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22 juin 2022
Cour d’appel de Paris
RG n°
20/09247
Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 3
ARRET DU 22 JUIN 2022
(n° 192 , 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/09247 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCA6H
Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Novembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 16/12123
APPELANTE
SARL LE MONT PANTHEON agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 482 304 946
[Adresse 1]
[Localité 7]
représentée par Me Sandra OHANA de l’AARPI OHANA ZERHAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, avocat postulant
assistée de Me Cyril BELLAICHE, avocat au barreau de PARIS, toque : G0050, avocat plaidant substitué par Me David ELBAZ, avocat au barreau de PARIS, toque L 223, avocat plaidant
INTIMES
Monsieur [R] [L]
né le 2 Janvier 1948 à [Localité 11]
[Adresse 5]
[Localité 8]
représenté par Me Alain RAPAPORT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0122
Monsieur [O] [L]
né le 2 Août 1945 à [Localité 12]
[Adresse 4]
[Localité 9]
représenté par Me Alain RAPAPORT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0122
Monsieur [W] [L] en sa qualité d’héritier de Monsieur [J], [P], [S], [H] [L] décédé le 19 novembre 2018
né le 03 Décembre 1966 à [Localité 10]
[Adresse 3]
[Localité 6]
représenté par Me Alain RAPAPORT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0122
Monsieur [Z] [L] en sa qualité d’héritier de Monsieur [J], [P], [S], [H] [L] décédé le 19 novembre 2018
né le 08 Septembre 1970 à [Localité 10]
[Adresse 2]
[Localité 6]
représenté par Me Alain RAPAPORT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0122
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Gilles BALA’, président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Gilles BALA’, président de chambre
Madame Sandrine GIL, conseillère
Monsieur Pascal CLADIERE, conseiller
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Madame Marie-Gabrielle de La REYNERIE
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Gilles BALA’, président de chambre et par Claudia CHRISTOPHE, greffière à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
*****
FAITS ET PROCÉDURE
La société Mont Panthéon est titulaire d’un bail commercial portant sur un local situé [Adresse 1] à [Localité 7], appartenant à MM. [R], [O] et [J] [L]. Le 19 février 2007, Mme [T] [F] [A], veuve [L], a régularisé un acte de renouvellement au profit de la société Mont Panthéon, prenant effet rétroactivement au 1er novembre 2006 jusqu’au 31 octobre 2015. La société Mont Panthéon exploite un restaurant dénommé « le Kaza Maza ».
Par acte du 24 mars 2015, les consorts [L] ont fait signifier à la société Mont Panthéon un congé avec offre de renouvellement du bail, portant le loyer à 27 500 €, cette dernière acceptant le principe du renouvellement mais contestant le montant du loyer proposé.
Par procès-verbal du 30 mars 2016, les consorts [L] ont fait constaster qu’une cuisine avait été installée dans la cave du deuxième sous-sol. À l’occasion de la visite du logement du 1er étage par un agent immobilier, ils soutiennent que le logement était occupé par M. [D] [B], sa femme et son enfant. Un procès-verbal de constat a été établi le 13 juin 2016 par maître [C] désigné par ordonnance sur requête du 2 mai 2016.
Par exploit du 9 août 2016, les consorts [L] ont fait assigner à comparaître la société Mont Panthéon en résiliation du bail commercial devant le tribunal de grande instance de Paris. Par jugement du 09 novembre 2018 assorti de l’exécution provisoire, le tribunal a prononcé la résiliation du bail commercial aux torts de la société Mont Panthéon, ordonné
son expulsion et statué sur le sort des meubles ; il l’a condamnée à payer à MM. [R], [O] et [J] [L] la somme globale de 3 000 € à titre de dommages-intérêts, la somme de 4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont distraction au profit de maître Alain Rapaport, avocat à la Cour, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
Par déclaration du 04 décembre 2018, la société Mont Panthéon a interjeté appel de l’ensemble des chefs de jugement. Par conclusions déposées le 16 mars 2021, les consorts [L] ont interjeté appel incident de certains chefs de jugement.
À la suite du décès de M. [J] [L], MM. [W] et [Z] [L], en leur qualité d’héritier, sont intervenus à l’instance.
Par ordonnance du 05 mai 2021, le conseiller de la mise en état a dit n’y avoir lieu à prononcer la radiation du rôle de cette affaire et a condamné les intimés à communiquer à la société appelante les procès-verbaux d’assemblée générale de 2005 à 2011 et l’étude mentionnée dans la résolution n°11 de l’assemblée générale du 27 mai 2014.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 23 mars 2022.
MOYENS ET PRÉTENTIONS
Vu les dernières conclusions déposées le 29 juin 2021, par lesquelles la société Mont Panthéon, appelante à titre principal et intimée à titre incident, demande à la Cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau, à titre principal, dire et juger nulle l’assignation du 9 août 2016 ; déclarer en tout état de cause irrecevable la demande des consorts [L] pour prescription et défaut de qualité à agir; condamner les consorts [L] à lui payer la somme de 100 000 € à titre de dommages-intérêts ; rappeler que l’infirmation du jugement emporte obligation de restitution des sommes perçues au titre de l’exécution du jugement (7 000 €) ; condamner les consorts [L] au paiement, au profit de la société Mont Panthéon, de la somme de 15 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ; condamner les consorts [L] aux entiers frais et dépens de l’instance ; à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la Cour estimait que l’installation de la cuisine constituait une faute contractuelle justifiant la résiliation, accorder rétroactivement à la société Mont Panthéon un délai de 6 mois pour déplacer sa cuisine.
Vu les dernières conclusions déposées le 03 août 2021, par lesquelles les consorts [L], intimés à titre principal et appelants à titre incident, demandent à la Cour de déclarer irrecevable la nouvelle demande présentée par la société le Mont Panthéon ayant pour objet de voir dire nulle l’assignation introductive d’instance en date du 9 août 2016 ; confirmer le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné la société le Mont Panthéon à payer la somme globale de 3 000 € à titre de dommages et intérêts, et fixer ce montant à 30 000 € ; confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société le Mont Panthéon à leur payer la somme de 4 000 au titre de l’article 700 du code de procédure civile et la condamner à leur payer en outre la somme de 6000 € à ce titre concernant la procédure d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens.
En application de l’article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties. Cependant, pour une meilleure compréhension du présent arrêt, la position des parties sera succinctement résumée.
In limine litis, la société Mont Panthéon soulève la nullité de l’assignation du 9 août 2016 tirée de l’absence de mention relative aux diligences entreprises par les bailleurs pour parvenir à une résolution amiable du litige. En réponse à cette demande, les consorts [L] affirment que cette demande est irrecevable au motif qu’elle n’a pas été soulevée en première instance, constituant ainsi une demande nouvelle au sens de l’article 564 du code de procédure civile.
Au soutien de sa demande relative à l’irrecevabilité de l’action adverse, la société Mont Panthéon affirme que l’action en résiliation du bail est prescrite en ce que les bailleurs avaient connaissance de la réalisation des travaux litigieux au deuxième sous-sol. Elle soulève le défaut de qualité à agir des bailleurs tiré du défaut de leur qualité de propriétaire à l’égard de la cave litigieuse. En réponse à cette demande, les consorts [L] affirment que la cuisine a été installée à leur insu et contestent la portée des courriers adverses des 17 décembre 2007 et 30 mars 2010. Ils ajoutent que le délai de prescription n’est pas acquis dès lors qu’il n’a commencé à courir qu’en 2016. Ils affirment leur qualité de propriétaire de la cave litigieuse.
À titre subsidiaire, au fond, au soutien de sa demande relative à la contestation de l’expulsion, la société Mont Panthéon affirme que le fondement juridique tiré du nouvel article 1228 du code civil est erroné et prétend que le droit antérieur à l’ordonnance du 10 février 2016 devait s’appliquer. Elle soutient que le bailleur a manqué à son obligation de délivrance au motif que le local délivré ne disposait pas de cuisine permettant d’exploiter une activité de restauration au jour de l’entrée dans les lieux, alors qu’une telle cuisine devait y être installée au regard de l’activité autorisée de bar-restaurant. Elle affirme que les travaux entrepris sont réguliers dès lors que le bail ne comporte aucune précision sur la distribution des lieux dans l’hypothèse d’une activité de restauration. Elle ajoute qu’aucune atteinte à la structure n’a été relevée, soutenant que les travaux litigieux sont conformes à la destination des lieux. Elle affirme qu’en renouvelant le bail, le bailleur a manifesté sans équivoque son intention de ne pas se prévaloir de l’infraction éventuelle, dès lors qu’il avait connaissance des travaux entrepris et qu’il ne les a pas contestés. Elle fait valoir que l’appartement n’a jamais été sous loué ni à M. [D] [B] ni à messieurs [G] et [V] [E] et qu’en tout état de cause, l’appartement n’a jamais été occupé comme lieu d’habitation. En réponse à cette demande, les consorts [L] affirment avoir fondé leur demande sur l’ancien article 1184 du code civil dans l’exploit introductif d’instance. Ils soutiennent que la société preneuse a commis une faute suffisamment grave de nature à justifier la résiliation du bail en ce que les travaux litigieux sont des travaux de transformation qui violent aussi bien les dispositions du bail que le règlement de copropriété. Ils exposent qu’une cuisine existait déjà dans la salle de restaurant, et qu’en tout état de cause, l’absence de cuisine au rez-de-chaussée n’autorisait pas la société appelante à réaliser des travaux dans la cave et à modifier la destination de celle-ci. Ils affirment qu’ils n’ont pu renoncer à se prévaloir d’une infraction au bail dès lors que le bail vise une cave au deuxième sous-sol et non une cuisine et que l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires était nécessaire.
Les consorts [L] font grief au Tribunal de ne pas avoir retenu l’existence d’une sous-location, et soutiennent que la société preneuse a sous-loué les locaux en violation des dispositions du bail. Ils sollicitent un montant plus élevé de dommages-intérêts évalué à la somme de 30 000 €. En réponse à cette demande, la société Mont Panthéon affirme que les bailleurs n’ont subi aucun préjudice.
A l’inverse, la société Mont Panthéon affirme avoir subi un préjudice en raison de son impossibilité d’exploiter une partie du restaurant, de son occupation devenue précaire, de son impossibilité de diligenter des travaux de réfection de la façade. À titre infiniment subsidiaire, au soutien de sa demande relative à l’octroi d’un délai rétroactif, la société Mont Panthéon fait observer que la cause de résiliation a disparu dès lors qu’elle a déplacé la cuisine.
MOTIFS DE L’ARRET
Sur l’irrecevabilité de l’exception de nullité
La société Mont Panthéon demande à la Cour de déclarer nulle l’assignation introductive d’instance du 9 août 2016 pour défaut d’une mention exigée par l’article 56 du code de procédure civile.
En application de l’article 74 du code de procédure civile, les exceptions de procédure doivent être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir à peine d’irrecevabilité. En outre, il résulte de l’article 789 du même code que le juge de la mise en état est seul compétent pour statuer sur les exceptions de procédure ; et que les parties ne sont plus recevables à soulever ses exceptions ultérieurement.
Cette demande formée pour la première fois en cause d’appel, après défense au fond, saisissant la Cour au lieu du conseiller de la mise en état, est en conséquence irrecevable.
Sur l’exception de prescription de l’action en résiliation du chef de travaux non autorisés
Aux termes de l’article 2224 du Code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par 5 ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.
Ainsi, l’action en résiliation d’un bail commercial pour l’installation d’une cuisine dans un local en sous-sol désigné comme une cave, doit être considéré comme prescrite si la preuve est rapportée du fait que le propriétaire bailleur avait connaissance ou aurait dû avoir connaissance des travaux concernant cette cuisine à cet emplacement, plus de 5 ans avant la demande en justice.
En l’espèce, l’assignation en résiliation du bail a été signifiée le 29 août 2016.
Or, le bail ayant été consenti pour plusieurs usages et notamment à destination de restaurant, et en l’absence d’une installation de cuisine suffisante, il a été justifié d’un système de ventilation de cuisine pour répondre aux interrogations du syndic de la copropriété, par lettre du 17 décembre 2007, donnant les coordonnées de l’entreprise ayant réalisé les travaux et délivrés le certificat de conformité.
De même, il est justifié d’un certificat de conformité du système de ventilation en date du 27 mars 2010.
Il est constant et non contesté que ces installations de cuisine ont été effectuées dans le 2e sous-sol constituant la cave annexe du local commercial litigieux.
Or, les bailleurs avaient connaissance de ces travaux depuis le 17 décembre 2007 ; ils ne peuvent pas sérieusement soutenir qu’ils ne connaissaient pas le siège de ces travaux, dans la cave.
En effet, il ressort des procès-verbaux d’assemblée générale de la copropriété qui ont été produits en cause d’appel, que ces assemblées se sont tenues dans l’immeuble.
‘Le procès-verbal de l’assemblée générale du 26 juin 2006 interroge Madame [L] sur les problèmes d’électricité de la cave et lui demande quelle sorte de travaux sont effectués dans son 2e sous-sol pour qu’elle en informe la copropriété.
‘Le procès-verbal de l’assemblée générale du 23 avril 2007 évoque les travaux entrepris sur les canalisations en cave ayant mis à jour un compteur d’eau pour le restaurant Kaza Maza et l’appartement du premier étage appartenant à Madame [L] à laquelle il est demandé de refaire son installation privative en mauvais état ; on signale aussi des odeurs de cuisine dans la cage d’escalier de l’immeuble et l’assemblée générale demande aux copropriétaires de veiller à ce que les conduits d’évacuation des odeurs soient révisés et qu’un certificat de conformité des installations d’évacuation soit fourni au syndic. C’est donc en exécution de cette demande qu’a été adressé le certificat de conformité dont fait état la lettre du 17 décembre 2007 déjà citée.
‘L’assemblée générale du 23 juin 2008 évoque encore au titre des questions divorce les odeurs fortes provenant du restaurant.
‘L’assemblée générale du 13 octobre 2008 évoque encore la sortie des tuyaux d’aération des restaurants dans une courette insalubre qu’il faut restaurer.
‘L’assemblée générale du 3 juin 2009 évoque encore des travaux de maçonnerie dans les caves pour lutter contre la prolifération des rats.
Il résulte des constatations qui précèdent que Madame [L], et après elle ses héritiers, ont eu de multiples occasions de visiter les lieux, de s’intéresser aux caves, aux problèmes posés par l’extraction des odeurs de la cuisine du restaurant ; et que leur participation aux assemblées générales de la copropriété, y compris comme membre du conseil syndical, démontrent suffisamment leur parfaite connaissance des lieux.
Il convient de constater qu’après signification d’un congé avec offre de renouvellement le 24 mars 2015, les consorts [L], devenus propriétaires indivis après le décès de leur mère, ont enregistré l’acceptation de principe de la société le Mont Panthéon, mais son désaccord sur le loyer proposé ; et que c’est dans ce contexte qu’en date du 30 mars 2016, a été réalisé sans autre cause connue, le procès-verbal dressé le 30 mars 2016 par Maître [I] [C] qu’ils avaient requis à cet effet. Dans ces conditions, la réalisation de ce constat ne démontre pas qu’ils venaient d’apprendre incidemment l’infraction qu’il s’agissait de constater, mais cela témoigne seulement de l’intérêt qu’ils avaient à faire procéder à ce constat dans le cadre du litige naissant sur le prix du bail renouvelé.
D’autre part, aucune explication n’a été fournie sur la résistance des consorts [L] à communiquer des procès-verbaux d’assemblée générale qui étaient réclamés, et dont les derniers n’ont été communiqués qu’après l’ordonnance sur incident rendue par le conseiller de la mise en état le 5 mai 2021, pour ce qui concerne les procès-verbaux des assemblées générales de 2005 à 2011. Or, leur lecture démontre la participation active des consorts [L] aux assemblées de copropriété, et plus généralement le fait que les questions du restaurant, des odeurs et autres nuisances, des caves et des travaux les concernant, ont été à de nombreuses reprises évoquées au cours des diverses assemblées générales, démontrant leur nécessaire connaissance des lieux.
En conséquence, l’action en résiliation du bail du fait d’une infraction consistant dans la réalisation de travaux d’aménagement d’une cuisine dans le 2e sous-sol est prescrite, dès lors irrecevable.
Sur l’action en résiliation pour sous-location interdite
Aux termes du bail liant les parties, et de l’avenant de renouvellement du 19 février 2007, la société preneuse à l’obligation de ne pouvoir en aucun cas sous-louer tout ou partie des locaux loués.
Pour prétendre démontrer une sous-location interdite, les consorts [L] invoquent une attestation établie par Monsieur [U] [M] le 16 avril 2016, qui déclare avoir fait visiter l’appartement dépendant des lieux loués à un client le 18 novembre 2015, et avoir rencontré Monsieur “[K]” qui lui aurait déclaré vivre dans les lieux avec sa famille ; et qu’un employé du restaurant, lors d’un rendez-vous ultérieur, le lui aurait confirmé ; les appelants invoquent aussi une attestation d’assurance de la société AXA France et ARD en date du 23 juin 2014, établi au nom de Monsieur [D] [B] pour la période du 1er août 2013 au 1er août 2014.
Il est cependant établi par les statuts que Monsieur [D] [B] est associé de la société le Mont Panthéon dont il détient 1/3 des parts, et qu’il a pu la représenter dans divers actes de gestion sociale ; il est par exemple démontré qu’il est assuré pour le risque de décès et invalidité au profit de la société le Mont Panthéon, adhérent d’un contrat d’assurance collective Antarius du groupe crédit du Nord. Sa présence dans les lieux est donc insuffisante à démontrer l’existence d’une sous-location prohibée par le bail, de même que doit être considérée comme suspecte la déclaration rapportée par le témoin, déclaration qui de toute façon ne démontre pas une sous-location.
Les intimés se prévalent aussi du procès-verbal de constat sur ordonnance qui a été établi le 13 juin 2016 ; cependant, l’huissier de justice désigné n’a trouvé personne dans les lieux, ne fait aucune constatation sur une boîte aux lettres, et alors que l’huissier commis était seulement autorisé à interroger l’occupant, il semble avoir procédé à une forme de perquisition dont la légalité est très discutable, prenant connaissance, en l’absence de tout occupant, de courriers couverts par le secret des correspondances, d’une prescription médicale, d’une attestation d’assurance maladie, de relevés bancaires, ainsi que de plusieurs éléments concernant l’asile et la situation fiscale de Monsieur [E] [G] et de monsieur [E] [V]. En tout état de cause, la présence de ces éléments d’identité ou de santé, ou encore relatifs à la situation administrative de ces personnes, pas plus que la présence de vêtements masculins découverts à l’intérieur d’un rangement, ne sont de nature à démontrer une sous-location interdite. Il en est d’autant plus ainsi que la société locataire a pu démontrer les démarches effectuées pour l’embauche de ces personnes, justifiant la présence de documents administratifs sur leur situation.
La lettre envoyée à Monsieur [J] [L] le 22 août 2018 par le service des impôts d’Île-de-France et [Localité 7], concernant l’établissement de la taxe d’habitation pour un appartement de 34 m², soit une superficie qui ne correspond pas à l’appartement de 27,20 m² désigné par le bail, et se contente d’indiquer que le dernier occupant connu serait Monsieur [Y] [X], en l’absence de tout autre élément, ne rapporte pas la preuve d’une sous-location interdite.
Il résulte des constatations qui précèdent que la preuve certaine d’une sous-location interdite par le bail n’est pas rapportée. Les seuls faits constatés ou rapportés par un témoin ne sont pas de nature à démontrer une infraction au bail, dont la gravité pourrait en outre justifier sa résiliation.
En conséquence, le jugement doit être infirmé en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire du bail litigieux.
Sur la demande de dommages et intérêts formés par les consorts [L]
La demande de dommages et intérêt formé par les consorts [L] a pour seule justification la nécessité prétendue d’exécuter des travaux de remise en état de la cave qui avait été aménagée en cuisine. La poursuite du bail ne permet pas au bailleur d’entreprendre de tels travaux et il ne justifie pas de leur nécessité, ni de son préjudice.
La demande de dommages-intérêts n’est donc pas fondée
Sur la demande reconventionnelle de la société le Mont Panthéon
La défense des consorts [L], et leur action, n’ont pas dégénéré en abus de droit.
Les intimés ne sauraient être tenus pour responsables des conséquences de l’exécution provisoire.
Compte tenu de la prescription, il n’a pas été statué sur la réalité et les conséquences de l’infraction prétendue au bail, du fait de travaux d’installation d’une cuisine dans le 2e sous-sol de l’immeuble.
En conséquence, la société le Mont Panthéon ne rapporte pas la preuve d’une faute des consorts [L].
Elle doit être déboutée de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Les consorts [L] qui succombent en leur action principale devront supporter les dépens de première instance et d’appel. En équité, par application de l’article 700 du code de procédure civile, ils devront indemniser la société le Mont Panthéon de ses frais irrépétibles exposés tant en première instance qu’en cause d’appel, en lui payant une indemnité globale de 8000 €.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Déclare irrecevable l’exception de nullité de l’assignation,
Infirme le jugement rendu le 9 novembre 2018 par le tribunal de grande instance de Paris, le réforme en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
Déclare prescrite l’action en résiliation du bail en raison des travaux d’aménagement d’une cuisine dans le 2e sous-sol de l’immeuble,
Déboute pour le surplus MM. [R], [O], [W] et [Z] [L] de toutes leurs prétentions,
Déboute la société le Mont Panthéon de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts,
Condamne in solidum MM. [R], [O], [W] et [Z] [L] à payer à la société le Mont Panthéon la somme de 8000 € en indemnisation de ses frais irrépétibles d’instance,
Les condamne in solidum aux dépens de première instance et d’appel.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT