Secret des correspondances : 23 mars 2018 Cour d’appel de Paris RG n° 16/14089

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Secret des correspondances : 23 mars 2018 Cour d’appel de Paris RG n° 16/14089
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23 mars 2018
Cour d’appel de Paris
RG n°
16/14089

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 1

ARRÊT DU 23 MARS 2018

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 16/14089

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Mai 2016 -Tribunal de Grande Instance de MELUN – RG n° 15/01317

APPELANTS

Monsieur [T] [H]

né le [Date naissance 5] 1937 à [Localité 12]

demeurant [Adresse 4]

Représenté et assisté sur l’audience par Me Marie-alexandra VANKEMMELBEKE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0333

Madame [R] [H]

née le [Date naissance 6] 1951 à [Localité 11]

demeurant [Adresse 1]

Représentée et assistée sur l’audience par Me Marie-alexandra VANKEMMELBEKE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0333

Monsieur [X] [H]

demeurant [Adresse 7]

Représenté et assisté sur l’audience par Me Marie-alexandra VANKEMMELBEKE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0333

SCI VERDUN 24 prise en la personne de ses représentants légaux

N° SIRET : 348 245 168

demeurant [Adresse 3]

Représentée et assistée sur l’audience par Me Marie-alexandra VANKEMMELBEKE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0333

INTIMÉE

SARL FINANCIERE LMJ agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

N° SIRET : 433 187 705

ayant son siège au [Adresse 2]

Représentée par Me Alain FISSELIER de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044

Assistée sur l’audience par Me Benoit RAIMBERT de la SELARL SIMON ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0411

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 Février 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre

M. Dominique GILLES, Conseiller

Mme Christine BARBEROT, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame [V] [M] dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

– rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Dominique DOS REIS, président et par M. Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

Suivant acte sous seing privé du 23 mai 2014, M. [T] [H], assisté par son curateur, M. [X] [H], et sa s’ur, Mme [R] [H], ont vendu à la SARL Financière LMJ, moyennant le prix de 790.000 €, une propriété sise sur la parcelle cadastrée section [Cadastre 9], composée de divers bâtiments à usage de bureaux, d’atelier et d’habitation, donnés en location à une société Prochrome.

Cette vente a été contractée sous conditions suspensives’:

– de la signature, au plus tard le 30 juin 2014, d’un acte de vente de la parcelle contiguë, cadastrée section [Cadastre 8], entre la SCI Verdun 24, dont M. [T] [H] était le gérant, et la SARL Financière LMJ, pour le prix de 3.000 €,

– de l’obtention par la SARL Financière LMJ d’un ou plusieurs prêts bancaires pour un montant de 790.000 € sur une durée de 15 ans au taux d’intérêt de 3,5 % l’an, la SARL Financière LMJ devant déposer ses demandes de prêt avant le 31 juillet 2014 pour obtenir un financement au plus tard le 28 novembre 2014, la réitération par l’acte authentique devant intervenir au plus tard le 30 décembre 2014.

La vente de la parcelle cadastrée [Cadastre 8] a été convenue par acte sous seing privé du 15 octobre 2014 entre la SCI Verdun 24, représentée par son gérant, M. [T] [H], assisté de son curateur, M. [X] [H], et la société Financière LMJ.

La SARL Financière LMJ a obtenu un accord de financement de la BRED le 19 décembre 2014, qu’elle a notifié aux consorts [H] en demandant la réitération en la forme authentique des deux ventes, ce que les consorts [H] ont refusé au motif que les deux actes de vente étaient caducs, et un procès-verbal de carence a été dressé devant notaire le 19 février 2015.

C’est dans ces conditions que, suivant actes extra-judiciaires des 19 mars et 21 juillet 2015, la SARL Financière LMJ a assigné M. [X] [H] en sa qualité de curateur d'[T] [H], Mme [R] [H] (les consorts [H]) et la SCI Verdun 24 à l’effet voir constater la perfection des ventes de parcelles intervenues, d’en entendre ordonner la réitération par acte authentique et de condamner les défendeurs au paiement des clauses pénales contractuelles’;

Par jugement du 17 mai 2016, le tribunal de grande instance de Melun a’:

– ordonné aux consorts [H] de régulariser avec la SARL Financière LMJ l’acte authentique de vente portant sur la parcelle cadastrée [Cadastre 9] à [Localité 10] aux conditions fixées par le compromis de vente du 23 mai 2014, dans le délai d’un mois passé la signification du jugement,

– ordonné à la SCI Verdun 24 représentée par son gérant, M. [T] [H], et à M. [X] [H] en qualité de curateur de ce dernier, de régulariser un acte authentique de vente portant sur la parcelle cadastrée [Cadastre 8] sise à [Localité 10] aux conditions du compromis de vente signé le 15 octobre 2014 dans le délai d’un mois passé la signification du jugement,

– dit qu’à défaut de réalisation de l’acte réitératif dans le délai imparti, le jugement vaudrait vente aux conditions déterminées dans ces compromis,

– condamné in solidum les consorts [H] à payer à la SARL Financière LMJ la somme de 1.700 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens’;

rejeté toute autre demande.

Les consorts [H] ont relevé appel de ce jugement dont ils poursuivent l’infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions du 17 janvier 2018, de’:

au visa des articles 1134, 1341 et suivants, 1184, 1589, 1165, 1315 du code civil,

– constater que l’assignation en intervention forcée délivrée à M. [X] [H] en sa qualité de curateur et celle délivrée à M. [T] [H], en sa qualité d’ex-gérant de la SCI Verdun 24, ne sont pas régulières,

– constater qu’il s’agit d’une irrégularité de fond qui ne peut être couverte en cours de procédure,

– en conséquence, prononcer la nullité des assignations délivrées à ces parties,

– subsidiairement, sur le fond, constater que l’échange de mails intervenu le 27 novembre 2014 entre leur notaire, M. [F], et M. [E], notaire de la SARL Financière LMJ, est couvert par le secret professionnel des notaires,

– en conséquence, écarter ces mails des débats,

– constater que le refus de prêt notifié à la SARL Financière LMJ le 18 novembre 2014 et aux vendeurs le 27 novembre 2014 est intervenu dans les délais du compromis signé le 23 mai 2014,

– constater l’absence de tout accord écrit prorogeant les deux compromis signés,

– constater qu’en tout état de cause, l’assistance de M. [X] [H] par M. [T] [H] en qualité de curateur , a été omise à tous les stades de la procédure,

– en conséquence, prononcer la caducité des deux compromis signés entre les parties le 15 octobre 2014, le terme fixé dans l’acte étant extinctif,

– débouter la SARL Financière LMJ de ses demandes,

– la condamner au paiement à chacun d’entre eux de la somme de 10.000 € à titre de dommages-intérêts, la procédure engagée étant manifestement abusive, l’objectif poursuivi étant d’exercer une pression, une intimidation sur eux,

– condamner la SARL Financière LMJ à leur payer à chacun la somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.

La SARL Financière LMJ prie la Cour, par dernières conclusions du’7 février 2018, de’:

au visa des articles 1152, 1226, 1184, 1589 et 1382 du code civil,

– débouter les consorts [H] de toutes leurs demandes,

– dire que les conditions d’application de la clause pénale sont réunies,

– confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné la vente des parcelles cadastrées section [Cadastre 9] et [Cadastre 8],

– le réformer en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de clause pénale et condamner solidairement les consorts [H] à lui payer la somme de 79.000 € à ce titre, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation

– condamner la SCI Verdun 24 à lui payer la somme de 300 € au titre de la clause pénale contractuellement prévue, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation,

– condamner solidairement les consorts [H] et la SCI Verdun 24 à lui payer la somme de 6.029,42 € par mois à compter du 1er février 2015,

– condamner solidairement les mêmes à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en sus des dépens.

SUR CE

LA COUR

Sur la nullité des assignations

Les consorts [H] soutiennent que les assignations délivrées le 19 mars 2015 sont nulles car elles omettent d’attraire à l’instance M. [T] [H] en sa qualité du curateur de son père [X]’: ils font valoir qu’il s’agit d’une irrégularité de fond insusceptible de régularisation par l’appel en intervention forcée de M. [X] [H] suivant acte extra-judiciaire du 21 juillet 2015′;

Toutefois, par ordonnance du 23 novembre 2015, le juge de la mise en état a déclaré toutes les assignations délivrées le 19 mars 2015 aux consorts [H] régulières, incluant celle délivrée à la SCI Verdun 24 prise en la personne d'[T] [H], dès lors que son ordonnance vise les quatre procédures enrôlées sous les n° de RG 15/01320, 15/01317,15/02526 et 15.02527 dont il ordonne par ailleurs la jonction’;

En l’absence d’appel de cette ordonnance du juge de la mise en état, celle-ci a acquis force de chose jugée et la régularité des assignations ne peut plus être remise en cause devant la Cour’;

Il s’ensuit que la procédure est régulière ;

Sur la caducité de l’acte de vente

Les consorts [H] estiment que le secret des correspondances échangées entre notaires est intangible, en sorte que l’échange de mails entre notaires des 25 et 27 novembre 2014 ne peut fonder l’affirmation de la SARL Financière LMJ selon laquelle le délai de validité de la condition suspensive d’obtention de prêt aurait été prorogé au 30 décembre 2014 d’un commun accord entre parties’; en tout état de cause, ils font valoir que l’avenant de prorogation prévu dans ces mails n’a jamais été signé et en déduisent que les actes de vente sous condition suspensive d’obtention de prêt sont caducs ;

La SARL Financière LMJ répond que les mails échangés par chaque notaire avec son client ne sont pas couverts par le secret professionnel et soutient que, seule bénéficiaire de la condition suspensive d’obtention de prêt stipulée dans son intérêt exclusif, elle peut seule se prévaloir de sa non réalisation’;

L’acte de vente sous seing privé du 23 mai 2014 prévoit une condition suspensive d’obtention de prêt en indiquant qu’elle devra être réalisée au plus tard le 28 novembre 2014 et que «’l’acquéreur devra justifier de l’obtention ou de la non-obtention du ou des prêts avant le 31 juillet 2014, qu’à défaut d’en avoir apporté la justification dans le délai imparti, le vendeur aura la faculté de demander à l’acquéreur, par lettre recommandée avec avis de réception, de lui justifier du dépôt de la demande de prêt et que, dans le cas où l’acquéreur n’aurait pas apporté la justification requise dans un délai de huit jours de l’accusé de réception, le vendeur pourra se prévaloir de la caducité des présentes’»’; au chapitre «’Réitération Authentique’» il est encore précisé’: «’les conditions suspensives devront être levées dans le délai de réalisation des présentes [‘..] la date d’expiration de ce délai, ou sa prorogation, n’est pas extinctive mais constitutive du point de départ de la période à partir de laquelle l’une des parties pourra obliger l’autre à s’exécuter’»’;

Or, d’une part, la condition suspensive d’obtention de prêt étant stipulée au bénéfice exclusif de l’acquéreur, seule la société Financière LMJ pourrait se prévaloir de sa non-réalisation pour invoquer la caducité de l’acte de vente alors que, de leur côté, les consorts [H] devaient, pour établir la carence de la société Financière LMJ, la sommer de se présenter en l’étude d’un notaire pour réitérer la vente en la forme authentique, ce qu’ils n’ont pas fait, d’autre part, les consorts [H] n’ayant pas adressé à la société Financière LMJ la lettre recommandée avec avis de réception visée à l’acte sous seing privé, ils ne peuvent davantage se prévaloir de la caducité de l’acte de vente par suite de l’expiration du délai de réalisation de la condition suspensive d’obtention de prêt’;

Il s’ensuit que, sans qu’il soit nécessaire de rechercher si le délai de réalisation de la condition suspensive d’obtention de prêt a été ou non prorogé d’accord entre parties, il convient de confirmer le jugement en ce qu’il a dit la vente parfaite et en a ordonné la réitération’;

Sur le paiement des loyers,

L’acte sous seing privé du 23 mai 2014 indique, au chapitre «’Propriété-Jouissance’»’:

«’ L’acquéreur sera propriétaire du bien ci-dessus désigné à compter du jour de la réalisation de la vente par acte authentique et il en aura la jouissance par la perception des loyers, ledit bien étant loué, aux termes d’un contrat de bail sous seing privé en date du 5 mai 2006, au profit de la société Prochrome [‘.]’»’;

La société Financière LMJ fait valoir que, selon les accords des parties, la vente devait être réitérée en la forme authentique le 30 janvier 2015, que le refus des consorts [H] de signer l’acte authentique l’a privée à compter de cette date de la perception des loyers de la société Prochrome, d’un montant mensuel de 6.029,42 €, en sorte qu’elle réclame la condamnation des consorts [H] à lui régler, à compter du 1er février 2015, la somme mensuelle de 6.029,42 € jusqu’à la réitération de la vente en la forme authentique’;

Toutefois, les parties étant expressément convenues de transférer la propriété du bien litigieux, incluant le bénéfice du bail de la société Prochrome, à la date de signature de l’acte authentique, la société Financière LMJ sera déboutée de sa demande de paiement sans qu’il soit nécessaire de rechercher si cette prétention est ou non nouvelle en cause d’appel’;

Sur l’application de la clause pénale

L’acte de vente sous seing privé conclu entre les consorts [H] et la société Financière LMJ prévoit une clause pénale de 79.000 € qui n’apparaît pas manifestement excessive, du fait que le refus des consorts [H] de réitérer la vente a privé la société Financière LMJ de la perception des loyers de la société Prochrome depuis le 30 janvier 2015, date prévue pour la signature de l’acte authentique’;

Le jugement étant infirmé en ce qu’il a rejeté ce chef de demande de la société Financière LMJ, les consorts [H] seront condamnés à lui régler cette somme de 79.000 €, à laquelle il convient d’ajouter celle de 300 € prévue à l’acte de vente sous seing privé conclue entre la SCI Verdun 24 et la société Financière LMJ’;

En équité, les consorts [H] et la SCI Verdun 24 seront condamnés in solidum à payer à la société Financière LMJ la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Dit que l’ordonnance du juge de la mise en état ayant déclaré régulières les assignations délivrées par la société Financière LMJ est assortie de la force de chose jugée et que l’exception de nullité présentée par les consorts [H] est irrecevable,

Dit que la procédure est régulière,

Confirme le jugement, sauf en ce qu’il a débouté la société Financière LMJ de sa demande de paiement des clauses pénales assortissant les actes de vente sous seing privé,

Statuant à nouveau,

Condamne les consorts [H] à payer à la société Financière LMJ la somme de 79.000 € à titre de clause pénale,

Condamne la SCI Verdun 24 à payer à la société Financière LMJ la somme de 300 € à titre de clause pénale,

Déboute la société Financière LMJ de sa demande de paiement des loyers versés par la société Prochrome,

Condamne les consorts [H] et la SCI Verdun 24 in solidum à payer à la société Financière LMJ la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel,

Rejette toute autre demande,

Condamne les consorts [H] et la SCI Verdun 24 in solidum aux dépens d’appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,

 


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