifier d’abusive et que M. [D] sera débouté de toutes ses demandes présentées tant sur ce fondement qu’au titre d’une indemnité de procédure ou des dépens.
PAR CES MOTIFS :
Déboute M. [H] [D] de l’ensemble de ses moyens tant de nullité ou d’irrecevabilité que de fond, ainsi que de ses demandes de dommages et intérêts et d’indemnité de procédure,
Confirme l’arrêté entrepris en toutes ses dispositions.
Condamne M. [H] [D] aux dépens.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,