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14 janvier 2021
Cour d’appel de Versailles
RG n°
19/08548
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 35A
14e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 14 JANVIER 2021
N° RG 19/08548
N° Portalis DBV3-V-B7D-TTXY
AFFAIRE :
[G] [O]
…
C/
SAS KYSES
Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 27 novembre 2019 par le Président du TC de NANTERRE
N° chambre :
N° Section :
N° RG : 2019R00795
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Thierry VOITELLIER
Me Bertrand LISSARRAGUE
Me Claire RICARD
TC NANTERRE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATORZE JANVIER DEUX MILLE VINGT ET UN,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur [G] [O]
né le [Date naissance 1] 1975 à [Localité 8]
de nationalité Française
[Adresse 4]
[Adresse 4]
SARL DATA LINKS agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 847 689 759
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
Représentés par Me Thierry VOITELLIER de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 – N° du dossier 020872
Assistés de Me Jean-Yves LE DIZET de la SELARL LWP AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
SARL PYCTORIA agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 517 745 667
[Adresse 3]
[Adresse 3]
SAS FACTORIA agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET : 490 572 187
[Adresse 3]
[Adresse 3]
SAS DIGITAL ACCESS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
N° SIRET: 491 543 435
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentées par Me Bertrand LISSARRAGUE de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 1962970
Assistées de Me Rebecca GUILLOUX substituant Me Louis-Marie ABSIL, avocat au barreau de PARIS
APPELANTS
****************
SAS KYSES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
N° SIRET : 841 337 421
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Claire RICARD, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 – N° du dossier 2200985
Assistée de Me Céline BRAKA substituant Me Nathalie SAILLARD-LAURENT, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 25 Novembre 2020, Madame Marina IGELMAN, conseiller ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Nicolette GUILLAUME, Président,
Madame Marie LE BRAS, Conseiller,
Madame Marina IGELMAN, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sophie CHERCHEVE
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le groupe Digital Access, créé en 2006, exerçait une activité de vente, de location et de maintenance de matériels bureautiques destinés aux entreprises, notamment des photocopieurs, des outils de télécom et des dispositifs réseaux.
Il était composé de quatre sociétés :
– les sociétés Digital Access et Digital Access Télécom, sociétés opérationnelles constituées sous forme de SARL, employant une vingtaine de salariés et réalisant en 2017 un chiffre d’affaires cumulé de 4,5 millions d’euros ;
– les sociétés MYM et CTC Immo, sociétés détenant les locaux dans lesquels les sociétés opérationnelles exerçaient leurs activités.
Ce groupe a été initialement constitué de trois associés, MM. [M] [L] [Z], [G] [A] et [G] [O], chacun étant co-gérant et détenant le tiers de son capital.
Lors de l’assemblée générale des associés du 13 mai 2015, M. [Z] a été révoqué de ses fonctions de co-gérant des quatre sociétés du groupe. Il a alors rejoint la société DFM, société concurrente, en qualité de salarié.
Sur assignation de M. [Z] à l’encontre des sociétés du groupe Digital Access ainsi que de MM. [O] et [A], le tribunal de commerce de Nanterre a, par jugement rendu le 21 septembre 2017, rejeté sa demande aux fins d’annulation de sa révocation et lui a alloué une somme de 25 000 euros en réparation du préjudice subi du fait de la révocation de ses fonctions de gérant sans juste motif. M. [Z] a interjeté appel de cette décision compte tenu de l’indemnisation partielle du préjudice allégué.
Dans ce contexte litigieux, un protocole d’accord transactionnel a été signé le 25 avril 2018 entre MM. [O] et [A] d’une part, M. [Z] d’autre part, ainsi que les sociétés du groupe Digital Access, aux termes duquel M. [Z], associé retrayant, s’est notamment engagé à céder ses titres détenus au sein des sociétés du groupe Digital Access moyennant un prix total de 655 000 euros.
L’acte de cession des titres est intervenu le 27 juillet 2018 entre les sociétés du groupe Digital Access et la société Kyses, créée la veille, en tant que holding personnelle à laquelle M. [Z] a transmis ses droits.
Le 13 septembre 2018, une lettre d’intention a été conclue entre les dirigeants de la société Digital Access et ceux du groupe Factoria pour l’acquisition par la société Pyctoria de la totalité du capital de la société Digital Access.
Le groupe Factoria est composé de 14 sociétés détenues par la holding Pyctoria, qui exercent toutes des activités complémentaires dans le domaine de la bureautique, de la téléphonie, ainsi que des technologies de l’information.
L’acquisition a eu lieu le 30 novembre 2018.
Au début de l’année 2019, la société Digital Access Telecom a fait l’objet d’une scission. Deux nouvelles sociétés ont été créées, dont la SARL Data Links détenue par M. [O].
Par requête du 11 février 2019, la société Kyses a demandé au président du tribunal de commerce de Nanterre de mandater un huissier de justice afin de rechercher certains documents auprès des sociétés Pyctoria, Factoria, Digital Access et Data Links, pour établir la preuve que les dirigeants de ces sociétés étaient en cours de négociation avec le groupe Pyctoria alors qu’ils achetaient les actions de la société Kyses à un prix très inférieur.
En application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile, le président de ce tribunal, par ordonnance rendue le 11 février 2019, a fait droit à la requête et désigné la SCP Venezia & Associés, huissier de justice, pour saisir simultanément dans les locaux desdites sociétés divers documents précisés dans l’ordonnance. Me [P] [T] et Me Frédérine Lodieu ont accompli les diligences le 22 mars 2019, respectivement à l’adresse des sociétés Pyctoria et de Factoria et à l’adresse des sociétés Digital Access et Data Links.
Par acte d’huissier de justice délivré le 1er juillet 2019, la société Kyses et M. [Z] ont fait assigner au fond les sociétés Pyctoria et Digital Access ainsi que MM. [O] et [A] devant le tribunal de commerce de Nanterre qui a fait droit à la demande de sursis à statuer sollicitée par les sociétés Pyctoria et Digital Access dans l’attente de la présente décision.
Par actes d’huissier de justice délivrés respectivement les 24 juillet et 1er août 2019, les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access, d’une part, et la société Data Links et M. [O], d’autre part, ont fait assigner en référé la société Kyses aux fins d’obtenir principalement la rétractation de l’ordonnance rendue le 11 février 2019, l’annulation des actes subséquents ainsi que des procès-verbaux dressés le 22 mars 2019, la restitution immédiate de l’intégralité des éléments appréhendés à leur destinataire à compter du prononcé de la décision à intervenir ainsi que l’interdiction faite à la requérante et à tout tiers de se prévaloir ou de faire mention des informations appréhendées lors de l’exécution de mesures d’instruction in futurum initialement autorisées par l’ordonnance.
Par ordonnance contradictoire rendue le 27 novembre 2019, le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre a :
– ordonné la jonction des affaires enregistrées sous les N° 2019 R 00795 et 2019 R 00806 et dit qu’elles sont jugées sous le N° 2019 R 00795,
– confirmé l’ordonnance rendue le 11 février 2019 en toutes ses dispositions,
– dit irrecevables les demandes reconventionnelles de la société Kyses,
– condamné in solidum les sociétés Factoria, Pyctoria et Digital Access au paiement à la société Kyses la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné in solidum les sociétés Factoria, Pyctoria et Digital Access aux dépens,
– rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
Par déclaration reçue au greffe le 10 décembre 2019, les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access ont interjeté appel de cette ordonnance en ce qu’elle a confirmé l’ordonnance rendue le 11 février 2019 en toutes ses dispositions, les a condamnées in solidum à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les a condamnées in solidum aux dépens. La procédure a été enregistrée sous le numéro RG 19/8548.
Par déclaration reçue au greffe le 11 décembre 2019, M. [O] et la société Data Links ont également interjeté appel de la même ordonnance en tous ses chefs de dispositif. La procédure a été enregistrée sous le numéro RG 19/8589.
Dans leurs dernières conclusions déposées le 10 novembre 2020 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access demandent à la cour, au visa des 145, 249, 493, 494, 497 et suivants et 700 du code de procédure civile, de :
sur l’appel principal partiel qu’elles ont formé :
– déclarer recevable l’appel principal partiel qu’elles ont formé ;
– dire qu’il n’est pas justifié in concreto de la nécessité de déroger au principe du contradictoire ;
– dire que la société Kyses ne justifie d’aucun motif légitime au sens de l’article 145 du code de
procédure civile ;
– dire que les mesures d’instruction sollicitées par la société Kyses et ordonnées le 11 février 2019 ne sont pas légalement admissibles et causent une atteinte disproportionnée à leurs droits ;
– dire qu’aucune action au fond n’a été initiée par la société Kyses à l’encontre de la société Factoria, dans le délai de 3 mois après réception du procès-verbal de l’huissier de justice imparti par l’ordonnance rendue le 11 février 2019 ;
– dire qu’aucune mesure d’instruction in futurum n’a été diligentée à l’encontre des sociétés Pyctoria et Digital Access, dans le délai de 30 jours de la saisine des huissiers de justice imparti par l’ordonnance rendue le 11 février 2019 ;
en conséquence,
– infirmer l’ordonnance de référé rendue le 27 novembre 2019 par le président du tribunal de commerce de Nanterre en ce qu’elle :
– a confirmé l’ordonnance rendue le 11 février 2019 en toutes ses dispositions,
– les a condamnées in solidum au paiement à la société Kyses de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;
– ordonner la rétractation intégrale de l’ordonnance rendue le 11 février 2019, l’annulation des actes subséquents ainsi que des procès-verbaux dressés le 22 mars 2019, puis la restitution immédiate de l’intégralité des éléments appréhendés à leur destinataire à compter du prononcé de la décision à intervenir ;
– interdire à la société Kyses ainsi qu’à tout tiers de se prévaloir ou de faire mention des informations appréhendées lors de l’exécution de mesures d’instruction in futurum initialement autorisées par l’ordonnance rendue le 11 février 2019 ;
sur l’appel incident formé par la société Kyses :
– juger que la demande reconventionnelle tendant à les voir condamnées, sous astreinte, à communiquer à la société Kyses des documents et informations outrepasse la compétence du juge de la rétractation ;
en conséquence,
– confirmer l’ordonnance de référé rendue le 27 novembre 2019 par le président du tribunal de commerce de Nanterre en ce qu’elle a dit irrecevables les demandes reconventionnelles formulées par la société Kyses dans la présente procédure ;
en tout état de cause,
– condamner la société Kyses à leur verser la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société Kyses aux entiers dépens.
Dans leurs dernières conclusions déposées le 30 juillet 2020 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de leurs prétentions et moyens, la société Data Links et M. [O] demandent à la cour, au visa des 145, 146, 493, 494 et suivants, 812 et 700 du code de procédure civile, de :
– infirmer le jugement de première instance ;
– les déclarer recevables en leur action en rétractation de l’ordonnance rendue le 11 février 2019 par le président du tribunal de commerce de Nanterre ;
– dire que la société Kyses n’a démontré aucune circonstance nécessitant de déroger au principe du contradictoire, et ne justifie d’aucun motif légitime au sens de l’article 145 du code de procédure civile ;
– dire qu’aucune action au fond n’a été initiée par la société Kyses à l’encontre de la société Data Links, dans le délai de 3 mois après réception du procès-verbal de l’huissier de justice imparti par l’ordonnance rendue le 11 février 2019 ;
en conséquence,
– ordonner la rétractation intégrale de l’ordonnance rendue le 11 février 2019, l’annulation des actes subséquents ainsi que des procès-verbaux dressés le 22 mars 2019, puis la restitution immédiate de l’intégralité des éléments appréhendés à leur destinataire à compter du prononcé de la décision à intervenir ;
– interdire à la société Kyses ainsi qu’à tout tiers de se prévaloir ou de faire mention des informations appréhendées lors de l’exécution de mesures d’instruction in futurum initialement autorisées par l’ordonnance rendue le 11 février 2019 ;
– condamner la société Kyses à leur verser la somme de 9 000 euros, soit 4 500 euros à chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société Kyses aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SCP Courtaigne Avocats, conformément aux articles 699 et suivants du code de procédure civile ;
– rappeler que l’exécution provisoire est de droit.
Dans ses dernières conclusions déposées le 23 novembre 2020 dans le dossier l’opposant aux sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé de ses prétentions et moyens, la société Kyses demande à la cour, au visa de l’article145 du code de procédure civile, de :
– juger qu’elle avait un intérêt légitime à engager une procédure devant le président du tribunal de commerce de Nanterre sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ;
par conséquent,
– confirmer l’ordonnance rendue le 27 novembre 2019 en ce qu’elle a confirmé l’ordonnance rendue le11 février 2019 en toutes ses dispositions ;
– débouter les sociétés Factoria, Pyctoria et Digital Access de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
à titre reconventionnel,
vu les articles 11 et suivants du code de procédure civile,
– infirmer l’ordonnance rendue le 27 novembre 2019 en ce qu’elle l’a déboutée de sa demande de condamnation des sociétés Factoria, Pyctoria et Digital Access à titre reconventionnel ;
– condamner les sociétés Factoria, Pyctoria et Digital Access à exécuter cette ordonnance et notamment à communiquer :
– l’ensemble des mails et échanges et notamment le premier échange, ainsi que sa date par lequel le groupe Factoria a manifesté son intérêt de racheter la société Digital Access à MM. [A] et [O] ou à leur conseil et l’ensemble des actes relatifs à la cession intervenue entre les sociétés Pyctoria et Digital Access ;
– le prix de cession des actions de la société Digital Access à la société Pyctoria ;
– ordonner cette condamnation sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision ;
– condamner in solidum les sociétés Factoria, Digital Access et Pyctoria à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Dans ses conclusions déposées le 6 avril 2020 dans le dossier l’opposant à M. [O] et la société Data Links, la société Kyses demande à la cour, au visa des articles 11 et suivants, 145 du code de procédure civile, à l’égard de M. [O], de :
– dire qu’elle avait un intérêt légitime à engager une procédure devant le président du tribunal de commerce de Nanterre sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ;
– et dire qu’aucune des mesures d’instruction entreprises n’a présenté un caractère disproportionné ou n’a occasionné un préjudice tel que la demande de rétractation de cette l’ordonnance du 11 février 2019 puisse être bien fondée,
par conséquent,
– confirmer l’Ordonnance rendue le 27 novembre 2019 en ce qu’elle a confirmé l’ordonnance
du 11 février 2019 en toutes ses dispositions ;
– débouter M. [O] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
à titre reconventionnel :
– infirmer l’ordonnance du 27 novembre 2019 en ce qu’elle a débouté la société KYSES de sa demande de condamnation de M. [O] à titre reconventionnel ;
– condamner M. [O] à exécuter cette ordonnance, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision et notamment à communiquer :
– l’ensemble des mails et échanges et notamment le premier message, ainsi que sa date par lequel le groupe Factoria a manifesté son intérêt de racheter la société Digital Access à MM. [A] et [O], ou à leur conseil et l’ensemble des actes relatifs à la cession intervenue entre Pyctoria et Digital Access ;
– le prix de cession des actions de Digital Access à la société Pyctoria ;-
– condamner M. [O] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.
Dans ses conclusions déposées le 6 avril 2020 dans le dossier l’opposant à M. [O] et la société Data Links, la société Kyses demande à la cour, au visa de l’article 145 du code de procédure civile, à l’égard de la société Data Links, de :
– dire qu’elle avait un intérêt légitime à engager une procédure devant le président du tribunal de commerce de Nanterre sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ;
– et qu’aucune des mesures d’instructions entreprises n’a présenté un caractère disproportionné ou n’a occasionné un préjudice tel que la demande de rétractation de cette l’ordonnance du 11 février 2019 puisse être bien fondée,
par conséquent,
– confirmer l’ordonnance rendue le 27 novembre 2019 en ce qu’elle a confirmé l’ordonnance
du 11 février 2019 en toutes ses dispositions ;
– débouter la société Data Links de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– condamner la société Data Links à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.
Dans ses dernières conclusions déposées le 21 octobre 2020 dans le dossier l’opposant à M. [O] et la société Data Links, la société Kyses demande à la cour, au visa de l’article 145 du code de procédure civile, de :
– dire que la société KYSES avait un intérêt légitime à engager une procédure devant le Président du Tribunal de commerce de Nanterre sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ;
– et qu’aucune des mesures d’instructions entreprises n’a présenté un caractère disproportionné ou n’a occasionné un préjudice tel que la demande de rétractation de cette l’ordonnance du 11 février 2019 puisse être bien fondée,
par conséquent,
– confirmer l’ordonnance rendue le 27 novembre 2019 en ce qu’elle a confirmé l’ordonnance du 11 février 2019 en toutes ses dispositions ;
– débouter la société Data Links de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– condamner la société Data Links à lui payer de la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 12 novembre 2020 dans le dossier RG n° 19/8589 et le 24 novembre 2020 dans le dossier RG n° 19/8548.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
A titre liminaire
La cour rappelle, à titre liminaire, qu’elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de ‘dire et juger’ qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques.
Par ailleurs, le 1er alinéa de l’article 367 du code de procédure civile dispose que le juge peut, à la demande des parties ou d’office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble.
En l’espèce, s’agissant d’appels formés à l’encontre d’une même ordonnance du juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre en date du 27 novembre 2019, il apparaît de l’intérêt d’une bonne justice de les juger ensemble, ce à quoi les parties ont acquiescé à l’audience de plaidoiries.
En conséquence les affaires RG 19/8589 et 19/8548 seront jointes sous l’unique numéro RG 19/8548.
Enfin, s’agissant de la demande de la société Kyses aux fins de voir dire que dans le dossier originellement 19/8589 elle renonce à ses conclusions déposées le 21 octobre 2020 au profit de ses conclusions déposées le 6 avril 2020, il doit être constaté que cette demande n’a fait l’objet d’aucune opposition à l’audience de plaidoiries et que par ailleurs, les appelants M. [O] et la société Data Links ayant en tout état de cause conclu pour la dernière fois postérieurement aux conclusions du 6 avril 2020, il convient d’y faire droit, le principe du contradictoire étant respecté.
Sur la demande de rétractation
Les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access (les sociétés appelantes) relatent que suite au jugement du 21 septembre 2017 ayant partiellement fait droit aux demandes indemnitaires de M. [Z] mais ayant rejeté toutes ses autres demandes, MM. [A] et [O] ont accepté de reprendre les discussions avec M. [Z] afin de mettre fin au litige les opposant et nuisant au bon fonctionnement de la société Digital Access, discussions ayant abouti à la formalisation d’un protocole transactionnel (dit le protocole de cession) aux termes duquel ils acceptaient de lui verser la somme de 645 000 euros décomposée comme suit :
– 465 000 euros au titre du rachat des parts de M. [Z] au sein de la société Digital Access,
– 180 000 euros au titre de l’indemnité transactionnelle,
le protocole prévoyant que la cession devrait intervenir au plus tard le 25 juillet 2018.
Elles indiquent que M. [Z] ayant tardé à constituer la société Kyses, qui n’a fait l’objet d’un dépôt légal que le 26 juillet 2018, l’exécution du protocole et la cession n’ont pu être réalisés que le 27 juillet suivant.
Elles relèvent que suite à l’intérêt manifesté par les dirigeants des sociétés Pyctoria et Factoria pour l’acquisition de 100 % du capital de la société Digital Access, le rapprochement a donné lieu à la signature le 13 septembre 2018 d’une lettre d’intention portant la cession de la totalité des actions, au vu d’une valorisation sur la base des comptes de l’exercice 2017, puis à la signature d’un acte de cession définitif le 30 novembre 2018.
Les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access sollicitent au vu de ce contexte la rétractation de l’ordonnance sur requête du 11 février 2019 aux motifs qu’elle ne satisfait pas à l’ensemble des conditions de l’article 145 du code de procédure civile dès lors que :
– elle ne fait mention d’aucune circonstance factuelle et concrète justifiant qu’il soit dérogé au principe du contradictoire,
– la société Kyses ne justifie pas de l’existence d’un motif légitime au soutien de sa demande de mesure d’instruction,
– les mesures ne sont pas légalement admissibles,
– les conditions d’octroi de la mesure n’ont pas été respectées.
Ainsi, les sociétés appelantes font tout d’abord valoir que la société Kyses n’a pas caractérisé dans sa requête les éléments concrets quant à un risque de dépérissement de la preuve justifiant qu’il soit dérogé au principe du contradictoire puisqu’elle s’est contentée d’affirmer que cette dérogation serait nécessaire car ‘les anciens associés de la société Kyses auraient tout intérêt à supprimer les quelconques échanges pouvant exister entre le groupe Digital Access et le groupe Factoria’, ce qui ne relève pas d’une démonstration in concreto, s’agissant d’impressions subjectives, et se révèle, au demeurant, erroné sur le plan technique en raison de l’impossibilité de modifier des documents informatiques ou des courriels, informations encodées dès la création du format.
Elles ajoutent que l’ordonnance du 11 février 2019 ne caractérise pas davantage la nécessité de déroger au principe du contradictoire, notamment en ce qu’elle se réfère à la prétendue concomitance entre l’accord intervenu entre les sociétés Digital Access et Factoria et la vente par M. [Z] de ses parts, concomitance inexistante au vu des dates de ces actes.
En réponse à l’argumentation adverse sur ce point, elles soulignent que la société Kyses n’avait pas dans sa requête mis en avant le fait qu’il s’agit de fichiers informatiques, fait au demeurant trop général.
Les sociétés appelantes font ensuite valoir que la société Kyses, qui procède par simples affirmations non étayées, n’a présenté aucun motif légitime justifiant l’octroi d’une mesure d’instruction in futurum.
Elles relèvent que la société Kyses s’est contentée de prétendre dans sa requête que le processus d’acquisition d’une société nécessiterait au minimum 6 mois de négociation entre la signature d’une lettre d’intention et la signature de l’acte de cession, ce qui est une affirmation artificielle au demeurant non vérifiée en l’espèce puisque ce délai a été de 2 mois.
S’agissant de la société Factoria, elles arguent de l’inutilité de la mesure à son égard dans la mesure où la requérante elle-même reconnaît qu’elle est étrangère à la cession intéressant la société Pyctoria.
Les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access concluent encore au caractère non légalement admissible des mesures d’instruction sollicitées en ce qu’elles portent atteinte au secret des affaires, faisant valoir que les mots clés retenus dans l’ordonnance du 11 février 2019 tels que ‘protocole de cession’, ‘date de cession’, ‘protocole d’accord ou SPA’, ‘lettre d’intention ou LOI’, ‘pourparlers’, ‘prix de cession’, ‘date de cession définitive’, ‘audit’, sont manifestement des termes génériques.
Elles ajoutent que la phrase de l’ordonnance ‘en rapport avec les faits litigieux’, mentionnée à deux reprises, revient à conférer à l’huissier de justice une mission d’analyse des documents saisis, strictement prohibée par les dispositions de l’article 249 du code de procédure civile.
Elles considèrent également que le rapport concurrentiel qui anime le groupe Factoria à la société DFM, employeur de M. [Z], additionné à l’absence de mesure de séquestre sont deux éléments de contexte qui rendent la mesure disproportionnée au regard du droit au respect du secret des affaires des sociétés du groupe Factoria la subissant.
Enfin, elles soulèvent le non-respect des conditions d’octroi des mesures d’instruction en ce que la société Factoria n’a pas fait l’objet d’une action au fond et en ce qu’il n’a été diligenté aucune mesure à l’encontre les sociétés Pyctoria et Digital Access dans les 30 jours impartis à compter de l’ordonnance.
Ainsi, elles font valoir que la copie de la requête et l’ordonnance a uniquement été signifiée à la société Factoria et non à la société Pyctoria et qu’aucune mesure n’a pu être diligentée à l’encontre de la société Digital Access, l’huissier de justice ne s’étant pas rendu à l’adresse de son siège social.
La société Data Links et M. [O] rejoignent essentiellement la position des sociétés appelantes et sollicitent également la rétractation de l’ordonnance sur requête du 11 février 2019.
Ils relatent que compte tenu de la mésentente entre les associés, le blocage de la situation avait rendu les participations des associés non liquides et invendables, ce pourquoi les trois associés ont, pour aboutir à la signature du protocole d’accord transactionnel du 25 avril 2018, déterminé d’un commun accord la valorisation des parts de M. [Z] en prenant comme base de calculs les comptes de l’exercice clos le 31 décembre 2016.
Ils expliquent encore que la société Digital Access avait fait l’objet de plusieurs tentatives de rapprochements de la part de concurrents ou partenaires, dans le contexte d’un marché de la bureautique et de l’infogérance relativement étroit au niveau de la région Ile-de-France.
Ainsi, ils font valoir que la société Pyctoria avait déjà approché la société Digital Access en 2015 et qu’au mois de septembre 2018, elle a renouvelé son intérêt, ce qui a donné lieu à la signature de la lettre d’intention du 13 septembre 2018.
Ils considèrent que M. [Z] cherche par tous les moyens possibles à obtenir des compensations financières complémentaires indues, en invoquant un dol imaginaire par refus opiniâtre d’assumer les effets de son propre comportement.
Sur les conditions du recours à l’article 145 du code de procédure civile, la société Data Links et M. [O] font valoir que la requête litigieuse ne caractérise pas le caractère urgent de la situation qui commanderait que les mesures ne soient pas prises contradictoirement et estiment que la requérante ne démontre pas un début de soupçon qui laisserait penser que les défendeurs détruiraient des preuves ou auraient opposé un refus de communiquer, alors que la cession a fait l’objet d’un communiqué officiel le 5 décembre 2018 sur le site internet du groupe Factoria.
Ils avancent qu’en abordant déjà le fond du litige, M. [Z] se borne à indiquer que ses coassociés cherchaient depuis 4 ans à céder tout ou partie du groupe et à faire valoir qu’il aurait fait une mauvaise affaire, ce qui est sans lien avec l’urgence requise.
S’agissant du cas particulier de la société Data Links, ils soutiennent que la requérante n’a pas respecté les termes de l’ordonnance du 11 février 2019, disposant qu’elle pouvait pratiquer une mesure d’instruction in futurum uniquement si elle assignait ses adversaires ‘au fond devant le tribunal compétent, dans un délai de 3 (trois) mois après réception du procès-verbal d’huissier’, puisqu’elle n’a pas assigné au fond la société Data Links avant le 5 juillet 2019, de sorte que l’autorisation d’exécuter les mesures d’instruction in futurum à son encontre est caduque.
Ils invoquent ensuite l’absence de motif légitime exigé par l’article 145 du code de procédure civile, et ce alors que l’article 146 du même code énonce qu’en aucun cas une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve.
Ils font également valoir que l’intimée est mal fondée à invoquer un dol alors que ce vice du consentement doit être caractérisé lors de la formation du contrat, lequel date du 25 avril 2018, tandis que le ‘silence’ reproché à la société Digital Access aurait eu lieu après cette date.
Ils ajoutent que dans son assignation au fond du 1er juillet 2019, l’intimée explique que MM. [A] et [O] souhaitaient céder leurs titres depuis 2014, ce qui rend impossible un dol dans une situation où trois associés travaillant ensemble depuis 2006 évoquent la possibilité de céder leurs titres depuis 2014, et alors que le rachat des titres par ces deux associés était la seule solution pour rendre la société Digital Access de nouveau attractive et sa gouvernance saine.
La société Kyses, aux termes de ses trois jeux de conclusions à l’encontre d’une part des sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access, d’autre part de M. [O] ainsi qu’à l’encontre de la société Data Links relate que le 13 mai 2015, MM. [A] et [O] ont décidé de la révocation abusive des fonctions de gérant de M. [Z] dans des circonstances pour lesquelles ils ont été condamnés judiciairement et même accepté, suite à cette décision, dans le cadre d’un accord transactionnel signé le 27 juillet 2018, de verser à M. [Z] un montant de 180 000 euros à titre de dommages et intérêts, ce qui démontre qu’ils se sont liés au mois de mai 2015 contre M. [Z].
Elle indique que MM. [A] et [O] ont ensuite proposé à M. [Z] de racheter sa participation au sein des sociétés du groupe Digital à vil prix, en ayant préalablement veillé à le révoquer et à le déterminer à accepter la cession puisqu’il s’est retrouvé dans une situation financière délicate.
Elle considère que le 27 juillet 2018, M. [Z] a cédé au travers de sa société Kyses les actions du groupe Digital Access pour un montant de 465 000 euros, ce qui correspond à une valorisation de la société à un montant de 1 395 000 euros, ceci alors que selon une jurisprudence constante, si MM. [A] et [O] avaient débuté à cette date des négociations avec une société tierce, en vue d’envisager la cession de leurs actions à un montant largement supérieur au prix de cession consenti à la société Kyses, ils auraient dû informer celle-ci de l’existence de ces négociations en cours au titre de l’obligation de loyauté des dirigeants à l’égard de leurs actionnaires.
Elle souligne qu’elle a découvert en septembre 2018 qu’une cession de la société Digital Access avec un concurrent avait été négociée par MM. [A] et [O], lesquels faisaient savoir à qui voulait l’entendre qu’ils avaient vendu leurs participations à un prix plus que satisfaisant.
Elle fait valoir que ce type d’acquisition d’envergure ne se négocie pas en un ou deux mois et que la société Pyctoria et le groupe Factoria ont nécessairement débuté leurs négociations avec MM. [A] et [O] bien avant le mois de novembre 2018, alors que depuis la révocation de ses fonctions de gérant, ils avaient toujours laissé croire à M. [Z] qu’ils ne souhaitaient pas céder leurs participations à un tiers.
Elle ajoute que si elle avait connu l’intention réelle de ses associés, les négociations ne seraient pas intervenues de la même manière et qu’il est évident que MM. [A] et [O] n’ont pas conclu de bonne foi le rachat des titres à la société Kyses, eu égard au rapprochement qui était d’ores et déjà en cours avec le groupe Factoria.
Elle souligne que d’ailleurs, le groupe Factoria qui prétend dans ses conclusions qu’une lettre d’intention aurait été signée le 13 septembre 2018, ne communique pour autant pas cette pièce.
Ainsi, elle soutient que la requête visait à obtenir des pièces et informations qui démontreraient que MM. [A] et [O] étaient au mois de juillet 2018 au moins, déjà en cours de négociation avec le groupe Factoria, pour la cession de leurs propres participations, à un prix bien plus élevé et qu’ils savaient dès lors qu’ils faisaient racheter le 27 juillet 2018 les actions de la société Kyses à un prix bien inférieur à celui qui était susceptible de leur être proposé par le groupe Factoria.
Sur les circonstances justifiant la dérogation au principe du contradictoire, elle avance avoir parfaitement caractérisé dans sa requête le risque de dépérissement de la preuve, notamment en visant des données informatiques, numériques ou électroniques s’agissant des messages ou mails échangés afin de déterminer si à la date du 27 juillet 2018, MM. [A] et [O] avaient déjà été en contact avec le groupe Factoria.
Elle soutient que ces éléments peuvent être détruits ou altérés à tout moment et qu’en évoquant ‘les échanges pouvant exister entre le groupe Digital Access et le groupe Factoria’ dans sa requête, elle a nécessairement fait référence aux données informatiques, numériques ou électroniques, d’autant qu’il pouvait au demeurant également s’agir de documents papiers.
Elle allègue que la requête a pris soin de rappeler les manoeuvres de dissimulations précédemment subies de la part de MM. [A] et [O], à savoir avoir fait signer à M. [Z] des procès-verbaux d’assemblée ne correspondant pas aux résolutions mises aux votes ou encore l’avoir révoqué pour des motifs fallacieux et inexistants, attitude permettant de caractériser le risque de disparition des preuves.
En outre, elle fait valoir qu’il résulte de la lecture du procès-verbal de Maître Lodieu du 22 mars 2019 lors de son intervention au sein de la société Data Links, qui celui-ci a constaté que dès le départ M. [O] a cherché à dissimuler la vérité.
Elle indique que l’huissier, contrairement aux déclarations de M. [O] lui ayant mentionné avoir contacté le groupe Factoria ‘fin septembre, début octobre’, a découvert différentes versions de la lettre d’intention dont une datée du 29 août 2018.
Elle souligne à cet égard que M. [O] prétend dans ses écritures qu’elle aurait pu obtenir les informations visées de manière contradictoire, alors que ces informations ne lui ont toujours pas été fournies à ce jour.
En réponse à l’argumentation adverse, elle prétend que selon la Cour de cassation, il n’est nullement besoin de justifier d’une urgence pour obtenir une ordonnance sur requête.
S’agissant de la prétendue absence de qualité à défendre soulevée par la société Data Links, elle répond que la Cour de cassation n’exige pas que la personne qui supporte la mesure d’instruction soit le défendeur potentiel au futur procès et que le fait qu’aucune manoeuvre dolosive ne lui soit opposée est sans incidence sur le bien-fondé de la demande d’instruction.
Sur la légitimité de la mesure, la société Kyses répond aux sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access qu’elles ne produisent aucune preuve permettant de contredire le caractère concomitant qu’elle invoque entre l’accord intervenu entre la société Digital Access et Factoria et la vente par M. [Z] de ses parts, en soulignant qu’elles s’abstiennent de communiquer la date du début des négociations.
Elle rétorque également que ce qui l’intéresse n’est pas tant la date de la signature de la lettre d’intention, mais surtout celle du début des négociations entre les parties et souligne que le délai de 6 mois qu’elle visait dans sa requête était relatif au délai ayant couru entre la date du début des négociations et celle de la cession finale.
Sur le fait que la société Factoria serait étrangère à la cession, elle répond qu’elle n’a jamais fait une telle allégation, que la société Digital Access a été rachetée par le groupe Factoria qui n’est donc pas étranger à la cession et que si tel était le cas, cela n’empêche pas l’exercice d’une mesure d’instruction à l’égard d’un tiers au fond du litige en germe.
L’intimée répond ensuite à la société Data Links et M. [O] qu’il n’est pas démontré en quoi le fait de négocier de longue date les conditions d’une cession de titres empêcherait les cessionnaires d’adopter au jour de la cession une attitude déloyale à l’égard du cédant des actions et qu’en tout état de cause, il s’agit d’arguments qui relèvent de l’appréciation du juge du fond.
Concernant le secret des affaires, la société Kyses rappelle qu’il ne constitue pas en soi un obstacle à l’application de l’article 145 du code de procédure civile et fait valoir que l’ordonnance du 11 février 2019 est parfaitement circonscrite en ce qu’elle ne concerne que les éléments susceptibles de démontrer la date du début des négociations entre MM. [A] et [O] et le groupe Factoria et le prix de cession négocié entre eux, à l’exclusion de tout fichier client, produit ou informations concurrentielles.
Elle conteste être une société concurrente dans la mesure où elle détient 100 % des parts de la société Rygal, laquelle exploite un restaurant et précise que le fait que M. [Z] soit le beau-frère d’une société concurrente n’est pas pertinent.
Sur l’absence de séquestre, la société Kyses souligne que l’huissier l’a proposé mais que les sociétés appelantes l’ont refusé.
Sur les conditions d’octroi des mesures, elle rétorque qu’elle n’avait pas à assigner au fond la société Factoria puisqu’il peut être ordonné à des tiers de produire tout document qu’ils détiennent pour établir la preuve de certains faits dont pourrait dépendre le litige.
S’agissant de la société Digital Access, elle fait valoir que l’huissier a bien accompli sa mission dans le délai de 30 jours de l’ordonnance et que le fait que la société ait transféré son siège social est sans incidence, d’autant que l’huissier s’est bien rendu à l’adresse figurant dans l’ordonnance.
Sur ce,
Selon l’article 145 du code de procédure civile, ‘s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées, à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé’.
Le juge, saisi d’une demande de rétractation d’une ordonnance sur requête ayant ordonné une mesure sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile et tenu d’apprécier au jour où il statue les mérites de la requête, doit s’assurer de l’existence d’un motif légitime, au jour du dépôt de la requête initiale et à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui, à ordonner la mesure probatoire et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement.
Sur la mesure d’instruction exercée à l’encontre de la société Data Links
Il découle des articles 493 et suivants du code de procédure civile relatifs aux ordonnances sur requête que celle-ci concerne la personne qui support l’exécution de la mesure, qu’elle soit ou non défendeur au procès potentiel.
Ainsi, dès lors qu’il est établi dans la requête que la société Data Links est issue de la scission de d’une société partie du groupe Digital Access et qu’elle a été créée par M. [O] à la suite de la cession litigieuse à la société Pyctoria, elle pouvait être considérée comme devant supporter la mesure, sans que toutefois, ayant été créée postérieurement aux faits litigieux, la requérante éprouve la nécessité d’engager l’instance au fond contre elle.
D’ailleurs, dans le dispositif de l’ordonnance sur requête du 11 février 2019 le président du tribunal de commerce de Nanterre a dit ‘que la requérante devra assigner au fond devant le tribunal compétent, dans un délai de 3 (trois) mois après réception du procès-verbal d’huissier’ sans imposer que soient précisément assignées les personnes visées par la requête.
Au demeurant, une telle critique relève des modalités d’exécution de la requête qu’il n’appartient pas à la cour, statuant en appel du juge de la rétractation, d’apprécier.
Le moyen de ce chef sera écarté.
Sur le grief tiré de l’absence de caractérisation de l’urgence
Il est constant que l’urgence n’est pas une condition requise pour que soient ordonnées sur requête des mesures d’instruction sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile de sorte que le moyen tiré de ce chef par la société Data Links et M. [O] sera rejeté.
Sur le grief tiré de l’absence de justification de la nécessité de déroger au principe du contradictoire
Selon l’article 493 du code de procédure civile, l’ordonnance sur requête est une décision rendue non contradictoirement dans les cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.
Les mesures d’instruction prévues à l’article 145 du code de procédure civile ne peuvent être ordonnées sur requête que lorsque les circonstances exigent qu’elles ne soient pas prises contradictoirement.
Le juge saisi d’une demande de rétractation statue sur les mérites de la requête en se prononçant, au besoin d’office, sur la motivation de la requête ou de l’ordonnance justifiant qu’il soit dérogé au principe de la contradiction, motivation qui doit s’opérer in concreto et ne peut pas consister en une formule de style.
Il sera tout d’abord relevé que les résultats de l’exécution des mesures ordonnées ne peuvent être pris en considération pour apprécier la régularité de leur autorisation, laquelle doit être appréciée au moment de son prononcé, de sorte que les arguments de l’intimée quant au déroulement de la mesure d’instruction et notamment au comportement de M. [O] relatés par l’huissier de justice ne seront pas retenus.
La requête litigieuse, après avoir rapporté les faits reprochés par la société Kyses pour avoir été en substance abusée par MM. [A] et [O] qui ne l’auraient pas informée des négociations portant sur la cession de la totalité des parts de la société Digital Access à un tiers, concomitantes à la formalisation de sa propre cession de parts dans cette société, indique :
‘Il est essentiel de souligner que les documents tels que lettres d’intention, protocole de cession ne font l’objet d’aucune publicité auprès de tiers ni d’obligation d’enregistrement.
Seuls les aces de cessions intervenus au mois de novembre 2018 ont date certaine car ils font l’objet d’un enregistrement.
En outre, il est certain que si la société Kyses devait solliciter de manière contradictoire la communication des éléments et échanges antérieurs à cette cession entre les dirigeants de la société Digital Access (ses anciens associés) et ceux du groupe Factoria, elle n’aura jamais la certitude que la date mentionnée à cette documentation était bien la date réelle à laquelle cette documentation a été envisagée entre les parties.
En effet, il est évident que dans le cadre d’une procédure au fond, les dirigeants de la société Digital Access auront tout intérêt à prétendre que leurs négociations avec le groupe Factoria n’auraient démarré qu’après l’été 2018 et que curieusement, ils auraient réussi à accomplir et négocier l’ensemble des diligences généralement accomplies en minimum six mois en un temps record de trois mois !
Ainsi, en l’espèce, les anciens associés de la société Kyses ont tout intérêt à supprimer les quelconques échanges pouvant exister entre le groupe Digital Access et le groupe Factoria, échanges permettant de prouver les pourparlers qui étaient en cours au moment de la vente de participations dont la société Kyses était propriétaire et par conséquent, la mauvaise foi et la réticence dolosive dont le requérant souhaite par la suite se prévaloir’.
Ce faisant, la requête expose les faits d’obstruction dont elle suppose avoir été victime, dans un contexte de conflit entre anciens associés, la laissant craindre que ces dissimulations perdurent, ainsi qu’un risque de disparition ou de travestissement de documents susceptibles de constituer des preuves encouru dans un contexte invoqué de déloyauté.
L’ordonnance rendue le 11 février 2019 vise cette requête, ce qui vaut adoption de ces motifs.
Au surplus, elle relève elle aussi les griefs dénoncés reposant sur le fait que le consentement de M. [Z] a été vicié lors du protocole transactionnel du 25 avril 2018, MM. [A] et [O] ne lui ayant pas fait part de l’éventualité du rapprochement du groupe Digital Access et du groupe Factoria pour considérer, au vu de ces éléments que :
– il existe un risque de déperdition des preuves en cas de débats contradictoire,
– l’absence d’effet de surprise rendrait la mesure inefficace,
– cette ‘crainte de disparition des preuves est d’autant plus justifiée qu’il ressort des pièces jointes au dossier qu’un accord est intervenu entre la société Digital Access et Factoria immédiatement après la vente par Monsieur [L] [Z] de ses parts de Digital Access et que celui-ci n’a pas été informé des pourparlers en cours’.
Ainsi, l’ordonnance souligne que le grief même élevé par la requérante, constitué par un défaut d’information, voire une dissimulation, engendre un risque de déperdition des preuves en cas de débat contradictoire préalable.
Il découle de ce qui précède qu’est établie dans tant dans la requête que dans l’ordonnance du 11 février 2019 l’existence de circonstances susceptibles de justifier qu’il soit dérogé au principe de la contradiction.
A cet égard, il importe peu que le risque de déperdition des preuves compte tenu de la nature volatile des documents informatiques et numériques ne soit que sous-entendu, les éléments ci-dessus énoncés suffisant à caractériser la démonstration in concreto de la nécessité de la mesure non contradictoire.
Sur l’existence d’un motif légitime
Il est constant que l’auteur de la demande à une mesure d’instruction in futurum à l’origine non contradictoire n’a pas à rapporter la preuve, ni même un commencement de preuve, du grief invoqué, mais qu’il doit toutefois démontrer l’existence d’éléments précis constituants des indices de violation possible d’une règle de droit permettant d’établir la vraisemblance des faits dont la preuve pourrait s’avérer nécessaire dans le cadre d’un éventuel procès au fond.
Par ailleurs, les dispositions de l’article 146 du code de procédure civile relatives aux mesures d’instruction ordonnées au cours d’un procès ne s’appliquent pas lorsque le juge est saisi d’une demande fondée sur l’article 145.
En l’espèce, la requérante allègue à l’encontre de MM. [A] et [O] tant un manquement à leur obligation de loyauté en leur qualité d’associés de la société Digital Access à l’égard de son actionnaire que le dol en résultant.
Contrairement à ce que prétendent les appelants, la lettre d’intention qu’ils reconnaissent comme datant du 13 septembre 2018 concernant la cession de la société Digital Access à la société Pyctoria a été signée dans un temps très proche tant de la signature de l’acte définitif de cession par la société Kyses de ses actions le 27 juillet 2018, que celui du protocole préalable en date du 25 avril 2018.
Ainsi ce seul élément, dans un contexte où aucune information n’a été fournie à la société Kyses sur le rapprochement entre la société Digital Access et le groupe Factoria, constitue un indice suffisant de la potentialité de l’existence des griefs allégués, justifiant la légitimité de la mesure d’instruction in futurum ordonnée, étant relevé que la requérante recherche en particulier la date du début des négociations critiquées et qu’il ne peut être à ce stade, exclu que des négociations étaient effectivement en cours au 25 avril 2018 ou à tout le moins, au 27 juillet 2018.
Par ailleurs, s’agissant d’un groupe de sociétés dans lequel la holding Pyctoria détient à 85,1 % le groupe Factoria constitué de 14 sociétés, et désormais également 100 % de la société Digital Access, l’utilité de la mesure à l’encontre de la société Factoria apparaît suffisante.
Le moyen des appelantes à ce titre sera écarté.
Sur la légitimité des mesures
Au sens de l’article 145, les mesures légalement admissibles sont celles prévues par les articles 232 à 284-1 du code de procédure civile et elles ne doivent pas porter une atteinte disproportionnée aux intérêts légitimes du défendeur.
Le secret des affaires, de même que le secret des correspondances et le respect de la vie privée, ne constitue pas en eux-mêmes un obstacle à l’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile dès lors que les mesures ordonnées procèdent d’un motif légitime et sont nécessaires à la protection des droits de la partie qui les a sollicitées.
Enfin, le juge de la rétractation peut modifier la mission en la complétant ou l’amendant afin qu’elle soit limitée dans son étendue et dans le temps, conformément à l’article 149 du code de procédure civile.
En l’espèce, les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access critiquent l’ordonnance comportant les termes ‘protocole de cession’, ‘date de cession’, ‘protocole d’accord ou SPA’, ‘lettre d’intention ou LOI’, ‘pourparlers’, ‘prix de cession’, ‘date de cession définitive’ et ‘audit’ selon elles trop génériques.
Toutefois, l’ordonnance dispose, après avoir autorisé l’huissier à rechercher ‘tous les fichiers, dossiers, documents, correspondances intervenus entre janvier 2018 et décembre 2018 situés dans [les locaux des sociétés appelantes], ses établissements ou annexes, en rapport avec les faits litigieux et notamment tout document relatif aux échanges qui sont intervenus entre la société Digital Access et/ou ses associés, MM. [A] et [O], avec les sociétés Pyctoria et/ou Factoria et/ou leurs dirigeants dont Monsieur [V] [E] et Monsieur [W] [S] (…)’, que les échanges de mails ou extractions de documents devront comporter les mots clés relatifs au lexique habituellement utilisé en matière de processus d’acquisition de titres d’une société.
Cette précision relative aux mots clés est ainsi énoncée afin de circonscrire le champ de la mission, lequel est précisément délimité aux actes dénoncés par la requérante. Il est par ailleurs encadré dans le temps.
Ainsi, il résulte de ces constatations que la liste de mots clés ne peut être considérée comme générique dans la mesure où elle a au contraire vocation à venir restreindre le champ des investigations autorisées.
En tout état de cause, les appelants ne fournissent aucun élément justificatif démontrant le risque allégué d’atteinte disproportionnée au secret des affaires à travers les mots clés déterminés.
Quant à l’allégation d’une atteinte au secret des affaires au regard du rapport concurrentiel qui oppose le groupe Factoria à la société DFM, employeur de M. [Z], elle est inopérante dans la mesure où seule la société Kyses est requérante.
S’agissant de l’expression utilisée dans l’ordonnance ‘en rapport avec les faits litigieux’, il ne s’agit que d’une précision faisant référence au contexte, sans qu’il puisse en être déduit qu’il est demandé à l’huissier de justice d’identifier lui-même les faits litigieux de sorte qu’aucune infraction aux dispositions de l’article 249 du code de procédure civile ne peut être constatée.
Ainsi, il doit être constaté qu’aucune atteinte disproportionnée au secret des affaires n’apparaît caractérisée.
En revanche, le juge des requêtes n’a pas ordonné la séquestration des éléments saisis.
L’article R. 153-1, alinéa 1, du code de commerce dispose que :
‘ Lorsqu’il est saisi sur requête sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ou au cours d’une mesure d’instruction ordonnée sur ce fondement, le juge peut ordonner d’office le placement sous séquestre provisoire des pièces demandées afin d’assurer la protection du secret des affaires ‘.
Il entre dans les pouvoirs du juge de la rétractation de compléter éventuellement la mission ordonnée en constituant l’huissier de justice désigné comme séquestre des éléments recueillis.
Il convient ainsi de constituer ici l’huissier comme séquestre dans les termes indiqués au dispositif du présent arrêt afin d’assurer le cas échéant une totale protection du secret des affaires.
Sur l’exécution des mesures
Comme il a été ci-dessus jugé à propos de la société Data Links, la société Factoria pouvait de la même manière être considérée comme devant supporter la mesure, sans que toutefois la requérante soit dans l’obligation d’engager l’instance au fond contre elle.
Par ailleurs, aux termes du dispositif de l’ordonnance sur requête litigieuse du 11 février 2019, il est dit qu’à défaut de saisine des huissiers commis au plus tard dans le délai d’un mois suivant l’ordonnance, la désignation de cet officier ministériel sera caduque et privée de tout effet.
Or s’agissant de la société Pyctoria, il ressort du procès-verbal dressé le 22 mars 2019 par Maître [P] [T], huissier de justice, qu’elle s’est rendue à [Localité 6], au [Adresse 3], adresse correspondant au siège de la société Pyctoria tel que cela ressort de l’extrait K-bis la concernant, où, après avoir signifié l’ordonnance à M. [S], directeur général du groupe Factoria, elle a signifié l’ordonnance à M. [E], gérant de la société Pyctoria.
Ainsi, il découle des mentions de ce procès-verbal que contrairement à ce qu’indiquent les sociétés appelantes, l’huissier de justice a bien effectué les diligences conformément à la mission qui lui était confiée à l’égard de la société Pyctoria.
S’agissant de la société Digital Access, de la même manière, il ressort du procès-verbal dressé le même jour par Maître [Y] [K], huissier de justice, qu’elle s’est rendue à [Localité 5], au [Adresse 7], adresse mentionnée dans l’ordonnance du 11 février 2019 comme étant celle des sociétés Digital Access et Data Links, où, après avoir constaté que le nom des deux sociétés figurait sur la porte, elle a signifié l’ordonnance à M. [O], s’étant déclaré dirigeant des deux sociétés, en sa qualité donc de représentant déclaré de la société Digital Access.
Il découle ainsi également des mentions de ce procès-verbal que contrairement à ce qu’indiquent les sociétés appelantes, l’huissier de justice a bien effectué les diligences conformément à la mission qui lui était confiée à l’égard de la société Digital Access.
Dès lors et au vu de tout ce qui précède, il n’y a pas lieu de rétracter l’ordonnance du 11 février 2019. L’ordonnance dont appel sera donc confirmée en ce qu’elle a confirmé l’ordonnance du 11 février 2019 en toutes ses dispositions, sous réserve de l’ajout concernant la séquestration des éléments saisis.
Sur la demande reconventionnelle de la société Kyses
La société Kyses sollicite l’infirmation de l’ordonnance querellée en ce qu’elle l’a déboutée de ses demandes reconventionnelles.
Elle sollicite ainsi la condamnation des appelantes à communiquer, sous astreinte de 100 euros par jour de retard :
– l’ensemble des mails et échanges et notamment le premier message ainsi que la date par lequel le groupe Factoria a manifesté son intérêt de racheter la société Digital Access à MM. [A] et [O] et les actes relatifs à la cession intervenue entre les sociétés Pyctoria et Digital Access,
– le prix de cession,
soutenant que les appelantes n’ont aucune raison valable de s’opposer à ce que soient communiquées les pièces demandées.
Les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access rétorquent qu’une telle demande est irrecevable devant le juge de la rétractation.
Sur ce,
Comme l’a retenu a juste titre le premier juge de la rétractation, l’instance en rétractation ayant pour seul objet de soumettre à un débat contradictoire les mesures initialement ordonnées à l’initiative d’une partie en l’absence de son adversaire, la saisine du juge de la rétractation se trouve limitée à ce seul objet, de sorte que les demandes reconventionnelles de la société Kyses sont irrecevables.
L’ordonnance critiquée sera partant confirmée en ce qu’elle a ainsi jugé.
Sur les demandes accessoires
L’ordonnance sera confirmée en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et dépens de première instance.
Parties perdantes, les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access, Data Links et M. [O] ne sauraient prétendre à l’allocation de frais irrépétibles. Elles devront en outre supporter les dépens d’appel avec distraction au bénéfice des avocats qui en ont fait la demande.
Il est en outre inéquitable de laisser à la société Kyses la charge des frais irrépétibles exposés en cause d’appel. Les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access, Data Links et M. [O] seront en conséquence condamnés, ensemble, à lui verser une somme globale de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour statuant par arrêt contradictoire,
Prononce la jonction des affaires n° RG 19/8589 et 19/8548 sous l’unique numéro RG 19/8548,
Constate que la société Kyses renonce à ses conclusions déposées le 21 octobre 2020 au profit de celles déposées le 6 avril 2020,
Confirme l’ordonnance du 27 novembre 2019 en toutes ses dispositions critiquées,
Y ajoutant,
Ordonne que les documents et fichiers appréhendés lors des opérations de constat réalisés le 22 mars 2019 soient séquestrés en l’étude des huissiers de justice instrumentaires, la SCP Venezia & Associés, jusqu’à ce que le juge éventuellement saisi autorise la communication desdits documents ou que les parties en soient d’accord,
Dit que les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access, Data Links et M. [G] [O] supporteront ensemble les dépens d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
Condamne les sociétés Pyctoria, Factoria et Digital Access, Data Links et M. [G] [O] ensemble à payer à la société Kyses la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Arrêt prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame Nicolette GUILLAUME, Président et par Madame CHERCHEVE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,