Secret des correspondances : 15 septembre 2022 Cour d’appel de Dijon RG n° 22/00294

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Secret des correspondances : 15 septembre 2022 Cour d’appel de Dijon RG n° 22/00294
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15 septembre 2022
Cour d’appel de Dijon
RG n°
22/00294

FV/IC

[F] [I]

[O] [M]

C/

S.A.S. CRIT

Expédition et copie exécutoire délivrées aux avocats le

COUR D’APPEL DE DIJON

2ème chambre civile

ARRÊT DU 15 SEPTEMBRE 2022

N° RG 22/00294 – N° Portalis DBVF-V-B7G-F42J

MINUTE N°

Décision déférée à la Cour : ordonannce de référé rendue le 22 février 2022,

par le Président du tribunal judiciaire de Mâcon – RG : 21/00163

APPELANTS :

Monsieur [F] [I]

né le 12 Février 1977 à TÜBINGEN (Allemagne)

domicilié :

[Adresse 1]

[Localité 2]

Madame [O] [M]

née le 13 Janvier 1973 à [Localité 6] (71)

domiciliée :

[Adresse 5]

[Localité 6]

représentés par Me Cécile RENEVEY – LAISSUS, membre de la SELARL ANDRE DUCREUX RENEVEY BERNARDOT, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 2

assistée de Me François BERBINAU, membre de L’AARPI cabinet BFPL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

S.A.S. CRIT prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis :

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Claire GERBAY, avocat au barreau de DIJON, vestiaire : 126

assistée de Me Karim BEYLOUNI, membre de BEYLOUNI CARBASSE GUÉNY VALOT PERNET AARPI, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 09 juin 2022 en audience publique devant la cour composée de :

Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre, Président, ayant fait le rapport,

Sophie DUMURGIER, Conseiller,

Sophie BAILLY, Conseiller,

qui en ont délibéré.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Maud DETANG, Greffier

DÉBATS : l’affaire a été mise en délibéré au 15 Septembre 2022,

ARRÊT : rendu contradictoirement,

PRONONCÉ : publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

SIGNÉ : par Françoise VAUTRAIN, Présidente de Chambre, et par Maud DETANG, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Madame [O] [M] et Monsieur [F] [I] ont été employés au sein de la société Crit. Ils ont l’un et l’autre été licenciés pour abandon de poste Monsieur [I] le 10 août 2018 et Madame [M] le 28 août 2020.

Le 5 mars 2021,la société Crit, qui soupçonnait Madame [M] et Monsieur [I] d’actes de concurrence déloyale au profit de la société Iziwork, a sollicité sur requête l’autorisation du président du tribunal judiciaire de Mâcon de procéder à des mesures d’instruction à leurs domiciles à la fois personnels et professionnels, afin que soient saisis l’ensemble des éléments de preuve nécessaires pour engager leur responsabilité et celles de toutes personnes identifiées devant les juridictions du fond, qu’elles soient civiles ou pénales.

Par ordonnance rendue le 23 mars 2021, suivie d’une ordonnance rectificative rendue le 29 mars 2021, le président du tribunal judiciaire de Mâcon a fait droit à cette demande et a désigné Maître [YW] [WM], huissier de justice à Orléans, et Maître [JS] [BN], huissier de justice à Mâcon, les autorisant :

– à se rendre respectivement et simultanément aux domiciles – personnels et professionnels – d'[F] [I], [Adresse 1]) et d'[O] [M], [Adresse 5]) ;

– à y recueillir :

« [‘] sur le Matériel Informatique d'[O] [M] et [F] [I] en particulier sur leurs boites e-mails, de tout courriel, fichier, dossier, SMS et plus généralement, tout document en lien avec l’activité de Crit, contenant l’un quelconque des mots clés suivants,

entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019 :

* [F] [I], [O] [M], [FO] [RZ], [Z] [BY], Iziwork, Partner, Affaire(s), Bascule, Projet, Accord, Accord cadre, Cadre, AO / appel d’offre, Client(s), Fichier client(s), Liste client(s), Prospect(s), Fichier prospect(s), Liste prospect(s), Prospection, Offre(s), Offre(s) commerciale(s), Négociation, Collaboration, Ouverture, Rdv/ rendez-vous, Rencontre, Proposition/ proposition commerciale, Commercial, Recrutement, Recrutement CDD/CDI, offre(s) de recrutement CDD/CDI, Pla de conquête, Intérimaire(s), Fichier(s) intérimaire(s), Liste intérimaire(s), Digital, Stratégie, Business plan, Chiffre d’affaires, Marge, Marge brute, Secteur, Région, [Localité 6], Bourgogne, Centre ;

* ainsi que les noms des clients / prospects de Crit figurant dans le fichier Excel « Business Plan – Iziwork Partners – [F] & [O] (3)» retrouvé dans l’ordinateur portable professionnel d'[O] [M] : Allainé Lumière, Allainé Log, Allainé Pro logi, Id Log, Carrefour, MJB, Groupe Carrefour, Ronsard, Naturex, [CV] [UN], Vins Georges Duboeuf, Chevenet, Dubois, SNCTP, CV Maintenance, SMEE, Eurovia, Vinci, Eiffage, Limoge Revillon, Guinot TP, Tournier, Salaisons du Mâconnais, Cémoi, Stef, KN, Kuehne Nagel, Caves coopératives, Eckes granini, Terres de France, Courant ;

* et les noms des clients / prospects de l’agence Crit de [Localité 8], dont [O] [M] avait la responsabilité (noms qui figuraient dans deux fichiers « Cibles TOP 30 [Localité 8] Avril 2019 » et « Cibles prioritaires MAI 2018 » se trouvant sur le disque dur de l’ordinateur portable d'[O] [M]) :

o Sociétés identifiées comme faisant partie du Top 10 des clients de l’agence de [Localité 8] en avril 2019 : Renault, Pain Jacquet, Prysmian, Berner, Lincet, Galva Afa, Idnt, Chemetal, Kep Ou Kep Technologies, Graindorge, Systemes Attum,France Cheval, Savoie Refractaires, Coved, Trans Dev ;

o Sociétés identifiées comme faisant partie du Top 20 des prospects de l’agence de [Localité 8] en avril 2019 : Jovi Dor Ou Jovid Or, Atelier De Joigny, Rosler, Bekalube, Guernet Compresseur, Armatop, Befor, Se.Ma.Me, Contrôle Et Maintenance, Tcp, Altead, Ibre, Cm, Icaunaise Groupe, Rougeot Cano, La Manufacture, Soprema, Schott France, Sam, Tubauto, Serpollet, France Com Prefac ;

o Sociétés figurant dans le fichier « Cibles prioritaires MAI 2018 »: Aba, Alfacoustic, Avs, Brico Maillot, Cliches 2000, Color By Guernet, Cpf, Domanys, Entreposr Echafaudages, Europcar, Ficap, Fromagerie Lincet, Garage Ducreux, Goujet Déménagement, Henriot Equipements, Jardiland, Ltm, Lumilec, Matrex, Metalise Industrie, Meubles Barre, Moulins Dumee, Nadalon, Sarl Racine Construction, Sagop, Sotis Sas, Systemes Attum, Taxi Fret De L’yonne, Auchan, Delavicyul, Doras, Fmc Technologie, La Nougatine, Prysmian Gron, Prysmian Paron, Saur, Technique & Décor, Timev, Cofely Endel Gdf Suez, Cofely Gdf Suez Energie S, Cegelec Bourgogne, Fmc Technologie, Senonais Mobilites,Veolia Onyx;

* les noms de clients de l’agence de [Localité 8] dont le référent était [FO] [RZ] en octobre 2019 : Choquet, Cjs-Plv, Csia, Eiffage, Ermas, Fontaine, Froid Henriot, Id Tp, Kep Technoligies Integrated Sy, Ktis, Ltm, Meublena, Pirelli Energie Cables Et Syst, Primedge, Prysmian Energie Et Cables, Rosler, Sera, Thiriet Disval, Timev, Veolia ‘ Valest, Yltec ;

* les noms des intérimaires de Crit délégués de janvier à août 2020 aux clients correspondant à la catégorie « Bascule » dans le fichier Excel « Business Plan – Iziwork Partners – [F] & [O] (3) »: [D] [SE], [RU] [OP], [AI] [FJ], [DA] [L], [A] [MG] [ML], [ZB] [B], [K] [UT], [W] [X], [H] [G], [S]. ».

– à ‘Procéder, ou faire procéder par l’expert informatique l’assistant, à la copie des Documents Collectés Sur Le Matériel Informatique sur quelque support que ce soit, en vue de leur mise sous séquestre à l’étude de l’huissier instrumentaire, ou en tout autre local déterminé par celui-ci ; [‘]’

– à ‘ ‘Procéder à la copie, ou faire procéder par l’expert informatique l’assistant, sur quelque support que ce soit, des Documents Collectés Après Récupération Sur le Matériel Informatique d'[O] [M] ou [F] [I], pour être mise sous séquestre à l’étude de l’huissier instrumentaire, ou en tout autre local déterminé par celui-ci ; [‘]’

Le président dit par ailleurs ‘ que l’huissier instrumentaire sera gardien de l’exemplaire des documents qui lui seront remis, déposés à son étude, ou en tout autre local déterminé par lui, pendant toute la durée de la procédure et les tiendra à la disposition de la justice à première réquisition de celle-ci ; [‘] »

Les huissiers exécutent leurs constats le 4 mai 2021.

Par acte d’huissier du 12 octobre 2021, Monsieur [F] [I] et Madame [O] [M] assignent en référé la société Crit devant le président du tribunal judiciaire de Mâcon aux fins de voir rétracter, sur le fondement des articles 489 alinéa 2 et 496 alinéa 2 du code de procédure civile, l’ordonnance sur requête et de relever les huissiers désignés de leur mission de séquestre. Ils demandent qu’il soit ordonné aux huissiers de leur restituer sans délai l’intégralité des documents saisis, et la condamnation de la société Crit à leur verser à chacun la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens, et d’ordonner l’exécution de la décision à intervenir au seul vu de la minute.

Au terme de leurs dernières écritures, Monsieur [I] et Madame [M], demandent au magistrat :

– à titre principal, eu égard à l’absence de respect des conditions de l’article 145 du code de procédure civile,

– de prononcer la rétractation de l’ordonnance rendue le 23 mars 2021 en toutes ses dispositions et relever Maître [YW] [WM] et Maître [JS] [BN], huissiers de justice, de leurs missions de séquestre ;

– de prononcer la nullité des procès verbaux établis par lesdits huissiers ;

– d’ordonner aux huissiers de justice susmentionnés de leur restituer l’intégralité des pièces appréhendées lors des opérations qu’ils ont menées le 4 mai 2021, de détruire tout autre support qui aurait servi au transfert des-dites données, dans un délai de 72 heures à compter de la signification de la décision de rétractation, et de dresser un procès-verbal de cette destruction dont un exemplaire leur sera remis ;

– d’interdire aux huissiers de justice susmentionnés, ainsi qu’aux experts informatiques dont ils étaient accompagnés de faire mention ou de révéler à quelque titre que ce soit des informations auxquelles ils ont eu accès dans le cadre des opérations qu’ils ont menées à leurs domiciles,

– à titre subsidiaire,

– de juger que l’ordonnance rendue le 23 mars 2021apparaît disproportionnée après rétablissement du principe du contradictoire ;

– de modifier les termes du point 4 de l’ordonnance litigieuse en modifiant notamment la nature des mots clés recherchés et d’ordonner la restitution à leurs égards des documents ne répondant pas à cette ordonnance amendée,

– en tout état de cause,

– d’écarter des débats les pièces adverses n°10 et 11 – la société Crit ayant obtenues ces pièces par une recherche sur l’ordinateur de Madame [O] [M] en violation de ses droits ;

– d’écarter des débats, à titre principal, le contenu des procès-verbaux dressés le 4 mai 2021 par Maître [YW] [WM] et Maître [JS] [BN], les-dits procès-verbaux ne pouvant être pris en compte par le juge de la rétractation dès lors qu’il ne peut en apprécier la validité et, à titre subsidiaire, le contenu du rapport d’expertise figurant au procès-verbal dressé par Maître [JS] [BN] lors de l’accomplissement des mesures d’instruction prescrites par l’ordonnance du 23 mars 2021, ce dernier étant illicite ;

– de condamner la société Crit à leur verser chacun la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens, et d’ordonner que l’exécution de l’ordonnance à intervenir aura lieu au seul vu de la minute.

La société Crit demande pour sa part au président :

A titre principal, de rejeter l’ensemble des prétentions de Monsieur [I] et Madame [M],

A titre subsidiaire, de modifier le point 4 de l’ordonnance en ordonnant à l’huissier que, s’agissant des mots clés du premier tiret, un nouveau tri soit effectué afin que ne soient conservés que les documents comprenant également l’un des termes suivants : ‘Iziwork’, ‘Tahri’, ‘Dardv’, ‘Partner’ et ‘Crit’ et d’ordonner que la restitution partielle ou totale des

documents saisis et l’éventuelle destruction des supports de transfert de ces documents n’interviendra qu’après signification d’une décision définitive sur l’instance en rétractation,

En tout état de cause,

– de rejeter la demande visant à écarter les pièces n° 10 et 11,

– de rejeter la demande visant à ce que soient écartés des débats les procès verbaux dressés le 4 mai 2021 par les huissiers mandatés à cet effet,

– de condamner solidairement les parties demanderesses à lui verser la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens, et de rejeter la demande visant à ce que l’exécution de l’ordonnance ait lieu au seul vu de la minute.

Par ordonnance du 22 février 2022, le président du tribunal judiciaire de Mâcon :

– déboute Monsieur [F] [I] et Madame [O] [M] de l’ensemble de leurs prétentions,

– constate son incompétence matérielle concernant l’exécution de l’ordonnance du 23 mars 2021 rectifiée le 29 mars 2021 et renvoie Monsieur [I] et Madame [M] à mieux se pourvoir devant le juge du fond concernant ce point,

– déboute Monsieur [I] et Madame [M] et la société Cris de leurs demandes respectives au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamne solidairement Monsieur [F] [I] et Madame [O] [M] au paiement des entiers dépens,

– déboute Monsieur [I] et Madame [M] de leur demande d’exécution au seul vu de la minute,

– rejette le surplus des demandes,

– rappelle que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Pour statuer ainsi, le président retient :

– concernant la réunion des conditions de l’article 145 du code de procédure civile :

– sur le retrait des débats des pièces 10 et 11 de la société Crit à l’appui de sa requête :

que bien que le salarié ait droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de sa vie privée, ce droit n’est pas absolu et peut faire l’objet de limitation, notamment lorsque l’employeur soupçonne son salarié d’être en relation avec une société concurrente ; que le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle d’un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi ; qu’en l’espèce, les pièces portées à la connaissance de la juridiction sont issues de la messagerie professionnelle de Madame [M], et qu’il n’est pas démontré qu’ils étaient positionnés dans une rubrique ‘personnel’, ‘privé’ ou tout autre terme permettant de déterminer l’absence de lien avec son activité professionnelle ; que de plus, Madame [M] a volontairement relié son compte Linkedin à sa messagerie professionnelle ; que dès lors, il résulte de l’ensemble de ces éléments que la société Crit n’a pas violé les droits de Madame [M] en portant à l’appui de sa requête ces messages électroniques.

– sur l’absence de motifs légitimes :

* que la requête aux fins de mesures d’instruction du 5 mars 2021 de la société Crit est fondée sur la recherche et l’établissement de preuves de faits susceptibles d’engager la responsabilité des demandeurs notamment pour des faits de concurrence déloyale, d’abus de confiance et de recel d’abus de confiance ; qu’il ressort des pièces versées à l’appui de la requête qu’il est vraisemblable que Madame [M] a été démarchée par la société Iziwork concurrente de la société Crit antérieurement à son licenciement pour faute grave et qu’elle a réalisé un business plan en lien avec la-dite société ; que de même, il résulte des éléments au dossier de la requête que Monsieur [I], licencié également pour faute grave, exerce désormais une activité professionnelle qualifiée de ‘Partner Région Centre Bourgogne’ de la société Iziwork ; que bien que les demandeurs soutiennent que l’ordinateur fixe professionnel attribué antérieurement à son licenciement à Madame [M] a fait l’objet de manipulations et que les documents versés à l’appui des prétentions de la société défenderesse ont été extraits plusieurs mois après qu’elle ait quitté la société Crit et sans la présence d’un huissier, il y a lieu de constater qu’ils ne démontrent ni que des manipulations multiples injustifiées sur l’ordinateur litigieux ont eu lieu ni du caractère détérioré des éléments extraits ;

* que de plus, le procès verbal de constat d’huissier du 26 novembre 2020 de Maître [E] [C], huissier de justice, porte sur l’analyse de l’ancien ordinateur fixe de Madame [M] au sein de la société Crit et que le rapport de copie dressé le 27 novembre 2020 par la société FIP – certifié par Maître [C] avec pour objet d’examiner le – dit ordinateur mentionne notamment la présence d’un contrat d’agent commercial entre la société Iziwork et Monsieur [I] ;

* que le rapport d’expertise informatique de la société Crit du 3 décembre 2020 réalisé par la société FIP mentionne, concernant l’ordinateur fixe de Madame [M], en page 5 que cette dernière est en possession sur des périphériques de stockage USB de documents de travail appartenant à la société Crit et que des informations professionnelles ont été transmises via sa messagerie professionnelle à sa messagerie personnelle, et en page 11 un courriel de Madame [WS] [HT], RH manager de la société Iziwork, à l’attention de Madame [M] lui proposant de devenir un entrepreneur partenaire ; que l’analyse des accès à des fichiers en pages 14 et 15 mentionne notamment celui de l’annuaire client de [Localité 6] du 6 février 2020, une mini présentation Iziwork et un pitch Iziwork du 14 mai 2020 ;

* que pour sa part, le procès verbal de constat d’huissier du 21 décembre 2020 de Maître [KC] [T], huissier de justice, indique en page 15 que Monsieur [F] [I] a été en contact avec l’une des salariées de la société Crit, Madame [JX] [Y], aux fins de la démarcher sur un autre poste d’activité ;

* qu’il résulte des débats qu’aucun élément versé au dossier ne permet de déterminer que les fichiers ouverts sur l’ancien ordinateur fixe professionnel de Madame [M] ou résultant de ses courriels issus de son adresse courriel professionnelle indiquaient une mention ‘privé’ ou ‘personnel’ ;

– que de plus, la société Crit a procédé à l’examen de l’ordinateur professionnel d’une ancienne salariée, puisque Madame [M] n’était plus employée par elle, lorsqu’elle a réalisé la reprise des outils informatiques qui lui avait été mis à disposition dans le cadre de son activité professionnelle ;

– que dès lors, les faits exposés dans la requête ont été corroborés suffisamment par les pièces versées à son appui, et la société Crit a ainsi démontré l’existence d’un motif légitime à obtenir, selon la procédure de requête, la mise en oeuvre d’une mesure d’instruction aux fins de rechercher auprès de deux de ses anciens salariés les éléments permettant de démontrer l’existence d’une concurrence déloyale, ces derniers ayant pu être en contact avec une société tierce, la société Iziwork.

* que l’interprétation de la clause de non concurrence existante entre la société Crit et Madame [M] sa validité ne sauraient ‘trouver une réponse univoque à la présente instance qui a pour unique objet la rétractation de l’ordonnance sur requête du 23 mars 2021 rectifiée le 29 mars 2021″ (sic) ;

* que de plus, l’action future de la société Crit présentée à l’appui de la requête aux fins de mesures d’instruction n’était pas fondée uniquement sur la concurrence déloyale, mais également sur l’abus de confiance, ladite action se devant de n’avoir qu’un caractère hypothétique étant donné les dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, et qu’il ne peut être reproché à la société Crit de ne pas avoir d’ores et déjà engagé une action au fond.

– sur l’irrecevabilité des procès- verbaux issus de l’exécution de l’ordonnance litigieuse à l’appui de la justification de cette dernière :

que dès lors qu’ainsi que retenu plus haut, la société Crit a dûment justifié lors de sa requête aux fins de mesures d’instruction de la légitimité de sa demande compte- tenu des éléments alors versés à l’appui de ses prétentions, la demande d’écarter des débats les procès- verbaux dressés en exécution de l’ordonnance est sans objet, ces documents n’ayant pas été ‘intellectuellement’ pris en compte dans l’appréciation des moyens justifiant cette dernière.

– sur le caractère général et disproportionné de la mission:

* que bien que la recherche puisse paraître vaste eu égard au nombre de mots clés mentionnés dans l’ordonnance du 23 mars 2021, la mission était strictement limitée à différentes périodes, notamment à la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019 antérieure au licenciement de Madame [M] de la société Crit, Monsieur [I] ayant été pour sa part licencié au cours de l’année 2018 ;

* que la lecture de la mission confiée aux huissiers commis permet de constater que cette mission était précisément circonscrite et portait sur des documents précis ayant un lien avec l’activité de la société Crit pour la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019, et notamment le nom des clients et prospects inscrits sur le fichier Excel ‘Business plan – Izíwork Partners – [F] & [O] (3)’ et le nom des clients et prospects de l’agence Crit de [Localité 8] dont Madame [M] a été la responsable, les noms de clients de l’agence de Sens dont le référent était Madame [FO] [RZ] en octobre 2019, les noms des intérimaires de la société Crit délégués de janvier à août 2020 aux clients correspondant à la catégorie ‘Bascule’ dans le fichier Excel ‘Business plan – Iziwork Partners – [F] & [O] (3)’.

* qu’il n’est pas démontré que l’énoncé de la mission – notamment de la recherche des mots clés associés au nom de la société Crit – n’ait pas permis aux huissiers mandatés de connaître l’étendue de la recherche qui était autorisée ;

* qu’il résulte de la mission que l’ordonnance n’autorise aucun transfert et divulgation de données de façon générale ;

* que le caractère disproportionné de la mission n’est pas établi et qu’il n’y a pas lieu à modifier la mission de l’ordonnance du 23 mars 2021 rectifiée le 29 mars 2021.

– sur la violation du secret des affaires et du droit à la vie privée et au secret des correspondances :

* que le secret des affaires reconnu et protégé par l’article L. 151-1 du code de commerce n’est pas en soi un obstacle à la réalisation de mesures d’instruction in futurum sous réserve que le juge qui l’ordonne s’assure de la proportionnalité de la mesure au regard des intérêts des parties.

* que l’ordonnance litigieuse ne cible pas des documents couverts par un secret d’ordre professionnel notamment quant à la période visée par les recherches, et qu’eu égard aux faits de la cause et aux preuves que la société Crit entendait établir ou conserver, les mesures ordonnées apparaissent nécessaires et proportionnées à la protection des intérêts de la partie défenderesse ;

* que de même, l’ordonnance ne cible pas des documents personnels et s’en tient à une mission de recherche caractérisée par des mots clés spécifiques pour découvrir les messages et documents en lien avec l’activité de la société Crit et la recherche d’une utilisation de ces données aux fins de développer une activité tierce concurrente pouvant constituer une activité de concurrence déloyale ou un abus de confiance.

– sur le dépassement de la mission par l’extraction des éléments des années 2020 et 2021 :

que l’instance en rétractation ayant pour seul objet de soumettre à l’examen d’un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l’initiative d’une partie en l’absence de son adversaire, la saisine du juge de la rétractation se trouve strictement limitée à cet objet, et que, dès lors, le contentieux de l’exécution de la mesure d’instruction ordonnée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ne relève pas des pouvoirs du juge de la rétractation mais du juge du fond.

******

Monsieur [F] [I] et Madame [O] [M] font appel par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel le 9 mars 2022.

Par conclusions déposées le 14 avril 2022, ils demandent à la cour d’appel de :

‘ Vu les articles 490, 905, 905-1 et 905-2 du code de procédure civile,

Vu la requête du 5 mars 2021 et l’ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Mâcon le 23 mars 2021, rectifiée le 29 mars 2021,

Vu l’ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Mâcon le 22 février 2022,

Les appelants sollicitent de la cour d’appel de Dijon l’infirmation de l’ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Mâcon en date du 22 février 2022 en ce qu’elle a jugé qu’il n’y avait pas lieu à rétractation de l’ordonnance rendue le 23 mars 2021 et en ce qu’elle a débouté Monsieur [I] et Madame [M] de leurs prétentions, et, statuant à nouveau, de :

A titre principal

– Juger que la requête déposée le 5 mars 2021 par la société Crit afin d’être autorisée à pratiquer des mesures d’instruction in futurum sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ne remplit pas les conditions fixées par cet article et par la jurisprudence.

En conséquence,

– Prononcer la rétractation de l’ordonnance rendue le 23 mars 2021 en toutes ses dispositions et relever Me [YW] [WM] et Me [JS] Voillequin-Arnal, huissiers désignés aux fins de son exécution de leur mission de séquestre.

– Prononcer la nullité des procès-verbaux établis par lesdits huissiers et des mesures d’instruction diligentées.

– Leur ordonner (i) de restituer l’intégralité des pièces appréhendées lors des opérations qu’ils ont menées le 4 mai 2021, respectivement à Monsieur [I] et à Madame [M], (ii) de détruire tout autre support qui aurait servi au transfert des-dites données, et ce dans un délai de 72 heures à compter de la signification de la décision de rétractation, et de dresser procès-verbal de cette destruction, dont un exemplaire serait remis à Madame [M] et Monsieur [I] chacun.

– Leur interdire, ainsi qu’aux experts informatiques dont ils étaient accompagnés de faire mention ou de révéler à quelque titre que ce soit des informations auxquelles ils ont eu accès dans le cadre des opérations qu’ils ont menées aux domiciles de Madame [M] et de Monsieur [I].

A titre subsidiaire

– Juger que l’ordonnance rendue le 23 mars 2021 sur requête de la société Crit du 5 mars 2021 apparaît disproportionnée après rétablissement du débat contradictoire.

En conséquence,

– Modifier les termes du point (4) de l’ordonnance rendue le 23 mars 2021. Les termes du point (4) étant remplacés par les termes suivants :

‘ 4) Se faire remettre ou rechercher et en toute hypothèse prendre copie avec l’assistance de l’expert informatique, sur le Matérielle (sic) Informatique d'[O] [M] et d'[F] [I] en particulier sur leurs boites emails, de tout courriel, fichier, dossier, sms et plus généralement, tout document ayant été créé et/ou modifié entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019, contenant le mot-clé ‘Crit’ et l’un quelconque des mots clés suivants : [‘] »

– Ordonner à Me [YW] [WM] et Me [JS] Voillequin-Arnal (i) de restituer, respectivement à Monsieur [I] et à Madame [M], l’intégralité des pièces appréhendées lors des opérations qu’ils ont menées le 4 mai 2021 mais ne répondant pas aux critères de cette ordonnance amendée, et (ii) de détruire tout autre support qui aurait servi au transfert des-dites pièces, et ce dans un délai de 8 jours à compter de la signification de la décision de rétractation, et de dresser procès-verbal de cette destruction, dont un exemplaire serait remis à Madame [M] et Monsieur [I] chacun.

– Leur interdire, ainsi qu’aux experts informatiques dont ils étaient accompagnés, de faire mention ou de révéler à quelque titre que ce soit des informations relatives aux-dites pièces ne répondant pas aux critères de l’ordonnance amendée.

En tout état de cause

– Juger que les pièces n°10 et 11 produites par la société Crit ont été obtenues par une recherche sur l’ordinateur de Madame [M], en violation de ses droits.

– Juger :

o A titre principal, que le contenu des procès-verbaux dressés le 4 mai 2021 par Me [YW] [WM] et Me [JS] Voillequin-Arnal lors de l’accomplissement des mesures d’instruction prescrites par l’ordonnance du 23 mars 2021 ne peut être pris en compte par le juge de la rétractation dès lors qu’il ne peut en apprécier la validité.

o A titre subsidiaire, que le contenu des listes de documents saisis figurant dans les procès-verbaux dressés par Me [JS] [BN] et Me [WM] le 4 mai 2021 constitue des informations obtenues de manière illicite.

En conséquence

– Ecarter des débats les pièces adverses n°10 et 11 produites par Crit en violation des droits de Madame [M].

– Ecarter des débats :

o A titre principal, l’intégralité du contenu des procès-verbaux dressés le 4 mai 2021 par Me [YW] [WM] et Me [JS] Voillequin-Arnal lors de l’accomplissement des mesures d’instruction prescrites par l’ordonnance du 23 mars 2021.

o A titre subsidiaire, le contenu des listes de documents saisis figurant dans les procès-verbaux dressés par Me [JS] [BN] et Me [WM] lors de l’accomplissement des mesures d’instruction prescrites par l’ordonnance du 23 mars 2021.

– Condamner la société Crit à verser à Madame [M] et à Monsieur [I], chacun la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– Condamner la société Crit aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions déposées le 16 mai 2022, la SAS Société Crit demande à la cour de :

‘Vu les articles 145, 489 et 502 du code de procédure civile,

Vu les articles L. 151-1 et L. 151-4 du code de commerce,

Vu les articles 226-1 et 226-15 du code pénal,

Vu l’ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Mâcon le 23 mars 2021 à la suite de la requête du 5 mars 2021 et l’ordonnance rectificative du 29 mars 2021,

Vu le procès-verbal de constat de Maître [JS] [BN], huissier de justice, en date du 4 mai 2021 et le rapport de [AL] [FE], expert informatique ;

Vu le procès-verbal de constat de Maître [YW] [WM], huissier de justice, en date du 4 mai 2021 et le rapport de [J] [P], expert informatique ;

Vu l’ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Mâcon le 22 février 2022 ;

(…)

– Confirmer l’ordonnance du 22 février 2022 en toutes ses dispositions,

En conséquence,

– Rejeter la demande de rétractation de l’ordonnance rendue le 23 mars 2021 telle que modifiée par l’ordonnance du 29 mars 2021 ;

– Débouter [O] [M] et [F] [I] de l’ensemble de leurs prétentions ;

A titre subsidiaire,

– Modifier le point 4 de l’ordonnance en ordonnant à l’huissier que, s’agissant des mots-clés du premier tiret de l’ordonnance du 23 mars 2021, un nouveau tri soit effectué afin que ne soient conservés que les documents comprenant également l’un des termes suivants : ‘Iziwork’, ‘Tahri’, ‘ [V]’, ‘Partner’ et ‘Crit’ ;

A titre plus subsidiaire,

– Ordonner que la restitution partielle ou totale des documents saisis et l’éventuelle destruction des supports de transfert de ces documents n’interviendra qu’après signification d’une décision définitive sur l’instance en rétractation ;

En tout état de cause,

– Rejeter la demande visant à ce que soient écartées des débats les pièces n°10 et 11 ;

– Rejeter la demande visant à ce que soient écartés des débats les procès-verbaux dressés le 4 mai 2021 par Me [YW] [WM] et Me [JS] Voillequin-Arnal ;

– Condamner solidairement [O] [M] et [F] [I] au paiement de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner solidairement [O] [M] et [F] [I] aux entiers dépens.’

MOTIVATION :

Il sera liminairement rappelé que les demandes de ‘juger que’ ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4 et 954 du code de procédure civile, et que la cour n’a pas à statuer dans le dispositif de son arrêt sur les-dites demandes.

Par ailleurs, dès lors que les appelants demandent que des pièces soient écartées des débats, il est logique de statuer dans un premier temps sur ces prétentions, malgré l’ordre pour le moins étonnant dans lequel le dispositif de leurs écritures est établi.

Sur les pièces n° 10 et 11 produites par la société Crit :

Au soutien de leur demande tendant à voir écarter des débats les pièces n° 10 et 11 produites par la société Crit, Monsieur [I] et Madame [M] soutiennent que cette société a procédé à des recherches injustifiées dans l’ordinateur professionnel de Madame [M] et justifie sa requête, dans une large mesure, au moyen de documents obtenus de manière parfaitement déloyale et sans aucune traçabilité, notamment le Business plan attribué à [F] [I] et [O] [M] ; que les premières recherches effectuées sur cet ordinateur sont justifiées, selon la requête, par l’impossibilité qu’aurait rencontré l’informaticien de la société pour le redémarrer, ce qui l’aurait contraint à ‘accéder au disque dur de cet ordinateur’ et d’en examiner le contenu ; que cependant, aucun document n’est produit à l’appui de ce postulat, et si la société Crit avait rencontré une difficulté à démarrer ledit ordinateur, elle n’aurait pas manqué de solliciter son ancienne salariée, qui le lui avait restitué 15 jours plus tôt.

Ils ajoutent qu’il ressort de l’échange d’e-mails entre Monsieur [HN], responsable des ressources humaines chez Crit, et Monsieur [HT] que l’ordinateur n’était plus intègre après l’intervention de ce dernier en octobre 2020 ; qu’il est ainsi aujourd’hui impossible de vérifier la provenance des documents retrouvés par Monsieur [HT] et d’en tirer une quelconque conclusion; que les éléments issus de ces investigations, sans aucun contrôle et sans garantie pour les droits de Madame [M], doivent être écartés des débats.

Ils invoquent par ailleurs une violation de la vie privée de Madame [M] en ce que des documents relevant de sa vie privée ont été extraits et produits au soutien de la requête, soit deux messages provenant de son compte Linkedin et donc par nature non publics, puisqu’ils n’étaient adressés qu’à cette dernière, même si Madame [M] avait reçu notification de ces messages sur sa boîte mail Crit.

Ils ajoutent que la cour de cassation a précisé que si l’employeur peut toujours consulter les fichiers qui n’ont pas été identifiés comme personnels par le salarié, il ne peut toutefois les produire dans une procédure judiciaire, si leur contenu relève de la vie privée sans l’accord de ce dernier ; qu’il ressort clairement de l’adresse expéditeur, voire de l’objet de l’e-mail par lequel les-dits messages ont été transmis, qu’ils provenaient de la messagerie Linkedin de Madame [M] et relevaient donc de sa vie privée, alors au surplus qu’une proposition de collaboration adressée à une salariée par une entreprise tierce utilisant la voie d’un message privé Linkedin relève indéniablement de la vie privée ; que la société Crit s’est bien gardée de solliciter l’accord de Madame [M] pour les produire en justice.

Ils soutiennent enfin que la société Crit ne saurait se prévaloir d’un quelconque droit à la preuve ; que la jurisprudence retient de manière constante qu’une partie ne peut produire des éléments de preuve illicites, parce que portant atteinte à la vie privée d’une autre partie, qu’à condition que ces éléments soient indispensables à son droit à la preuve et que l’atteinte soit proportionnée aux droits de l’autre partie ; qu’en l’espèce, les messages reçus par Madame [M] ne démontrent ni ne font présumer aucun acte de concurrence déloyale de la part de cette dernière, ni une quelconque relation avec la société Iziwork fin 2019, puisqu’il s’agit simplement de propositions de collaboration qu’elle a reçues via Linkedin ; que leur production ne peut être proportionnée au but poursuivi.

La société Crit réplique que l’employeur peut accéder, en dehors de la présence de l’intéressé, aux dossiers et fichiers créés par un salarié grâce à l’outil informatique qu’il a mis à sa disposition ainsi qu’aux correspondances adressées sur son lieu de travail ; que ces documents sont présumés avoir un caractère professionnel, sauf s’ils sont identifiés par le salarié comme personnels ; que si Madame [O] [M] lui reproche d’avoir produit deux messages Linkedin dont elle avait reçu notification sur sa messagerie professionnelle en soutenant que la provenance des messages et leur objet indiquaient clairement que ceux-ci relevaient de sa vie privée, il a été jugé que des courriels et fichiers ne peuvent être identifiés comme personnels du seul fait qu’ils émanent initialement de la messagerie personnelle du salarié ; que dans la mesure où elle a choisi de recevoir ses InMail sur sa messagerie professionnelle à laquelle était rattaché son compte Linkedin, il n’y a pas lieu de considérer ces messages comme des messages personnels.

Elle ajoute qu’en tout état de cause, à supposer que ces messages puissent être considérés comme personnels, il a été établi que l’employeur pouvait produire en justice des éléments extraits du compte privé Facebook d’un salarié si cette production était indispensable à l’exercice de son droit à la preuve et si l’atteinte à la vie privée du salarié était proportionnée au but poursuivi ; que le juge doit ainsi mettre en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve ; qu’en l’espèce, les courriels reçus sur la boîte professionnelle d'[O] [M] comportent des messages Linkedin s’avérant être des propositions de collaboration émanant d’Iziwork et sont les seuls éléments qui permettent à la société Crit de démontrer qu’elle avait reçu des propositions de poste de la société d’intérim digitale bien avant son départ de la société, et d’établir précisément la date de ces offres ; que leur production en justice n’est en outre, notamment compte- tenu du contenu des-dits messages, pas disproportionnée au regard du droit au respect de la vie privée d'[O] [M].

Il doit être relevé que les pièces numérotées 10 et 11 dont les appelants demandent qu’elles soient écartées des débats sont non pas celles annexées aux écritures d’appel de la société Crit portant cette numérotation, mais celles annexées à la requête initiale ayant saisi le président du tribunal judiciaire de Mâcon et consistant :

– pour la pièce n° 10 en un message émanant de Madame [WS] [HT], ‘professional Development Manager chez Iziwork’ adressé à Madame [M] le 11 décembre 2019 (et portant le n° 13 des pièces produites par l’intimée devant la cour) ,

– pour la pièce n° 11 un message émanant de Monsieur [OK] [KH] ‘Head Of BI chez Iziwork’ adressé à Madame [M] le 27 mai 2020 (et portant le n° 14 des pièces produites par l’intimée devant la cour).

Il sera également souligné qu’il ressort des explications des parties que Madame [M] disposait de deux ordinateurs professionnels, un ordinateur portable et un poste fixe ; que l’informaticien de la société Crit a examiné le disque dur de l’ordinateur portable et a constaté la présence de plusieurs dossiers dont la société argue au soutien de sa requête ; que s’agissant du poste fixe, un huissier, Maître [C], a procédé le 26 novembre 2020, à la demande de la société Crit, à un constat des éléments figurant sur ce matériel et procédé à une copie du disque dur, laquelle a été analysée par un expert en informatique qui a dressé le 3 décembre 2020 un rapport dont il est également fait état au soutien de la requête soumise au président du tribunal judiciaire de Mâcon.

Or si les appelants critiquent dans leurs écritures les conditions dans lesquelles ces constatations ont été réalisées par l’informaticien de la société Crit puis par Maître [C], et font état de ce que les opérations d’analyse effectuées sur les éléments issus du disque dur de l’ordinateur fixe les ont altérés, ils demandent uniquement que soient écartés des débats deux messages retrouvés sur la messagerie professionnelle.

Concernant ces deux messages, Madame [M] ne conteste pas qu’ils sont effectivement extraits de sa messagerie professionnelle au sein de la société Crit, et elle n’a jamais soutenu que leur contenu tel que présenté par cette dernière aurait été modifié ou altéré.

Il n’est pas plus contesté par Madame [M] que ces messages, trouvés dans sa messagerie professionnelle, n’étaient pas inclus dans un fichier mentionnant expressément qu’il s’agissait de documents personnels.

Par ailleurs, dès lors que Madame [M] a fait le choix de recevoir ses messages en provenance du réseau social Linkedin sur sa messagerie professionnelle, elle ne peut pas soutenir qu’à l’évidence il s’agissait de messages personnels.

Surtout, l’employeur qui entend démontrer l’existence d’une faute imputable à son salarié ou à un ancien salarié bénéficie d’un droit à la preuve susceptible de justifier une atteinte à la vie privée de cette personne dès lors que cette atteinte est proportionnée au but poursuivi.

En l’espèce, les deux messages litigieux démontrent l’existence de contacts entre Madame [M] et deux représentants de la société Iziwork alors même qu’elle était salariée de la société Crit, chacun de ses interlocuteurs lui proposant une collaboration avec la société Isiwork qui exerce dans le même secteur d’activité que l’intimée. Dès lors que la société Crit soupçonne son ancienne salariée de ne pas respecter la clause de non-concurrence prévue à son contrat de travail et de se livrer à des actes de concurrence déloyale au profit de la société Iziwork, la production de ces deux documents, dont il n’appartient ni au magistrat statuant sur requête, ni à la juridiction statuant en référé d’apprécier le caractère probant – cette appréciation relevant du juge du fond éventuellement saisi du litige- , et dont Madame [M] ne conteste pas que ce sont les seules pièces permettant à son ancien employeur de démontrer la réalité de ces contacts et de les dater, ne peut pas être critiquée au regard d’une atteinte à la vie privée qui en l’espèce est justifiée.

Il s’en déduit que l’ordonnance en ce qu’elle a débouté les appelants de leur demande tendant à voir écarter des débats les pièces n° 10 et 11 sera confirmée.

Sur les procès-verbaux des huissiers ayant exécuté l’ordonnance sur requête :

Les appelants soutiennent qu’il convient d’écarter des débats les procès-verbaux de constat dressés par les deux huissiers chargés d’exécuter l’ordonnance sur requête en expliquant

– à titre principal, que le contenu des procès-verbaux des huissiers ayant exécuté l’ordonnance doit être écarté des débats dès lors que le juge de la rétractation n’est pas le juge compétent pour connaître de l’exécution des mesures ; qu’il n’a donc pas le pouvoir de statuer sur la validité des procès-verbaux établis par les huissiers mandatés pour mettre

en ‘uvre la ou les mesures d’instruction in futurum prévues dans l’ordonnance objet de la demande de rétractation, et que le président du tribunal judiciaire ne pouvait se contenter d’énoncer qu’il n’en avait pas ‘intellectuellement’ tenu-compte, sans formellement écarter des débats ces listes des éléments collectés jointes par les huissiers à leurs procès-verbaux dont il ne peut pas être tiré argument pour justifier a posteriori la requête.

– à titre subsidiaire, que le contenu des procès-verbaux des huissiers ayant exécuté l’ordonnance doit être écarté des débats dès lors qu’ils ont violé l’ordonnance à l’occasion de son exécution et procédé à des saisies illicites ; qu’en effet, il apparaît clairement à la lecture du procès-verbal de Me [JS] [BN] que la mesure d’instruction diligentée au domicile de Madame [M] n’a pas respecté les prescriptions de l’ordonnance qui indiquait clairement que seuls des documents sur la période ‘entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019″ pouvaient être saisis, alors qu’aucun traitement relatif à la période n’a été appliqué par l’informaticien qui s’est contenté de saisir tous les documents contenant l’un quelconque des mots-clés listés dans l’ordonnance sans se préoccuper d’une quelconque période ; que ce faisant, les documents saisis sont, dans une très large majorité, des documents datant de 2020 et/ou 2021 ; que bien que Me [WM] ait pris la peine d’effectuer un tri pour ne placer sous séquestre que les documents concernant la période située entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019, certains documents en dehors de la période prévue par l’ordonnance font toujours partie de la saisie.

La société Crit réplique que cette demande est malfondée car dépourvue d’objet.

Elle soutient en premier lieu que, contrairement à ce qu’affirment les parties adverses, elle ne fonde pas son argumentation sur le contenu des procès-verbaux des huissiers ayant mis en ‘uvre l’ordonnance, et que ce n’est qu’incidemment qu’elle souligne que les mesures ordonnées ont manifestement permis d’établir cette preuve et confirmé ses soupçons.

Elle ajoute qu’il est de jurisprudence constante que le juge de la rétractation est tenu d’apprécier les mérites de la requête au jour où il statue et non au jour de l’ordonnance querellée ; qu’ainsi, ‘la demande de rétractation d’une ordonnance sur requête rendue sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ne tendant qu’au rétablissement du principe de la contradiction, le juge de la rétractation qui connaît d’une telle demande doit apprécier l’existence du motif légitime au jour du dépôt de la requête initiale, à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui.’ (Civ 2ème 27 juillet 2016 n° 15-21.579) ; que le juge de la rétractation est donc tout-à-fait en mesure d’apprécier des éléments intervenus postérieurement à l’ordonnance sur requête, et notamment les procès-verbaux décrivant le déroulement des mesures d’instruction in futurum.

Elle soutient à titre subsidiaire, que les appelants sollicitent que le contenu des procès-verbaux de Me [BN] et de Me [YW] [WM] soit écarté des débats parce que ces derniers n’auraient pas respecté les prescriptions de l’ordonnance alors que le contentieux de l’exécution de la mesure d’instruction ordonnée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ne relève pas des pouvoirs du juge de la rétractation ; qu’en outre, la nullité ne frappant que les opérations qu’affecte l’irrégularité, la nullité du procès-verbal doit être limitée aux fichiers qui n’étaient pas visés par l’ordonnance, et que si les appelants prétendent qu’ont été saisis des documents en dehors de la période temporelle prévue par l’ordonnance, il n’apparaît pas possible à ce stade de déterminer la date de création des documents saisis ; que ce débat doit donc se tenir – et se tient de fait – dans le cadre de l’instance en mainlevée du séquestre.

Sur ce,

Ainsi que le relève à juste titre l’intimée, il n’entre pas dans la compétence du juge de la rétractation de l’ordonnance ayant ordonné un constat d’huissier de statuer sur la régularité de tout ou partie des opérations réalisées par l’huissier commis en exécution de la décision critiquée.

Par ailleurs, si le juge de la rétractation doit se placer au jour où il statue, en considération de la situation qui existe à cet instant et non pas à la date à laquelle le premier juge s’est prononcé, et s’il doit tenir compte de faits postérieurs à l’ordonnance attaquée dont il est fait état par les parties, il ne peut pas toutefois pas fonder sa décision sur le résultat des opérations réalisées en exécution de ladite ordonnance.

Cependant, en l’état, les deux huissiers commis ont procédé à leurs constats en exécution d’une ordonnance leur en donnant le pouvoir, et dès lors qu’il n’entre pas dans la compétence du juge de la rétractation de statuer sur la régularité des opérations ainsi effectuées, en l’état l’illicéité des procès-verbaux qu’ils ont dressés n’est pas établie. Rien ne justifie en conséquence qu’ils soient écartés des débats.

Sur le motif légitime :

Pour conclure à la rétractation de l’ordonnance sur requête, les appelants soutiennent que la société Crit ne justifie pas d’un motif légitime, et que la requête comporte des affirmations mensongères destinées à tromper le président du tribunal judiciaire de Mâcon et n’apporte jamais un quelconque élément qui pourrait donner à penser que des actes de concurrence déloyale ont été commis.

Ils affirment qu’ils n’avaient aucunement pour dessein de quitter la société Crit en la dépouillant de ses clients et salariés et que leur projet initial n’était aucunement de se lancer dans une entreprise concurrente de celle de Crit ; que l’affiliation à Iziwork n’est in fine que le résultat de l’effondrement de l’activité de formation en ressources humaines reprise par Monsieur [I], et l’opportunité salutaire de l’offre faite par Iziwork ; qu’en réalité, la société Crit fait feu de tout bois dans le but de déstabiliser l’activité nouvelle de ses anciens salariés.

Ils estiment que les éléments produits par la société Crit ne permettent aucunement de soupçonner l’existence d’actes de concurrence déloyale ; qu’en effet, les constats du procès-verbal d’huissier en date du 26 novembre 2020 et l’analyse informatique du disque dur ne fournissent aucun élément de preuve.

Concernant le document intitulé : ‘contrat d’agent commercial -[F] [I]’, ils soutiennent qu’il n’a, à l’évidence, aucun lien direct avec Madame [M], et qu’étant en couple avec Monsieur [I], il n’est pas anormal qu’elle échange avec lui sur l’avenir professionnel de celui-ci.

S’agissant de la ‘proposition commerciale’ de Facilitation & Co, société franchisée Dale Carnegie, ils relèvent qu’il s’agit en réalité du contrat ayant pour objet le suivi par Madame [M] d’une formation professionnelle dispensée par Dale Carnegie intitulée ‘communication et leadership’ ; que de plus les sociétés Facilitation & Co et Facilitation RH sont deux sociétés distinctes ; que la première offre des services de formation et conseil en ressources humaines, tandis que la seconde dirigée par Madame [M] est en contrat avec la société Iziwork pour la promotion des prestations de service offertes par cette dernière, dans le secteur de l’intérim ; que par conséquent, aucune des pièces concernant Facilitation & Co /Dale Carnegie n’est de nature à démontrer un quelconque motif légitime puisque ces sociétés n’interviennent pas dans le même secteur d’activité que la société Crit, dont elles ne sont nullement concurrentes.

Concernant enfin un CV d’intérimaire, ils soutiennent qu’aucune déduction ne peut être faite sur la base de ce document puisqu’aucun d’eux n’est chargé de recruter des intérimaires dans le cadre de leurs activités professionnelles respectives.

Ils ajoutent que la société Crit relève, sur la base du rapport d’expertise informatique privé qu’elle a fait diligenter, que Madame [M] aurait été en possession de ‘documents de travail hautement confidentiels’ sur des périphériques de stockage USB, alors que rien ne permet de s’assurer que les connections des périphériques de stockage USB invoquées sont bien le fait de Madame [M], et que l’utilisation d’une clé USB sur un poste de travail est d’usage courant ; que par ailleurs il n’y a rien d’anormal à ce que Madame [M] ait consulté l”Annuaire clients [Localité 6] MAJ 6.02.2020.xlsx’et le ‘Portefeuille Clients-référent 10.2019.xlsx’ alors qu’elle était à l’époque responsable des agences de Mâcon et de [Localité 8] de la société Crit.

S’agissant du tableur Excel intitulé ‘Positionnement tarifaire – simulateur de marges V19 – 1.xlsx’ envoyé sur l’adresse mail personnelle de Madame [M] le 10 avril 2020, et du tableur Excel intitulé ‘Copie de login et mot de passe.xlsx’ contenant les identifiants et mots de passe de Crit pour divers sites permettant notamment de passer des annonces et de retrouver les coordonnées de candidats intérimaires envoyé sur son adresse mail personnelle le 20 juillet 2020, ils soutiennent que ces transferts sont liés au confinement dû à la crise sanitaire afin de lui permettre de travailler depuis son domicile, et que ces documents ne lui sont d’aucune utilité pour travailler en relation avec Iziwork.

Concernant les échanges de mail courant janvier 2020 avec Monsieur [I] des ‘contenant des informations appartenant à la société Crit’ invoqués par cette dernière, les appelants soulignent qu’en réalité le rapport d’expertise informatique ne fait état que de quelques échanges qui ne contiennent aucune information appartenant à la société Crit et ont été envoyés bien avant que Monsieur [I] ne devienne Partner Iziwork en mai 2020.

Ils ne contestent pas que Madame [M] a consulté deux documents relatifs à la société Iziwork : ‘Mini présentation Iziwork.pptx’et ‘Pitch Iziwork sales.pdf’, mais ajoutent que la société Crit se contente d’affirmer que ces documents auraient été visiblement destinés au démarchage de clients pour le compte Iziwork.

Ils ajoutent que la société Crit ne fait état d’aucun préjudice que la prétendue concurrence déloyale à laquelle ils se serait livrés lui aurait causé ; que les éléments qu’elle produit sont insuffisants à faire naître un quelconque soupçon de tentatives de démarchage illégal de certains de ses clients, intérimaires ou collaborateurs ; que Madame [RZ] et Monsieur [I] n’ont pas d’obligation de non-concurrence à l’égard de la société Crit et sont de ce fait parfaitement libres de démarcher loyalement les employés et clients de cette dernière, et qu’à cet égard, la proposition de poste adressée à Madame [BT] [Y], salariée de Crit, par Monsieur [I] n’est donc pas constitutive d’un acte de concurrence déloyale ; que s’agissant de Madame [M], l’intimée n’avance aucune preuve qu’elle ait tenté de démarcher un client ou un salarié, le seul document produit à l’appui de cette thèse étant une attestation de Monsieur [N] [U] du 16 novembre 2020, lequel ne témoigne pas de faits qu’il aurait lui-même constatés, et a un ressentiment à l’égard de Madame [M] suite à son départ de Crit.

Madame [M] ajoute que la clause de non-concurrence prévue dans son contrat de travail ne lui est pas opposable.

La société Crit réplique que la notion de motif légitime n’implique pas que le demandeur établisse un commencement de preuve pour le procès futur – puisqu’il s’agit justement de l’objet de la mesure d’instruction -, mais seulement que le litige potentiel, civil ou pénal, soit plausible ; que le juge des requêtes n’a pas davantage à apprécier le bien-fondé de l’instance potentielle in futurum, ni si cette instance doit être introduite envers d’autres parties que celles déjà présentes dans l’instance en référé, et qu’il ne peut rejeter les mesures d’instruction sollicitées que si les faits invoqués à leur appui relèvent du domaine de l’hypothétique ou si cette prétention est manifestement vouée à l’échec ou dénuée de tout sérieux ; que la mise en ‘uvre des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile suppose ainsi seulement que soit constaté qu’il existe un procès ‘en germe’ possible et non manifestement voué à l’échec au regard des moyens soulevés par les défendeurs, sur la base d’un fondement juridique suffisamment déterminé et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée.

Elle soutient que c’est ce qu’elle a fait dans sa requête du 5 mars 2021 en exposant notamment qu'[O] [M] s’était appropriée un certain nombre de documents confidentiels lui appartenant et qu’elle avait envoyés sur sa boîte personnelle peu avant son départ ; qu’elle avait consulté sur son poste de travail des documents de la société Iziwork, pour laquelle travaillait son compagnon [F] [I], et notamment des documents destinés au démarchage de clients pour le compte d’Iziwork ; qu’elle est, après son départ, intervenue pour cette société concurrente a minima à partir d’octobre 2020, et qu’Iziwork a, notamment par son intermédiaire, essayé de démarcher clients, intérimaires et salariés de la société Crit.

La société Crit soutient que ces faits étaient naturellement de nature à éveiller ses soupçons quant à des agissements susceptibles de relever de la concurrence déloyale ou de caractériser les délits d’abus de confiance et de recel d’abus de confiance ; qu’en effet, les éléments découverts avant les opérations d’huissier du 4 mai 2021 laissaient supposer qu'[O] [M] était en possession d’un grand nombre de documents confidentiels de travail lui appartenant, notamment les listes de ses clients, le tableur Excel intitulé ‘Positionnement tarifaire – simulateur de marges V19-1.xlsx’ou encore le tableur Excel intitulé ‘Copie de login et mot de passe.xlsx’ ; que par ailleurs, elle a été informée de plusieurs tentatives de débauchage pour le compte d’Iziwork ; que d’autre part, dans le cadre de ses fonctions de responsable d’agence Crit, [O] [M] avait eu accès à des informations confidentielles relatives à la clientèle, et qu’il apparaissait qu’elle avait détourné ces informations à son préjudice.

Elle ajoute que les faits d’espèce ont révélé un détournement illicite d’informations professionnelles de Crit par [O] [M], échangées avec [F] [I], à leur profit et celui d’Iziwork, et que l’infraction de recel pourrait donc être reprochée à [F] [I] et Iziwork.

Elle expose que les mesures d’instruction in futurum semblent d’ailleurs avoir confirmé les soupçons de la société au regard des documents retrouvés sur le matériel informatique présent au domicile d'[O] [M] comme d'[F] [I].

La société CRIT expose ensuite que les éléments constatés par l’huissier et l’expert informatique les 26 novembre et 3 décembre 2020 étaient bien ‘de nature à faire naître un soupçon de concurrence déloyale’ puisqu’ils montraient qu'[O] [M] avait téléchargé sur des supports USB et envoyé sur sa messagerie professionnelle des documents particulièrement confidentiels de Crit alors qu’elle était manifestement déjà en relation avec Iziwork ; que les mesures diligentées le 4 mai 2021 sur autorisation du juge des requêtes ont d’ailleurs confirmé ces suspicions et qu’il appartiendra aux parties adverses de discuter devant le juge du fond de la force probatoire des éléments recueillis.

Elle ajoute que la rétractation ne peut pas être motivée par une prétendue insuffisance de preuve d’une faute ou d’un préjudice en résultant, alors au surplus qu’en matière de concurrence déloyale, le préjudice est présumé dès lors qu’est établie la faute ; que surtout, elle subit un préjudice évident du fait notamment du démarchage de ses clients et du débauchage de ses intérimaires et salariés par une société concurrente ; qu’un récent e-mail de l’un de ses clients a d’ailleurs révélé que ce démarchage a porté ses fruits puisqu’Iziwork intervient en tant que société de travail temporaire pour la société Adrexo, cliente de Crit, par l’intermédiaire d'[O] [M].

Elle affirme avoir mis en évidence un certain nombre d’éléments tendant à confirmer que les appelants ont bien tenté de démarcher de nombreux clients, salariés et intérimaires de la société ; qu’en 2020, elle a appris que le directeur des ressources humaines de son client, Transports Alaine, avait été démarché par [O] [M] pour le compte d’Iziwork, les intérimaires de Crit délégués chez ce client ayant été invités à s’inscrire chez Iziwork et [O] [M] ayant cherché à rencontrer son ancienne collaboratrice, [O] [R] ; qu’elle a ensuite découvert sur l’ordinateur professionnel d'[O] [M] un document intitulé ‘Business Plan – Iziwork Partners – [F] & [O] (3)’qui comporte sous un onglet ‘prospects’ la liste d’une trentaine de clients ou prospects de Crit, associés à des actions commerciales telles que ‘Accord à négocier’, ‘Nouvelle offre à faire’, ‘Bascule’ ; qu'[O] [M] a enregistré sur des supports USB des documents de Crit intitulés ‘Annuaire clients [Localité 6] MAJ 6.02.2020.xlsx’et ‘Portefeuille Clients-référent 10.2019.xlsx’ et a envoyé sur sa messagerie personnelle un document relatif au positionnement tarifaire de Crit le 10 avril 2020 ainsi que des tableaux comportant les identifiants et mots de passe de Crit sur des sites de recrutement d’intérimaires le 20 juillet 2020 ; qu’enfin [O] [M] a consulté le 14 mai 2020 des documents destinés au démarchage de clients pour le compte d’Iziwork.

Elle ajoute que là aussi, les opérations réalisées conformément à l’ordonnance du 23 mars 2021 ont confirmé ces soupçons.

La société Crit relève enfin que le débat relatif à l’opposabilité de la clause de non-concurrence d'[O] [M] relève de l’appréciation du juge prud’homal et qu’il est ici hors sujet. Elle ajoute qu’en toute hypothèse, les appelants prétendent à tort que la clause de non-concurrence d'[O] [M] lui serait inopposable.

Sur ce :

A juste titre la société Crit rappelle que la notion de motif légitime prévue à l’article 145 du code de procédure civile n’implique pas que le demandeur établisse un commencement de preuve pour le procès futur – puisqu’il s’agit justement de l’objet de la mesure d’instruction -, mais seulement que le litige potentiel, civil ou pénal, soit plausible.

En l’espèce, il n’est pas contestable que la société Crit et la société Iziwork exercent une activité dans le même secteur, celui du travail intérimaire. Les appelants ne contestent par ailleurs pas travailler l’un et l’autre en relation avec la société Iziwork, peu important que tel n’ait pas été leur intention lorsqu’ils ont quitté la société Crit.

Il est par ailleurs établi que Madame [M] est tenue d’une clause de non-concurrence qui, en l’état, n’a pas été déclarée irrégulière ou inopposable par une juridiction, et le juge des référés n’a aucune compétence ni aucun pouvoir pour trancher cette question.

Or , si effectivement il ne peut pas être tenu compte du résultat des constatations réalisées en exécution de l’ordonnance sur requête critiquée, il n’en demeure pas moins qu’au soutien de sa requête, la société Crit a produit diverses pièces extraites des ordinateurs portable et fixe qui avaient été mis à la disposition de Madame [M] lorsqu’elle était sa salariée et qui lui permettaient de soupçonner que cette dernière, en concertation avec son compagnon Monsieur [I], a eu non seulement des contacts avec la société Iziwork avant même son départ de la société, mais également qu’elle a, en transférant sur sa messagerie personnelle des documents internes à la société qui l’employait , récupéré des documents concernant les clients de son employeur, les intérimaires ou les conditions tarifaires.

Ces éléments, dont le caractère probant sera apprécié lors du débat au fond devant la juridiction éventuellement saisie du litige, sont suffisants par leur simple existence, pour établir l’existence d’un motif légitime.

Sur les mesures ordonnées :

Les appelants soutiennent que les mesures ordonnées sont disproportionnées, et qu’elles portent atteinte au secret des affaires et au droit à la vie privée et au secret des correspondances.

Ils reprochent au président du tribunal judiciaire de Mâcon d’avoir considéré que les huissiers instrumentaires comprendraient que, pour respecter le périmètre fixé par l’ordonnance, il leur appartenait notamment, non seulement de ne rechercher des pièces que sur la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019, mais également d’associer le mot ‘Crit’ aux mots-clefs listés par ailleurs dans l’ordonnance alors qu’ils ont purement et simplement ignoré le lien avec Crit et se sont contentés de saisir tous les documents comportant l’un ou l’autre des mots-clés listés, ce qui les a conduits à saisir une multitude de documents sans aucun rapport avec le périmètre de la saisie autorisée.

Ils soulignent que la nature même des mots clés utilisés, parfaitement communs pour certains, et se rapportant de manière générale à l’activité d’intérim, a conduit à la saisie d’un nombre incalculable de documents sans lien aucun avec la société Crit.

Ils ajoutent que les termes de l’ordonnance conduisent à saisir tous documents contenant des termes génériques et fréquemment utilisés dans l’activité qu’ils exercent ; que les mots-clés ‘Rendez-vous’, ‘Intérimaire’, ‘Stratégie’, ‘Business plan’, ‘Chiffre d’affaires’, ‘ Marge’ et ‘ Marge Brute’, ‘Proposition commerciale’, ‘Commercial’, ‘Fichier client(s)’, ‘ Liste client(s)’, ‘Prospect(s)’, ‘Fichier prospect(s)’, ‘ Liste prospect(s)’, ‘ Négociation’, revient à saisir l’ensemble des courriels, fichiers, dossiers et SMS liés à l’activité de Monsieur [I] et Madame [M], même sans lien avec la société Crit, et/ou couverts par le secret des affaires; que la société CRIT entendait que les mots clefs ‘Iziwork’, ‘ Partner’, ‘Accord’, ‘Accord cadre’, ‘Cadre’, ‘AO / appel d’offre’, ‘Recrutement CDD/CDI’, ‘Offre recrutement CDD/CDI’, ‘Digital’, ‘ Stratégie’ soient recherchés dans le but manifeste d’obtenir indûment et le plus largement possible toute information relative à leur relation avec Iziwork ; qu’il est tout à fait injustifié et contraire au respect du secret des affaires, de solliciter d’obtenir la saisie et la communication d’une manière générale de tous les fichiers comportant les mots clefs ‘Fichier(s) Client(s), Liste(s) Client(s), Prospect(s), Liste(s) Prospect(s)’, alors même que la société CRIT a demandé dans le même temps la saisie de tous les fichiers comportant ‘ les noms de prospects / clients de Crit’ figurant dans un fichier Excel.

Les appelants soutiennent enfin que les mesures d’instruction de l’ordonnance sur requête prévoient l’utilisation de mots-clés génériques et sans lien nécessaire avec la vie des affaires, de manière isolée, tels que ‘Ouverture’, ‘Rencontre’, ‘Rendez-vous’, ‘ [Localité 6]’ ou encore ‘Bourgogne’, qui portent nécessairement atteinte au droit à la vie privée et au secret des correspondances.

Ils proposent, à titre subsidiaire, la modification du périmètre de l’ordonnance afin que les documents saisis soient, de manière certaine, en lien avec l’activité de Crit, en rectifiant l’ordonnance de sorte que seuls les documents comportant à la fois l’un des mots-clés listés et le terme ‘Crit’demeurent effectivement saisis.

La société Crit réplique que les mesures d’instruction sollicitées sont proportionnées puisqu’elles sont bien limitées dans le temps et dans leur objet, circonscrites à un ensemble de mots clés ; que ces mots clés sont précisément en lien avec les faits de concurrence déloyale exposés dans la requête du 5 mars 2021 et dont sont soupçonnés [F] [I] et [O] [M] et renvoient purement et simplement aux éléments d’informations issus des documents Crit qu'[O] [M] s’est indument appropriés et qui ont été retrouvés sur son ordinateur, et n’ont en aucune façon investi l’huissier d’une ‘mission générale d’investigation’ ; que si l’ordonnance du 23 mars 2021 ne prévoit aucunement que le tri des documents doit être effectué en combinant les mots clés énumérés avec le terme ‘Crit’, il est prévu que seraient saisis les documents ‘en lien avec l’activité’ de cette société, ce afin d’exclure les documents qui ne présenteraient aucun lien avec les litiges potentiels présentés dans la requête du 5 mars 2021 ; qu’un tri excluant les documents qui ne présenteraient aucun lien avec l’activité de travail temporaire est en effet légitime, alors qu’une association des mots clés prévus par l’ordonnance avec le terme ‘Crit’ viderait les mesures d’instruction de tout intérêt.

Elle ajoute que l’ordonnance du 23 mars 2021 a pris le soin d’ordonner aux experts informatiques et huissier de tenir à la disposition des parties qui ont subi les mesures d’investigation une copie des pièces séquestrées afin qu’elles puissent sélectionner les pièces à la communication desquelles elles s’opposent, ce qui a été fait et leur a permis de constater que l’emploi des mots-clés listés dans l’ordonnance querellée n’a pas permis d’appréhender l’intégralité de leurs données.

Elle estime que les appelants ne justifient à aucun moment que certains des documents saisis comporteraient des informations protégées au titre du secret des affaires, et ajoute que ce secret ne constitue pas en lui-même un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du nouveau code de procédure civile, dès lors que le juge constate que les mesures qu’il ordonne procèdent d’un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées ; que les mesures d’instruction ne sauraient donc être annulées au seul motif qu’elles se heurteraient au secret des affaires, et ce d’autant plus lorsque seul l’huissier, soumis au respect du secret professionnel, a accès aux documents saisis ; qu’il leur appartiendra, s’ils considèrent que la saisie de certains documents porterait atteinte au secret des affaires, de l’invoquer dans le cadre de l’action en mainlevée du séquestre pour s’opposer à la communication de ces fichiers.

Concernant le droit au respect de sa vie privée, elle rappelle que la Cour européenne des droits de l’Homme considère que l’exercice du droit à la preuve, en ce qu’il tend à la protection des droits et libertés d’autrui, poursuit un but légitime permettant de porter atteinte au respect dû à la vie privée, tant que cette atteinte est proportionnée ; qu’au surplus, l’ordonnance du 23 mars 2021 a pris soin d’ordonner la mise sous séquestre de l’ensemble des éléments collectés en exécution de la mission de l’huissier et ceci afin de permettre aux demandeurs d’exercer leur droit de recours, Crit ne pouvant avoir accès à ce séquestre, et d’indiquer que l’huissier tiendrait à disposition d'[F] [I] et [O] [M] une copie des pièces séquestrées afin que ces derniers puissent sélectionner les pièces à la communication desquelles ils s’opposeront dans le cadre d’un débat contradictoire.

Subsidiairement, sur la demande formée par les appelants d’une modification de l’ordonnance afin d’associer les mots-clés listés au mot ‘Crit’ afin d’établir un lien avec l’activité de cette société Crit, elle réplique que cette condition supplémentaire serait trop restrictive ; qu’en effet, les documents en lien avec l’activité de travail temporaire ne se restreignent pas à ceux qui comportent expressément le terme ‘Crit’, et que ce double filtre conduirait à écarter de trop nombreux documents ayant un intérêt probatoire en vue notamment d’une action en concurrence déloyale ; qu’en effet par exemple, les propositions commerciales adressées dans l’intérêt d’Iziwork aux clients de Crit ne font aucune mention de cette dernière puisqu’il s’agit précisément de capter ses clients au bénéfice d’une société concurrente ; que le business plan ‘Iziwork Partners – [F] & [O]’ retrouvé avant toute mesure d’instruction in futurum sur l’ordinateur portable professionnel d'[O] [M] ne comporte pas davantage le terme Crit.

Elle propose en conséquence à titre subsidiaire une autre modification du point 4) de l’ordonnance.

Sur ce :

Les investigations ordonnées en application de l’article 145 du code de procédure civile doivent être proportionnées au but recherché, qui doit être celui de l’obtention de preuves en vue d’un procès futur, sans porter atteinte de manière injustifiée au secret des affaires et à la vie privée.

En l’espèce, le but des investigations étant de rechercher les preuves de possibles actes de concurrence déloyale au préjudice de la société Crit, il apparaît que la mission telle que prévue dans l’ordonnance sur requête et prévoyant que soient saisis et placés sous séquestre par les huissiers, assistés d’experts informatiques :

« 4) [‘] sur le Matérielle (sic) Informatique d'[O] [M] et d'[F] [I] en particulier sur leurs boites e-mails, de tout courriel, fichier, dossier, SMS et plus généralement ; tout document en lien avec l’activité de Crit, contenant l’un quelconque des mots clés suivants entre le 1erjanvier 2018 et le 31 décembre 2019 :

– [F] [I], [O] [M], [FO] [RZ], [Z] [BY], Iziwork, Partner, Affaire(s), Bascule, Projet, Accord, Accord cadre, Cadre, AO / appel d’offre, Client(s), Fichier client(s), Liste client(s), Prospect(s), Fichier prospect(s), Liste prospect(s), Prospection, Offre(s), Offre(s) commerciale(s), Négociation, Collaboration, Ouverture, Rdv/rendez-vous, Rencontre, Proposition/proposition commerciale, Commercial, Recrutement, Recrutement CDD/CDI, offre(s) de recrutement CDD/CDI, Pla de conquête, Intérimaire(s), Fichier(s) intérimaire(s), Liste intérimaire(s), Digital, Stratégie, Business plan, Chiffre d’affaires, Marge, Marge brute, Secteur, Région, [Localité 6], Bourgogne, Centre ;[‘] »

est trop imprécise pour garantir la proportionnalité des investigations ainsi ordonnées ; qu’il ne peut pas, contrairement à ce que le premier juge a retenu, être considéré que les huissiers commis pourraient interpréter leur mission.

Les critiques formulées par les appelants ne justifient nullement la rétractation de l’ordonnance. Par contre, une modification de la mission confiée aux huissiers commis est de nature à assurer la protection des intérêts de l’ensemble des parties.

A juste titre, la société Crit relève que la proposition de modification des appelants serait trop restrictive. Il convient en conséquence de modifier la mission des huissiers selon les modalités prévues au dispositif du présent arrêt, et de leur ordonner de restituer à Monsieur [I] et à Madame [M] les pièces appréhendées lors des opérations qu’ils ont menées le 4 mai 2021 mais ne répondant pas aux critères de cette ordonnance amendée, et de détruire tout autre support qui aurait servi au transfert des-dites pièces.

PAR CES MOTIFS :

Confirme l’ordonnance de référé du 22 février 2022 :

– en ce qu’elle a débouté Monsieur [F] [I] et Madame [O] [M] de leurs demandes tendant à ce que soient écartés des débats les pièces n° 10 et 11 produites au soutien de la requête, et les procès-verbaux dressés le 4 mai 2021 par les huissiers commis en exécution de l’ordonnance sur requête,

– en ce que le magistrat a constaté son incompétence matérielle concernant l’exécution de l’ordonnance du 23 mars 2021 rectifiée le 29 mars 2021,

– en ses dispositions concernant les dépens et les demandes formulées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

L’infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Déboute Monsieur [F] [I] et Madame [O] [M] de leur demande de rétractation de l’ordonnance sur requête du 23 mars 2021 rectifiée le 29 mars 2021 et d’annulation subséquente des procès-verbaux dressés par les huissiers commis en exécution de ladite ordonnance,

Ordonne la modification du point 4 de l’ordonnance du 23 mars 2021 rectifiée le 29 mars 2021 en ce que, au lieu de recueillir et saisir :

‘sur le Matériel Informatique d'[O] [M] et [F] [I] en particulier sur leurs boites e-mails, de tout courriel, fichier, dossier, SMS et plus généralement, tout document en lien avec l’activité de Crit, contenant l’un quelconque des mots clés suivants,

entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019 :

* [F] [I], [O] [M], [FO] [RZ], [Z] [BY], Iziwork, Partner, Affaire(s), Bascule, Projet, Accord, Accord cadre, Cadre, AO / appel d’offre, Client(s), Fichier client(s), Liste client(s), Prospect(s), Fichier prospect(s), Liste prospect(s), Prospection, Offre(s), Offre(s) commerciale(s), Négociation, Collaboration, Ouverture, Rdv/ rendez-vous, Rencontre, Proposition/ proposition commerciale, Commercial, Recrutement, Recrutement CDD/CDI, offre(s) de recrutement CDD/CDI, Pla de conquête, Intérimaire(s), Fichier(s) intérimaire(s), Liste intérimaire(s), Digital, Stratégie, Business plan, Chiffre d’affaires, Marge, Marge brute, Secteur, Région, [Localité 6], Bourgogne, Centre.’,

Maître [YW] [WM], huissier de justice à [Localité 7] et Maître [JS] [BN], huissier de justice à [Localité 6] sont autorisés à recueillir et saisir :

‘ sur le Matériel Informatique d'[O] [M] et [F] [I] en particulier sur leurs boites e-mails, de tout courriel, fichier, dossier, SMS et plus généralement, tout document en lien avec l’activité de Crit, contenant l’un quelconque des mots clés suivants combinés successivement avec les termes ‘Iziwork’, ‘Tahri’, ‘[V]’ , ‘Partner’ et ‘Crit’.,

entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2019 :

* [F] [I], [O] [M], [FO] [RZ], [Z] [BY], Iziwork, Partner, Affaire(s), Bascule, Projet, Accord, Accord cadre, Cadre, AO / appel d’offre, Client(s), Fichier client(s), Liste client(s), Prospect(s), Fichier prospect(s), Liste prospect(s), Prospection, Offre(s), Offre(s) commerciale(s), Négociation, Collaboration, Ouverture, Rdv/ rendez-vous, Rencontre, Proposition/ proposition commerciale, Commercial, Recrutement, Recrutement CDD/CDI, offre(s) de recrutement CDD/CDI, Pla de conquête, Intérimaire(s), Fichier(s) intérimaire(s), Liste intérimaire(s), Digital, Stratégie, Business plan, Chiffre d’affaires, Marge, Marge brute, Secteur, Région, [Localité 6], Bourgogne, Centre.’.

Maintient pour le surplus la mission des huissiers commis,

Ordonne à Me [YW] [WM] et Me [JS] Voillequin-Arnal de restituer, respectivement à Monsieur [I] et à Madame [M], l’intégralité des pièces appréhendées lors des opérations qu’ils ont menées le 4 mai 2021 mais ne répondant pas aux critères de leur mission telle que modifiée ci-dessus, et de détruire tout autre support qui aurait servi au transfert des-dites pièces, et ce dans un délai de 1 mois à compter de la signification du présent arrêt, et de dresser procès-verbal de cette destruction, dont un exemplaire serait remis à Madame [M] et Monsieur [I] chacun.

Condamne solidairement Monsieur [F] [I] et Madame [O] [M] aux dépens de première instance et d’appel,

Vu les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de leurs frais irrépétibles.

Le Greffier,Le Président,

 


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