Secret des correspondances : 20 février 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 17-26.444

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Secret des correspondances : 20 février 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 17-26.444
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20 février 2019
Cour de cassation
Pourvoi n°
17-26.444

COMM.

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 février 2019

Rejet

Mme MOUILLARD, président

Arrêt n° 156 F-D

Pourvoi n° V 17-26.444

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ la société Autobuses Hermanos E…, société de droit espagnol,

2°/ la société Group Sercolux, société de droit espagnol,

toutes deux ayant leur siège […] , […]

contre l’ordonnance rendue le 13 septembre 2017 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 15), dans le litige les opposant au directeur général des finances publiques, représenté par le chef des services fiscaux chargé de la direction nationale d’enquêtes fiscales, domicilié […] ,

défendeur à la cassation ;

Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 8 janvier 2019, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Gauthier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Labat, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Gauthier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat des sociétés Autobuses Hermanos E… et Group Sercolux, de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques, représenté par le chef des services fiscaux chargé de la direction nationale d’enquêtes fiscales, l’avis de Mme Pénichon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l’ordonnance attaquée, rendue par le premier président d’une cour d’appel (Paris, 13 septembre 2017), qu’un juge des libertés et de la détention a, sur le fondement de l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales, autorisé des agents de l’administration des impôts à effectuer une visite avec saisies dans des locaux et dépendances situés à Villetaneuse (93), susceptibles d’être occupés par les sociétés de droit espagnol Autobuses Hermanos E… SA (la société AHA), dont le dirigeant est M. E…, et Group Sercolux (la société Sercolux), et la société anonyme Société d’exploitation des cars Z… (la SECL), afin de rechercher la preuve de la soustraction de la société AHA au paiement de l’impôt sur les bénéfices et des taxes sur le chiffre d’affaires ; que les sociétés AHA et Sercolux (les sociétés) ont relevé appel de l’ordonnance d’autorisation et exercé un recours contre le déroulement des opérations de visite, effectuées le 16 juin 2016 ;

Sur le second moyen :

Attendu que les sociétés font grief à l’ordonnance de rejeter leur recours contre le déroulement des opérations de visite alors, selon le moyen :

1°/ que les sociétés faisaient valoir que M. E… contacté par téléphone n’a jamais correspondu avec l’officier de police judiciaire dans une langue qu’il comprend, qu’il n’a jamais déclaré aux agents de l’administration fiscale avoir compris la nature et la portée des notifications orales qui lui ont été faites, mais aussi et surtout n’a pas pu comprendre les effets d’un mandat, que si M. E… avait effectivement été informé de ce que M. L… (agent de l’administration fiscale) mentionne lui avoir notifié en espagnol, jamais il n’aurait mentionné que la Société Autobuses Hermanos E… aurait été la seule occupante des locaux situés à Villetaneuse dès lors qu’il est constant qu’il s’agit du siège social de la société de droit français SARL E… ; qu’ayant relevé qu’en l’espèce M. E… a été contacté téléphoniquement en qualité de représentant légal de la société Autobuses Hermanos E… SA, laquelle occupe les lieux devant être visités, qu’en son absence, il a désigné, après un échange téléphonique en langue espagnole avec M. O…, ce dernier, comme étant son représentant durant les opérations, qu’il n’est pas contesté que M. O… parle et comprend l’espagnol et qu’il a accepté cette mission, que cette désignation a été confirmée à M. L…, inspecteur principal des finances publiques, (cf. ” E… nous indique alors qu’il ne peut se rendre sur place et désigne M. O… pour le représenter durant ces opérations ») et confirmée par téléphone à M. F…, OPJ, que s’agissant de la notification de l’ordonnance et des droits y afférant, elle doit au cas présent être faite au représentant désigné à savoir M. O… qui parle et comprend parfaitement la langue française, qu’en l’espèce, le procès-verbal du 16 juin 2016 indique bien les voies et délais de recours et il est précisé la phrase suivante « mentionnons qu’il est porté à la connaissance de M. O… de la faculté de faire appel à un conseil de son choix », qu’il convient de relever que le procès-verbal susmentionné a été signé par M. O… sans la moindre réserve de sorte que les attestations produites postérieurement par les sociétés requérantes sont inopérantes, pour retenir qu’il résulte donc que M. E… a sans conteste pu être informé par M. O… en langue espagnole de l’objet de la visite, qu’il a désigné M. O… comme étant son représentant durant les opérations, que ce dernier s’est vu notifier l’ordonnance et les droits y afférant en langue française, de sorte que la présence d’un interprète assermenté n’était pas nécessaire, le premier président de la cour d’appel se prononce par des motifs inopérants dès lors que si M. O… indiquait parler et comprendre l’espagnol, cette circonstance ne permettait pas d’établir que M. E… comprenait la technicité des termes employés et partant a violé les articles L. 16 B du livre des procédures fiscales et 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

2°/ que les sociétés faisaient valoir que M. E… contacté par téléphone n’a jamais correspondu avec l’officier de police judiciaire dans une langue qu’il comprend, qu’il n’a jamais déclaré aux agents de l’administration fiscale avoir compris la nature et la portée des notifications orales qui lui ont été faites, mais aussi et surtout n’a pas pu comprendre les effets d’un mandat, que si M. E… avait effectivement été informé de ce que M. L… (agent de l’administration fiscale) mentionne avoir notifié en espagnol, jamais il n’aurait mentionné que la Société Autobuses Hermanos E… aurait été la seule occupante des locaux situés à Villetaneuse dès lors qu’il est constant qu’il s’agit du siège social de la société de droit français SARL E… ; qu’ayant relevé qu’en l’espèce M. E… a été contacté téléphoniquement en qualité de représentant légal de la société Autobuses Hermanos E… SA, laquelle occupe les lieux devant être visités, qu’en son absence, il a désigné, après un échange téléphonique en langue espagnole avec M. O…, ce dernier comme étant son représentant durant les opérations, qu’il n’est pas contesté que M. O… parle et comprend l’espagnol et qu’il a accepté cette mission, que cette désignation a été confirmée à M. L…, inspecteur principal des Finances Publiques, (cf. ” E… nous indique alors qu’il ne peut se rendre sur place et désigne M. O… pour le représenter durant ces opérations ») et confirmée par téléphone à M. F…, OPJ, que s’agissant de la notification de l’ordonnance et des droits y afférant, elle doit au cas présent être faite au représentant désigné à savoir M. O… qui parle et comprend parfaitement la langue française, qu’en l’espèce, le procès-verbal du 16 juin 2016 indique bien les voies et délais de recours et il est précisé la phrase suivante « mentionnons qu’il est porté à la connaissance de M. O… de la faculté de faire appel à un conseil de son choix », qu’il convient de relever que le procès-verbal susmentionné a été signé par M. O… sans la moindre réserve de sorte que les attestations produites postérieurement par les sociétés requérantes sont inopérantes, pour retenir qu’il résulte donc que M. E… a sans conteste pu être informé par M. O… en langue espagnole de l’objet de la visite, qu’il a désigné M. O… comme étant son représentant durant les opérations, que ce dernier s’est vu notifier l’ordonnance et les droits y afférant en langue française, de sorte que la présence d’un interprète assermenté n’était pas nécessaire, sans répondre au moyen faisant valoir que si M. E… avait effectivement compris ce qui lui était indiqué il n’aurait jamais indiqué que la société qu’il dirige occupait seule les locaux, qui constituaient le siège social de la société de droit français SARL E…, le premier président de la cour d’appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

3°/ que les sociétés faisaient valoir l’irrégularité de la conversation en espagnol tenue par l’agent des impôts ; qu’ayant relevé que la traduction en langue espagnole a été effectuée par M. O…, dont il n’est pas contesté qu’il parle et comprend cette langue, que cette traduction avait pour objet d’expliquer le motif de la visite et de faire désigner un représentant de l’occupant des lieux durant ces opérations, que si M. L…, inspecteur principal, a souhaité avoir une confirmation de cet accord et/ou expliquer les raisons de la visite et que cette conversation a été faite en langue espagnole, elle a été effectuée en présence de M. O…, faisant fonction d’interprète et dont il n’était pas nécessaire qu’il soit assermenté, pour en déduire que cet élément ne fait aucunement grief, s’agissant de la réitération d’une information que M. O… avait déjà traduite en langue espagnole, quand il relève que l’agent des impôts a voulu avoir une confirmation de l’accord et/ou expliquer les raisons de la visite, le premier président n’a par là-même pas constaté qu’il s’agissait de la réitération de l’information qui aurait été communiquée par M. O… et a violé l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales ensemble l’article 6-1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu que ni l’article L. 16 B du livre des procédures fiscales ni aucune autre disposition n’impose la présence d’un interprète à l’occasion d’une visite domiciliaire et que ce texte prévoit que l’ordonnance est notifiée verbalement et sur place, au moment de la visite, à l’occupant des lieux ou à son représentant ; que l’ordonnance constate que M. O…, salarié de la SECL, qui s’est entretenu téléphoniquement avec M. E…, dirigeant de la société AHA, lequel était absent des lieux, a été désigné par celui-ci comme représentant durant les opérations, à la suite d’échanges tenus en langue espagnole, cette désignation ayant été confirmée par M. E… à un agent de l’administration fiscale et à l’officier de police judiciaire ; qu’il relève que M. O… s’est vu ensuite notifier l’ordonnance et les droits afférents ; qu’en l’état de ces appréciations souveraines, le premier président, qui n’avait pas à répondre au moyen inopérant invoqué par la deuxième branche ni à procéder à la constatation invoquée par la troisième branche, a pu retenir que les opérations de visite ne nécessitaient pas la présence d’un interprète et étaient régulières ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Autobuses Hermanos E… SA et la société Group Sercolux aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt février deux mille dix-neuf.

 


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