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23 février 2023
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/04642
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 8
ARRET DU 23 FEVRIER 2023
(n° , 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/04642 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCDTP
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mars 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CRETEIL – RG n° F18/00793
APPELANTE
Madame [A] [D]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065
INTIMÉE
SOCIÉTÉ H2C
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Matthieu HUE, avocat au barreau de PARIS, toque : G746
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 15 Décembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Nathalie FRENOY, présidente
Madame Corinne JACQUEMIN, conseillère
Madame Emmanuelle DEMAZIERE, vice-présidente placée, rédactrice, qui en ont délibéré, un rapport ayant été présenté à l’audience par Madame Nathalie FRENOY, présidente, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Nolwenn CADIOU
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Madame Nathalie FRENOY, présidente et par Madame Nolwenn CADIOU, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Madame [A] [D] a été engagée par la société H2C par contrat à durée indéterminée du 22 septembre 2003 en qualité d’opératrice de saisie.
Par courrier du 19 juillet 2012, elle a été convoquée à un entretien préalable fixé au 3 août suivant.
Le 13 août 2012, la société H2C lui a notifié son licenciement pour faute grave.
Contestant son licenciement, Mme [D] a saisi le conseil de prud’hommes de Créteil le 26 décembre 2012.
Par jugement du 20 mars 2020, le conseil de prud’hommes de Créteil a :
-dit et jugé que le licenciement pour faute grave de Madame [D] repose sur une cause réelle et sérieuse,
-débouté Madame [D] de l’ensemble de ses demandes à titre principal, subsdiaires, infiniment subsidiaires et accessoires,
-débouté la société H2C de ses demandes, reconventionnelles et accessoires,
-dit que chaque partie assumera la charge de ses dépens.
Par déclaration du 15 juillet 2020, Mme [D] a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 4 novembre 2022, Mme [D] demande à la cour
-de la recevoir en ses demandes, fins et conclusions,
-de l’y déclarer bien fondée,
-de se déclarer valablement saisie par la déclaration d’appel, et dire que l’appelante a respecté les dispositions de l’article 901 4ème du code de procédure civile en ce qu’elle a bien visé dans la déclaration d’appel les chefs du jugement expressément critiqués,
-d’infirmer le jugement du 20 mars 2020 en ce qu’il a débouté Madame [D] de l’ensemble de ses demandes,
statuant de nouveau :
-de dire et juger que le licenciement de Madame [D] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
-de condamner la société H2C à verser à Madame [D] les sommes suivantes :
-43 876 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
-1 371 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied entre le 19 juillet 2012 et le 12 août 2012,
-137,10 euros au titre des congés payés afférents,
-3 656 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
-365,60 euros au titre des congés payés afférents,
-de débouter la société H2C de l’ensemble de ses demandes,
-de condamner la société H2C à verser à Madame [D] la somme de 5 000 euros, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Maître Etevenard.
Dans ses dernières conclusions notifiées et déposées au greffe par voie électronique le 23 septembre 2022, la société H2C demande à la cour :
-de juger que la déclaration d’appel de Madame [A] [D] n’a déféré à la Cour aucun chef de jugement critiqué,
-de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Madame [A] [D] de l’ensemble de ses demandes tendant à :
*condamner la société H2C à lui payer la somme de 43 876 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
*condamner la société H2C à lui payer la somme de 1 371 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied entre le 19 juillet 2012 et le 12 août 2012,
*condamner la société H2C à lui payer la somme de 137,10 euros au titre des congés payés afférents,
*condamner la société H2C à lui payer la somme de 3 656 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
*condamner la société H2C à lui payer la somme de 365,60 euros au titre de congés payés afférents,
*condamner la société H2C à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
*condamner la société H2C aux entiers dépens,
-d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la société H2C de sa demande de condamnation de Madame [A] [D] à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,
statuant à nouveau :
-de condamner Madame [D] au paiement d’une somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 15 novembre 2022 et l’audience de plaidoiries a été fixée au 15 décembre 2022.
Comme l’y autorise l’article 455 du code de procédure civile, la cour se reporte, pour un plus ample exposé des faits et la présentation des moyens des parties, à leurs écritures et au jugement dont appel.
MOTIFS DE L’ARRET
Sur l’effet dévolutif de l’appel :
La société H2C soutient que la déclaration d’appel ne permet pas d’identifier avec précision les demandes déférées à la cour, de telle sorte que l’effet dévolutif n’opère pas.
Au contraire, Mme [D] soutient que sa déclaration d’appel opère effet dévolutif dans la mesure où les chefs de jugement critiqués sont clairement mentionnés dans l’acte d’appel.
Aux termes de l’article 562 du code de procédure civile, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
La dévolution ne s’opère pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
En l’espèce, l’acte d’appel est ainsi libellé : ‘l’appel tend à obtenir la réformation ou l’annulation de la décision entreprise selon les moyens et prétentions qui seront développées dans les conclusions. Les chefs du jugement critiqués, étant rappelé les dispositions de l’article 455 al 2 du CPC selon lesquelles le jugement énonce la décision sous forme de dispositif sont énumérés ci-après : l’objet de l’appel porte sur le fait que le tribunal :
– a dit et jugé que le licenciement pour faute grave de Mme [A] [D] repose sur une cause réelle et sérieuse
-a débouté Mme [D] de l’ensemble de ses demandes à titre principal, subsidiaires, infiniment subsidiaires et accessoires. Plus généralement, l’appel porte sur toute disposition non visée au dispositif faisant grief à l’appelante, selon les moyens qui seront développés dans ses conclusions, étant précisé qu’elle y reprendra l’intégralité de ses moyens et demandes présentées en première instance et tels qu’énumérés dans la décision entreprise.’
Cette déclaration d’appel reprend précisément le dispositif du jugement et répond ainsi aux exigences posées par les dispositions de l’article 562 du code de procédure civile.
Elle opère effet dévolutif.
Le moyen sera donc rejeté.
Sur le licenciement pour faute grave :
La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible immédiatement le maintien du salarié dans l’entreprise.
Il appartient à l’employeur d’apporter la preuve de la gravité des faits fautifs retenus et de leur imputabilité au salarié.
En l’espèce , la lettre de licenciement est ainsi motivée :
« ( …) nous avons eu à déplorer de votre part les manquements suivants:
Fin janvier 2012, notre prestataire informatique, la société [R], nous a informés que vous vous étiez introduite dans le réseau informatique de la société et que vous aviez consulté des documents auxquels vous n’aviez pas accès, tels que des synthèses ou des statistiques des ventes de l’ensemble des sociétés dont H2C assure la gestion commerciale.
Cet accès n’a pu être effectué que de façon frauduleuse, dans la mesure où le code d’accès qui vous avait été remis ne vous permettait plus, depuis novembre 2011, d’accéder qu’aux bons de livraison et aux bons de cession.
Quelques jours plus tard, le 13 février 2012, un contrôle de grande ampleur a été effectué par le groupement d’intervention régionale du Val de Marne (« GIR 94 »), au cours duquel des dizaines d’enquêteurs se sont rendus simultanément dans nos bureaux à [Localité 4], ainsi que dans les surfaces commerciales de plusieurs magasins dont H2C assure la gestion commerciale.
Ces contrôles ont porté à la fois sur le respect de la législation du travail, mais également sur la réglementation des douanes, la réglementation de la concurrence et de la réglementation sociale.
A l’issue de ce contrôle, qui a duré plusieurs heures et s’est avéré particulièrement traumatisant pour les salariés qui y ont participé (sans évoquer le préjudice commercial et d’image qui en a résulté), les procès-verbaux dressés par les enquêteurs ont laissé apparaître qu’aucune infraction n’avait été commise.
Ultérieurement, il s’est avéré que ce contrôle avait été provoqué par votre soeur, Madame [R] [N] (responsable du magasin G. du centre commercial «Belle Epine ») et par Monsieur [R] [O] (responsable du magasin G. du centre commercial « [Localité 3] Soleil»).
Fin mars 2012, Monsieur [O], pétri de remords, a en effet avoué avoir participé à une machination contre la société H2C et ses dirigeants, dans le but de leur soutirer de fortes indemnités.
Ces faits ont été orchestrés par Monsieur [E] [V], conjoint de votre soeur, lequel se qualifie illégalement de « conseiller juridique» et a fait signer à Monsieur [O] et à votre soeur une convention lui assurant une rémunération sur l’ensemble des indemnités qui seraient allouées à ces derniers.
Dans ce cadre, votre soeur, Monsieur [O] et Monsieur [V] ont participé, de novembre 2011 à janvier 2012, à plusieurs réunions préparatoires au contrôle du 13 février 2012.
Au cours de ces réunions, de nombreux documents internes à la société ont été présentés par Monsieur [V] aux enquêteurs, dont des synthèses et des statistiques des ventes de l’ensemble des sociétés dont H2C assure la gestion commerciale.
Dans ce contexte, votre soeur a été licenciée le 2 mai 2012, notamment pour avoir participé à une entreprise de déstabilisation et de désorganisation de la société qui l’employait (la société F.), de sa holding H2C et des équipes qui les composent.
Une plainte pénale a, par ailleurs été déposée contre votre soeur et Monsieur [V] en date du 4 mai 2012, des chefs de tentative de chantage, subornation de témoin, menaces, harcèlement et exercice illégal de la profession d’avocat.
Ultérieurement, Monsieur [O] a présenté sa démission à effet du 30 juin 2012.
Quelques jours plus tard, il nous informait que certains des documents présentés par Monsieur [V] aux enquêteurs du GIR 94 lors des réunions préparatoires du contrôle du 13 février 2012 (tels que statistiques d’achats, statistiques de ventes, résultats et chiffres d’affaires par boutique) lui avaient été remis par vous.
Il est ainsi avéré que vous avez délibérément transmis à des personnes extérieures à l’entreprise des documents de nature confidentielle que vous avez prélevés sur notre réseau informatique en dépit de l’accès restreint dont vous disposiez.
Ces faits sont d’autant plus graves que vous avez sciemment facilité la préparation des infractions commises par votre soeur et Monsieur [V] (telles qu’elles résultent de la plainte déposée le 4 mai 2012), de sorte que vous vous en êtes rendue complice par aide et assistance.
Au demeurant, leur gravité découle également de votre état de récidive, puisque vous aviez déjà été sanctionnée d’un avertissement pour des faits identiques le 10 avril 2009.
Ces faits sont radicalement incompatibles avec votre maintien dans l’entreprise.
Au cours de notre entretien préalable, vous avez nié les faits et avez prétendu n’avoir aucun lien avec les actes commis par votre soeur et Monsieur [V]. Vos affirmations, contraires aux éléments de preuve en notre possession, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation de la situation.
Nous vous informons que nous avons, en conséquence, décidé de vous licencier pour faute grave.
Votre licenciement prend effet immédiatement à la date de première présentation de la présente lettre, sans indemnité de préavis ni de licenciement (‘)’
L’appelante fait valoir que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse dans la mesure où les griefs ne sont ni établis, ni constitutifs d’une faute grave.
Au contraire, la société H2C soutient que le licenciement de Mme [D] est fondé sur une faute grave, laquelle est constituée par son intrusion dans le système informatique de la société pour y consulter des éléments frappés de confidentialité auxquels elle n’avait normalement pas accès au regard de ses fonctions et la communication desdits documents à des personnes extérieures à l’entreprise.
Afin d’établir le grief qu’il reproche à la salariée dans la lettre de licenciement, l’employeur produit aux débats :
– un procés verbal établi par Maître [H], huissier de justice, dont il ressort une connexion de l’ordinateur intitulé ‘[A]’ les 18, 19 et 23 janvier 2012 sur le logiciel de gestion des points de vente de la société H2C (pièce 7) ;
– un courrier de M. [Z], responsable commercial de la société Solsys Informatique, indiquant que ses services ont constaté la connexion du poste ‘[A]’ aux données statistiques les jours suivants :
-mercredi 18 janvier 2012 : accès à la table de synthèse des ventes pour le mois de janvier 2012 (à 17h et à 17h30) ;
– jeudi 19 janvier à 11h11 et 17h39 : accès aux stats ventes CA pour les données du 18 janvier 2012 ;
-vendredi 20 janvier 2012 à 12h : accès à la synthèse des ventes du mois de janvier 2012 (pièce 9) ;
– les témoignages de Melles [R] et [X] et de M.[Z] indiquant que [A] [D] avait travaillé seule sur son ordinateur le 13 janvier 2012 (pièces 4, 5 et 6) ;
– un procés-verbal de contrôle du 13 février 2012 au sein du magasin Gedenim au centre commercial de [Localité 3] Soleil dans lequel il est relevé que le contrôle n’a pas permis de relever d’infraction dans le cadre du travail illégal (pièce 37) ;
– une attestation de M .[Z] indiquant que :
– la société Solsys édite un logiciel informatique de points de vente dont la société H2C est équipée depuis 1994, logiciel lui permettant d’accéder à l’ensemble des données commerciales des magasins dont elle assure la gestion commerciale et notamment la boutique Gedenim de [Localité 3] ;
– pour sécuriser les accès un code a été donné à chaque directeur de magasin pour lui permettre d’accéder à ses propres statistiques et un autre a été créé pour l’accès aux données depuis la société H2C ;
– fin novembre 2011, un nouveau code a été créé pour les directeurs de magasin et l’accès aux données a été restreint pour le personnel administratif qui ne pouvait désormais plus accéder aux statistiques mais seulement aux bons de livraison et de cession ;
– avoir constaté que, malgré ces restrictions, le poste de Mme [A] [D] avait consulté des statistiques de vente et des synthèses de vente portant sur l’ensemble des boutiques administrées par la société H2C, ce qu’elle n’a pu faire qu’en utilisant un code réservé à la direction ou aux directeurs de magasin (pièce 20) ;
– une attestation de M.[O], ancien responsable de la boutique de [Localité 3], précisant que le code d’accès des responsables de boutique permettait d’accèder à l’ensemble des données du groupe mais uniquement lorsqu’il était utilisé depuis les postes du service de gestion des stocks situé au siège d’H2C et indiquant que l’appelante remettait régulièrement à M.[V] des documents confidentiels auxquels elle n’avait normalement pas accès par ses fonctions tels que statistiques d’achats, statistiques de vente, résultat de CA par boutique relatifs à l’ensemble des boutiques du groupe (pièce 19) ;
– une attestation du même M.[O] indiquant avoir été manipulé par M.[V] et avoir commis des actes (notamment dépôt de mains courantes, envoi de courriels) sous pression psychologique (pièce 29) ;
– des sms adressés par M.[V] à l’appelante par lesquels il fait notamment état de rendez-vous avec les avocats pour signer un protocole qu’il a exigé de mettre en place et précise qu’il est à vendre au plus correct (pièce 21) ;
– un protocole daté du 19 janvier 2012 établi entre M.[V] et M.[O] par lequel M.[V] s’engage notamment à assister M.[O] dans le cadre des procédures qui seront engagés par ce dernier contre son employeur ainsi que dans l’élaboration des dossiers, pour réunir des éléments tangibles sur les infractions à la législation du travail et qu’il choisira le conseil qui assistera M.[O] tandis que ce dernier s’engage à lui reverser 20 % du montant des condamnations qu’il obtiendra (pièce 30) ;
– un procès- verbal de constat dans lequel sont retranscrits des appels téléphoniques de M.[V] à M.[O] et plus précisément un premier appel dans les termes suivants :'(…) si tu pouvais m’rappeler à l’occasion parce que j’ai différents documents qu’j’ai récupéré que j’voudrais te restituer donc appelle moi pour me dire au plus vite euh à quel moment j’peux t’les déposer ou à quelle adresse les avocats peuvent te les communiquer ou t’les envoyer ok sur ce parenthése s’il arrive quoique que ce soit à [T] de négatif j’te prends toi ta mère ton père et j’t’encule ok quand on pactise avec l’ennemi alors qu’on a tout mis en place comme t’es une grosse salope j’t’explique et personne fait rien pour qu’soit bien ben tu sais quoi moi j’agis devant la menace des gens qui me trahissent ou qui salissent les gens pour qui j’bosse j’les encule et tiens le toi pour dit tu peux aller porter plainte faire c’que tu veux ok et tu remercieras les gens qui m’ont poussé à bout ou qui font tout pour qu’j’sois à bout pour que j’te parle comme ça j’vais t’enculer G’ (…)'(pièce 36 ) ;
– un jugement du conseil de prud’hommes du 9 février 2017 confirmé par arrêt de la cour d’appel du 5 juin 2019 décidant que la faute grave qui était reprochée à la soeur de l’appelante, Mme [R] [N], ayant notamment consisté à avoir orchestré avec son compagnon, M.F, un litige artificiel à l’encontre de la société dans le but de lui extorquer des indemnités était établie (pièce 38) ;
-les témoignages de Mmes [R] et [K], collègues de travail de l’appelante, indiquant que [A] [D] avait imprimé des documents chiffrés concernant les points de la vente de la société qu’elle avait déposés sur son bureau puis mis dans son sac (pièces 15 et 16) ;
-une plainte pénale datée du 4 mai 2012 pour des faits notamment de tentative de chantage et de harcèlement déposée par la société H2C contre M.[V] et Mme [N], soeur de la plaignante (pièce 8) ;
– une citation directe de la société intimée à Mme [D] pour vol et recel de vol de documents et un jugement du tribunal correctionnel du 3 décembre 2014 la condamnant pour recel de vol et atteinte au secret des correspondances (pièce 33) ;
-des documents de synthèse des ventes pour la période du 1/01/2011 au 31/12/2011 portant la date du 13 janvier 2012 (pièce 27).
Sur l’intrusion de la salariée dans le système informatique de la société auquel elle n’avait normalement pas accès
Si l’employeur fait valoir que c’est l’appelante qui a extrait du logiciel des documents de synthèse des ventes auxquels elle n’avait normalement pas accès, il convient d’observer que, comme l’indique Mme [D], il n’est pas établi qu’elle se soit personnellement connectée à ces données dès lors que trois de ses anciens collègues témoignent que son poste était utilisé par plusieurs salariés ( témoignage de Mmes [V] et [M] et de M.[F], anciens collègues de la salarié: pièces 20, 21 et 22) et qu’il n’est pas établi qu’aux dates où son poste s’est connecté à ces données (les 18, 19 et 20 janvier 2012), elle avait été la seule à y avoir accès.
En outre et comme le fait observer l’appelante, si l’employeur fait valoir qu’elle se serait connectée sur ledit logiciel avec le code d’accès utilisé par sa soeur, il ne produit aucun élément pour corroborer cette affirmation ni ne justifie du code utilisé lors des connexions.
Il n’est donc pas établi que la salariée a personnellement extrait des documents confidentiels sur le réseau informatique auquel elle n’avait pas normalement pas accès.
Sur la transmission d’informations confidentielles à des tiers
Il ressort des témoignages de plusieurs des collègues de travail de l’appelante produits au débat par l’employeur que Mme [D] imprimait des documents relatifs aux points de la vente de la société, les déposait sur son bureau puis les mettait dans son sac (pièces 15 et 16 de l’employeur précité ), des sms que M.[V] lui adressait qu’elle était informée des manoeuvres de de dernier (pièce 21) et du témoignage de M.[O] qu’elle remettait régulièrement à M.[V] des documents confidentiels auxquels elle n’avait normalement pas accès par ses fonctions tels que statistiques d’achats, statistiques de vente, résultats de CA par boutique (pièce 19 précité de l’employeur).
Si la salariée tente néanmoins de discréditer le témoignage de M. [O] en faisant valoir que, contrairement à ce qu’il y mentionne et ainsi qu’en atteste le commandant de police qui l’a interrogé (pièce 31 du salarié ) et les mains courantes qu’il a établis contre son employeur (pièce 32), il n’était pas sous pression, ces pièces sont contredites par le protocole versé au débat par l’employeur (pièce 30 de l’employeur précitée) et la retranscription des messages adressés par M.[V] à M.[O] (pièce 36 précitée de l’employeur) qui corroborent la pression qui était exercée sur sa personne.
Le témoignage de M.[O] est donc probant et corroboré par les témoignages de collègues de travail de l’appelante (pièces 15 et 16 de l’employeur) et les sms de M.[V] (pièce 19 de l’employeur); il permet d’ établir que l’appelante a détourné et divulgué des données de l’entreprise.
Si la salariée fait toutefois valoir que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas fautifs dès lors qu’il n’est pas établi que les documents litigieux étaient confidentiels, il convient de rappeler que l’obligation de discrétion découle de son contrat de travail et lui interdisait de divulguer des documents de l’entreprise à des tiers, ce qu’elle ne pouvait d’autant moins ignorer que le non respect de son obligation de confidentialité lui avait déjà été reprochée (courrier de l’employeur du 10 avril 2009 au sujet de la transmission des informations sur la promotion d’une salariée pouvant créer des conflits au sein du personnel -pièce 2).
Enfin, elle ne peut faire valoir qu’elle a agi comme lanceur d’alerte dès lors qu’elle n’a pas dénoncé des faits aux autorités mais transmis des documents à M. [V] qui avait pour objectif, comme il le lui a indiqué par sms, d’en tirer un profit personnel.
Le caractère fautif des faits commis par la salariée est donc établi.
De tels faits ne pouvaient permettre la poursuite du contrat de travail et ce, même pendant la durée du préavis dès lors que son employeur lui avait déjà par le passé reproché des faits de même nature et qu’elle savait, comme l’établissent les sms que lui a adressés M.F, que les informations qu’elle divulgait seraient utilisées au détriment de son employeur.
Le licenciement pour faute grave est donc justifié.
Il convient donc, par confirmation du jugement entrepris de débouter la salariée de l’ensemble de ses demandes.
Sur les frais irrépétibles et les dépens :
L’équité commande de condamner Mme [D] au paiement d’une somme de 500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel.
La salariée, qui succombe, doit être tenue aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe à une date dont les parties ont été avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
DÉCLARE l’appel recevable,
CONFIRME le jugement déféré,
Y ajoutant,
CONDAMNE Mme [D] au paiement d’une somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel,
CONDAMNE Mme [D] aux dépens d’appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE