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20 février 2019
Cour de cassation
Pourvoi n°
17-26.833
COMM.
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 20 février 2019
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10078 F
Pourvoi n° T 17-26.833
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Doris Engineering, société anonyme, dont le siège est […] ,
contre l’ordonnance rendue le 11 octobre 2017 par le premier président de la cour d’appel de Paris , dans le litige l’opposant au directeur général des finances publiques, représenté par le chef des services fiscaux chargé de la direction nationale d’enquêtes fiscales, domicilié […] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 8 janvier 2019, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Gauthier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Labat, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Doris Engineering, de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques, représenté par le chef des services fiscaux chargé de la direction nationale d’enquêtes fiscales ;
Sur le rapport de M. Gauthier, conseiller référendaire, l’avis de Mme Pénichon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Doris Engineering aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer au directeur général des finances publiques, représenté par le chef des services fiscaux chargé de la direction nationale d’enquêtes fiscales la somme de 2 500 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Doris Engineering.
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’ordonnance attaquée d’AVOIR confirmé l’ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé la visite domiciliaire et les saisies dans les locaux occupés par la société DORIS ENGINEERING ;
ALORS QUE d’une part, la signature du premier président et du greffier s’impose à peine de nullité ; que l’ordonnance communiquée par RPVA à l’avocat de la société DORIS ENGINEERING n’est signée ni par le délégué du premier président, ni par la greffière, en violation de l’article 456 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, d’autre part, seul est qualifié pour signer une ordonnance, le greffier qui a assisté à son prononcé ; qu’il ne résulte d’aucune mention de l’ordonnance attaquée que Madame DARDAS, greffière qui l’aurait signée était présente à son prononcé, en violation de l’article 456 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’ordonnance attaquée d’AVOIR confirmé l’ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé la visite domiciliaire et les saisies dans les locaux occupés par la société DORIS ENGINEERING ;
AUX MOTIFS QUE 1) sur l’existence de présomption de fraude justifiant les opérations de visite,
Lors de la présentation de la demande par l’administration, il est demandé au JLD de vérifier si la requête et les annexes jointes font apparaître des présomptions simples d’agissements frauduleux.
Il convient de noter que le champ d’action de l’administration fiscale doit être relativement étendu au stade de l’enquête préparatoire, étant précisé qu’à ce stade, aucune accusation n’est portée à l’encontre des sociétés visées dans l’ordonnance.
L’article L. 16 B du LPF dispose en son paragraphe II : “chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter.
Le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d’autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d’information en possession de l’administration de nature à justifier la visite.”
S’agissant de la formulation “tous les éléments d’information”, il y a lieu de distinguer ceux qui peuvent être surabondants ou comporter quelques erreurs ayant peu d’incidence sur la compréhension du dossier, et ceux pouvant être retenus par le juge comme étant des éléments utiles laissant apparaître au moins une présomption simple d’agissements frauduleux.
Or l’examen de la requête et des annexes produites par les services fiscaux a permis au premier juge de relever que les dirigeants des sociétés de droit britannique STAT HOLDINGS INTERNATIONAL LIMITED et STAT R… LIMITED résidaient, pour leur quasi-totalité (6 sur 7), en FRANCE et dès lors, il pouvait être supposé que le centre décisionnel de ces sociétés se trouvait sur le territoire national.
Le JLD retenait également que la société STAT HOLDING INTERNATIONAL LIMITED était titulaire depuis décembre 2007 d’un compte bancaire au Crédit industriel et commercial CIC, agence Sud Saint Augustin […] et que la société STAT R… LIMITED était titulaire depuis mars 2016 d’un compte bancaire à la BNP PARIS AS Ag CAFLR sise à MONTPELLIER et indiquait comme adresse : […] – […] – […], laquelle d’après le site www.lombardhouse est une adresse correspondant au centre d’affaires LOMBARD HOUSE qui peut accueillir 60 entreprises de ventes et services.
Il constatait également que l’adresse du siège des sociétés STAT HOLDING INTERNATIONAL LIMITED et STAT R… LIMITED correspondaient à des adresses de domiciliation.
En outre, il mettait ces éléments en perspective avec les montants des chiffres d’affaires réalisés ainsi que les charges de personnel de la société STAT R… LIMITED en 2012, 2013, 2014, en constatant que le nombre de salariés avait évolué pendant cette période de 48 personnes à 118 personnes. Il constatait que le nom de domaine stat-marine.com était enregistré auprès d’un hébergeur français et que son administrateur, M. B… Q…, disposait de coordonnées françaises pour en déduire que cette société ne disposait pas de moyens propres nécessaires à l’exercice de son activité.
Le même raisonnement était appliqué à rencontre de la société STAT HOLDING INTERNATIONAL LMITED.
De surcroît, il était mis en évidence que les dirigeants des deux sociétés de droit britanniques visées dans l’ordonnance exerçaient également des fonctions de direction dans les sociétés de droit français DORIS ENGINEERING, STAT R…, STAT ASSETS MANAGEMENT ou STAT SERVICES SAS et que l’ensemble de ces sociétés appartenaient toutes au groupe informel STAT R….
Ainsi, il relevait une présomption simple selon laquelle le centre décisionnel des deux entités de droit britannique était commun et se situait dans les locaux des sociétés françaises.
Dès lors, il retenait une connexité de direction et de moyens d’exploitation, ainsi que des activités similaires entre les sociétés de droit britannique STAT HOLDING INTERNATIONAL LMITED et STAT R… LIMITED et les sociétés SAS STAT R…, SA DORIS ENGINEERING et SASU STAT ASSETS MANAGEMENT et présumait que les sociétés britanniques ne disposaient pas des moyens matériels et humains suffisants en GRANDE BRETAGNE et que leurs activités étaient réalisées en FRANCE, via les sociétés françaises sus-mentionnées disposant d’un personnel qualifié et ce, sans s’acquitter de leurs obligations déclaratives.
Il convient d’observer que l’administration n’a pas à produire des éléments à charge et à décharge et que le JLD n’a pas à se prononcer sur des indices graves et concordants à l’instar d’un magistrat instructeur.
Les éléments retenus étant constitutifs de présomptions simples d’agissements frauduleux, le JLD s’étant bien livré à la vérification concrète du bien-fondé de la requête ;
2) sur l’irrégularité du recours à la procédure de visite et de saisie
II y a lieu de rappeler que les dispositions de l’article L.16 B du LPF ont été totalement modifiées par la loi n° 2008 – 776 du 4 août 2008 et qu’il est vain de se reporter aux travaux préparatoires de la loi du 29 décembre 1984 pour déduire que le législateur avait voulu subordonner l’engagement d’une procédure de visite et de saisie à l’existence de circonstances exceptionnelles.
S’agissant de l’élément intentionnel de la fraude, dans le cadre de l’enquête préparatoire, le champ d’application des dispositions actuelles de l’article L. 16 B du LPF n’impose pas de rechercher l’élément intentionnel de l’agissement frauduleux présumé.
Autrement dit, le choix de recourir à une enquête dite “lourde” n’est pas soumise à une condition édictée par les dispositions de l’article L. 16 B du LPF.
Le JLD devait seulement apprécier s’il existait de simples présomptions d’exercice d’une activité commerciale même partielle avec les moyens humains et matériels d’une autre société installée sur le territoire national et/ou de manquement aux obligations déclaratives.
Ce moyen sera écarté
3 ) l’atteinte au droit au respect du domicile garantie par l’article 8 de la CESDH notamment
II a été déjà répondu partiellement à plusieurs moyens.
Concernant la violation du droit au respect de la vie privée et familiale, l’article 8 de la CESDH, tout en énonçant le droit au respect de sa vie privée et familiale, est tempéré par son paragraphe 2 qui dispose que “il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui”.
En l’espèce, le JLD, saisi sur requête de l’administration, a effectué un contrôle de proportionnalité entre les présomptions qui lui étaient produites et l’atteinte aux libertés portée aux sociétés visitées. Il a estimé qu’une enquête lourde était nécessaire, étant précisé que le recours à l’article L. 16 B du LPF n’a pas un caractère subsidiaire par rapport aux autres moyens d’investigations de la DGFP, notamment ceux prévus par l’article L.47 du LPF (vérification de comptabilité).
Par ailleurs l’argument relatif à la notion d’établissement stable relève de l’appréciation des juges du fond et non pas du JLD, ni du délégué du Premier Président statuant en appel, lesquels ne sont pas les juges de l’impôt.
En outre, le fait que le JLD ait délivré une ordonnance de visite et de saisie un jour après la présentation de la requête est sans incidence sur la validité de la procédure, étant précisé que le JLD chargé d’instruire ces demandes est déchargé de ses attributions pénales et que le nombre d’annexes (38) n’est pas très important au regard d’autres dossiers dont il a la charge.
Enfin, s’agissant de la critique portant sur le caractère pré-rédigé des ordonnances, le JLD signataire de l’ordonnance est également destinataire d’une copie numérique de celle-ci, lorsque la requête est déposée au greffe du tribunal. Entre le dépôt et la signature de l’ordonnance, il peut modifier à sa guise le modèle d’ordonnance qui lui est proposé en supprimant des arguments non-pertinents, en les remplaçant par une autre motivation et enfin, peut tout simplement refuser de faire droit à la requête de l’administration. En ayant cette possibilité de modifier, de rectifier ou de refuser de délivrer une autorisation, il s’approprie l’autorisation qu’il signe, son rôle ne se limitant pas à une simple mission de chambre d’enregistrement.
Ainsi cette pratique des ordonnances pré-rédigées n’est qu’une facilité proposée au juge par l’administration. Ce dernier peut s’en affranchir, ayant en sa possession la copie numérique de l’ordonnance.
ALORS QUE, d’une part, en vertu de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, pour permettre au juge des libertés et de détention d’apprécier l’existence de présomptions de fraude fiscale, la requête doit être assortie de tous les éléments utiles à sa mission, qu’ils soient à charge ou à décharge, lorsque l’administration en a connaissance ; que, par ordonnance du 9 juin 2016, le juge des libertés et de la détention du TGI de Paris, a autorisé la visite domiciliaire dans les locaux de la société DORIS ENGINEERING, en vue de rechercher des éléments de preuve d’une fraude fiscale commise par deux sociétés britanniques, STAT HOLDING INTERNATIONAL et STAT R… LIMITED, en considérant que ces sociétés ne disposaient pas de moyens matériels et humains pour exercer leur activité en Grande-Bretagne, ce qui permettait de présumer qu’elles exerçaient leur activité à travers les […] , dont la société visitée ; que la requérante invoquaient dans ses conclusions que l’agent de la direction des finances publiques n’avait pas fourni une information loyale au magistrat, en produisant des documents en anglais, non intégralement traduits et ne faisant notamment pas état de ce que ces documents indiquaient que la société STAT HOLDING INTERNATIONAL, dont l’objet social était le placement financier, employait trois salariés, ce qui établissait son activité en Grande-Bretagne ; que le premier président qui a rejeté ce moyen de nullité de l’ordonnance, aux motifs que la direction des finances publiques n’avait pas à produire au JLD des éléments à charge et à décharge à l’appui de sa requête, a violé l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales ;
ALORS QUE, d’autre part, le juge doit se livrer à un examen concret des pièces qui lui sont soumises et ne sauraient se contenter de signer le projet d’ordonnance annexé par l’administration fiscale à sa requête ; que, dans ses conclusions, la société DORIS ENGINEERING invoquait la nullité de l’ordonnance ayant autorisé les visites domiciliaires, en relevant que le juge ayant autorisé la visite domiciliaire n’avait pas analysé les documents qui lui étaient soumis par la Direction nationale des finances publiques, puisqu’il n’avait pas relevé les omissions de cette requête, portant sur le fait que la société STAT HOLDING INTERNATIONAL disposait de salariés en Grande Bretagne, que les deux sociétés britanniques disposaient non seulement de comptes bancaires en France, mais également de comptes bancaires en Grande-Bretagne et que la similitude des activités de ces sociétés par rapport à celle de DORIS ENGINEERING et de STAT R… SAS ne ressortait pas des pièces produites, lesquels établissaient que l’activité de la société STAT R… portait sur l’emploi à l’étranger de personnel détaché auprès de ses clients, contrairement à la société DORIS ENGINEERING, laquelle délivre des prestations de conseils et d’études par ses bureaux d’études, ce qui tendait à dissimuler le fait que STAT R… n’avait pas besoin de locaux aussi importants que DORIS ENGINEERING ; que, faute de s’être prononcée sur ce chef péremptoire de conclusions, faisant état du fait que le JLD n’avait pas examiné concrètement les pièces annexées à la requête, le premier président a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QU’enfin, les conclusions faisaient également état des incohérences de l’ordonnance ayant autorisé la visite domiciliaire, qui a considéré que les deux sociétés britanniques ne disposaient pas de locaux en Grande-Bretagne, en se fondant sur la circonstance que leur siège social était situé à la même adresse qu’une société de domiciliation, et qui a retenu que ces sociétés n’avaient pas de locaux d’activité, ce qui l’a conduit à considérer que ces sociétés britanniques n’ayant pas de locaux en Grande-Bretagne exerçaient en réalité leur activité en France, tout en constatant, qu’outre son siège social, les documents concernant la société STAT R… LIMITED faisaient état de deux adresses pour ses locaux d’activité, lesquels devaient être mis en relation avec son activité de détachement de salariés auprès de ses clients ; que ces faits, ajoutés au silence sur les comptes britanniques, sur les salariés de la société INTERNATIONAL HOLDING LIMITED et l’absence de sollicitation de traduction intégrale des documents en langue anglaise établissaient que le magistrat ne s’était pas livré à une analyse concrète des documents qui lui étaient soumis et s’était contenté de signer le projet d’ordonnance qui lui avait été proposé par la direction des finances publiques ; que, faute d’avoir répondu à ce chef péremptoire de conclusions tendant à l’annulation de l’ordonnance entreprise, le premier président a violé l’article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’ordonnance attaquée d’AVOIR confirmé l’ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé la visite domiciliaire et les saisies dans les locaux occupés par la société DORIS ENGINEERING ;
AUX MOTIFS QUE 1) sur l’existence de présomption de fraude justifiant les opérations de visite,
Lors de la présentation de la demande par l’administration, il est demandé au JLD de vérifier si la requête et les annexes jointes font apparaître des présomptions simples d’agissements frauduleux.
Il convient de noter que le champ d’action de l’administration fiscale doit être relativement étendu au stade de l’enquête préparatoire, étant précisé qu’à ce stade, aucune accusation n’est portée à l’encontre des sociétés visées dans l’ordonnance.
L’article L. 16 B du LPF dispose en son paragraphe II: “chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter.
Le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d’autorisation qui lui est soumise est bien fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d’information en possession de l’administration de nature à justifier la visite.”
S’agissant de la formulation “tous les éléments d’information”, il y a lieu de distinguer ceux qui peuvent être surabondants ou comporter quelques erreurs ayant peu d’incidence sur la compréhension du dossier, et ceux pouvant être retenus par le juge comme étant des éléments utiles laissant apparaître au moins une présomption simple d’agissements frauduleux.
Or l’examen de la requête et des annexes produites par les services fiscaux a permis au premier juge de relever que les dirigeants des sociétés de droit britannique STAT HOLDINGS INTERNATIONAL LIMITED et STAT R… LIMITED résidaient, pour leur quasi-totalité (6 sur 7), en FRANCE et dès lors, il pouvait être supposé que le centre décisionnel de ces sociétés se trouvait sur le territoire national.
Le JLD retenait également que la société STAT HOLDING INTERNATIONAL LIMITED était titulaire depuis décembre 2007 d’un compte bancaire au Crédit industriel et commercial CIC, agence Sud Saint Augustin […] et que la société STAT R… LIMITED était titulaire depuis mars 2016 d’un compte bancaire à la BNP PARIS AS Ag CAFLR sise à MONTPELLIER et indiquait comme adresse : […] – […] – […], laquelle d’après le site www.lombardhouse est une adresse correspondant au centre d’affaires LOMBARD HOUSE qui peut accueillir 60 entreprises de ventes et services.
Il constatait également que l’adresse du siège des sociétés STAT HOLDING INTERNATIONAL LIMITED et STAT R… LIMITED correspondaient à des adresses de domiciliation.
En outre, il mettait ces éléments en perspective avec les montants des chiffres d’affaires réalisés ainsi que les charges de personnel de la société STAT R… LIMITED en 2012, 2013, 2014, en constatant que le nombre de salariés avait évolué pendant cette période de 48 personnes à 118 personnes. Il constatait que le nom de domaine stat-marine.com était enregistré auprès d’un hébergeur français et que son administrateur, M. B… Q…, disposait de coordonnées françaises pour en déduire que cette société ne disposait pas de moyens propres nécessaires à l’exercice de son activité.
Le même raisonnement était appliqué à rencontre de la société STAT HOLDING INTERNATIONAL LMITED.
De surcroît, il était mis en évidence que les dirigeants des deux sociétés de droit britanniques visées dans l’ordonnance exerçaient également des fonctions de direction dans les sociétés de droit français DORIS ENGINEERING, STAT R…, STAT ASSETS MANAGEMENT ou STAT SERVICES SAS et que l’ensemble de ces sociétés appartenaient toutes au groupe informel STAT R….
Ainsi, il relevait une présomption simple selon laquelle le centre décisionnel des deux entités de droit britannique était commun et se situait dans les locaux des sociétés françaises.
Dès lors, il retenait une connexité de direction et de moyens d’exploitation, ainsi que des activités similaires entre les sociétés de droit britannique STAT HOLDINGS INTERNATIONAL LMITED et STAT R… LIMITED et les sociétés SAS STAT R…, SA DORIS ENGINEERING et SASU STAT ASSETS MANAGEMENT et présumait que les sociétés britanniques ne disposaient pas des moyens matériels et humains suffisants en GRANDE BRETAGNE et que leurs activités étaient réalisées en FRANCE, via les sociétés françaises sus-mentionnées disposant d’un personnel qualifié et ce, sans s’acquitter de leurs obligations déclaratives.
Il convient d’observer que l’administration n’a pas à produire des éléments à charge et à décharge et que le JLD n’a pas à se prononcer sur des indices graves et concordants à l’instar d’un magistrat instructeur.
Les éléments retenus étant constitutifs de présomptions simples d’agissements frauduleux, le JLD s’étant bien livré à la vérification concrète du bien-fondé de la requête ;
2) sur l’irrégularité du recours à la procédure de visite et de saisie
II y a lieu de rappeler que les dispositions de l’article L. 16 B du LPF ont été totalement modifiées par la loi n° 2008 – 776 du 4 août 2008 et qu’il est vain de se reporter aux travaux préparatoires de la loi du 29 décembre 1984 pour déduire que le législateur avait voulu subordonner l’engagement d’une procédure de visite et de saisie à l’existence de circonstances exceptionnelles.
S’agissant de l’élément intentionnel de la fraude, dans le cadre de l’enquête préparatoire, le champ d’application des dispositions actuelles de l’article L. 16 B du LPF n’impose pas de rechercher l’élément intentionnel de l’agissement frauduleux présumé.
Autrement dit, le choix de recourir à une enquête dite “lourde” n’est pas soumise à une condition édictée par les dispositions de l’article L. 16 B du LPF.
Le JLD devait seulement apprécier s’il existait de simples présomptions d’exercice d’une activité commerciale même partielle avec les moyens humains et matériels d’une autre société installée sur le territoire national et/ou de manquement aux obligations déclaratives.
Ce moyen sera écarté
3 ) l’atteinte au droit au respect du domicile garantie par l’article 8 de la CESDH notamment II a été déjà répondu partiellement à plusieurs moyens.
Concernant la violation du droit au respect de la vie privée et familiale, l’article 8 de la CESDH, tout en énonçant le droit au respect de sa vie privée et familiale, est tempéré par son paragraphe 2 qui dispose que “il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui”.
En l’espèce, le JLD, saisi sur requête de l’administration, a effectué un contrôle de proportionnalité entre les présomptions qui lui étaient produites et l’atteinte aux libertés portée aux sociétés visitées. Il a estimé qu’une enquête lourde était nécessaire, étant précisé que le recours à l’article L. 16 B du LPF n’a pas un caractère subsidiaire par rapport aux autres moyens d’investigations de la DGFP, notamment ceux prévus par l’article L. 47 du LPF (vérification de comptabilité).
Par ailleurs l’argument relatif à la notion d’établissement stable relève de l’appréciation des juges du fond et non pas du JLD, ni du délégué du Premier Président statuant en appel, lesquels ne sont pas les juges de l’impôt.
En outre, le fait que le JLD ait délivré une ordonnance de visite et de saisie un jour après la présentation de la requête est sans incidence sur la validité de la procédure, étant précisé que le JLD chargé d’instruire ces demandes est déchargé de ses attributions pénales et que le nombre d’annexés (38) n’est pas très important au regard d’autres dossiers dont il a la charge.
Enfin, s’agissant de la critique portant sur la caractère pré-rédigé des ordonnances, le JLD signataire de l’ordonnance est également destinataire d’une copie numérique de celle-ci, lorsque la requête est déposée au greffe du tribunal. Entre le dépôt et la signature de l’ordonnance, il peut modifier à sa guise le modèle d’ordonnance qui lui est proposé en supprimant des arguments non-pertinents, en les remplaçant par une autre motivation et enfin, peut tout simplement refuser de faire droit à la requête de l’administration. En ayant cette possibilité de modifier, de rectifier ou de refuser de délivrer une autorisation, il s’approprie l’autorisation qu’il signe, son rôle ne se limitant pas à une simple mission de chambre d’enregistrement.
Ainsi cette pratique des ordonnances pré-rédigées n’est qu’une facilité proposée au juge par l’administration. Ce dernier peut s’en affranchir, ayant en sa possession la copie numérique de l’ordonnance ;
ALORS QUE, d’une part, seules des présomptions de fraude fiscale peuvent justifier des visites domiciliaires, portant atteinte au droit au respect du domicile ; qu’en estimant que « le champ d’action de l’administration fiscale doit être relativement étendu au stade de l’enquête préparatoire, étant précisé qu’à ce stade, aucune accusation n’est portée à l’encontre des sociétés visées dans l’ordonnance » et qu’il suffit de constater de simples présomptions d’exercice d’une activité, même partielle, en France, indépendamment de toute considération de l’obligation de déclarer une telle activité en France ou de l’intention de frauder, le premier président a méconnu l’obligation de disposer de présomptions suffisantes de fraude fiscale pour rendre nécessaire une visite domiciliaire, et a violé l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ;
ALORS QUE, d’autre part, il était soutenu dans les conclusions pour la société DORIS ENGINEERING que dès lors que les documents produits par l’administration, permettaient de constater que, contrairement à ce qu’avait considéré le juge ayant autorisé la visite domiciliaire, les sociétés britanniques disposaient de locaux en Grande-Bretagne, siège social et locaux d’activité, lesquels devaient être ramenés à leur activité réelle, portant pour l’une sur des placements financiers et pour l’autre sur le détachement de salariés auprès de ses clients, qu’elles y disposaient de salariés établissant la réalité de leur activité, qu’elles y disposaient de comptes bancaires, et que si leurs dirigeants étaient tous domiciliés […] et dirigeaient également des sociétés françaises, cela s’expliquait pas le fait que l’ensemble de ses sociétés formaient un groupe, dont la société DORIS ENGINEERING était la holding, les pièces fournies par l’administration établissant qu’elle détenait 70% des parts de la société STAT HOLDING INTERNATIONAL, laquelle possédait 100% des actions de la société STAT R… LIMITED, le fait qu’elles exercent toutes dans le domaine de la prospection pétrolière et gazière en mer étant inhérent également à la structure du groupe, que le fait que le site stat.marine de la holding britannique ait été créé en France, auprès d’un opérateur français, portant sur une simple prestation de service réalisée pour STAT HOLDING INTERNATIONAL, ne pouvait par conséquent donner aucune information sur le lieu d’exécution de sa propre activité, et que dès lors, il n’existait aucune présomption de fraude fiscale ; qu’en se contentant d’affirmer que les motifs de l’ordonnance du JLD établissaient suffisamment l’existence des présomptions d’activité des […] , sans répondre à ces concluions, le premier président a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QU’enfin et en tout état de cause, sont seuls imposables les bénéfices tirés d’une activité déployée en France ; qu’en se contentant de prendre en compte les indices erronés du défaut de moyen matériels et humains en Grande Bretagne des sociétés britanniques, sans disposer d’aucun indice concret d’une activité de ces sociétés en France, l’administration n’établissant pas que les salariés de ces sociétés travaillaient en France pour leur compte, qu’elles passaient leurs contrats en France, ou, s’agissant de la société STAT HOLDING INTERNATIONAL que ses dirigeants, résidents en France, ne se déplaçaient jamais hors de France, le premier président qui n’a constaté aucune présomption de fraude fiscale, a violé tant l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales que les articles 6, paragraphe 1, et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme.
DERNIER MOYEN DE CASSATION
Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR rejeté la requête en nullité des opérations de visite domiciliaire ;
AUX MOTIFS QUE 1) sur l’absence de preuve de l’habilitation spéciale délivrée aux agents ayant procédé à la visite
Sur ce point, il suffît de se reporter au dossier de fond (dossier vert) présenté le 8 juin 2016, à l’appui de la requête pour constater que les habilitations nominatives des agents des finances publiques (au nombre de 14) habilités à effectuer les visites et à procéder à des saisies, existent en version papier et également dans le CD-ROM qui contient, en version numérisée, les pièces présentées au JLD.
Ce moyen sera rejeté.
2) sur l’insuffisance de l’information due aux occupants subissant la visite domiciliaire
II a déjà été répondu à ce moyen, invoqué lors de la demande d’annulation de l’ordonnance, au motif que l’article L. 16 B du LPF ne prévoit pas que l’ordonnance de visite et de saisie doit comporter l’information selon laquelle l’occupant des lieux dispose du droit de saisir le JLD signataire de l’ordonnance au cours des opérations.
Il y a lieu de préciser qu’un officier de police judiciaire, chargé de veiller au respect des droits de la défense était présent lors des opérations et qu’il n’aurait pas manqué de prendre attache avec le JLD si un incident était intervenu lors de la visite, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce, l’occupant des lieux n’ayant formulé aucune observation.
Enfin, l’article L. 16 B du LPF a été jugé conforme aux dispositions de la CESDH et notamment à son article 6§1. Par ailleurs, un recours juridictionnel effectif existe devant le délégué du Premier président et il a été exercé par la requérante devant notre juridiction.
Ce moyen sera écarté.
3)sur la violation des garanties prévues par l’article L. 16 B du LPF pour le respect des droits de la défense et du secret professionnel
En extournant les fichiers et courriels d’avocats identifiés suite à une liste de noms communiquée par l’occupante des lieux, Mme Anne-Sophie M…, comme l’indique le procès-verbal de visite et de saisie, les agents de la DGFP ont pris toute mesure pour assurer la confidentialité des échanges avocat-client, respectant ainsi le privilège légal.
Par ailleurs, aucune pièce n’a été produite à l’audience pour démontrer qu’un document protégé par le secret professionnel a été appréhendé par les agents des finances publiques.
Ce moyen sera rejeté.
4) l’atteinte objective aux impératifs d’impartialité et d’indépendance de l’OPJ intervenant dans l’opération au retard de sa situation de subordination ;
II est constant qu’un OPJ relève, aux termes du code de procédure pénale, de l’autorité judiciaire que ce soit en matière pénale (Parquet, juge d’instruction) qu’en matière de visite domiciliaire, en l’espèce, le juge des libertés et de la détention signataire de l’ordonnance.
L’article L. 16 B du LPF énonce clairement que ” La visite et la saisie de documents s’effectuent sous l’autorité et le contrôle du juge qui les a autorisées. A cette fin, il donne toutes instructions aux agents qui participent à ces opérations.
Il désigne un officier de police judiciaire chargé d’assister à ces opérations et de le tenir informé de leur déroulement”.
Il s’en suit que peu importe son statut, sa mise disposition ou son détachement, seule sa qualité d’OPJ doit être retenue et à ce titre, rien n’autorise la requérante à affirmer que l’OPJ se soit affranchi de son impartialité, de sa mission de veiller au respect aux droits de la défense et d’informer le JLD d’un incident pendant les opérations.
Ce moyen sera rejeté.
En conséquence, la demande d’annulation des opérations de visite et de saisie intervenues le 16 juin 2016 au […] dans les locaux de la société DORIS ENGINEERING SA sera rejetée.
Enfin, aucune considération ne commande qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, d’une part, l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales ne prévoyant pas la possibilité de faire informer le magistrat ayant délivré l’autorisation de toute difficulté tenant aux opérations de visite domiciliaires, serait-ce par l’intermédiaire de l’Officier de police judiciaire qu’il doit désigner à cette fin et n’offrant aucune garantie au justiciable contre les irrégularités dans la saisie, la remise d’une copie de l’ordonnance autorisant cette visite ne permettant de s’assurer de la connaissance effective de ce recours, il méconnait le droit à un recours effectif et immédiat contre les atteintes excessives au droit au respect de la vie privée ou au secret des correspondances avec un avocat ; que, dès lors, toute visite domiciliaire méconnait le droit à ce recours effectif, en violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ;
ALORS QUE, d’autre part, l’Officier de police judiciaire désigné par le juge des libertés et de la détention afin de lui rendre compte des conditions de réalisation des opérations de visite domiciliaire, doit présenter les mêmes garanties d’impartialité que le magistrat qu’il représente ; que, dans les conclusions déposées pour la société DORIS ENGINEERING, il était soutenu que l’officier de police judiciaire désigné pour contrôler les opérations ne présentait pas les garanties d’impartialité nécessaires pour rendre compte de l’existence d’une difficulté concernant les conditions d’exécution des opérations et notamment des conditions dans lesquelles les agents de l’administration fiscale avaient assuré le respect du secret des correspondances entre la société et ses avocats (conclusions, p. 7) ; qu’en se contentant de relever qu’en sa qualité d’officier de police judiciaire, le policier désigné par le juge continuait à dépendre de l’autorité judiciaire, quand il résultait de son affectation auprès de la Direction générale des douanes et des droits indirects, service de l’administration fiscale, qu’il ne présentait plus les garanties d’impartialité objective pour assurer ce contrôle, le premier président a violé tant l’article L. 16 B II du Livre des procédures fiscales que les articles 6 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.